Corpus Essonnien

Histoire et patrimoine du département de l'Essonne

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La grange dîmeresse de Ballainvilliers Extrait de l'Atlas Trudaine

Juin 2008

Chronique du vieux Marcoussy

JP. Dagnot

C. Julien

Cette chronique est consacrée à la grange dîmeresse de Ballainvilliers (Essonne, arr. Palaiseau, cant. Longjumeau). Sous l'Ancien régime, la grange dixmeresse ou grande maison était un fief particulier à Ballainvilliers, ce village qui, nous dit un érudit, « possédoit plusieurs labourages et deux fiefs ».

En remontant dans les temps éloignés, vers 1200, nous trouvons que « Bellenvillers n'étoit qu'un simple hameau de Longjumel ». C'est en 1265, alors que Longjumeau et Ballainvilliers ne formaient qu'une seule paroisse, que les chevaliers Pierre et Ansel de Ballenvillier, Pierre de Villeneuve & autres prièrent Renaud de Corbeil , l'évêque de Paris , de détacher Ballainvilliers de Longjumeau et d'y établir une cure d'où dépendrait le Plessis-Saint-Père et Villebouzin ( Ville Boissen ). En fait, il faut voir dans cette opération, un grave préjudice pour le curé de Longjumeau qui se trouvait dépouiller d'une partie de son bénéfice. Celui-ci exigea pour dédommagement le versement annuel d'une somme de 12 livres et la perception des grosses dîmes à Ballainvilliers.

Mais notre érudit est peu loquasse pour Ballainvilliers, toutefois, il termine par « je me contenterai de remarquer ce qu'on lit au procès-verbal de la Coutume de Paris de l'an 1580, que pour la grande Maison de Balainvilliers qui est le second nom du fief des Boursiers , comparut Louis Galoppe, avocat ». Cela suffit pour aiguiser notre curiosité et c'est bien cela que nous allons traiter maintenant.

La grange dîmeresse de Ballainvilliers

En 1237, nous assistons au démembrement de la dixme de Longjumeau possédée en fief et partagée entre les enfants d'un chevalier nommé Bassigny. Cette même année, Pierre de Bassigny vendit le tiers des dîmes de Longjumeau et Ballainvilliers pour 415 livres à charge de payer un muid de grain aux religieux de la Ferté-Aleps (1). Nous savons que, pour mieux gérer ses domaines agricoles, le clergé, tant séculier que régulier, avait construit des lieux servant à stocker les récoltes. Ces bâtiments ou maisons ont été appelés granges dîmières ou granges dîmeresses bien que n'étant pas exclusivement destinés à abriter le prélèvement sur les récoltes, mais aussi à assurer l'exploitation des terres alentour.

En 1353, Guillaume Ferrand « recognoit tenir à foy et hommage du Plessis-Pâté, un fief siz à Ballainvilliers appelée la Grange Dixmeresse avec la tierse partie des dixmes de Ballainvilliers et Longjumeau ». C'est la première mention connue de ce fief qui comprenait un lieu « la grange » et un droit « la dîme » dont l'histoire est continue jusqu'à la Révolution. Notons également que la grosse dîme de Ballainvilliers a été de tout temps en partie inféodée (2).

Le 15 mars 1383, André Lepreux porte la foy et hommage pour son fief de la Grange Dixmeresse et une petite foullerie size à ladite grange , laquelle souloit rendre trois sols parisis de cens, lesquelles choses naguère achetées de Guillaume Ferrand. Le 1er juin de cette même année, un aveu et dénombrement est rendu par Guillaume Ferrand à Messire Louis Pasté, seigneur du Plessis, pour raison d'un lieu appelé la Grange Dîmeresse, sis à Ballainvilliers avec la place et dépendance de ladite grange avec la tierce partie de la dixme. En mars 1386, Lepreux passe aveu et dénombrement à Louis Pasté du tiers de la grande dixme de Longjumeau et de Ballainvilliers avec une saussaye devant la grange pour Guillaume Ferrand.

Donc, nous apprenons que le fief de Ballainvilliers est mouvant de Plessis devenu Plessis-Pasté du nom des chevaliers qui possédaient cette terre au XIIIe siècle. Nous ignorons l'origine exacte de la famille Pasté et l'implantation dans la région de Montlhéry, mais en compulsant les chartes du prieuré de Longpont, on peut penser que les Pasté, relevant du roi Philippe Auguste, auraient été alliés à la famille Cochivi qui possédait la dîme du Plessis au XIIe siècle (3). Outre le Plessis, la famille Pasté possédait de nombreux fiefs dans la région comme ceux de Ballainvilliers, Brétigny, Fretay, etc.

