Corpus Essonnien

Histoire et patrimoine du département de l'Essonne

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Montlhéry chez les auteurs après l'abbé Lebeuf

Chronique du Vieux Marcoussy –Marcoussis————— _——————————_—– Avril 2009

“ Rendre à chacun selon ses oeuvres ” (Imitation, liv. III, chap. XXXVI, verset 3e).

C. Julien

JP. Dagnot

Depuis le très populaire ouvrage de l'abbé Jean Lebeuf qui écrivit son “ Histoire de tout le diocèse de Paris ” au milieu du XVIIIe siècle, de nombreux auteurs, historiens ou géographes, se sont essayés à donner les antiquités de Montlhéry avec une image plus récente. Publié en 1757, le volume V de Lebeuf contient la suite des paroisses du doyenné de Montlhéry, avec un détail circonstancié de chaque territoire, et le dénombrement de toutes ceux qui y sont compris, ensemble quelques remarques sur le temporel desdits lieux (1).

Les historiens sérieux ont, pour décrire l'histoire de Montlhéry, eu recours au pilier de la chronologie historique « L'Art de Vérifier les Dates des Faits Historiques » produit par un religieux bénédictin de la congrégation de Saint-Maur (2). La lecture de cette “véritable Bible” historique est édifiante car on s'aperçoit que bon nombre d'auteurs se sont contentés de faire ce qu'on appelle de nos jours “copier-coller”. Cela prouverait le sérieux de l'ouvrage; d'autres auraient mieux fait de s'en inspirer. Ainsi, nous suivons la filiation des « sires ou chastelains de Montlhéri » depuis Thibaut « Filans stupas » dont Duchesne le nomme « par conjecture second fils de Bouchard II de Montmorenci », jusqu'à Elisabeth pour la branche aîné et Agnès de Garlande pour la branche cadette.

Dans cette chronique, nous nous proposons de donner une liste non exhaustive des auteurs qui ont parlé de Montlhéry après Lebeuf. Ses successeurs sont des historiens ou géographes vivant au XIXe siècle. Dans une chronique précédente, nous avions présenté le texte intégral de Millin, qui, après être venu visiter la ville et le château, présenta en décembre 1790 un mémoire sur les Antiquités de Montlhéry devant l'Assemblée nationale. Il convient d'être sélectif dans la lecture de ces ouvrages qui contiennent des erreurs, en général dues à l'imagination de l'auteur.

Montlhéry par Dulaure

Jacques-Antoine Dulaure consacre 42 pages à l'histoire de Montlhéry, ce qui forme le chapitre VI du septième tome de son œuvre « Histoire des Environs de Paris » (3). L'ouvrage publié en 1828, donc dédigé sous la Restauration , n'a rien de fracassant. Il commence ainsi « petite ville située à six lieues et au sud de Paris, et près de la grande route de cette capitale à Orléans, son nom varie avec le temps, on le trouve écrit Mons-Letherieus, Mons-le-Hericus ou Monsel-Hericus » sans préciser l'origine du toponyme. Aussi surprenant qu'il soit, l'auteur prend le parti d'écrire Mont-le-Héry alors que Lebeuf donne en 1757 le nom de la ville d'un seul tenant.

L'auteur avait connaissance de l'œuvre de Lebeuf et ne s'en cachait pas. Il cite le célèbre abbé à plusieurs reprises, notamment à propos des chicanes ecclésiastiques entre les chanoines de Montlhéry et les bénédictins de Longpont. Notons que Guy Troussel devient Guy de Trousselle sous sa plume.

Par contre, Dulaure fait quelques entorses à l'histoire. Lors de la bataille de Montlhéry, il nomme le challenger du roi Louis XI comme « le comte Jean de Charolais, fils du duc de Bourgogne ». Il ne s'agit pas de Jean, mais de Charles, devenu lui-même duc de Bourgogne à la mort de son père Philippe III le Bon, qui « mérita bien son surnom de Téméraire » dit Antonin Roche.

Après avoir emprunté à Suger, puis à Duchesne et à Commines, Dulaure nous entraîne dans les fantasmes des souterrains de Montlhéry qui relient le château au bas de la montagne. Et d'ajouter « il se trouvait dans presque toutes les anciennes forteresses de pareils conduits souterrains : c'était un moyen d'évasion que se ménageaient les hauts seigneurs, en cas de défaite… ». Sans compter que cette hypothèse est impossible géologiquement : le château est construit sur un rocher, un banc de grès, qui ne permet pas de telles constructions, seule une cave avait été pratiquée dans la roche (4). Puis de poursuivre « L'abbé Lebeuf dit que son ouverture fut bouchée en 1757 ; et l'on m'apprend qu'elle l'a été encore en 1804, par le maire de Mont-le-Héry ».

L'auteur finit par « Le nombre des habitans de Mont-le-Héry va toujours croissant; en 1737, on l'évaluait à 1.093 puis à 1.100 ; on voit, le fait est remarquable, ce nombre s'élever aujourd'hui à 1.386. Sur la plate-forme ou esplanade où s'élève la tour de Mont-le-Héry, on a construit depuis quelques années, lors de la guerre en Espagne, un télégraphe qui fait partie de la ligne télégraphique qui communique de Paris à Bayonne… Il s'y tient quatre foires par an, les derniers lundis des mois de janvier, avril, juillet et octobre, et un marché très-considérable le lundi de chaque semaine. Le bureau de poste est à Linas. Le territoire des environs est en labours et en vignes ».

Il est certain que Dulaure vint visiter Montlhéry car il fait une description très précise de la tour et des ruines. Il avait rencontré M. Payen, docteur en médecine qui lui avait communiqué des mesures « on voit sur une longueur d'environ cent pieds, ce mur [d'enceinte] resté presqu'intact et il s'élève à seize pieds au dessus du sol de la plate-forme ». Dulaure émet un doute sur la date 1015 de construction de la porte Baudry. On pourrait reprocher à Dulaure d'être un peu brouillon et de passer du XIIe siècle au XVIe, puis revenir au XIIIe siècle. Toutefois, l'auteur apporte des éléments qui avaient échappé à Lebeuf.

