Corpus Essonnien

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Le moulin à vent de Saint Clerc (1545-1666)

Ce moulin se situe à la droite du carrefour où aboutit le tunnel évitant Gometz-la-Ville (côté Paris). Le but est de reconstituer l'histoire de ce moulin, en apportant les notes trouvées lors du dépouillement du minutier de Limours.

JP Dagnot . ajout septembre 2015 Août 2007.

L'absence de moulin

La succession de Jeanne de Graville, Dame de Marcoussis, est laborieuse, on aboutit au partage de 1545. Thomas de Balsac, l'un des deux héritiers, reçoit les seigneuries de la Roue et de Saint Clerc et Gometz. Pour celle de la Roue les biens figurent, quant aux terres seigneuries et châtellenie de Saint clair, la description détaillée ne comprend que des droits et pas de moulin.

Le moulin en censive des seigneurs de Gometz

Quinze ans après, devant le prévôt et tabellion au baillage de saint Clerc, Thomas de Balsac, seigneur de Gometz le Châtel rend aveu de sa baronnie. Parmi les biens relevons “ung moulin a vant que tient de présent à ferme, Jehan Suzanne, à deux muyds de bled mousture, mesure de Gommetz le Chastel”.

Deux plus tard, haut et puissant seigneur, Messire Thomas de Balsac, seigneur baron, chatelain de Gometz le Chastel et de la Roue, lequel de son bon gré baille et délaisse à titre de ferme et pension de grain jusqu'à deux ans à Jehan Norril, meunier demeurant à Bazoches sous Monfort, “le moullin a vant de sainct clerc situé et assis en la terre et seigneurie dudit Saint Clerc et la Brosse prez Gometz la ville”, et une maison couverte de chaulme, appartenances et dépendances, le preneur disant bien savoir connaître pour en jouir. Le présent bail est fait moyennant deux muids de bled mousture, mesure de St Clerc, rendu en l'hôtel de la Roue (Linas). Le preneur sera tenu de garder le moulin bien moulant tournant et travaillant, de bled faisant farine; il devra servir les sujets dudit seigneur bailleur qui y iront moudre audit moulin tant ceux de St Clerc que de Gometz la ville. L'acte est clair le propriétaire est le seigneur de Gometz et la banalité du moulin mentionne ses sujets.

Sans autre information, nous arrivons à la fameuse période agitée des guerres de religion de la fin du XVIe siècle. Le receveur de la seigneurie de la Roue, Pierre Lefèvre qui assistait au bail ci-dessus, est toujours présent, son maître n'est plus, et il se porte fort pour la dame de Montagu et de la Roue. Il baille à titre de loyer jusqu'à trois ans à Nicolas Hanyard (meunier également du moulin de Marcoussis), “le moullin a vant de Gommetz le Chastel, garny de moullans tornans et travaillans, avec la maison de deux espasses couverte de chaume, et les terres d'allentour contenant un arpent. Le preneur disant bien connaître les biens, que depuis longtemps il tient icelluy moulin et qu'il en a joui. Le bail est fait moyennant six septiers de bled mestail, sans avoyne ni vesse, et un minot de bled froment, à livrer en l'hôtel seigneurial de la Roue. Le bailleur s'engage à tenir les moulin et logis clos et couverts (ajouté en marge: le locataire non responsable des troubles extérieurs).

Deux après, le receveur de la baronnie de Gometz déclare forfait, il ne peut tenir ses engagements du bail de la seigneurie et transige avec la dame de la Roue. Il est fait mention de quelques deniers qu'aurait payé notre meunier Nicolas Hanyard pendant “les troubles et guerres civiles advenues”.

À la fin du XVIe siècle, ladite dame déjà en difficulté depuis quelques années (voir la chronique à venir sur la Roue) se verra obligée de mandater en blanc un procureur pour vendre la baronnie de Gometz.

Effectivement, l'année 1599 voit la saisie de la baronnie et châtellenie de Gometz-le-Châtel devenir effective, par le transport d'un sergent devant le manoir (sic) et lieu seigneurial, ainsi que le rappel de la consistance des biens. Dans cette chronique nous noterons uniquement: - “y est dedans un moulin à vent à faire de bled farine, que tient lors Pierre Crestien avec la maison et le porpris, tenant au chemin qui tend de Gometz le chastel à Briis, d'autre aux héritiers de Valery”.