La Grange Dixmeresse sous les Galoppe

En 1444, Alexandre et Gérard Le Boursier portent foy & hommage pour le fief de la Grange Dixmeresse avec « une place devant icelle quy fait appartenant à Jean de la Croix quy devoit trois sols de cens ». L'aveu et dénombrement est passé par Alexandre à demoiselle Marie Pasté, dame du Plessis. Marie Pasté que l'abbé Lebeuf dit être la nièce de Jean Pasté, évêque de Chartres, aliéna Le Plessis à Jean de Blosset, chambellan du roi Charles VI. Le 7 juin 1455, honorable homme et sage Gérard Leboursier passe aveu à Rogerin Blosset, seigneur du Plessis, pour la Grange dixmeresse de Ballainvilliers.

Vers 1460, Jean Galoppe, advocat en Parlement porte la foy et hommage du fief qui fut à Alexandre Leboursier, …, colombier, cour, jardin, le tout clos de murs tenant à la rue, d'autre à la voye aux vaches, des deux bouts au chemin qui tend de Longjumeau à Longpont. La grange dixmeresse prit quelquefois le nom de fief des Boursiers à cause de la famille qui le possédait au XVe siècle. Un chantier du territoire de Ballainvilliers prit le nom de Croix Galope , qu'il possède encore de nos jours.

Le 7 juillet 1464, Guillaume Galoppe, seigneur de l'ancien fief de Ballainvilliers, fils de Jean Galoppe, seigneur du fief et seigneurie de Ballainvilliers, à luy eschu par le deceds dudit Jean Galoppe, escuyer, consistant de maison, colombier, vivier, cour, jardin, grange, fontaine, grange dixmeresse tenant aux chemin de Longjumeau à Longpont et de Ballainvilliers à Longjumeau.

Léon de Sainte-Maure, escuier, seigneur et baron de Montauzier, passe le 29 juillet 1482 un adveu par au nom de Jeanne Leboursier , veuve de feu Léon de Sainte-Maure, ses père et mère à Messire Jean Allard, seigneur du Plessis pour une place qui fut jadis à feu Jean de Croci, laquelle place soulloit devoir trois sols parisis de cens … Un aveu identique est passé huit ans plus tard devant Hernault, notaire à Montlhéry, par Léon de Sainte-More, procureur de Jeanne Leboursier, veuve de Léon de Sainte-Maure, à Jean Blosset, seigneur du Plessis-Pâté (4).

En 1505, nous trouvons la foy et hommage de Jean Galoppe, seigneur de Ballainvilliers, à moy eschu par la mort et trépas de feu Guillaume Galoppe pour le fief de la Grange Dixmeresse, « clos de murs & moiens fossez ». La succession de Jean Galoppe est liquidée le 7 décembre 1543, « noble homme et saige maistre Charles Galloppe, seigneur de Boutervillier, advocat en la cour de Parlement, d'une part, et Germain Lefèvre, laboureur demeurant à Lonjumeau d'aultre part, lesquelles parties font par ces présentes, c'est à savoir Charles Galloppe délaisse à titre de rente annuelle à toujours audit Germain Lefèvre, les pièces de vignes cy après déclarées luy revenant par le trépas et succession de feu messire Jehan Galloppe, son père auquel Michel Lefèvre, père du preneur, les avait vendues en la censive du seigneur de Palloyseau, moyennant 70 sols tournois de rente ».

En février 1584, nous trouvons, suite à une main mise, noble homme messire Louis Galoppe, conseiller du roy, notre sire en sa cour de Parlement, commis aux requestes du Palais, seigneur de Boutervilliers-en-Beauce (5), seigneur de la grande maison de Ballainvilliers , demeurant à Paris paroisse Saint-André-des-Arts, pour raison du fief et seigneurie de Ballainvilliers, échu par le trépas de Charles Galoppe, son père. C'est l'acte qui est à l'origine du litige pour lequel Louis Galoppe doit payer les frais de saisie. Trois mois plus tard, Louis Galoppe passe un aveu à Jean de Blosset. Le seigneur du fief de Ballainvilliers déclare que la Grange Dixmeresse fut à Alexandre Leboursier, tenant à la rue de la voye aux vaches , au chemin de Longjumeau à Longpont.