Les séjours royaux

Dans un volume publié en 1888 par la Société Historique et Archéologique du Gâtinais (Libr. A. Picard à Paris), Eugène Thoison livra un document intitulé « Les séjours des Rois de France dans le Gâtinais », dans le quel il cite les visites et séjours à Montlhéry dont « on connaît trop, pour que nous en parlions sommairement le célèbre château. Il a été le sujet de plusieurs travaux, et sa tour, l'occasion de bien des dessins. Nous ne rapellerons que celui de Chastillon, pl. 12 ». Voici la liste des rois : - Philippe 1 er , 1105. - Louis VI, 1108. - Louis VII, 1er août 1144 et 14 avril 1145. - Philippe II, 1er novembre 1182, 16 avril 1183, décembre 1195, décembre 1205. - Louis IX, décembre 1227, mai 1257. « Et le saint roi me conta que ni lui ni sa mère, qui étaient à Montlhéri, n'osèrent revenir à Paris jusques à tant que les habitants de Paris les vinrent quérir en armes » (Mémoires de Joinville). Guillaume de Nangis dit que le roi était à Chastres (Arpajon). - Philippe VI, 5 octobre 1343. - Jean II, février et novembre 1356. - Louis XI, 25 septembre 1461, 19 août 1463, 16 juillet 1465. - Charles VIII, 29 février 1488. - Henri IV, 29 mars 1590. D'après l'auteur, s'appuyant sur des manuscrits de la B.N ., ce roi était de passage à Linas les 3 et 4 novembre 1589 et le 31 mars 1590.

Nous apprenons encore que le roi Henri II séjourna à Leuville le 20 août 1550 et que Louis XIII résida deux fois à Linas, le 7 mai 1619 et le 27 janvier 1622. Le journal d'Héroard mentionne « Le roi soupe et couche ». Le 2 juin 1626 il était à Ollainville dans le château de sa tante Catherine. Il séjourna à Marolles-en-Hurepoix du 10 au 12 mai 1627.

Les historiens du XIXe siècle

La littérature est riche de l'histoire féodale de Montlhéry. Tous les textes sont tirés de la Chronique de Saint-Denis et de la biographie de l'abbé Suger « Vita Ludovici grossi regis », la vie du roi Louis VI le Gros (5). Dans sa « Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France » publié en 1825 chez le libraire Jean-Louis Brière à Paris, François Guizot donne la vie de Louis VI le Gros et relate au chapitre VIII (page 21) les démêlés du roi avec les occupants du château de Montlhéry. « C'était par ces preuves de valeur, et d'autres encore … Ainsi, par exemple, Gui de Truxel (sic), fils de Milon de Montlhéry , homme remuant et troublant le royaume ». L'auteur ne fait que donner une traduction plus ou moins approchée de la biographie de Suger, célèbre abbé de Saint-Denis. Puis, au chapitre XVII (page 70), l'auteur raconte « comment le roi Louis enleva son frère Philippe et malgré sa résistance, les châteaux de Mantes et de Montlhéry ».

Pour de nombreux chercheurs du XIXe siècle, Montlhéry est étroitement associé à la maturité politique de Suger vers 1105 (6). Antoine de Genoude , auteur d'une « Histoire de France » publiée en 1845 par la librairie de Perrodil à Paris prétend (page 374) que c'est à cause de l'affaire du mariage de la fille de Guy Troussel avec Philippe de Mantes, bâtard du roi Philippe et de Bertrade de Montfort que Suger entra au service du roi. L'abbé Adam appelé dans le conseil où l'on devait délibérer sur cette proposition, se fit remplacer par Suger; ce fut celui-ci qui, quoique encore jeune, ouvrit l'avis qui fut adopté avec l'argument que si l'alliance était utile au roi, elle était nécessaire au comte de Montlhéry qui craignait de mourir en laissant sa fille sans défense.

Différentes versions existent sur la suite que donna Louis VI à son demi-frère Philippe. Pour certains, ce dernier finit ses jours en prison, pour d'autres comme Jean-Charles Simonde de Sismondi , auteur d'une « Histoire de Français » publiée en 1836 chez l'éditeur Dumont à Bruxelles, le roi fit simplement, en toute sérénité « un échange avec son frère auquel il donna en apanage la ville et le comté de Mantes sur la frontière avec les Normands, tandis qu'il réunit à son domaine le château de Montlhéry, et qu'il eut soin d'y tenir dès lors garnison ». [il convient de corriger que Philippe reçut Mantes des mains des son père et non de son frère].

Dans son « Histoire de France » publiée en 1864 chez la librairie Hachette à Paris, Victor Duruy expose la société féodale au XIe siècle en présentant une gravure du château de Montlhéry pour illustrer les relations entre vassaux et le prototype de château féodal « C'était en général d'énormes édifices ronds ou carrés, placés sur des hauteurs, pour voir de loin, massifs, sans architecture ni ornements, et percés à peine de quelques meurtrières d'où sortaient les flèches, et ayant parfois, comme celui de Montlhéry, cinq enceintes se dominant l'une l'autre… ». Une gravure (page 228) illustre le propos de l'historien. On y découvre l'église Saint-Laurent à gauche de la porte principale, mais également des coupoles et un style qui, plutôt, préfigure “Disneyland”.

