Corpus Essonnien

Histoire et patrimoine du département de l'Essonne

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L'église Saint-Fiacre de La Ville-du -Bois de 1621 à 1714

Chronique du Vieux Marcoussy –Marcoussis————— _——————————- Novembre 2008

JP. Dagnot

C. Julien

Cette chronique est la seconde partie de l'histoire de l'église Saint-Fiacre de La Ville-du -Bois. Nous avons vu précédemment qu'une chapelle avait été fondée en 1533 après la libéralité de “ très hault et très puissant seigneur ” Messire l'amiral Louis de Graville d'un terrain pour construire un sanctuaire pour servir de succursale à la paroisse de Nozay (*) .

Rappelons au lecteur que les récents documents découverts aux archives, nous ont appris que la chapelle primitive avait été agrandie bien avant les dates données par certains auteurs. Par exemple, ce qui est donné dans la base Mérimée n'est pas exact « cette chapelle…agrandie vers le nord en 1548 », puis « la nef actuelle date de 1691 ». La preuve de ce que nous avançons est fournie par les textes présentés (1).

La chapelle Saint-Fiacre

Nous sommes en 1621, sous le règne de Louis XIII. À cause de la rapide croissance de la population de La Ville-du-Bois, plus de 500 âmes en 1562, il avait fallu agrandir la petite chapelle Saint-Fiacre (2). Défendant leurs intérêts avec une volonté farouche, les habitants de La Ville-du-Bois ont un grand dessein : posséder une église propre au village afin d'éviter de se rendre à Nozay, chef-lieu ancestral de la paroisse. Mais, sous l'Ancien régime, l'indépendance ne s'acquiert pas aussi facilement. Le haut clergé considère, sans doute, que la sécession du spirituel entre Nozay et La Ville-du -Bois n'est pas possible bien que ces deux villages appartiennent à la même seigneurie laïque. Depuis un siècle, la chapelle Saint-Fiacre est construite au prix d'une redevance payée à la fabrique de Nozay pour l'entretien de l'église paroissiale. Le 14 février 1621, une assemblée d'habitants donne procuration aux représentants désignés par la communauté pour régler une dette sur le “ pied de la grande taille ” et affaires de la communauté et faire un emprunt jusqu'à 400 livres tournois.

Quatre jours plus tard, les délégués de La Ville-du-Bois sont présents devant la prévôté de Montlhéry « sont comparus Germain Guignard et Pierre Rousseau, marchands demeurant à la Villeduboys ayant pouvoir des habitans dudit, lesquels ensuivant la signification à eux faite le jour d'hier par Pierre Angot, sergent royal à la requête de Jehan Brethon, laboureur demeurant à Nozay, …. d'une somme de neuf vingts livres que les habitans de la Villeduboys sont obligés de payer aux marguilliers de Nozay pour icelle église conformément au traité de transaction passé par devant Bligny le xvi jour de janvier mil six cens deulx… ».

Comme on peut le voir, c'est une affaire vieille de 20 ans ! Mais les paroissiens de La Ville-du-Bois ne l'entendent pas de cette façon. En 1622, les habitants de La Ville-du-Bois sont assemblés devant l'église du lieu « lesquels en nom collectif, nomment un procureur pour présenter leur requeste tendant à ce qu'il soit ordonné que à l'advenir, il seroit establi à la Ville-du -Bois une paroisse distraite de celle de Nozay et faire les fonctions curialles accoustumées et poursuivre le procès entre les deux communautés ». La colère gronde !