L'année 1596, nous apprenons que le fief de Ballainvilliers est un arrière-fief mouvant de la seigneurie de Sucy. Devant le notaire royal Beauperrin, Louis de Montbron, fils héritier de feue dame Claude de Blosset sa mère, héritière de feu Jean de Blosset passe un aveu et dénombrement à messire François, seigneur de Sucy, pour raison de la terre et seigneurie du Plessis : - consistant en un château composé de deux grands corps de logis, corps de chapelle, colombier et jeu de paume , le tout couvert de thuiles et ardoises, cour pavée enclos de fossés à cuve de poissons, pont-levis, basse cour, étable, pressoir, jardin clos de murailles, … - 3 arpents en bâtiment, 303 en terre et en fossés, 8 en jardins, 167 en bois taillis, - 11 boisseaux et deux chappons à prendre sur 622 arpents… Les arrières fiefs de la seigneurie du Plessis sont: - le fief de la Grange Dîmeresse, consistant en maison grange, étable, colombier, cour, jardin, vivier, le tiers de la grande dixme de Ballainvilliers appartenant à Loys Galoppe, - le fief de Lunezy, consistant en un hôtel, chambre basse, cuisine, four, étable, grenier, grange, bergerie, cellier, étables, écuries, et 152 arpents de terres, - le fief de Fretay, consistant en un hôtel et jardin, 49 arpents de terres et 3 de prés.

En 1598, Hiérosme Lemaistre, tuteur des enfants mineurs de Jehan Olivier, seigneur de Leuville et Ballainvilliers, passe le bail d'une ferme et mestairie assise à Ballainvilliers qui se consiste en corps d'hostel, granges et estables, bergeries avec neuf vingt dix-huit arpens , ledit bail moyennant sept muids de grains (6).

Les devoirs seigneuriaux sont faits par Loys Gallope, escuyer sieur de la grande maison de Ballainvilliers. Il s'est transporté le 6 juillet 1615, devant la principale porte du château du Plessis-Pâté pour rendre foy et hommage à messire Loys de Montbron, seigneur du lieu. Puis, le 17 décembre 1618, Louis Gallopppe, escuier, sieur de Boutervilliers-en-Beauce et la grande maison de Ballainvilliers confesse avoir reçu six muyds ung septier de bled mestail , en paiement du loyer de la maison.

La succession de Louis Galoppe

Le seigneur de Boutervilliers décède en 1625 laissant la grange de Ballainvilliers à sa fille Madeleine. Mariée à Antoine Dauqueslin, magistrat au Châtelet de Paris, elle eut deux filles Eléonore et Madeleine toutes deux mariées à des personnages qui occupaient des fonctions de gouvernement et de justice. Ayant acquis à titre onéreux un office anoblissant, ces personnes achetaient de petits fiefs occupant le groupe social de la noblesse de robe .

Le 13 décembre 1625, Madeleine Galoppe, veuve de messire Antoine Dauqueslin, rend foy et hommage et passe aveu et dénombrement à messire Jean de Montbron, seigneur du Plessis-Pâté, consistant en: - la maison grange dîmeresse, coulombier, cour, jardin, vivier et ses dépendances, le tout clos de murs, - le tiers de la dixme de Longjumeau et de Ballainvilliers. La dame paie une amende de 68 livres de droits de suite à la saisie et main mise au seigneur dominant.

Le 6 février 1645, la foy et hommage portant aveu est rendue à Jean de Montbron, par Guy Carré en partie du fief, à cause de dame Eléonore Dauquelin, fille héritière de Madeleine Galoppe sa mère. Puis le 17 septembre 1656, la foy & hommage est rendue à Geoffroy de Laigue, seigneur du Plessis-Pasté, par dame Magdeleine Dauquelin, veuve de Messire Paul Hay, vivant seigneur du Châtelet (7), conseiller du roy, seigneur en partie de la grande maison de Ballainvilliers , héritière de Magdeleine Galoppe, sa mère.

