Corpus Essonnien

Histoire et patrimoine du département de l'Essonne

Outils pour utilisateurs

Outils du site


dagnot:chronique28.03

Page en chantier


L'église Sainte-Trinité de Montlhéry (4) (XVIIe siècle)

Chronique du Vieux Marcoussy –Marcoussis————— _——————————_—– Avril 2009

Dessin (à droite) montrant la reconstruction de l'église Sainte-Trinité de Montlhéry après l'écroulement du clocher (à gauche) du mois de juillet 1689

JP. Dagnot

C. Julien

Voici la quatrième chronique donnant l'histoire de l'église Sainte-Trinité de Montlhéry. Après avoir décrit l'organisation ecclésiastique de Montlhéry au Moyen Âge, la paroisse et la fabrique au XVIe siècle, les confréries du XVIIe siècle, nous présentons les évènements survenus pendant le règne de Louis XIV ; le fait majeur étant ni plus ni moins l'écroulement de l'église !!!

Pour revenir un court instant sur l'origine de la paroisse Notre-Dame, nous donnons les propos pertinents d'Adolphe Duchalais, historien du XIXe siècle qui fit une « analyse de l'architectonique » de la Tour de Montlhéry pour déterminer l'âge d'un monument. L'auteur fait une critique de l' Histoire du Diocèse de Paris (1). Voici ce qu'écrit le médiéviste : « L'abbé Lebœuf prétend que les parties les plus anciennes de celte chapelle remontaient au XIII e siècle. Selon ce savant abbé, il aurait existé dans le château une seconde chapelle dédiée à la Vierge , mais il se trompe vraisemblablement. Il aura pris pour le château, la ville elle-même, désignée par le mot castrum . D'ailleurs il se condamne lui-même, en avouant que l'église de la Trinité , paroisse actuelle de Montlhéry a porté autrefois le nom de Notre-Dame ». Voilà un nouvel éclairage sur l'histoire primitive de l'église de Montlhéry (2).

Les revenus de la fabrique

Nous avons vu à plusieurs reprises que la fabrique de Montlhéry était richement dotée. Marchands, bourgeois, notaires, gens des offices royaux fondaient ou donnaient des rentes « pour le repos des deffunts » enregistrées dans le « martirologe ». Ainsi, il fallut dresser et établir des inventaires des titres de « l'œuvre de fabrique Sainte-Trinité ». Les archives ont gardé plusieurs de ces registres, dont le plus ancien nous vient du XVIe siècle. De nouveau, au début du XVIIe siècle, fut ouvert un nouvel inventaire « l'an 1623, le 27 décembre après midy ès présences de Louis Divry et Jean Beauperrin, clerc demeurans audict Montlhééry, tesmoings et ont lesdicts sieurs Le Berger, marguilliers paroissiens et tesmoings ci-dessus nommez signé en la minutte des présentes avec ledict notaire signé Beauperrin ».

En 1664, les marguilliers font une nouvelle fois, l'inventaire des titres constatant qu les nouvelles fondations d'obits avaient considérablement augmenté les revenus de la fabrique de telle sorte que le curé exige une somme de 630 livres tournois au lieu des 300 livres accordées par le précédent traité. Pour résumer succinctement l'actif de la fabrique, nous pouvons citer : • des terres, vignes et prairies à Longpont sur les bords de l'Orge, • une certaine quantité de prez et prairies de Paloiseau, • plusieurs rentes seigneuriales avec le droit de censive sur une bonne partie des maisons du bourg de Longjumeau de valeur le tout de plus de 500 livres par chacun an qui est un revenu assez considérable, • les droits de chapelle Montlhéry, • un nombre considérable de rentes foncières assises des maisons, terres, vignes, prés et bois à Montlhéry, Linas, Longpont, La Norville, Leuville, La Ville-du-Bois, etc. Une telle fortune amassée au cours des décennies, allait permettre l'agrandissement de l'église Sainte-Trinité, car l'augmentation incessante de la population montlhérienne exigeait une extension du sanctuaire, comme nous allons le décrire de suite.

Le droit de chapelle du seigneur de Lormois

En 1666, un contrat est passé devant des notaires parisiens, entre messire Paul Legendre, seigneur de Lormois, et les héritiers et ayant cause du sieur Claude Lecler « lequel contrat donne au seigneur de Lormois et à la dame sa femme, le “ droit de chapelle ” en la chapelle Nostre-Dame de Pitié de l'église de la Très Saincte Trinité de Montlhéry suivant le contrat de fondation d'icelle. » (3).