La pression est forte et une nouvelle réunion est organisée en 1623 en présence de Monsieur le curé de Nozay « furent présents en leurs personnes, vénérable et discrète personne Messire Charles Patoillat, prestre curé de Nozay et Ville-du-Bois » et des délégués des habitants de La Ville-du-Bois « eulx faisant fort pour le tout du corps des habittans dudit lieu d'autre part, lesquels de leur bon gré promettent de faire accord, c'est à savoir que le sieur Patoillat à présent pourvu du bénéfice de la cure dudit Nozay et Ville-du-Bois, juge salutaire de faire la paix et concorde avec les voisins cy présents, comme estant le commung pasteur des habittans dudit Nozay et Ville-du-Bois avec lesquels il doit journellement discuter et debattre par les habitans de Ville-du-Bois du payement de la fondation de la cure dudit Nozay …». Encore une fois, c'est la dette due à la fabrique et au curé de Nozay qui est en jeu. C'est alors que le prêtre de Nozay devient très imprudent « accorde audits habittans soulz le bon plaisir de Monseigneur Archevesque de Paris que la chapelle de ladite Villedubois, annexe dudit Nozay soit érigée et establie en cure paroisse pour estre distraite et séparée envers l'église de Nozay du payement de la somme de quinze livres de rente annuelle… et de payer un gros au curé ». L'avenir montrera qu'il n'en fut rien.

Une pierre placée « à côté gauche du chœur », selon Lebeuf, aujourd'hui près de l'entrée principale à main gauche, marque qu'une relique de Monsieur Saint-Fiacre avait été donnée, en 1629, par les religieux de Longjumeau à Dom Jacques Thiercelin, curé de Noset (3). Plus tard, la relique, mâchoire de Saint-Fiacre fut déposée dans une châsse en cuivre doré payée 500 livres chez Lavache à Paris.

La construction du clocher

Nous arrivons à l'époque où la France était gouvernée par Mazarin et le seigneur de Marcoussis était « hault et puissant seigneur messire Léon de Balsac d'Illiers » qui avait pris parti pour le cardinal contre les princes du sang, chefs de la Fronde. Le 10 décembre 1644, Léon de Balsac, demeurant ordinairement audit Malherbes, estant de présent en son hostel faubourg Saint-Germain-des-Prez les Paris , lequel désirant et tout son pouvoir accroistre la gloire de Dieu en toutes ses seigneuries a déclaré et déclare par ces présentes que « de son adveu et consentement le sieur Laurent à faire bastir une chapelle à l'aisle gauche du choeur de l'église de la Villedubois pour y faire célébrer la saincte messe et se retirer avec sa famille pendant la célébration du service divin… ». Un nouvel agrandissement est donc projeté, mais cette fois au seul profit du seigneur se considérant comme le digne successeur de son ancêtre « messire l'admiral ». Ledit seigneur a déclaré avoir agréable la construction de chapelle en qualité de seigneur fondateur de ladite église et de seigneur hault justicier de ladite paroisse. « Consentant ledit seigneur autan qu'a luy est que le sieur Laurent et ses successeurs jouissent de ladite chapelle en y entendant le service divin à condition touteffois que lors qu'il plaira audit seigneur ou ses successeurs seigneurs de ladite ville du bois d'aller entendre la messe en ladite église, le sieur Laurent et ses successeurs seront tenus de cedder la place dans ladite chapelle ».

N'ayant pas encore continué, l'histoire de la “Grand Maison” , précisons que le sieur Laurent est le personnage qui a repris la propriété des filles Paré.

Certainement encouragés par les donations pieuses du “ seigneur haut justicier ”, le marguillier, les représentants actifs et les paroissiens de l'église Monsieur Saint-Fiacre « lesquels ont constaté la nécessité de faire les réparations et augmentations qui conviendront pour la gloire de Dieu » sont réunis en 1646 et décident « de bastir au coeur de ladite église deux arcades de pierre de tailles entre un pillier au milieu d'icelle aussy de pierre de taille, bastir une tour pour mettre les cloches avec grès pierre et chaux, faire fondre et augmenter ladite cloche et lesdits habitans et nommer honorable maistre Jacques Tiercelin, prestre curé de ladite églize et Germain Guignard, marguillier afin de pouvoir de convenir du prix avecq les ouvriers marché des matériaux nécessaires pour faire les dicts ouvrages ». L'acte notarié se poursuit par l'état des travaux et leur règlement. Les élus ont promis de mettre leur bonne volonté d'autant qu'il s'agit de la “ Gloire de Dieu ”. À cette date les habitants engagent le temporel de l'église pour 400 livres tournois.