Le conflit avec le baron de Ballainvilliers

La terre de Ballainvilliers est érigée en baronnie le 21 février 1661 , en faveur de Nicolas Lepagnol de Fontenoy (1617-1688), marié à Marie de Bourlon. Son fils Claude Lepagnol, écuyer, seigneur de Bompart, lui succèdera et mourra en 1707 sans postérité. Le nouveau baron fait construire un château dont ne subsistent aujourd'hui que l'aile gauche et la Chapelle.

En sa terre de Ballainvilliers, Mr Lepagnol de Fontenoy n'est que baron et s'oppose au propriétaire de la Grande Maison qui a le titre de marquis. La préséance ne sera pas respectée.

Le contentieux entre Messire Nicolas Lepagnol seigneur de Fontenoy et de Ballainvilliers et Messire Jean Hay, chevalier, seigneur marquis du Châtelet commença le 26 avril 1679 « lesquels ont déclarés qu'ils sont en procès ». Le sieur de Fontenoy se plaint que le sieur du Châtelet avoit changé le nom du fief qu'il possède , relevant de la seigneurie du Plessis-Pâté et qu'il est seul seigneur de Ballainvilliers. Jean Hay rétorque que « luy et ses prédécesseurs depuis plus de deux cents ans estoient en possession de faire porter le nom de Ballainvilliers » ou de prendre la qualité de seigneur du fief de Ballainvilliers comme il le justifie par plusieurs aveux rendus au seigneur du Plessis-Pâté. Finalement, les parties sont convenues que le sieur du Châtelet s'est désisté de se faire appeler seigneur de Ballainvilliers, ce titre réservé au seigneur de Fontenoy.

Un autre acte le même jour, réunit les mêmes concernant la chapelle avec le curé et marguilliers de l'église de Ballainvilliers, prétendant que la dite chapelle leur appartient,…, les dites parties se sont accordées en la manière qui suit, sçavoir que la place de la chapelle sera partagée entre elles, en deux portions du costé de l'hostel la partie supérieure appartient à l'église pour faire une sacristie, l'autre sera prise du costé inférieur et appartiendra au sieur du Châtelet; enfin le sieur de Fontenoy restera le seigneur de la paroisse sans préjudice de ses droits honorifiques.

Le 25 mai 1679, Messire Jean Hay, chevalier, seigneur de la Grande Maison de la grange dîmeresse de Ballainvilliers , estant en la maison seigneuriale de Ballainvilliers voit François d'Argouges pour lui présenter ses foy & hommage à cause de ladite grange. Ledit fief venant du mariage de Mme Dauquelin, sa mère avec Paul Hay, lequel fief consiste en vivier, deux maisons, une pour le maître, l'autre pour le fermier, dont la grange, le tiers de la grande dixme de Longjumeau et de Ballainvilliers, fait en présence de Nicolas Lepagnol qui ne réclame plus ces biens.

Nous pouvons noter que, curieusement, l'acte de foy et hommage est fait chez le vassal alors que le chapitre XVI de la coutume de Paris exige « pour faire la Foi, le vassal doit se transporter au principal manoir s'il y en a un, sinon au lieu accoutumé ». Le même jour, Jean Hay se rend chez Nicollas Lepagnol, …, en état de vassal pour présenter ses foy & hommage pour le fief des Carneaux, situé vis à vis la grande porte du fief de la grande maison de la Grange Dîmeresse, fait en présence du seigneur du Plessis-Pâté.

En juillet 1682, Messire Nicolas Lepagnol, seigneur de Ballainvilliers, de présent en son château de Ballainvilliers, baille pour neuf années à Pierre Guillemain, laboureur, la ferme dudit Ballainvilliers attenant au château « ladite ferme avec coullombier ». En 1704, Nicolas de Laleu tabellion à la baronnie de Ballainvilliers, fondé de pouvoir du seigneur du Châtelet, passe un bail à Pierre Dollimier, laboureur de la ferme de la Grange Dixmeresse, appartenances & dépendances…

Le 22 décembre 1706, à la requête d'Elisabeth de Baux, seule héritière de Jean Hay, marquis du Châtelet, son oncle, il est procédé à l'inventaire des meubles du lieu; on note les pièces suivantes : cuisine, office attenant à la cuisine, vestibule attenant à l'office, salle au dessus de la cuisine & office, chambre attenant à ladite salle, cabinet à costé, chambre attenant l'escallier, autre chambre attenant, chambre estant au passage d'icelluy dessus, garde robe à costé, chambre au dessus de la porte d'entrée, chambre du billard, grand grenier, bûcher, ferme, escurie, grenier au dessus.