D'autres historiens comme Gaillardin auteur d'une « Histoire du Moyen Âge » (1843) et Louis-François Villeneuve-Bargemont parlent de Montlhéry. Ce dernier, dans son « Histoire de Saint-Louis » donne une pièce justificative (page 395) qui décrit la ville et donne quelques indications sur l'histoire du château « … ce manoir était flanqué de huit autres tours crénelées, de six pieds d'épaisseur. Montlhéry ou Mont-le-Lhérie signifie montée hérissée, rude, difficile ». Encore un fois l'auteur évoque l'entrée du souterrain dans lequel Saint-Louis aurait trouvé refuge avec sa mère. Et encore, les fameux vers du Lutrin de Boileau.

Léon Golzan , auteur d'un spirituel article de la Revue de Paris (n°229, juin 1836) écrit d'une façon assez dédaigneuse « ni haute, ni vieille, ni respectable, ni tachée de sang royal, ni superbe sous un beau ciel » pour parler de la Tour. Publié en 1883 chez Dentu à Paris, Jules Payen est l'auteur d'une « Notice sur Montlhéry », petit opuscule in-12° de 87 pages avec photographie et plan.

La réputation des bourgeois de Montlhéry

Dans l' Histoire des Français des divers états , par Alexis Monteil (7), l'épître XCI évoque un passage sur Montlhéry au XIVe siècle (page 387) : J'arrivai le même soir à Montlhéry. Le fort et redoutable château de ce lieu, bâti sur une haute butte, par Thibault File-Étoupes, domine toute la plaine qui s'étend de Paris à Étampes ; il semble placé au milieu de la campagne comme ces anciens preux qui, montés sur leurs grands chevaux bardés de fer, prenaient position au milieu d'un large chemin, défiant tous ceux qui se présentaient. J'ai bien vu de forts châteaux ; je n'en ai jamais vu d'aussi forts. J'ai bien vu aussi des bourgeois orgueilleux de la puissance de leur seigneur, mais non comme ceux de Montlhéry. À les entendre, le roi n'est roi que depuis qu'il est maître de Montlhéry. Tous les châteaux, tous les seigneurs du pays relèvent de Montlhéry. Il est plus honorable, me disait-on, de payer la rente ici que de la lever ailleurs. Véritablement, j'appris que le droit de bourgeoisie y est très difficile à obtenir et que les habitants de cette ville vendent cher leur antiques et noires maisons .

Le lendemain j'arrivai à Brétigni ; je ne voulais pas m'y arrêter, à cause du mauvais renom de son vin. Cependant la soif me força d'entrer dans une maison où l'on me donna une botte d'un vin que je trouvai, malgré moi, excellent. Le maître de la maison se mit à rire : vous voyez, me dit-il, qu'en dépit du proverbe, le vin de Brétigni n'est pas mauvais. Du reste, ajouta-t-il, notre vin ne fait pas, comme on dit, danser les chèvres. Mais dans ce village nous avons une famille nombreuse, appelée Chèvres, qui a toujours aimé la joie et le vin nouveau, et quand elle danse on dit avec raison que « le vin de Brétigni fait danser les Chèvres ».

Gravures du XIXe siècle. La tour en 1834 ( Le Magasin pittoresque ) et une reconstitution du château ( Histoire de France par Victor Duruy, 1864).

Montlhéry par Malte Brun

Après avoir écrit une histoire complète de Marcoussis, Victor-Adolfe Malte-Brun produisit en 1885 un petit fascicule de 34 pages intitulé « La tour et l'ancien château de Montlhéry: extrait de l'histoire de Montlhéry ». Une note précise « Se vend à Montlhéry chez le gardien de la tour et chez Mme veuve Lepretre ». Dans son tracé très documenté de l'histoire de Montlhéry, il fait bien apparaître les tribulations qu'ont subies tant la ville que le château.

Dans le « Bulletin du bouquiniste » publié par le libraire Auguste Aubry le 1er janvier 1870, Albert Sorel annonce (page 471) la notice historique et archéologique « Montlhéry son château et ses seigneurs » publiée par Malte-Brun. Le critique littéraire commence « Quand nous sommes en présence de ruines séculaires, nous ressentons un véritable plaisir à reconstituer dans notre imagination le passé dont elles nous offrent les vestiges, et ce plaisir s'accroît encore quand à ces ruines viennent se rattacher quelques souvenirs historiques ». Puis, Sorel reprend l'envolée lyrique de Malte-Brun que nous ne résistons pas de donner « La tour de Montlhéry a plus de huit siècles d'existence, et, sans doute elle bravera encore les atteintes des ans. Dernier jalon de la féodalité, sa vue n'évoque plus comme autrefois des pensées de servitude et de souffrance. Ce n'est plus qu'un gigantesque témoin qui marque désormais le chemin que l'humanité a fait dans la voie du progrès et de la liberté ! ». Enfin le critique prend prétexte du panorama depuis la Tour pour évoquer l'incendie de l'Hôtel de Ville au temps de la Commune de Paris.

Un autre géographe, Abel Hugo , présente une notice sur Montlhéry dans la « France pittoresque » publié en 1835 à Paris chez l'éditeur Delloye (page 156) dans laquelle il est dénombré 1.566 habitants. L'auteur donne un extrait du procès-verbal de 1547 sur l'état de la « tour du donjon ».

Dans le « Magasin Pittoresque » de 1834 dirigé par MM. Cazeaux et Charton ( volume broché au prix de 6 fr. vendu aux bureaux d'abonnement, quai des Grands-Augustins à Paris ), un auteur anonyme donne l'histoire de la Tour de Montlhéry. La notice n'est pas originale, reprenant les textes antérieurs avec comme toujours « Boileau montre la Nuit qui, hâtant son retour, déjà de Montlhéry voit la fameuse tour ». Le texte est accompagné d'une gravure du début du XIXe siècle.