L'histoire de la seigneurie fera l'objet d'un récit spécifique. La saisie se traduit par la mise d'affiches dont une “contre la porte du moullin a vent”. Quelques mois après, le procès continue, pour simplifier la procédure dans l'expression moulin bannal, ce terme bannal sera osté. Malgré une première série d'affiches les enchérisseurs ne se présentent pas. Les plaignants se multiplient. Une seconde série d'affiches sera placée à trois endroits: - la porte de l'église, - la porte du moulin, - contre un arbre poirier estant sur la butte ou soulloit avoir antiennement ung vieil chasteau, à présent ou l'on faict le foy et homage. L'adjudication est faite à Madame de Sourdis moyennant 12.000 escus.

Début XVIIe, Marie Grassian veuve Vincent Lagon demeure au moulin à vent de Gometz. Il s'agit d'un acte n'ayant rien à voir avec le moulin.

En 1612, la baronnie de Saint Clair est passée des Sourdis aux Hurault. C'est ainsi que Loys Hurault, chevalier, comte de Limours, de présent en son château audit Limours, lequel de sa bonne volonté confesse avoir baillé à tiltre de loyer et moison de grain, pour quatre ans, à François Hanias, musnier demeurant à Bures, c'est assavoir le moulin à vent de Gometz le Châtel, dit Saint Clair, appartenant audit seigneur, appartenances et deppendances diceluy moulin ,avec les “droits de ce moulin audit Saint Clair, Gometz la ville, et hameaux estant en la baronnie”. Ce bail fait à la charge de faire tourner et travailler ledit moullin, moyennant la quantité de vingt setiers de blé métail, mesure de Gometz puis à celle de Limours, un gâteau, une douzaine de chappons et deux pourceaux.

En 1623, Jehan David musnier du moullin de l'abbaye de Gif, lequel de son bon gré confesse avoir baillé par ces présentesle moullin à vant de Gometz le Chastel à Lucas Guiard, meunier demeurant en la paroisse de Gometz, pour le reste du temps qui rest à expirer moyennant la quantité de six septiers de bled mestail mouture mesure de Gometz payable par trimestre. Il est encore question des chappons.

Deux mois après, Lucas Guiard trouve “un pigeon” pour le remplacer: Lucas Guiard, meunier du moulin à vent de Gometz le Châtel, cède et délaisse à Bonaventure Lambert le droit de bail que ledit Guiard avoit de Jean David, meunier du moulin de l'abbaye de Gif, du moulin à vent de Gometz, pour en jouir.. passé à Gometz.

Le jeu de chaises musicales s'accélère, quatre jours après, Bonadventure Lambert marchand demeurant en la paroisse de Gometz le Chastel, confesse avoir cédé à Guy de la Vigne, meunier de la paroisse de Rambouillet, le droit de transport qui a été fait par Lucas Guiard, ci devant meunier au moullin avant de Gometz et des dépendances, pendant le temps qui reste à expirer…

N'oublions pas que le propriétaire des biens trois mois plus tard n'est autre que le cardinal de Richelieu. Nous arrivons sept mois après avec un nouveau meunier: Robert Picot meunier demeurant au moulin à vent de Gometz, lequel baille à faire jouir du bail fait par le cardinal de Richelieu à Jehan David meunier au moulin de Gif, avec la chasse du moulin a vent de Gometz qui est sur la paroisse de Gometz et des paroisses qui dépendent dudit moulin à vent banal dudit Gometz, à charge d'aller quérir les bled des sujets dudit Gometz, moyennant neuf setiers de bled, paiement troys mois par troys mois, au logis dudit Picot au moulin de Jaumeron paroisse de Gif, passé devant Toussaint de la Croix meunier au moulin à vent de Limours. Le tour est fait le bail revient de nouveau à Jehan David!

Fin 1626, le cardinal de Richelieu est obligé de céder son comté de Limours au roi, qui le donnera à Gaston d'Orléans son frère en avril 1627.

Comme la plupart des moulins à vent les meuniers ne restent pas longtemps comme le montre l'acte qui suit datant de 1628: Gilles Georgin, meunier demeurant au moulin à vent de Saint Clerc, cède et transporte pour le temps quy reste à expirer, à Jehan Bouquet, le bail fait aux mêmes conditions que celles faites à Robert Picot.