Le revenu des grosses dîmes

Tout au long de cette chronique, nous voyons que le fief de la Maison Noble de Ballainvilliers dite Grange Dîmeresse comprend, depuis 1237, le tiers des grosses dîmes de Longjumeau et Ballainvilliers. La ferme et ses bâtiments avaient donc, au Moyen Âge, une fonction d'engrangement du dixième des récoltes collectées sur les terres de Longjumeau et Ballainvilliers.

Essayons maintenant de calculer le revenu tiré de la dîme inféodée. Un état des revenus du XVIIIe siècle nous donne directement les surfaces pour le prélèvement tant sur les terres du seigneur de Ballainvilliers que sur celles d'autres particuliers. Il y a donc 586 arpents 67 perches sur le territoire de Ballainvilliers et 664 arpents 50 perches sur celui de Longjumeau, soit une superficie totale de 1251 arpents.

Nous savons que le rendement à l'arpent était encore faible au XVIIIe siècle. Il était sensiblement supérieur à 150 gerbes par arpent pour une terre travaillée à trois façons. Le produit en grains peut être estimé à 3 setiers 1 mine par arpent. Les mercuriales du marché de Montlhéry de 1710, nous donnent le setier de froment vendu 15 livres 5 sols et la paille laissée au prix de 12 livres les 100 bottes. En 1712, les frais de labour et de sciage du blé s'élèvent à 51 livres 15 sols pour la récolte sur 9 arpents environ. Le bilan général donne un revenu net de 62 livres par arpents.

Le revenu de la dîme ne tient compte que du prélèvement « au bout du champ ». C'est-à-dire 4 boisseaux de grains et une douzaine de gerbes par arpent. Nous obtenons ainsi un revenu total de 9.880 livres tournois ! Comparons maintenant cette somme au pouvoir d'achat d'un ouvrier. Au XVIIIe siècle, le salaire moyen était 20 sols par jour. Le pain d'une livre et demie, ration journalière d'une personne, était vendu 2 sols et les œufs 10 sols la douzaine.

Tableau donnant l'étendue des territoires de Ballainvilliers et Longjumeau sur lesquels est perçue la grande dixme inféodée dudit Longjumeau et Ballainvilliers.

Vente de la Grange Dîmeresse au seigneur de Ballainvilliers

Le 30 juin 1715, Madeleine de Baux de Sainte-Frique, héritière de Jean Hay du Châtelet, marquis du Châtelet et Maupuis, rend foy et hommage portant aveu détaillé à Charles Louis Kadot, seigneur du Plessis-Pâté.

Le 13 août 1736, le fief de la Grande Maison Noble de Ballainvilliers, qui consiste en un grand corps de logis, vis à vis du clos du fief des Carneaux est vendue par dame Madeleine de Baux de Sainte-Frique. La vente est consentie au sieur Charles Chavet. Nous donnons ci-dessous le texte intégral de la minute.

« Fut présenté, la haulte et puissante dame Madeleine Elisabeth de Baux, de Sainte-Frique, comtesse du Bois de la Roche, veuve de haut et puissant seigneur Joseph de Voluydre de Ruffée, chevalier, comte du Bois de la Roche, vicomte de la Gaptière et autres lieux, demeurant ordinairement en son chasteau du Bois-de-la-Roche en Bretagne, près Rennes, estant de présent à Paris logée rue de Grenelle, paroisse Saint-Sulpice, tant en son nom que comme seule et unique héritière par bénéfice et inventaire de deffunt messire Jean Hay, chevalier, seigneur marquis du Chastelet, oncle de madame, laquelle a par ces présentes rendu promet et s'oblige solidairement en nom et en chacun d'iceux, ou d'eux seul pour le tout sans division, discussion et fidejussion aquoy elle renonce, garantie de tous troubles, douaire, dettes, hypothèques, évictions, substitution, alliénations et autres empêchements générallement quelconques au Sieur Charles Chavet, marchand bourgeois de Paris et demoiselle Marie Jeanne Forest, sa femme, qu'il autorise à l'effet des présentes demeurant rue des Bourdonnois, paroisse Saint-Germain l'Auxerrois, à ce présents et acceptants acquéreurs pour eux, leurs hoirs, et ayant cause, tous les biens cy après, sçavoir