On remarque ici la richesse de la fabrique de La Ville-du-Bois qui dispose d'un pécule confortable pour engager des travaux considérables, mais également la grande diplomatie par l'implication du curé de Nozay dans cette entreprise. Le marché est passé deux mois après, « Messire Jacques Thiercelin, prestre curé de Nozay et Villedubois, Germain Guignard, marguillier de l'église de Villedubois, Jehan Espinoy, Jehan Froissant, Jehan Bourgeron lesné, Pierre Bucher et Denis Blondeau, habitans dudit lieu, estant chargés de représenter les autres habitans de la paroisse Monsieur Saint Fiacre de la Villedubois ; il s'agit du marché de construction des ouvrages de massonnerie et autres, c'est à savoir que ledit Pierre Fiche masson demeurant à Juvisy sur Orge s'oblige à édiffier de neuf et de fond en comble une tour carrée pour servir de clocher proche et attenant à ladite église » .

Le contrat passé avec le maçon de Juvisy nous décrit précisément l'œuvre « ledit Fiche sera tenu de faire des fondations de quatre pieds de largeur jusqu'au rez-de-chaussée de l'église les fondations seront faites jusqu'à la bonne dimension, quatre pouces par dehors et deux pouces par dedans depuis le rez-de-chaussée jusqu'au premier plancher de trois pieds et demy dont y aura trois pouces de fruit, douze pieds de haut du rez-de-chaussée et depuis ledit rebastir depuis le premier plancher jusqu'au second plancher sera de trois thoises de haut, quatre pouces et demy de fruit, retrait de trois pouces et depuis le second plancher jusqu'à l'entablement sera aussy pareillement de trois thoises de hault et quatre pouces et demy de fruit de sorte que deux pieds dudit entablement et de huit thoises depuis le rez-de-chaussée de l'église jusqu'à l'entablement, lesquels murs seront bastir avecq chaux, sable, les encoignures seront bastis en grès fendus dressé et le mieux que faire se pourra avecq coing et charges autour, huit croisées seront faites avecq quartiers de grais, le dedans des murs basti en pierre de mollière, les croisées de neuf pieds de haut et de largeur à la volonté des habitans; l'entablement sera comme celluy du coeur de ladite église; sera tenu ledit masson de …, le bois avecq plastre et mettre dans les murs de fondations de mortier. Le grès sera fourny par les habitans. Le montant du marché est fixé à 1.080 livres , les termes de paiement de 200 livres à chaque niveau ».

L'évolution de l'église Saint-Fiacre de La Ville-du-Bois au XVIIe siècle avec les chapelles de la Sainte Vierge (V), de Sainte-Anne (A) et de Saint-Roch (R).

Les travaux sont commencés, mais six mois plus tard, une assemblée des représentants de l'église Saint-Fiacre « ayant procuration et pouvoir des habitans de la Villedubois » se réunit avec Léonard Gacheny, maçon demeurant à Linois. L'homme est connu pour ses travaux à Bellejamme. Il s'agit du parachèvement de la tour et clocher de ladite église, conformément au contrat de marché passé entre lesdits habitants et Pierre Fiche, maçon de Juvisy. Le fameux “ masson de Juvisy ” n'a pas respecté son contrat, pire il y aurait des malfaçons dans l'œuvre . Il s'agit de « faire et parachever le reste des bastimens et ladite tour daté du 27 juillet à ses frais et despens le reste de la convention duquel contrat ci dessus. Lequel Gacheny sera tenu de faire le parachèvement de six thoises de l'entablement, piqué et passé volle, qu'ils ont commencé de huit pieds, un costé sain… Mathieu Mize voullant sur le cave ( ?) et ledit Gacheny déclarent aux dits habitans qu' à deux pieds du haut de la tour le mortier n'est que du sable dans le corps du mur et n'y ayant auqune liaison et nécessaire de refaire ladite partie du corps du mur ledit Gacheny a promis de refaire le reste de ladite massonnerie qui se trouve mal faicte plus ledit Gacheny de crespir et enduire ladite tour par dehors tous les points renforcés et fait de pierre de taille aussi crespir à l'intérieur… ». Ce marché est fait moyennant la somme de 78 livres.