Montlhéry dans les “revues touristiques”

Afin de développer le tourisme, « les Environs de Paris » furent publiés en 1855 sous la direction de Charles Nodier chez Paul Boizard à Paris. Hyppolyte Lucas présente un article sur Montlhéry, Longpont, Arpajon et Longjumeau (page 217). C'est une notice qui reprend d'une manière succincte les textes précédents sans modifier les erreurs commises. Ainsi, la cave où Saint-Louis s'était réfugié lors du siège de Montlhéry est devenue un « vaste souterrain ».

Dans sa monographie, imprimée en 1856, intitulée « Les environs de Paris illustrés : itinéraire descriptif et historique », voulant développer le tourisme en empruntant la nouvelle ligne de chemin de fer du P.O., le géographe Adolphe Joanne décrit Montlhéry et ses environs à partir de la « station de Saint-Michel ». Et de préciser que le voyageur trouvera à cette station des voitures de correspondance pour Marcoussis (3 départs par jour, 6 kil. en 45 mn, gratis), et pour Montlhéry par Linas (3 départs par jour, 3 kil. En 20 mn, gratis). L'auteur ajoute quelques morceaux de poésie à son texte : Boileau, La Fontaine. De ce dernier, il cite « Est-ce Montlhéry qu'il faut dire ou Mont-le-Héry ? C'est Montlhéry quand le vers est trop long et Mont-le-Héry quand il est trop court ». Après bien des amabilités, l'auteur finit par « Montlhéry est une petite ville bien bâtie, mais triste. Elle possède un théâtre, de beaux magasins, plusieurs pâtisseries, de beaux cafés, une grande place, etc. On remarque de vieilles sculptures qui ornent la porte de son hospice civil. Son église ne vaut pas une visite : c'est un mélange assez laid de constructions appartenant à diverses époques . L'église de Linas est plus intéressante… ».

Cette monographie semble avoir été utilisée et traduite en langue anglaise par Augustus Hare qui publia son « Days near Paris » en 1887. Toujours à partir de la gare de Saint-Michel-sur-Orge, l'auteur nous entraîne dans une visite de Montlhéry et de Marcoussis avec une illustration intéressante de la porte Baudry.

Dans le Bulletin de la Société de l'Histoire de Paris et de l'Île-de-France de 1879, publié chez Champion à Paris, nous lisons à la rubrique Chronique (page 150) « La célèbre tour de Montlhéry, classée parmi les monuments historiques de la France et qui compte aujourd'hui huit siècles d'existence, va être l'objet de restaurations importantes : il s'agit de remettre la tour dans son état primitif. Dans ce but, la Commission des monuments historiques a alloué une somme de 9.000 frs à laquelle viennent s'ajouter trois autres mille francs votés par la commune de Montlhéry. Les travaux sont commencés depuis quelques jours ; déjà le fossé a été déblayé et les opérations de déblaiement ont mis à découvert les deux piles qui jadis supportaient l'ancien pont-levis ».

Dans « La France pittoresque du Nord » publiée en 1896 par Alexis-Marie Gochet , on peut lire « Montlhéry, sur un affluent de l'Orge, est une ancienne seigneurie dont Héric fut l'un des premiers possesseurs, de là son nom (Mont-le-Héric) ». N'est-ce pas une jolie introduction dans un pur style de la fantaisie ?

En juin1822, le comte Orloff prend prétexte d'écrire à sa cousine Sophie pour produire un « Voyage dans une partie de la France ». Ce sont des lettres descriptives et historiques publiées en 1824 chez le libraire Bossange à Paris. Après avoir changé de chevaux à Bernis, il arrive à Longjumeau « dont la route est plantée de beaux arbres et traverse des champs qui annoncent la fertilité et l'abondance ». Après un commentaire sur Théodore de Bèze, il continue « avant d'arriver à Linas, je passe devant Montlhéry (Mons-Lethericus), petite ville, si riche en souvenirs intéressans. Je vois la tour, seul reste de l'ancien château, qui s'élève sur une montagne, et est aperçue se sept lieues à l'entour… ». Et, Mr le comte nous récite pêle-mêle Boileau, Thibauld Fil-d'Etoupes ( ?), les souterrains, les Bourguignons, mais aussi « la petite chapelle gothique ». Enfin, il donne son point de vue à sa belle cousine « Lorsqu'on voyage, ma belle cousine, il est une sorte de paysage que j'appellerai “historique”, dont les couleurs se lient merveilleusement à celles du paysage “matériel” que l'on parcourt; ce qui forme une succession de tableaux aussi piquans par les contrastes, que brillans et grandioses par leur dessin ».

En 1889, paraît une “ relation de voyage ” écrite par Pégé de Céhel sous le titre « De Paris à Nice en quatre-vingts jours », parodie du fameux roman de Jules Verne. L'auteur commence d'une façon provocante « Ce n'est pas pour les agents de change, pour les banquiers, pour les employés d'administration, que nous publions cette relation de voyage ; ceux qui n'ont qu'un mois de congé… Nos ancêtres voyageaient, aujourd'hui nous nous transportons… ». Il s'agit des tribulations de M. le comte de Mauperth et de madame la comtesse née Jane-Louise d'Astier-Vénard, une adorable blonde de vingt ans sa cadette. Nous retrouvons ce couple faisant halte à Montlhéry le 20 mai où leur cocher Joseph était arrivé de la veille, trouvant une bonne écurie dans une des auberges de la ville. Voici le récit : « Ils montaient aux ruines de la tour ; évoquaient les souvenirs les plus reculés du vieux château ; reconstituaient la bataille de Louis XI et du comte de Charolais et quittant le passé pour le présent, cherchaient à découvrir, à l'ouest, le clocher de l'église de Saint-André-sur-Yvette et le cimetière du village, où reposent, après une vie misérable, les membres de la famille Desgrossous, dont tout Paris avait, plusieurs années auparavant, disséqué avec avidité, pendant toute une semaine, la scandaleuse histoire ». Voilà bien deux énigmes livrées à la sagacité du lecteur !!