Le fief de la Grande Maison noble de Ballainvilliers, relevant en plein fief, foy et hommage du seigneur baron du Plessis-Pâté, qui consiste en : • Un grand corps de logis couvert de thuilles, la grande porte duquel ouvre sur la rue qui conduit dudit Ballainvilliers à Longjumeau, laquelle grande porte est vis-à-vis le clos du fief des Carneaux appelé la Baronnie, ladite rüe ou chemin (tendant dudit Ballainvilliers à Longjumeau) entre d'eux, dans lequel logis il y a plusieurs chambres basses et hautes, greniers eu dessus, grande cour devant ledit logis, cour basse à costé en laquelle cour basse il y a écurie, deux remises nouvelement basties, poulailler, étables à vaches et autres édifices aussy couverts de thuilles, grand jardin derrière lequel il y a colombier, un vivier, des bois, taillis et de haute futage, le tout clos de murs, tenant d'une part par derrière à un chemin appelé la voye aux vaches, d'autre au sieur Collet, d'un bout à ladite rüe ou chemin sus déclaré tendant dudit Ballainvilliers à Longjumeau et encore à la maison cy après déclarée et d'autre bout au chemin conduisant de ladite voye aux vaches à l'église dudit Ballainvilliers, • Une maison en laquelle loge le fermier de ladite dame venderesses consistant en un grand corps de logis, d'une grande cour en laquelle il y a la grange dixmeresse , bergerie, estables à vaches, poulaillier, et une autre petite grange, lesdits lieux couverts de thuilles tenant d'une part et des deux bouts à ladite dame venderesses à cause de l'article précédent, d'autre à ladite rüe ou chemin sus déclaré tendant dudit Ballainvilliers à Longjumeau, • Le tiers de la grande dixme de Longjumeau et dudit Ballainvilliers, • Une place située devant les lieux et de l'autre costé dudit chemin qui tend dudit Ballainvilliers à Longjumeau qui est proche la Fontaine Bataille, dont partie en terre labourable et l'autre en saulsaye, et le tout contenant 3 arpents tenant d'une part au chemin, d'autre à ladite Fontaine Bataille et partie au seigneur de Ballainvilliers, d'un bout du costé de ladite saulsaye audit clos du fief apelé des Carneaux ou de la Baronnie, un petit chemin entre d'eux, d'autre bout à ladite dame venderesse et aux terres du Chapitre de l'Eglise de Paris, laquelle place étoit autrefois possédée par Jean de La Croix chargée de trois sols parisis de cens et ycelle place abandonnée pour ledit cens et lequel par erreur auroit été porté cy devant en la censive du seigneur de Ballainvilliers dans les papiers et reconnaissances de censive faitte par les prédécesseurs de ladite dame venderesse audit seigneur de Ballainvilliers, Le tout comme il est énoncé et résulte de la foy et hommage serment de fidélité, aveu et dénombrement de ce qui vient d'estre énoncé fait et fourni par la dame venderesse à messire Charles Louis Kadot, comte de Sebville, chevalier de l'ordre militaire de St-Louis, baron du Plessis-Pasté à cause de sa baronnie du Plessis-Pasté par acte passé devant Jean Le Roy L'aisné, notaire royal héréditaire en la chastellenie de Montlhéry le 30 juin 1714. • Plus le clos estant vis-à-vis ladite maison noble (le chemin entre d'eux) étant en préz, planté d'arbres fruitiers, bois de haute futage et autres, fossez à l'entour en dedans ledit clos à présent et depuis longues années, fermé de murs, contenant environ sept arpens apellé le fief des Carneaux ou le clos de la Baronnie, tenant d'une part à la voye de Ballainvilliers à Balizy, d'autre au seigneur de Ballainvilliers, par devant ledit chemin et par derrière sur la voye de Ballainvilliers à Balizy, mouvant et relevant ou estant en la censive dudit seigneur de Ballainvilliers et vers luy chargé de tels cens ou droits et devoirs seigneuriaux que ce peut devoir que les parties n'ont reçu dire ny déclaré de ce enquises et interpellées par ledit notaire • plus les terres labourables, prez et bois qui suivent : • premièrement ceux qui sont en la censive dudit seigneur de Ballainvilliers et vers luy chargés de ce suit va estre énoncé, • un arpent et demy de terre size au terroir dudit Ballainvilliers, chantier et lieux Belesbat tenant d'une part à Mr Quentin, seigneur de Villiers, d'autre part et d'un bout à plusieurs et au seigneurs de Ballainvilliers chargé de 15 deniers de cens, • cinq quartiers de terre size au terroir et chantier tenant d'une part aux terres déppendant du Chapitre de Notre-Dame, d'un bout sur le chemin tendant dudit Ballainvilliers à Villebouzin et d'autre bout audit seigneur de Ballainvilliers chargé de 4 sols 2 deniers de cens, • deux arpens trois quartiers de terre assis audit terroir chantier et lieudit Mollepatte tenant d'une part, d'autre et d'un bout audit seigneur de Ballainvilliers, d'autre bout en hache à Champagne de Villebouzin, chargé de 2 sols 3 deniers obole de cens, • huit arpens et demy de terre assis au terroir et chantier tenant d'une part et d'autre audit seigneur de Ballainvilliers, d'un bout sur la voye de Montlhéry, d'autre bout sur le chemin qui tend de Ballainvilliers à Villebouzin chargé de 6 sols seize deniers de cens…. Il semble que des créances étaient garanties sur la grange de Ballainvilliers puisque le 1er septembre 1736, une subrogation du contrat de vente de la grange est faite par Charles Chavet.