Le curé Thiercelin n'a jamais vu son clocher fini puisqu'il meurt le 18 janvier 1647 et fut inhumé dans le chœur. Son épitaphe, fixée au second pilier nord, représente le défunt en aube et surplis à genoux devant un prie-Dieu et invoque le Christ mourant sur la croix. L'inscription rappelle le don fait aux marguilliers de 300 livres tournois pour contribuer à la construction du clocher, “çà la charge d'une messe pour chaque vendredi des Quatre-Temps et d'un salut le jour de Pâques”.

À la mi-1647, un additif au marché du clocher nous apprend que Pierre Fiche a abandonné le chantier un an plus tôt, qu'un procès au Châtelet de Paris a eu lieu, que la sentence apportée par les mains de l'huissier du roy, Bassonnet au profit des plaignants d'un montant de 80 livres , sera allouée à Léonard Gacheny, masson connu à Beljambe , pour terminer les travaux. Il est fait mention des paiements et d'une somme de 1.088 livres pour décharge des termes du contrat.

Nous venons donc de voir que le clocher fut construit « au cœur de l'église », cela signifie bien que la nef est déjà la prolongation de la chapelle primitive, de plus « deux arcades de pierre de tailles entre un pillier au milieu d'icelle » sont prévues. Il n'y a donc jamais eu de percement ultérieur sous la tour du clocher.

Les paroissiens du XVIIe siècle

Nous reviendrons, dans une chronique ultérieure, sur la vie des habitants de La Ville-du-Bois sous le règne de Louis XIV. Comme partout ailleurs dans le Bassin parisien, la vie des urbisylvains est rythmée par une explosion démographie et une surmortalité infantile. Une épidémie dévastatrice sévit à La Ville-du-Bois à la fin de l'été 1626. À chaque inhumation, le curé écrit « mort à cause de contagion » ; on a compté jusqu'à un enterrement journalier pendant la première quinzaine de septembre. À cause des redevances à la fabrique de Nozay, un différend reprend entre le curé et les habitants le 20 mars 1657.

De 1664 à 1698, nous trouvons les frères Jean et Julien Martin faisant des donations pieuses afin d'être inhumés dans l'église. Tout d'abord, en 1664, c'est Julien Martin et Jeanne Froissant, sa femme, qui donnent un calice et deux burettes d'une valeur de 300 livres pour la fondation de quatre messes. Le 10 février 1669, Jullien Martin, vigneron, déclare qu'il a offert un calice et deux barrettes en 1664, puis avec son frère Jean cèdent une rente de 6 livres à prendre sur Claude Massy. Enfin Jean Martin et Jeanne Munier, sa femme, donnent 4 livres de rente en 1698 pour la fondation de deux messes basses.

Attaché à un autre acte décrit ci-après une note datée du 18 août 1675, de Léon de Balsac précise que Monsieur Guérin avait fondé « une chapelle dans l'église de Villedubois, qu'il en avait perdu le titre et qu'il voullait en passer un autre; que vous l'aviez remis à m'en parler et s'il n'y a pas d'autre difficulté que celle la et qu'il soit fondée en 1675 ». Ensuite, un acte du marguillier et des représentants des habitants mentionne une somme de 200 livres que « le sieur Guérin, conseiller du roy controlleur et consignateur des aydes de France, a promis pour une cloche ».

À nouveau, nous voyons le 1er mai 1681, le conflit avec le curé de Nozay. François Josse, notaire de Montlhéry, est présent devant la principale porte de l'église Saint-Fiacre, sur le « réquisitoire des habitans de la Villedubois , à l'issue de la messe chantée et célébrée, au son de la cloche de la manière accoutumée, le sieur curé se plaignant du non paiement des fondations et des obits, les habitans lui rappellent ses fonctions… ».

Nouvelle extension de l'église

Nous arrivons en 1698. Un nouvel acte est signé en juillet par les habitants. Il s'agit d'une réparation de l'église avec droit de poursuivre la construction dès qu'il y aura des fonds, l'extension et la fin de l'aile. Bien que cette fin du XVIIe siècle soit une période de crise, la pression démographique de La Ville-du -Bois se fait sentir sur la manque de place dans l'église.

