Corpus Essonnien

Histoire et patrimoine du département de l'Essonne

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La seigneurie de Soucy: Pierre de Ficte (1556-1587)

Chronique du Vieux Marcoussy ————————————- _——————————- Mars 2008

JP. Dagnot

Cette chronique est le second volet consacré à la seigneurie de Soucy paroisse de Fontenay-les-Briis. La précédente chronique décrivait la période allant de 1254 jusqu'à la vente de Soucy en 1561, par la veuve d'Adrien Lenfernat à Pierre de Ficte.

Préambule

Pour comprendre les évènements qui vont suivre, il est nécessaire de préciser les faits ci-dessous: - Jehan de Baillon s'est installé à Janvry et il en est devenu seigneur. Il s'est marié en secondes noces avec Marie de Hacqueville. Trésorier de l'épargne, il manipule des sommes très importantes et achète après Janvry, Ollainville et une partie de Bruyères-le-Châtel. Il décède subitement à Compiègne en août 1567. - Jehan de Baillon est l'employeur de Pierre de Ficte. - Marie de Hacqueville, fille du seigneur d'Attichy et de Garges, a une soeur Loyse. Cette dernière s'unit à Pierre de Ficte dont nous allons conter l'histoire. Ce dernier devient donc beau-frère et commis du seigneur de Janvry. - Au décès de Jehan de Baillon, une succession à problèmes commence. Tous les enfants du premier et du second lit sont mineurs. Des tuteurs représentant les familles du côté des épouses, Leclerc et Hacqueville, vont essayer de tirer un maximum pour leurs mandants. Au bout d'un an, au lieu d'entrer en procès, Guillaume de Baillon, fils unique du premier lit, devenu majeur, transige avec sa belle-mère, Marie de Hacqueville. Il obtient Ollainville et Bruyères-le-Châtel.

La vie du financier Pierre de Ficte

Revenons à notre personnage. Dès 1556, noble homme Pierre de Ficte est qualifié de commis de monsieur le trésorier de l'épargne, Jehan de Baillon. Avant cette période, il était procureur en la chambre aux deniers de Messeigneurs frères du Roy. Il cédera cette charge à Jehan Leroy qui était également son commis. Les temps ne sont pas cléments, on retrouve ce dernier, prisonnier des prisons de la conciergerie à Paris depuis six mois, à la demande de Pierre de Ficte, pour faire un apurement de comptes. La mère du prisonnier réglera les dettes pour permettre l'élargissement du détenu.

En 1561, notre commis achète Soucy à la veuve Lenfernat. Comme c'est la coutume il va porter ses hommages au suzerain, Louis de Maillard, seigneur de Vaux, et curieusement ce ne sont pas les religieuses de la Saulsaye (second suzerain), mais le premier qui perçoit les droits de relief, quint et requint. Les dames de la Saussaye reçoivent néanmoins le même mois en leur prieuré royal de Villejuif, Pierre de Ficte, accompagné de deux notaires parisiens, lesquels sont embarrassés, car on leur a remis peu de titres et ils rendent hommage pour le fief de Bajollet. Le droit payé n'est que de 20 livres tournois comparé aux 100 données au seigneur de Vaux.

Deux ans plus tard, le voisinage entre Soucy et Janvry aidant, notre dynamique personnage s'unit avec la soeur de son patron. Tout comme ce dernier, il est insatiable: - Il achète à un chaussetier du roy des rentes représentant une mise de 10.000 lt, qu'il paie comptant. Il s'assure de cet achat par l'hypothèque de trois corps d'hôtel à Paris. - A Soucy, Jacques Rousselet (père de la seconde femme d'Ambroise Paré), demeurant à Montlhéry, vend au seigneur de Soucy, une maison contenant un espace & demy, couverte de chaulme, court, assis à Soucy, item deux arpents de terre prez la maison, item 5 quartiers, moyennant 160 lt. - Plusieurs échanges de terres contre rente, revendus quelques jours après. - Il donne une procuration générale totale à sa femme pour gérer ses biens. Cette dernière procède de même en mandatant un tiers pour plaider les affaires de son mari. - Il travaille également en famille avec Jehan Jaupitre, notaire & secrétaire du roy, demeurant à Paris, seigneur d'Etiolles, mari d'Anne de Baillon (nièce du seigneur de Janvry). Il devient son homme de confiance pour faire appliquer des arrests de Parlement. Sa charge de travail l'oblige à “prendre procureur” aussi pour louer ses maisons à Paris, il s'adresse cette fois du côté de sa femme avec les Hacqueville.