Six mois après, Robert Piquot, meunier demeurant au moulin de Jaumeron paroisse de Gif, confesse avoir baillé à tiltre de loyer et moison de grain jusqu'à cinq ans à Pierre Galloy, meunier demeurant à Argenteuil, le moulin à vent de Gometz le Chastel, la maison et terre deppendant diceluy comprenant la chasse pour aller chercher les bleds sur les subjets de Gometz… Le bail fait moyennant 16 septiers de bled, six chappons, ung gasteau de 6 lt, moitié de ung porc gras, … On a l'impression que le moulin doit faire l'objet d'un autre bail en amont, avec les intendants des finances du roy qui ne veulent s'encombrer d'une location de moulin.

Nous arrivons en 1639, Josias de Rouen, bourgeoise de Paris, recepveur de Monseigneur le duc d'Orléans frère unique du roy en son comté de Limours confese par ces présentes avoir baillé à tiltre de loyer et prix d'argent jusqu'à six ans, à Estienne Martin meusnier demeurant à Palloiseau ung moulin à vent appelé le moulin de Saint Clerc, auquel moulin sont tenus aller mouldre les paroissiens dudit Saint Clerc; ce bail fait à charge d'entretenir ledit moulin à vent, tournans, virans et autres ustancilles, oultre ce bail faict moyennant la somme de 260 lt.

En 1641, le moulin appartient au Comté de Limours dont Gaston d'Orléans, frère unique du roy est le seigneur. Josias de Rouen fait entretenir les bâtiments du comté. Au chapitre du moulin à vent notons: - Plus il convient de mettre ung arbre tournant avec les quatre esles garnies de deux corps de vollants et quatre ? avec estriers de ses coings et fourniture de lattes, cottereau & toille, une lampe, une lanterne, ung cuige pour tirer au vent, avec quinze pieux garnis de cordage, ung engin pour monter le bled au moulin garny de ses poulies et cordages, et refaire la couverture dudit moulin qui est ruinée. Plus au logis du meusnier convient de restablir la couverture diceluy et mettre six chevrons au lieu de ceux qui sont pourris et refaire deux travées de planches, ensemble le manteau et cheminée et tombé et l'âtre du four, et mettre deux portes garnies de leur ferrure, l'une à l'entrée du logis, l'autre à l'estable. C'est un moulin classique avec logement pour le meunier et étable pour le cheval qui va chercher les grains.

L'année suivante, Josias de Rouen baille à tiltre de ferme loyer et prix d'argent jusqu'à quatre ans, à Pierre Delavigne, meusnier demeurant à Saint Clerc, ung moulin à vent dit de St Clerc avec tournans moullans et travaillans garny de ses meules avec une petite maison estant proche ledit moulin, … , oultre moyennant le prix et somme de 200 livres.

En 1644, de nouveau Josias de Rouen baille jusqu'à deux ans à Alexandre Geuffran, meusnier demeurant audit moulin de Saint Clerc, …, moyennant 20 livres… Cinq mois après le meunier quitte le moulin.

En juin 1651, lors d'un transport de bail du moulin à vent de Marcoussis, il est fait mention de Jean Pavier, meusnier au moulin de Saint Clerc.

Six ans après, Charles Richard, marchand boullanger et meusnier du moullin à vent banal de Gometz le Chastel dict Sainct Clair de Gometz la ville, baille à loyer et prix d'argent pour le temps qui reste à courir à Mathieu Meunan, meusnier à Paris, du bail faict par le receveur du comté de Limours pour 226 livres chacun an, … ; lequel preneur sera tenu de rendre ledit moullin tournan et travaillan et de laisser quatre toiles qui se trouveront sur icelluy moullin …

En 1661, lors d'une transaction sur procès il est fait mention de Pierre et Jacques Viville meusniers au moullin à vent de Gometz le Chastel…

Citons pour terminer en 1666, un plan où figure le moulin montré en tête de chronique, d'après la maîtrise des eaux et forêts de Paris. Ce moulin a-t-il résisté à la Fronde?

Dans le terrier de 1773 du comté de Limours le moulin n'apparaît plus . Seuls subsistent le chantier du moulin à vent sur les plans de Gometz. Également le moulin n'apparait pas sur les cartes d'Ile de France du XVIIIe siècle.