Les habitants de La Ville-du -Bois par le biais de Michel Cossonet, procureur syndic, sont assemblés « pour aviser entre eux sur ce qui est nécessaire à faire pour le rétablissement du bastimen d'icelle église, continuer l'aisle du coté de l'évangile près des bornes de terrain appartenant à ladite église ». Il s'agit du bas-côté nord où se trouvent actuellement les fonts baptismaux. Ainsi, nous connaissons les habitants présents « Aujourd'hui daté des présentes, à la réquisition de Michel Cossonnet, procureur sindic de la paroisse de la Villedubois et de tous les habitants dudit lieu cy après nommés, comparurent en personne par devant le notaire à Montlhéry, scavoir Claude Bourgeron, Claude Rathuy, Michel Goix, Nicolas Mazalon, Fiacre Goix, Denis Martin, Pierre Buchère, Jean Martin, Fiacre Dauphin, Jean Petit, Henri Robin l'aîné, Henry Robin le jeune, Jean Cossonnet, Jean Simoy, tous habitans et paroissiens de la paroisse dudit Villedubois, assemblés au son de la cloche en la manière accoutumée au devant de l'église dudit lieu »

Dans ce document nous apprenons que le terrain est prévu pour l'agrandissement et que des réparations sont indispensables « lequel bastiment estant desfectueux, menaçant ruines ainsi que les murs du mesme costé et celui du costé de l'épîtrre en la nef qu'il convient visiter que sy besoin est restablir et le rehausser à la hauteur qui sera prise sur celui qui sera fait à neuf à l'oposite, la couverture ainsi que la charpente estant endommagée par les eaux pluvialles ». Prudents, le procureur et les marguilliers avaient plaidé leur cause auprès du seigneur, le marquis d'Entragues, pour « cette continuation d'aisle, rétablissement et pressantes réparations, lesdits habitants en ayant conféré à Monsieur Monseigneur d'Entragues seigneur dudit lieu et en ayant reconnu la nécessité, veut bien y contribuer par ses charitables soings et libéralités et après avoir meurement considéré le déperrissement du comble en ladite église et la nécessité d'accroître icelle pour leur commodité ».

Ainsi, les travaux sont décidés et le curé désigne les habitants en charge de ceux-ci « ont en la présence de vénérable personne Messire Pierre Chantreau, prestre, docteur de Sorbonne, curé de Nozay et dudit Villedubois, donné et donne par ces présentes pouvoir en nom collectif à Germain Froissant, marguillier en charge, Claude Bourgeron, Jean Petit, Jean Cossonnet anciens marguilliers de ladite église, de faire faire lesdites pressantes réparations construction d' aisle susdéclarée, à cette fin faire les marchez desdits ouvrages, au pied du devis quy sera fait, acheter toute les matheriaulx à ce nécessaire, payer l'entrepreneur dans le temps terme et delay, qui seront pris par lesdits marchés jusqu'à la somme de huit à neuf cent livres deubs à ladite fabrique par les débiteurs dicelle fabrique. Aux fins de quoy lesdits habitans audits noms donnent pouvoir par ces présentes de poursuivre et faire payer instamment iceulx débiteurs ». Jusqu'au temps qui sera trouvé un fond pour allonger icelle église jusqu'aux bornes qui sont plantées. Les clauses d'usage sont bien portées en fin d'acte, car les habitants de La Ville-du -Bois protègent jalousement les droits acquis depuis près de deux siècles « ladite église dont lesdits habitans se réserveront pour ladite église les droits qui lui appartiennent ».

Deux après, il ne manque plus que l'horloge. A la réquisition de Michel Cossonnet et Henri Dauphin, marguilliers, les notables, faisant la plus grande et saine partie des habitants, examinent le devis de Nicolas Coignet, maître horloger à Paris , paroisse Saint-Germain le Viel, « pour fournir à ladite église une orloge sonnante et trébuchante, garantie quatre ans, posée au clocher ». Ils donnent pouvoir pour passer le marché « d'une orloge de fer de trois pieds de long sur deux pieds et demi de large garnye de toutes ses roues de sonner et servir promet garantie de quatre années ».