La suite de ce récit serait fastidieuse si on énumérait la cinquantaine d'actes trouvés pour cette période. Retenons néanmoins que pour réaliser certaines affaires, notre homme hypothèque la seigneurie de Soucy. Son beau-frère Jehan de Baillon décède subitement. Il procède alors à plusieurs constitutions de rentes afin d'obtenir des liquidités. On sait qu'il rachète à sa belle-soeur, la charge de trésorier de l'épargne, qui représente une mise de fonds importante.

La vie continue. Il aide cette dernière pour vendre plusieurs corps d'hôtels sur Paris, quartier Saint Pol. De ce fait les Baillon de Janvry ne sont plus parisiens. Il rachète également à sa belle-soeur une maison à Fontainebleau, contre 2.700 livres.

Dès l'obtention des biens de son père, Guillaume de Baillon, le fils unique du premier lit, cède une partie de la baronnye de Bruyères à Pierre de Ficte, son oncle par alliance (via les Hacqueville), devenu officiellement trésorier de l'épargne : - cela lui permet d'augmenter ses droits sur Mulleron et partie des fiefs mouvant de Bruyères, - eddifice ou y a pressoir & geolle où se tenoient les plaids avec prison et chambre pour le geollier; - item four à ban et le logis où est ledit four assis audit Brières; - droits de rivière et pesche avec le droit de chasse; - quatre thuilleries appartenant à la seigneurie. - en contre eschange le seigneur de Soussy verse 1.007 lt de rente. Notons pour les puristes que ces biens sont à ce moment indivis avec le seigneur Daubray.

De ce fait, notre seigneur de Soucy est devenu suzerain à son tour. Il reçoit maintenant des hommages: Claude de Lagranière archer des gardes du roy, en vertu de pouvoir donné par Guillaume de Baillon, et son beau frère Pierre de Lestoille, pour les mineurs de la dame de Janvry, s'adresse à Pierre de Ficte, leur oncle, seigneur de Soucy, qui estant en la maison de Soucy pour recevoir la souffrance des mineurs pour raison des fiefs de Mulleron & la Forest et mouvants dudit de Ficte à cause de son fief de Bruyères.

Nous apprenons quatre mois avant le décès de Pierre de Ficte, qu'il avait un secrétaire nommé Andeol Dufaure, demeurant à Paris rue du beau treillis, paroisse st Paul (chez son patron). Le seigneur de Soucy décède en sa maison de Soussy en août 1587.

Une semaine après, Jehan de Baillon, escuier sieur de Janvris y demeurant, & Michel de Baillon son frère aussi escuier seigneur de Marivaulx aussi y demeurant, constituent “en blanc” un procureur pour assister les enffans myneurs de feu messire Pierre de Ficte, chevalier, seigneur de Soucy, et dame Loyse de Hacqueville à présent sa veufve, et proposent monsieur le président Dudrat gendre dudit deffunt.

La transmission du patrimoine

Curieusement pour entrer dans le monde des trésoriers, le processus paraît être toujours le même, entrer au service du trésorier, s'unir avec la fille ou une parente. C'est ce qui se passe encore en 1574 avec François Sabathier, notaire & secrétaire du roy, commis de monseigneur le trésorier de l'épargne. Pierre de Ficte et Loyse de Hacqueville, à cause de Marie de Ficte leur fille, stipulant pour ladite & noble homme maistre François Sabathier, secrétaire du roy & aussi trésorier de l'épargne à la survivance dudit seigneur de Soucy, d'autre part, lesquels assistés de Joseph de Hacqueville, de Jehan Jaupitre seigneur d'Etiolles… procèdent à un contrat de mariage classique… Pierre de Ficte apporte 20.000 livres tournois, le futur 600 lt de rente sur des biens à Montpellier.

Cinq ans après, le seigneur de Soucy résigne son office de trésorier de l'épargne au proffit de son gendre, François Sabathier moyennant 30.000 lt. On apprend que le trésorier demeure à Paris rue du beau treillis, paroisse st Paul. Il héberge de ce fait son secrétaire qui donne la même adresse.