En effet, ce droit de chapelle avait été accordé en 1622 par le curé et les marguilliers au profit de Messire Thomas Lecler et dame Suzanne Le Sergent, sa femme. La fondation était faite moyennant 16 livres tournois de rente foncière appartenant en propre au sieur Lecler « à cause de la succession de deffuncte dame Catherine Louchart, sa tante veuve de Messire Claude de La Voisière , procureur du Roy à Montlhéry à prendre par chacun an sur tous les biens de Mathieu Langlois ». Puis, en 1625, le droit de chapelle avait été cédé et transporté à Messire Claude Lecler et Marie Deiser, sa femme « lequels ont peu après faict la ditte closture et ont joui de la ditte chapelle suivant et aux termes du dict contract jusques au décès dudict sieur Lecler ».

Ce droit de chapelle avait fait l'objet d'un contentieux puisque les sœurs de la Charité revendiquaient la propriété de cette chapelle qui fut changée « en conséquence dudict establissement de la confrairie de la Charité en icelle chapelle se sont les veuve et héritiers du dict deffunct sieur Lecler faictement désistez de leur droit en icelle et ont consenti que la ditte closture s'en fut abattue et le tableau et tiltre d'icelle qui estoit de Nostre-Dame de Pitié changé en celuy de la Charité au moyen de quoy les sœurs de la Charité ont depuis ce tems seules paisiblement jouy de cette chapelle sans aucune contradiction ». Il semble donc que le seigneur de Lormois avait acheté un droit qui n'existait plus.

La situation devient délicate pour le conseiller du Roy qui, conscient de la difficulté dans laquelle son acquisition l'a placée, décide de se séparer du droit de chapelle à Montlhéry. Nous trouvons un acte notarié passé en 1667 devant un notaire au Châtelet de Paris, Legendre cède « tout et tel droit qui luy pouvoit apartenir en la ditte chapelle à la demoiselle Despeirières, femme de Messire Jean-Baptiste Bodin, sieur Desperrières, procureur du Roy à Montlhéry pour en jouir par elle ses hoirs ou ayans cause tout ainsy que lesdits sieur et dame Legendre auroient pu faire au moyen du contract précédent ».

Le prévôt de Montlhéry écrivit à ce sujet « la ditte Desperrières dès l'instant de cette cession mise en possession de cette chapelle laquelle elle prétend luy apartenir privativement à tous autres mesmes à l'exclusion des sœurs de la Charité qu'elle en prétend empesché mesmes d'y faire célébrer les messes de leur ditte confrairie et ce au moyen tant des dicts contracts que de la nouvelle concession ». Le conflit reprend ainsi avec les sœurs de la Charité qui tiennent l'Hôtel-Dieu de Montlhéry; le nouveau détenteur du droit de chapelle précise alors « que le curé et les marguilliers luy en ont collusoirement et on peut dire assez inconsidérément depuis accordé de leur propre mouvement moyennant une somme de 30 livres que Messire Accurse Cornillier l'un des dicts marguilliers a dit en avoir receüe ».

La fondation de Barbe Bourdon

Une plaque fixée sur un des piliers du chœur renseigne sur un obit fondé le 16 octobre 1671 par deux habitants de Montlhéry. Le texte gravé dans la pierre est le suivant : « Barbe Bourdon, veuve Gérard Blavet, par son testament reçu par Boucheu et Le Maitre, notaires à Paris le seize octobre mil six cens soixante et onze a donné et légué à cette église 200 livres de rente à elle duë par l'Hostel Dieu de Paris et 17 arpents de terre seis à La Norville à la charge par les marguilliers de faire dire par chacun jour de l'année à perpétuité en cette église Sainte Trinité à l'hautel de la Charité non aïileurs par le sieur curé, son vicaire ou prestre habitué et non autre, à l'exception des parents qui seront préféré une messe basse de requiem, laquelle sera dite en esté depuis Pasques jusqu'à la Toussaints de chaque année à six heures du matin précise et depuis la Toussaint jusqu'à Pasques à sept heures sera dite messe sonnée d'une des deux grosses cloches en voile et par vingt coups en forme de passion et tintée par les deux petites cloches et à l'issüe de chacune sera par le prestre dit un libera, de profundis, et oraison accoutumée sur la fosse d'icelle testatrice, et luy sera payé quatorze sols sçavoir onze sols pour la messe, deux sols pour la sonnerie et un sol pour le libera de profundis et oraison, et faute d'acquitter les quatorze sols seront aumonez auz pauvres le dimanche issue de la messe de la paroisse par le marguillier dont elle en charge la conseience à aussy fondé en laditte église quatre saluts aux quatre trismètres de chaque année, et chargé de faire faire la prière pour le dit sieur Blavet pour elle leurs parents et amis aux quatre festes annuelles chaque année à perpétuité et dire à leur intention les services cy dessus. Requiescat in pace ».