Un différend éclate en 1693, entre le curé et le vicaire pour les offices à servir à Nozay et La Ville-du -Bois. En cette fin de siècle, nous trouvons également des chicanes entre “ personnes de petite noblesse ”. Lors de l'assemblée des habitants de La Ville-du-Bois du 18 octobre 1693, Elisabeth, veuve de feu Michel Ménager, escuier , sieur de Grand-Maison , et Catherine Ménager, fille majeure, consentent à abandonner à ladite église leur droit de chapelle où elles se mettent présentement contre un autre emplacement. En 1698, au mandement de Messire Claude Erard, ancien avocat en Parlement, demeurant en la ville de Paris, rue du Foin, paroisse Saint-Severin, les marguilliers sont appelés comme arbitres « nous nous sommes transportés en la maison presbitéralle de l'église Saint-Fiacre au sujet : la damoiselle Elisabeth Pullas, veufve du sieur Ménager de Grandmaison a fait signifier audit sieur Erard un acte par lequel elle se plaint qu'en conséquence de la concession à luy faite de la chapelle qu'il a fait clhore… ». Ce dernier va incessamment être titulaire du fief de Beaulieu, la veuve de Grand maison ne l'est pas!

La même année, Jean Martin vigneron, et Anne De Simoy, sa femme, donnent une rente à l'oeuvre et fabrique Saint-Fiacre, « soit quatre livres de rente perpétuelle aux charges de faire célébrer à perpétuité en ladite église une messe basse, obit de requiem le jour de la saint Roch et une autre à la sainte Reyne, sur la sépulture du fondateur le tout pour le repos de Jean Martin et Jeanne Munier, sa femme, parents desdits ci dessus et faire une épitaphe au droit de la sépulture de Julien Martin ».

Les démêlés du sieur Claude Erard

Depuis 1677, un notable était arrivé à La Ville-du -Bois, en la personne de “ noble homme Claude Erard ” qui possédait une charge anoblissante, celle de parlementaire. L'avocat vient d'acheter la maison de Beaulieu qui fut érigée en fief, en 1698, par Léon d'Illiers de Balsac, marquis d'Entragues et seigneur de Marcoussis et La Ville-du -Bois pour « l'estime et l'amitié particulière qu'il a pour luy et reconnoitre les services qu'il luy a rendu dans ses affaires » prétend le seigneur, mais plutôt pour des considérations pécuniaires (cf. “ Le fief de Beaulieu ” ).

Les bonnes relations entre le seigneur de Marcoussis et son vassal furent d'autant plus excellentes que le marquis d'Entragues, vivant à la Cour du roi Soleil, était rarement à Marcoussis et pratiquement jamais à La Ville-du-Bois. La situation changea quand Alexandre de Balsac, le fils aîné de Léon, hérita de la seigneurie. En tant que seigneur haut justicier, le marquis avait la place honorifique dans toutes les églises et chapelles de sa seigneurie, c'est-à-dire qu'il en avait le premier rang protocolaire. Au fil du temps, le sieur Erard avait pris de l'assurance et rêvant de « devenir le maître de La Ville-du -Bois », faisait des libéralités à la fabrique mais aussi imposait son autorité sur les villageois.

Soudain, en 1715, la situation étant devenue complexe à La Ville-du-Bois, un contentieux est porté par les habitants de La Ville-du-Bois devant la prévôté de Montlhéry, différend pour lequel le seigneur de Marcoussis intervient pour défendre ses prérogatives de seigneur haut justicier à La Ville-du-Bois contre la dame Richer, veuve Erard. Profitant, de cette querelle entre le « hault et puissant » seigneur et la veuve d'un robin fraîchement anobli, les habitants de La Ville-du-Bois prennent une sorte de revanche sur un homme qui les avait mal traités.