En proposant des excursions dans la vallée de l'Orge, Alexis Martin publia en 1896-1897 le troisième volume des « Etapes d'un Touriste en France » ( Éditeur : A. Hennuyer, Paris). Le guide nous conduit, comme toujours depuis la gare de Saint-Michel-sur-Orge, vers les frondaisons de la forêt de Séquigny. « Traversée par des chemins et des sentiers fort bien entretenus et tous tracés en ligne droite la forêt de Séquigny a l'aspect d'un parc immense ». La notice, sur Montlhéry « village d'origine gauloise » (sic), est accompagnée de trois dessins de Deroy. Après avoir donné la classique histoire de Montlhéry, l'auteur se pique d'un lyrisme douteux « au loin flottent les fumées que le soleil argente à midi et empourpre à l'heure de son coucher ; sur tout cela plane un majestueux silence ». Puis, il nous parle d'un coquet café des Ruines, et, construit en 1886, un beau réservoir en maçonnerie qui reçoit les eaux de Linas et alimente Montlhéry (ancien moulin des Suzeaux). La butte devient un « tumulus romain » ( ?) et la ville « un pays de maisons basses et grises autour de l'église de la Sainte-Trinité », mais y est bon et pour cette raison « y voit-on plusieurs institutions de jeunes garçons et de jeunes filles ».

Le « Guide National et Catholique du Voyageur en France » (publié en 1901 par la Maison de la Bonne Presse à Paris) recommande de visiter Longpont et Montlhéry en voyageant avec le tramway Paris-Arpajon. L'auteur du guide commet des erreurs fatales (page 10) « Du tramway, on se rend à l'église par la rue Luisant, la place du Marché, les rues des Juifs et de la Chapelle , la Grande Rue », puis « Eglise romane, due à la comtesse Hodierne de Montlhéry, et dont le roi Robert le Pieux posa la première pierre ». Il y a une confusion totale avec Longpont.

Un bien étrange roman

Sous la plume d' Henri Monin , professeur à la faculté des lettres de Besançon, nous pouvons lire un « Essai de critique antéhistorique » paru en 1861 dans la Revue des Sociétés Savantes des départements , tome VI (Impr. Paul Dupont, Paris). Il s'agit de la succession du roi Louis V d'Outremer et de l'arrivée d'Hugues Capet sur le trône. Voici le texte qu'il n'est pas nécessaire de commenter : « D'après un autre roman, ce même empereur Louis meurt empoisonné par un comte de Champagne qui ose prétendre à la couronne. Il veut en déshériter la fille unique de son suzerain, qui est représentée comme l'héritière légitime. L'ouvrage est du treizième siècle, temps où la succession des femmes aux fiefs et aux trônes était universellement adoptée. La loi salique du quatorzième siècle n'était point encore inventée, et le vieux droit public germanique et romain était entièrement oublié. La princesse, auguste et dernier reste du grand Charles de France et de Saint-Denis, est protégée et sauvée par Hugues Capet, général des bourgeois de Paris, petit-fils, par sa mère, du plus riche boucher de cette ville ; son père était très-pauvre, quoique sire de Baugency et d'une très-bonne et, vieille noblesse. Les conspirateurs s'emparent du palais royal, aujourd'hui Palais-de-Justice. Hugues les y prend d'assaut, et les abat comme des porcs à la boucherie. Ensuite il livre, toujours à la tête de ses bourgeois une grande bataille au parti champenois au pied de la tour de Montlhéry. Puis, il finit par épouser sa reine qui le fait élire roi de France. « Or, dans l'histoire, Hugues Capet n'est bien certainement ni le gendre du dernier roi carlovingien, ni le défenseur de la veuve et de l'orphelin, ni le petit-fils d'un boucher ».

Bibliographie sommaire

• André du Chesne, Les antiquités et recherches des villes, châteaux, places plus remarquables de toute la France , Paris, 1609.

• Abbé Louis du Four de Longuerue, Description historique et géographique de la France ancienne et moderne , Paris, 1719

• Boucher d'Argis, Mémoire historique sur la ville de Montlhéry , dans Mercure de France , juillet 1737.

• Abbé Jean Lebeuf, Histoire du diocèse de Paris , tome X, 1757.

• Aubin-Louis Millin, Antiquités nationales ou recueil de monuments pour servir à l'histoire générale et particulière de l'Empire françois , Paris, 1790.

• Jean Pons Guillaume Viennet, La tour de Montlhéry histoire du XXe siècle: histoire du XXe siècle , Publié par Abel Ledoux, Charles Gosselin, 1833.

• Adolphe Duchalais, Mémoire archéologique sur la Tour de Montlhéry , Lagny, 1850.

• Victor-Adolphe Malte-Brun, Montlhéry, son château et ses seigneurs , Paris, 1870.

• Jules Payen, Notice sur Montlhéry , Paris, 1883.

• Bulletin de la Société de l'histoire de Paris et de l'Ile-de-France , par Société de l'histoire de Paris et de l'Ile-de-France, 1898.

• O. Marchand, Histoire de Montlhéry et de son château , publié par O. Marchand, 1954.

• André Jouanen, Montlhéry, églises et chapelles , dans Essor du canton de Montlhéry , décembre 1976.

• Jeannine Gaugué-Bourdu, Montlhéry sous Henri IV, d'après Claude Chastillon , Bulletin monumental, 1981.

• André Jouanen, Montlhéry: douze siècles d'histoire , ISBN 2905270039, éditions du Soleil Natal, 1985.