Le domaine de Soucy

Dès l'achat de la seigneurie, nous avons vu que les papiers ou titres présentés n'étaient pas des plus clairs, Pierre de Ficte, seigneur dudit Soucy, à cause de l'eschange représente ses hommages aux dames de la Saussaye et précise la seigneurie qui consiste en: - un manoir seigneurial dans lequel y avoit d'ancienneté granche ( et non prison comme parfois mentionné), colombier, estable, cour, lesdits edifices cloz de fossés à eau, le tout de présent en ruyne, - item un quartier de vignes, - un clos allentour le manoir, - une basse cour joignant ledit hostel seigneurial, maison estable pressoir, - 60 arpents, - cinq quartier six perches au chantier de la forest, - droit de molin et de four à ban, - chapelle Saint Eloy, (édifice existant toujours actuellement mais à vocation différente), - les dixmes de Soucy… au sujets des fiefs associés et des cens le seigneur ironise sur l'injure du temps des seigneurs qui les ont possédés et aussi la malice de ceuls qui les doibvent.

Durant la même période il procède à des acquisitions de terres et maisons dans la région.

Le voici propriétaire de plus de 175 arpens de terres bois et étangs. Il est insatiable comme son futur beau-frère, moins d'un an après, il rencontre Philippe Lefèvre, veuve de feu noble homme et scientifique personne, Jacques Houllier, en son vivant docteur et régent en la faculté de médecine. Les deux interlocuteurs demeurent à Paris. La veuve en son nom & se portant fort de ses enfans myneurs, échange la métairie assise à Soucy et provenant de l'ancien curé de Bruyères. Pour son compte le seigneur de Soucy délaisse 125 lt de rente annuelle. La seigneurie de Soucy se trouve agrandie d'une mestairye assise à Fontenay, qui se consiste en maisons granche estable court jardin, terre labourables, le tout contenant 86 arpents de terre & 6 de pré, ces biens venant du conquest avec le deffunt, avec les marguilliers & habitants & paroissiens de l'église parochiale Monsieur Saint Didier de Bruyères.

On a la confirmation de la vente par le bail de cette ferme à Philippe Maillard qui en jouissait dudit deffunt Houllier. Il pourra continuer à jouir pendant le temps qui reste, de la maison granche avec 96 arpens de terre, et payer à Pierre de Ficte.

Un aveu de 1571, où Pierre de Ficte, seigneur de Soucy & de Bruyères en partie, déclare (au roy) les terres & seigneuries qui ensuivent: - terres cens droits justice tabellionnage à Bruyères …, tuilleries, venant de l'échange avec Guillaume de Baillon, qui l'avait obtenu de la succession de son père Jehan de Baillon, qui lui l'avait acquis par eschange avec Jehan de la Rochette lors seigneur de Bruyères & à présent des Molières, - item le fief de Troux assis en la chatellenie & baronnie de Bruyères que tient de présent le sieur de Montagu qui se consiste en maison granges estables court jardin et 180 arpens de terre labourables, deux arpents de pré valant par an 150 lt de rente, - item le fief de Mulleron, assis au village de Mulleron, que tient damoiselle Marie de Hacqueville (sa belle soeur), consistant en terre vignes bois friches à plusieurs personnes; le fief peut valoir six livres de menus cens, - item le fief de la Forest que tient aussi ladite Marye de Hacqueville qui se consiste en 132 arpens tant terre que boys pastils que genestiers & buisson qui peut valoir 80 lt de rente.

La totalité des biens doit se faire en additionnant les déclarations faites à tous les suzerains: le roy, le seigneur de Vaux, les religieuses de la Saulsaye. Pour simplifier la lecture, il n'est pas précisé si les biens sont déclarés en totalité ou en partie (Daubray).

En ce qui concerne sa demeure, il a choisi ses entrepreneurs de la région qui ont fait référence pour son beau-frère Jehan de Baillon, ce dernier demande le même type de prestations notamment à Mathurin Lesol, serrurier à Palloiseau, pour refaire son château d'Ollainville.

Jusqu'au décès de Pierre de Ficte, les constitutions de rentes, hypothéquant la seigneurie, permettent de dire que le domaine est composé d'un manoir et non d'un château.

À suivre …

dagnot/chronique11.02.txt · Dernière modification: 2020/11/11 18:20 de bg