Reprenons les évènements qui commencèrent au cours de la dernière décennie du siècle. En 1691, le curé de Nozay-Ville-du-Bois « et la plus saine partie des habitans de Villedubois , ont accordé à Messire Claude Érard, advocat à la cour de parlement de Paris, demeurant rue Cristine, paroisse Saint-André-des-Arts, à présent en sa maison audit Villedubois, une place dans la nef prosche au long du ballustre, moyennant 100 livres pour la fabrique » pour aider à la construction des bâtiments que les habitants ont entrepris. Il promet également de faire une chapelle. Il s'agit du sieur de Beaulieu qui n'a pas encore réussi à transformer ses biens en fief, mais souhaite affirmer sa position de notable. Le 21 octobre 1691 le curé et les habitants concèdent une chapelle sous l'invocation de saint Roch « et par ledit contrat il est dit qu'en cas que la maison du sieur Erard scise audit Villedubois passe dans une autre famille, les nouveaux propriétaires seront tenus pour se maintenir en la propriété, jouissance de ladite chapelle en donner une reconnaissance honnête à l'église ».

Depuis 1693, le sieur Erard possédait une autre chapelle appelée de sainte Anne qui « appartenoit cy devant au sieur Guérin, propriétaire d'une maison scise audit Villedubois, laquelle depuis appartient au sieur Baudouin [secrétaire du Roy] et ensuite à la dame Pottier qui a vendu audit sieur Erard ladite maison avec le droit de chapelle. Il est à remarquer que ny le sieur Baudouin, ny la demoiselle Pottier n'ont point reconnû l'église pour le droit de la chapelle Sainte Anne, en sorte que sur ce défaut de reconnaissance, on croit que les habitants et les marguilliers avoient été bien fondés à contester audit sieur Erard le droit de ladite chapelle qui étoit reconnüe au profit de la fabrique, d'autant que ledit sieur Baudouin et ladite Pottier n'avoient pas plus de droit pour ladite chapelle Sainte Anne, qu'en avoient aujourd'hui pour la chapelle saint-Roch ceux qui acheteroient la maison du sieur Erard. Mais comme le sieur Erard avoit assez d'autorité dans La Villedubois personne ne luy a contesté ce droit, et il a joüi de ladite chapelle depuis 1693 qu'il a acquis la maison dudit Guérin jusqu'en 1698 » (4).

Ainsi, en 1698, le propriétaire du fief de Beaulieu possède « deux chapelles dans ladite église de la Villedubois adossées contre le balustre du chœur » ; ce sont les chapelles sainte Anne et saint Roch. En principe, les droits de chapelle étaient éteints, car il n'avait pas été fait de titre nouvel à la fabrique lors des mutations. Notons que la chapelle de la Sainte Vierge appartenait au seigneur de Marcoussis.

Puis, Claude Erard abandonne ses deux chapelles, il prétend être généreux avec la fabrique pour, dit-il, « ne plus encombrer la nef de cette sorte », mais en réalité il prend la chapelle de la Sainte Vierge du seigneur, ce qui lui donne le premier rang dans l'église de La Ville-du-Bois. On pourrait dire “le calife à la place du calife”. « En ladite année 1698, le sieur Erard voyant que les seigneurs marquis d'Entragues ne venoient point à la Villedubois , et que la chapelle de la Vierge étoit vacante, il en eut envie et pour [accomplir] son dessein il persuada aux sieurs curé, marguilliers et habitants qu'il vouloit ces deux chapelles, cela aggrandiroit leur nef [pour rendre] leur église plus belle, plus commode , pour cela que [les persuada pour qu'ils] vouloient luy donner la chapelle de la Vierge , …, et fit deux chapelles, ce qui fut fait par acte passé devant Fontaine, notaire audit Montlhéry. Le sieur Erard leur abandonna et fit deux chapelles qu'il leur permit d'abattre et de démolir ». L'acte signé le 1er avril 1698 est la transaction avec Erard au sujet des deux chapelles, en échange, celui-ci demande un banc pour ses six domestiques et fait la donation d'une lampe avec rente de 20 livres assise sur une maison. « En exécution de ce contrat d'échange, le sieur Erard et la veuve après luy ont toujours joüi de la chapelle de la Vierge jusqu'en la présente année ».