Le 12 septembre 1736, Simon Charles Bernard, seigneur de Ballainvilliers de la grande maison noble & grange dixmeresse audit Ballainvilliers , rend foy et hommage portant aveu et dénombrement à Elisabeth Thérèse Marguerite Chevalier, veuve Charles Louis Kadot, seigneur du Plessis-Sebbeville , anciennement Plessis-Pâté. La comtesse d'Esclignac reçoit cet hommage en son nom et comme tutrice honoraire de Bernardin Louis Kadot, comte de Sebbeville, de demoiselle Françoise Antoinette et Madeleine Bernardine Marguerite Kadot de Sebbeville, ses enfants mineurs. Trois ans plus tard, le baron de Ballainvilliers et dame Marie Magdeleine Labbé, sa femme, reprennent l'achat de la grange dîmeresse avec les nombreuses pièces de terres attachées et déclarent qu'ils entendent la réunir à la terre et baronnie de Ballainvilliers.

En 1750, on trouve un état des héritages sur lesquels le propriétaire de la Grange Dîmeresse a droit de prélever le tiers des grosses dixmes, soit 586 arpents sur Ballainvilliers et près de 700 arpents sur Longjumeau.

Le 30 août 1767, le procureur de Simon-Charles Sébastien Bernard, chevalier, baron de Ballainvilliers, seigneur de Villebouzin, le Mesnil, Clery, Maurepas, conseiller du roy en ses conseils, maître ordinaire de ses requêtes ordinaires de son hôtel, grand croix de Saint-Louis, intendant de justice, police et finances de la généralité de Riom et province d'Auvergne, demeurant à Paris rue Neuve, paroisse Saint-Merry, est habilité à prendre et accepter soit la qualité d'héritier principal de noble défunt Messire Simon-Charles Bernard chevalier, baron de Ballainvilliers, seigneur de Maurepas,.., son père, soit les qualités de donataire entre vifs dudit feu sieur Bernard, suivant le contrat de mariage dudit seigneur de Ballainvilliers,…, s'est transporté devant Charles de Preissac comte d'Esclignac, et Elisabeth Chevallier Dame de Marcoussis & du Plessis-Sebbeville , anciennement Plessis Pasté, … à cause du fief de la grande maison noble et grange dixmeresse size audit Ballainvilliers relevant du Plessis-Pasté, héritier de son père auquel ledit fief appartenoit au moyen de la subrogation qui luy en a été faite en 1736.