La lettre de Louis XI

En 1885, le Bulletin de la Société d'Histoire de France a publié (tome II, page 143) une lettre de Louis XI datée de Montlhéry le 19 août 1463 prouvant que le roi demeurait au château ce jour là (8). C'est à propos d'une demande de 4.750 lt pour l'envoi de renforts au comte de Dunois. « De par le roy. Chiers et bien amez, nous avons presentement ordonné faire asseoir et imposer en nostre pays du Daulphiné la somme de trois mille sept cens cinquante livres tournois, pour emploier au paiement de cinquante hommes d'armes et de cent hommes de pié, que faisons prendre en nostre dit païs du Daulphiné, et tirer devers nostre très chier et amé cousin le conte de Dunois, pour l'execucion d'aucunes entreprinses qu'il a faictes pour le bien de nous et de noz royaume et seigneuries. Et pour ce qu'il est besoing que lesdictes gens de guerre s'en voisent devers nostre dit cousin le plus diligemment que possible sera, par quoy ladicte somme ne pourroit estre levée avant leur partement, nous vous prions bien affecteusement que vous trouviez moien d'avancer icelle somme de IIIm Vic L livres tournois. Et la faites bailler à nostre amé et feal conseillier et trésorier général de nostre dit païs du Daulphiné, Claude Cot, lequel vous baillera l'assignacion d'icelle somme, ainsi assise ou dit païs, laquelle vous pourrez avoir et recouvrer dedens ung mois après ladicte assiete. Et en ce ne vueillez faillir, et vous nous ferez très singulier et agréable plaisir. Donné à Montlehery, le XIXe jour d'aoust. Loys ». Louis XI allait revenir à Montlhéry deux ans plus tard, mais dans des conditions beaucoup plus périlleuses.

Précisons que par délibération du 10 septembre 1463, le consulat ordonna d'abord de remettre à Claude Cot 2.400 lt sur les 3.750 que demandait le roi, puis le 11 septembre 1463, il se ravisa et ordonna que la somme totale de 3.750 lt serait livrée audit Cot en une seule fois.

Les historiens de la Bataille

On ne compte plus le nombre d'historiens qui se sont intéressés à la bataille du mardi 16 juillet 1465 connue sous le titre de « bataille de Montlhéry ». Tous ces textes ont pour sources le récit du chroniqueur Philippe de Commynes et celui de Jean Pierre Panigarola, ambassadeur milanais auprès du roi Louis XI. Dans son « Histoire moderne », Théophile Burette écrit page 21« Des deux côtés l'on se croyait vaincu et l'on se proclamait victorieux ; les deux chefs passaient pour morts … ».

Dans les « Faits mémorables de l'histoire de France » paru en 1844 chez Aubert à Paris, Louis Michelant prétend que la bataille de juillet 1465 amena le roi a préféré « la voie des négociations, les détours de la diplomatie aux hasards de la guerre. La journée de Montlhéry lui donna le droit d'user plus des ressources de l'esprit que des lances de ses hommes d'armes » (page 1464). Son illustrateur, Victor Adam donna une représentation violente de la bataille avec le château de Montlhéry sur la colline au loin.

Urbain Legeay , professeur honoraire de la faculté des lettres de Grenoble, donne également les évènements du 16 juillet 1465 (page 428) dans son « Histoire de Louis XI » publiée en 1874 (9). « La journée de Montlhéry était restée douteuse, mais [le roi] s'y était acquis beaucoup de gloire ». Dans une lettre adressée aux officiers municipaux de Poitiers, on lit « Des Bourguignons, il est mort de quatorze à quinze cents sur-le-champ, et quatre à cinq cents sont prisonniers, et en la chasse ont été perdus ou pris plus de 2.000…. De notre part il n'y a pas que morts, que pris, trois cents. Vrai est que le grand sénéchal de Normandie, duquel Dieu veuille avoir l'âme, y a été tué, dont c'est grand dommag e ». Alors, vérité ou intox ?

D'après Baptiste Capefigue (page 107), il existe encore une miniature de la bataille de Montlhéry. On y voit trois coulevrines ou canons excessivement prolongés ; Montlhéry avec ses petites maisons est sur le devant de la scène ; le roi et les princes confédérés sont en présence. Cette miniature (chronique sur le moulin à vent de Montlhéry de 1849) a été gravée dans le premier volume de Lenglet du Fresnoy (10).

La bataille de Montlhéry imaginée par un dessinateur du XIXe siècle.

Le futur pape à Montlhéry

C'est l'abbé Feret qui, dans Henri IV et l'Eglise Catholique (page 261), narre la rencontre de Montlhéry entre Henri IV et le légat, le cardinal de Florence, organisée par le cardinal Du Perron au mois de juillet 1596 : il s'agissait de recevoir l'absolution du pape après que le roi ait abjuré la religion protestante à Mantes, le 25 juillet 1593 (11). « Montlhéry fut choisi à cet effet. C'était là que Du Perron devait attendre le légat et le roi lui faire visite. Mais comme le légat approchait, on expédia de suite un courrier au cardinal de Gondy pour lui ordonner de ralentir la marche autant qu'il serait possible : il fallait donner à l'évêque d'Evreux, qui allait partir le lendemain, le temps d'arriver le premier à Montlhéry . C'est ce qui s'accomplit exactement. Du Perron fit connaître au légat les intentions royales. Celui-ci séjourna quelques jours à Montlhéry ».

Le légat envoyé par Clément VIII n'était autre que Alexandre de Médicis, cardinal de Florence qui, plus tard, le 1er avril 1605, devint pape sous le nom de Léon XI . Le nouveau légat arriva à Montlhéry le 16 juillet accompagné de quatre évêques, de sept prélats et d'une suite nombreuse. La rencontre de Montlhéry, qui semble avoir été imposée par la peste qui sévissait à Paris à cette époque, eut lieu le 19 juillet quand le roi vint exprès d'Abbeville.