Comme de coutume, l'acte notarié est fait et passé à La Ville-du -Bois « à l'issue de la messe de paroisse ditte en cette église au son de la cloche en la manière accoutumée et au devant d'icelle église l'an 1698, le mercredy premier jour d'avril, heure de midy en présence de Jacques du Tombue, de Jacques Fontaine, clerc demeurant à Montlhéry et Letenamin qui ont avec lesdits curé, marguilliers et habitants et sieur et dame Erard et notaires signé en la minutte des présentes et quand au-delà Henry Robin, Jean Robin, Joscelin Query, Billebault, Marc Guignard, Germain Cousin, Jean Petit, Vincent Carré, Fiacre Dauphin, Jean Martin, Jean Rousseau, Martin Rousseau, Pierre et Simon Gallien et Denis Peuvrier ont déclaré ne sçavoir écrire ni signer de ce interpellés et quant comme les habitants ont signés ».

Le sieur Claude Erard, avocat au Parlement, avait pris de l'assurance en possédant le fief de Beaulieu, fraîchement anobli, il se comportait maintenant comme le seigneur de La Ville-du-Bois qu'il n'était pas. Des évènements nouveaux survinrent, le marquis Léon de Balsac d'Illiers, son protecteur, étant mort en 1702, son second fils hérita de la terre et seigneurie de Marcoussis. Le nouveau marquis d'Entragues avait épousé Louise-Philiberte de Xaintrailles, veuve de Cloviadus de Choiseul, qui apportait une dot de 120.000 livres . Les noces célébrées en 1707 furent un mariage commun en biens avec liquidation les dettes antérieures sur les biens personnels antérieurs.

La situation financière étant catastrophique, le marquis est poursuivi par les dettes des ses ancêtres, la dame de Marcoussis demanda la séparation de biens qu'elle obtint par la sentence de 1710. Louise-Philberthe vit à Marcoussis avec son oncle qui décède en 1713. En 1714, Louise déjà séparée en biens gère maintenant les biens du couple. Elle allouera, chaque trimestre, une pension alimentaire à son mari !!!

Le 25 juillet 1714, Louise-Philberthe de Xaintrailles, envoie Blondeau, le notaire du baillage, à dix heures du matin, à l'issue de la messe, en l'église de la Ville-du -Bois pour constater que le garde-chasse, Guérin, mandaté par la dite Dame, « a fait remarquer que la dame Evrard, bourgeoise de Paris, s'étoit mise en la place destinée pour le seigneur et la dame d'Entragues, au devant de l'autel de la très Sainte Vierge, ceci malgré les avertissement dudit Guérin, pour servir et faire valloir ce que de raison ». C'est un différend de préséance entre une “ bourgeoise ” et la “ très haute et très puissante dame de Marcoussis ”, épouse du seigneur Alexandre de Balsac, marquis d'Entragues. Nous sommes bien loin des bonnes relations qui existaient entre le marquis d'Entragues et le sieur Erard.

Cette fois, la chicane va conduire à un procès devant la prévôté de Montlhéry. C'est la suite que nous réservons à la prochaine Chronique.

Remerciements à Pascal Herbert pour sa contribution à la transcription d'un acte ardu.

À suivre … (**)

Notes

(1) Dans la première partie, nous avons vu que la nef de la chapelle Saint-Fiacre avait été construite avant 1615, dans laquelle de nombreuses inhumations eurent lieu au début du XVIIe siècle.

(2) Dans la requête adressée à l'official de Paris, le 21 mars 1562, les paroissiens de La Ville-du-Bois déclarent « que lesdits supplians sont en nombre de cent feux pour le moings », c'est-à-dire qu'il y avait plus de 500 habitants.

(3) Pierre de 70 x 65 cm . Inscription rapportée par Guilhermy [ Inscriptions de la France du Ve siècle au XVIIIe siècle. Ancien diocèse de Paris , Impr. Nat., Paris, 1875].

(4) Par ce document, nous apprenons donc que la fabrique avait rang de seigneurie puisqu'elle possédait dans biens fonciers et des droits de l'église paroissiale pour lesquels les preneurs devaient passer titre nouvel.

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