La grande maison noble et Grange Dixmeresse consiste en un grand corps de logis couvert de thuilles, la grande porte duquel ouvre sur la rüe qui conduit dudit Ballainvilliers à Longjumeau, laquelle grande porte est vis à vis le clos du fief des Carnaux, appelé la Baronnie, dans lequel logis il y a plusieurs chambres basses et hautes grenier au dessus grande cour devant ledit logis, cour basse à coté en laquelle il y a écurie, deux remises, poulailler, étable à vaches, et autres édifices, grand jardin derrière dans lequel il y a un colombier un vivier bois taillis le tout clos de murs…

Le 1er septembre 1780, nous trouvons une déclaration de Charles Bernard, maître des requêtes ordinaires de l'hôtel de sa Majesté, émancipé d'âge, pour une pièce de terre contiguë au Rouillon et au clos des Carneaux qui constitue la décharge des eaux de la maison noble . Quelques jours plus tard, le seigneur Charles Bernard baille à Jacques Ledoux, fermier , laboureur et procureur fiscal de Villebouzin, demeurant en la ferme seigneuriale, tout le corps de logis de ladite ferme avec 40 arpents de terre.

Il semble que les lieux aient été transformés puisque la foy & hommage portant aveu rendu le 24 août 1786, par Mr de Ballainvilliers à Madame la comtesse d'Esclignac donne une description différente des précédentes « où estoit ci devant construit un grand corps de logis dont il ne reste plus qu'une partie où il est aussi une pièce d'eau vive … »

Le 30 mars 1803, un titre de Louis Brot, détempteur de plusieurs bâtiments faisant partie de l'ancienne ferme dudit Ballainvilliers faisant partie d'un bail à rente de 60 livres dues à Charles Bernard en 1788…

Notes

(1) La Ferté-Alais (Essonne), autrefois la Ferté-Baudouin.

(2) Rappelons que la dîme était un impôt payé à l'église sur la dixième partie des récoltes sur toutes les terres. Les grosses dîmes concernaient les céréales et le vin par opposition aux menues dîmes (ou vertes) qui étaient prélevées sur les légumes et les fruits des arbres. La dîme dont des laïques se sont emparés, par achat, échange ou souvent par usurpation était appelée dîme inféodée . En dédommagement, le seigneur versait son gros au curé, le plus souvent payé en nature.

(3) Dans son Histoire Généalogique de France , le père Anselme donne un Ferry Pasté, seigneur de Chaleranges, maréchal de France dont le fils Ferry II, chevalier et seigneur de Bois-Malesherbes et de Montreuil sur le bois de Vincennes. Le fils de ce dernier, Jean Pasté, archidiacre de Thiérache en l'église de Laon est seigneur du Plessis-Pasté dont il obtint la haute justice en octobre 1317.

(4) Léon de Sainte-Maure, seigneur de Jonzac, fils d'Arnaud, seigneur de Jonzac et de Perrette Marchand mourut en 1485. En 1450, il avait épousé Jeanne le Boursier, fille de Gérard le Boursier « en 1451, messire Jean le Boursier étoit général de France, & chef des vaisseaux, qui battirent les Anglais à Blaye sous le comte de Dunois ».

(5) Boutervilliers (Essonne, arr. et cant. Etampes), village situé à 10 km de Dourdan sur le plateau de la Beauce. De la terre de Boutervilliers est issue une ancienne famille de chevaliers. Guillaume de Boutervilliers, chevalier, comparut à la montre des nobles de la châtellenie de Montlhéry en 1271.

(6) Le bail à ferme est celui dans lequel la chose louée est une exploitation rurale et où le loyer consiste en une somme préfixée à payer. Sous l'Ancien régime le loyer était payé en nature, bien souvent une part de la récolte en grains pour s'affranchir des manipulations monétaires. Ici, sept muids de grain correspond à 840 livres en prenant 10 livres le setier de froment.

(7) Le Châtelet est situé sur la commune de Balazé (Ille-et-Vilaine, cant. Vitré). Le Châtelet fut la propriété des familles Rabaud ou Rabault (en 1248), Sévigné (vers 1355), Guémadeuc, seigneurs de Trévécor (en 1584), de Baud, seigneurs de Saint-Frique, Coccault, sieurs de Chevigné (en 1726), de Volvire (en 1727), Hay, seigneurs des Nétumières (en 1752 et 1789). Le Châtelet est érigé en marquisat en 1682, relevant de la baronnie de Vitré. Le seigneur y possédait un droit de haute justice. On trouve les personnages suivants : Jean Hay et Gillette de Bourgon, sa femme, vivant dans la seconde moitié du XVI e siècle, seigneur et dame du Chastelet ; le 28 octobre 1668, Paul Hay, seigneur du Chastelet et du Vaufleury, et Geneviève Bonneau, sa femme.

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