Travaux à l'église Sainte-Trinité

La gestion de la fabrique de Montlhéry montre un nombre considérable de devis, mémoires, procès-verbaux de travaux effectués à partir de 1673. Tout d'abord, sur le réquisitoire de Jean-Baptiste Bodin, procureur du roy au siège de Montlhéry, assisté de Denis Chartier, vitrier, pour l'horloge de l'église et de Thomas Legrain serrurier, les ouvriers sont « montez sur le clocher pour faire faire l'ouverture de la porte ou fenestre où est ladite orloge, …, fermée à clef, pour ne pas empescher ladite orloge de sonner; que c'étoit Jean le Rou, maître-chirurgien, marguillier, et que l'ouverture fut faite par le serrurier et la remise en marche de la sonnerie fut faite en remettant le contrepoids !! ». Une sentence des requêtes du Palais rendue le 29 juillet 1678, devenait « exécutoire par adjudication avec despens ».

Un mémoire de trois feuillets sur petit papier timbré à un sol la feuille de la généralité de Paris fut établi en 1681. L'acte est passé au siège de la prévôté royale de Montlhéry devant Jean le Roy, greffier. Ce mémoire porte le titre « Mémoire des ouvrages et réparations à faire au clocher de l'Eglise sainte Trinité de Montlhéry » et comprend cinq articles, tels que : - premièrement, il convient de refaire un entablement en plastre, remanier à neuf la moitié de la crouppe du costé de l'entablement, et recouvrir deux auvents à neuf et recharger les autres et refaire les plastres qui sont nécessaires du mesme costé. - du costé du cimetière il convient de restablir deux thoises sur l'entablement que sur le pan et recouvrir à neuf deux bandeaux et trois à moitiédud costé dudit pan… - du costé de l'Hostel Dieu, il convient sur huict pieds de long sur trois pieds de hault de recharger le reste de la crouppe - il convient du pan du costé du portail de besogner de quatre pieds de hault contenant la lucarne sans comprendre les quatre lucarnes des quatre costés, recharger et recouvrir à neuf sans préjudice de l'orloge de raccommoder les plans, - il convient de recouvrir la moitié d'un auvent à neuf et recharger les autres, et de faire les plastres qui sont nécessaires. Et pour faire lesdits ouvrages, il convient deux milliers d'ardoizes, six bottes de lattes à ardoize et deux bottes de contre-lattes de six pieds, six milliers de clous à lattes, douze milliers de clous à ardoizes et six pouiddons de plastre. Vincent Pétineau, maître couvreur et plombier de Chailly accepte le marché pour 120 livres et entretien pendant le temps et l'espace de dix ans !!!

Le 26 juillet suivant, un marché d'entretien des vitres y compris la monte et démonte de l'horloge est passé par Messire Alexandre Thibauld, prestre curé de Sainte Trinité de Montlhéry, et Jacques Lucair et Simon Mortier, marguilliers de présent en charge de ladite église d'une part, et Denis Chartier, vitrier demeurant audit Montlhéry d'autre part, « lesquelles parties ont fait la convention qui ensuit, c'est assavoir que ledit Chartier s'est obligé et s'oblige pour les présentes d'entretenir les vitres de ladite église et de tout ce qui est nécessaire à faire ensemble l'orloge pour la montre et démontre seulement en cas pendant le temps et espasse de six années qui ont commencé le jour des festes de Pasques dernier moyennant la somme de 30 livres par an, sçavoir 10 livres pour les vitres et 20 livres pour l'orloge que les marguilliers s'obligent bailler , payer audit Chartier…. »

Un acte d'assemblée de la fabrique est produit l'année suivante pour résoudre le problème des dépenses. L'assemblée est convoquée au devant la grande porte et principale entrée de ladite église à la « réquisition de Messire Jean le Roy, notaire royal de la châtellenie, demeurant à Linois, marguillier en charge de l'église, œuvre et fabrique dudit lieu » après que les vêpres aient été célébrées. Sont comparus : Martin Rousseau, messire Michel Chauvin l'aîné, Bourdon, Pierre Colar l'aîné, anciens marguilliers, messire Blavet aussy ancien marguillier, Gouvain Le Coy, sindic, Jean Auger, Michel Bonas, Louis Lobrain, Nicolas Bourdon l'aîné, Pierre Chevrier, Pierre Abué, Georges Lecoq, Nicolas Lecoq,…accompagnés de Messire Charles de Machy, prestre, chanoine et curé de ladite église « lesquels sur la reconnaissance faite par ledit le Royaudit nom de marguillier… ». Les paroissiens écoutent le rapport moral et financier du marguillier et, après en avoir délibéré, énumèrent les travaux faits et à faire dans l'église : restablissement des gouttières de plomb, une armoire pour la conservation des ornements, changer de la croix et ciboire qui sont cassés, etc. Le curé et les marguilliers ont attendu, « qu'à moins d'engager les dépenses par l'emprunt que ledit Le Roy audit nom seroit obliger de faire des sommes desboursées pour raison que dessus… ». La somme de 296 livres 6 sols 11 deniers reste à payer. Une somme de 20 livres provient de la clôture du compte du sieur Peuvrier, ancien marguillier le 8 mai 1678. Une autre somme de 61 livres 3 sols 2 deniers est due après la clôture du compte du 2 juin 1679. À la suite de quoi, Jehan Le Roy fait approuvé les comptes de la fabrique.