Laissons le prévôt de Montlhéry continuer à nous narrer la suite « Monsieur l'archevesque de Rheims, Mr l'évesque de Malezars et plusieurs autres prélats et seigneurs de France aussy logez à Montlhééry en attendant la venue du Roy luy faisoient une cour fort assidue. Sa majesté y arriva le vendredy 23 su mesme mois de juillet sur les neuf à dix heures du matin accompagné des ducs du Maine, de Montpensier et de Nemours, et de Messieurs Legrand de Bellegarde, de Marivaux, de Dunes, de Liancourt, d'Alègre, de Montlevriart, de Louseres et autres seigneurs et gentilshommes descendit de cheval à la porte de la maison ou le légat étoit logé et estant avancé à pied jusques au milieu de la cour du légat l'y vint aborder et ils s'embrassèrent l'un l'autre ayant tous deux un genoux en terre er après s'estre relever l'un l'autre ils allèrent ensemble dans la salle se tenans par la main et s'y entretinrent en particulier le tems d'une demie heure ou environ, n'y ayant lors avec eux que Monsieur Dufresne secrétaire d'estat. Après cette conférence finie ils se séparèrent après s'estre derechef embrasser l'un l'autre et le Roy alla disner à Longjumeau en l'hostellerie de Leseu et retourna coucher à Monceaux ».

On remarque ainsi une différence de date sur cette conférence. Si la présence du duc de Mayenne près du roi, à Montlhéry, avait fait comprendre au légat que la Ligue n'existait plus, la députation du prince de Condé ainsi que le compliment par lui récité durent lui paraître un heureux commencement d'exécution des engagements pris à Rome. Enfin, la caravane romaine s'ébranla le lendemain pour faire son entrée solennelle à Paris le 21 juillet 1596.

L'histoire du Gatinois

Cet ouvrage produit par Dom Guillaume Morin et publié par Laurent à Pithiviers en 1883 fournit quelques pages sur Montlhéry dont voici le texte intégral (tome II, page 478 et suivantes). « Montlhéry est une ville bastie sur une colline à sept lieuës de Paris, remontant vers Orbane, & costoyant la Beausse. C 'estoit anciennement une Comté, laquelle a esté réunie au Doimaine du Roy. Sur la pointe de la roche qui commande sur la ville, du costé du Midy, se voyent les anciens vestiges d'un chasteau, ruiné dans les dernières guerres civiles sous le règne du feu Roy Henri le Grand. C'estoit une place de deffence, & qui estoit une des clefs de Paris : & pource pendant la rebellion des Parisiens, ledit Seigneur Roy le fit desmolir, afin d'oster le moyen aux rebelles de s'y fortifier.Attenant ce vieux chasteau il y a un petit Prioré qui appartient à monsieur Dellegrange, qui est un Chasteau entre Linois & Marcoussis ».

Quelques uns ont estimé que le chasteau de Mõtlhéry a esté basty par Gannes, & que c'estoit une de ses forteresses où il se retiroit. Les Annales de France font mémoire du Comte de Montlhéry appelé Gaultier fils de Milon, dont la fille unique espousa Philippes frère bastard du Roy Louys sixième, dict le Gros, que son père avoit engendrée à la Comtesse d‘Angers, & parce que ledit Philippes suivoit les rebellions de son beau-père, & ayant esté prins dans Meun, le Roy luy osta toutes ses terres & possessions, & le detint le reste de ses jours en perpétuelle prison, ainsi le Comté de Montlhéry fut réuny à la Couronne.

Du temps de Guy de Montlhéry fils de Milon le Cruel, Louys le Grois Roy de France, fit desmolir le chasteau, à cause que là se faisoient toutes les assemblées & monopoles du Royaume. Philippe Roy de France son père luy disoit, que ceste tour l'avoit fait vieillir beaucoup de fois, car nul mal ne se faisoit en France qui n'eut esté du conseil de ceux qui y habitoyent. Rochefort, Corbeil & Montlhéry estoient trois places de grande importance pour lors, dont sortoient des rebellles qui pilloient les Marchands, qui alloient & venoient d'Orléans à Paris.

Le Duc de Bourgogne du règne de Charles sixième print Montlhéry par composition, & se fortifia dedans l'an 1415. Le chasteau de Montlhéry fut construict par un certain forestier nommé Thibauld File-estoupe l'an 1015. Les autres disent qu'il a prins son nom de Lederic premier forestier de la forest Charbonière qui est la Flandre. Sur le grand chemin sont deux cimetières, l'un où fut enterrez les Bourguignons, & l'autre les François, du règne de Louis XI après la journée de Montlhéry, & avoit appartenu au Connestable de Clysson qui s'y sauva après la maladie du Roy Charles sixième son maistre, comme raconte Alain Chartier ».

Le pauvre de Montlhéry

C'est dans la nuit du 8 au 9 avril 1699 que le conseiller Ticquet fut assassiné chez lui à Paris. Après un procès mémorable, Madame Ticquet fut condamnée et exécutée le mercredi 17 juin pour avoir fait assassiner son mari.

Charles Rabou, auteur de Louison d'Arquien et des Contes Bruns a également fait publier un roman intitulé « Le pauvre de Montlhéry », mais en transportant l'action sous Louis XV et en défigurant les noms, sauf celui de l'héroïne, née Angélique-Nicole Carlier. Le roman fut édité en 1841 par Dumont à Paris. « Le 21 septembre 1742, un mousquetaire du roi, nommé le chevalier de Saint-Thomas, ayant lié une intrigue avec une fort avenante créature, qui servait en qualité de gouvernante chez le curé de Saint-Médard, obtint de cette fille un rendez-vous… ». Voilà comment commence un roman policier où une belle plaignante épouse son avocat, M. Ticquet, et prend un amant nommé Montgeorge, officier des gardes. Voulant surprendre sa femme, l'époux trompé est tué par son domestique Jean Doucet, amoureux éperdu de Mme Ticquet sur laquelle il exerce un chantage pour éloigner Montgeorge.

Après quelques semaines, le mari supposé être mort et enterré revient à la maison. Il avait pris les traits d'un mendiant que Doucet rencontra à Montlhéry voulant se rendre à Orléans « je traversais il y a deux jours le petit bourg de Montlhéry… la tour, je n'y pris pas garde … ce fut un mendiant qui s'approcha de moi sur la route pour me demander l'aumône, et dans lequel je reconnus M. Ticquet ». Et le romancier de continuer : ce ménechme s'appelait Romainville, qui pour se maintenir en santé, [réclamait] de boire un coup de vin blanc qu'il buvait d'ordinaire au Pigeon d'argent, qui était le meilleur cabaret de Montlhéry.

Ainsi l'intrigue continue avec le chevalier de Saint-Thomas, Jean Doucet, le mari ressuscité alias Romainville et la belle Madame Ticquet. C'est alors une situation étrange où le pauvre de Montlhéry, ayant pris la place du mari doit également prendre celle du conseiller au Parlement « pour siéger sur les fleurs de lys, d'où il décréterait, de droite et de gauche, la roue, le gibet, la question ordinaire et extraordinaire, l'amende honorable, la prison at eutres galenteries judiciaires … ». Lui, le vagabond, le mendiant, le gibier de potence (12).

Doucet fut condamné à faire amende honorable, à être rompu vif et à expier sur la roue. « Mme Ticquet se retira aux Carmélites de la rue de Grenelle, Saint-Thomas s'exila dans le midi pour écrire ses mémoires ». Nous sommes loin de la réalité !!!

Monsieur le comte de Lacépède

Quand la Convention remplaça l'Assemblée législative, « la voix des sages ne pouvait plus se faire entendre dans les cris de la tempête » dit l'éminent zoologiste, Monsieur le comte de Lacépède, qui demanda la démission de sa place au Jardin des Plantes. Il avait besoin de quitter Paris, de chercher le calme et les doux aspects de la nature loin du volcan des passions parisiennes. Il se retira, avec M. et Mme Gauthier, avec leur jeune fils dans la commune de Leuville. Il y loua une chaumière, il y fit apporter ses livres, et trouva dans le travail, des distractions alors si utiles, et, dans l'amitié, des consolations devenus alors si nécessaires.

Le pasteur de Leuville était le digne frère de M. Gauthier. Ses paroissiens le vénéraient et l'aimaient comme un père. Le repos de M. de Lacépède y fut respecté. L'abbé Raynal s'était retiré à Montlhéry. Le philosophe rechercha la société du naturaliste, et vint souvent, à pied, converser avec lui. Devenu veuve Mme Gauthier se remaria avec M. de Lacépède. Il avait repris le grand travail de son Histoire naturelle des Poissons . Il écrivit cet ouvrage « assis sur les ruines qui environnent la haute tour de Montlhéry, dominant sur un pays immense, découvrant de loin le faîte des superbes monuments de la capitale, ou, couché sur une gazon fleuri, à l'ombre des peupliers inspirateurs, et sur les bords du grand étang de Marcoussi… ».

La Terreur régnant encore, pour ne pas être inquiété dans la chaumière de Leuville, M. de Lacépède avait brûlé ses papiers de famille et une grande partie de sa correspondance et la plupart des lettres que Frédéric II lui avait écrites.

Notes

(1) Abbé Jean Lebeuf, Histoire de la ville et de tout le diocèse de Paris , volume 5 (chez Féchoz et Letouzey, Paris, édition de 1883).

(2) M. de Saint-Allais, L'art de Vérifier les Dates (Impr. Patris, Paris, 1818).

(3) J.A. Dulaure, Histoire Physique, Civile et Morale des Environs de Paris, depuis les premiers temps jusqu'à nos jours (Guillaume, Libr. Ed., Paris, 1828).

(4) On peut même lire qu'il y avait des souterrains reliant le château de Montlhéry à la forteresse de Marcoussis. Une monographie de Villebouzin fait encore plus fort : les souterrains partaient du château féodal de Villebouzin passaient à l'église de Longpont pour arriver à la tour de Montlhéry. Rien que çà !!!

(5) La « Vie de Louis VI le Gros » fut éditée et traduite par Henri Waquet, archiviste du département du Finistère. On la trouve également dans « Les Classiques de l'Histoire du Moyen Âge » publiés sous la direction de Louis Halphen, Tome 11 (Librairie Ancienne Honoré Champion, éditeur, Paris, 1929), pages 5 à 15.

(6) Dès son jeune âge, Suger avait côtoyé le futur Louis VI. Après une période d'études au prieuré d'Estrées, il devient moine à l'abbaye de Saint-Denis et en sera abbé en 1122 à 1151. Il est présenté comme un esprit pondéré, répugnant aux excès d'ascétisme et s'opposant à Bernard de Claivaux.

(7) A.A. Monteil, Histoire des Français des divers états ou Histoire de France aux cinq derniers siècles , tome I (chez W. Coquebert, Paris 1846).

(8) Louis XI a écrit une autre lettre est datée du même jour de Dourdan.

(9) U. Legeay, Histoire de Louis XI son siècle, ses exploits, tome premier (Libr. Firmin Didot Fr., Paris, 1874).

(10) B.H.R. Capefigue, Histoire de France au Moyen Âge , tome 3 (Wouters et Raspoet, Bruxelles, 1843).

(11) Abbé Pierre Feret, Les grandes figures de l'Histoire, Henri IV et l'Eglise Catholique (Librairie Victor Palmé, Paris 1875). G. Raynaud, in Bulletin de la Société d'Histoire de Paris et de l'Île-de-France (chez Champion, Paris, 1885).

(12) Le Parlement était ainsi composé : la grand'chambre, la tournelle civile, la tournelle criminelle, cinq chambres des enquêtes, deux chambres des requêtes du palais, les requêtes de l'hôtel et le parquet des gens du roi.

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