Signatures des paroissiens de Montlhéry au bas du procès-verbal de l'assemblée de la fabrique de l'église Sainte-Trinité du 26 avril 1682.

En 1688, le curé et les marguilliers font avec Claude Huiard, maitre vitrier demeurant audit Montlhéry, c'est à savoir d'entretenir toutes à chacunes, les vitres de ladite église , pendant le temps de neuf ans, tant de verre de plomb, verger et clavette …. réserve faite pour cause par accident soit de la grêle, feu du ciel, guerres ou par l'impétuosité et tourbillon des vents… moyennant dix livres par an….

Le droit de chapelle du sieur Bodin-Desperrières

Dans cette affaire qui s'avère assez compliquée, le droit de chapelle et d'une place de banc dans l'église de Montlhéry est encore rappelé. C'est celui qui avait été acquis par la famille Bodin Desperrières . Le contentieux est porté par les marguilliers, d'une part et le sieur Bodin Desperrières, d'autre part, parce que « la concession ne pouvant être baillée à perpétuité, lesdits biens d'église étant inaliénable, mais seulement à vie et non pour les hoirs ou ayant cause que ce serait une aliénation qui transmettrait pour toujours ladite chapelle à un étranger qui il a faisant demeurant hors la paroisse ». L'irrégularité et la nullité des actes sont proclamées par la demande des marguilliers.

S'ensuit une série de procédures. Une sentence des Requêtes du Palais du 29 juillet 1678, celle du Châtelet et l'arrêt du Parlement du 28 mars 1684. Le différend continuera d'être porté en justice : un second arrêt du Parlement interviendra le 8 février 1694 avec sommation du 19 mai de la part des marguilliers « de répondre ar écrit et satisfaire à ladite exception… ».

À cette époque, un exploit introductif d'instance « notoit par une demande en complainte et qui étoit la forme de contenu en pareil cas » – ici, le lecteur nous excusera pour le jargon juridique – que ledit sieur Bodin-Desperrières pouvait bien s'approprier le droit de patron de la chapelle « puisque l'église dudit Montlhéry étoit venue à tomber depuis la grille du chœur jusqu'au portail, elle fut rédiffiée à la diligence et aux dépens dudit sieur Desperrières à dix mil livres, prix qu'il fit donner par sa Majesté et que ladite chapelle faisant partie de cette rédiffication qu'il pouvoit bien avec raison appliquer partie de s pour ???la rédiffication et reconstruction de ladite chapelle et qu'il étoit naturel qu'il commença ses libéralités pour un objet sur lequel il avoit un droit spécial… ». Ici, nous anticipons, mais cette affaire est aussi liée à la catastrophe de juillet 1689 évoquée plus loin.

L'agrandissement de l'église de Montlhéry

L'agrandissement de l'église de Montlhéry a été décidé au cours de l'année 1688 et un devis est établi le 1er janvier 1689 « des ouvrages de maçonnerie, charpenterie et couvertures à faire pour l'agrandissement de l'église paroissiale Sainte Trinité de Montlhéry estant difforme et de trop peu étenduë pour la quantité d'abitans qui s'augmente tous les jours dans ledit lieu ». Tout est dit dans ce titre. Nous donnons la suite in extenso du devis: - Premièrement, comme ladite église n'a qu'un bas costé à gauche de la nef en entrant, il seroit nécessaire d'en faire un pareil à droit qui donneroit beaucoup plus d'espasse et d'étenduë à ladite église, lequel mesme servira pour faire les processions du Saint-Sacrement qui se font tous les jeudys au-dedans du pourtour de la dite église. Est aussi nécessaire de faire un petit bas costé derrière le choeur du maistre autel; dans lequel il y aura deux chapelles dont l'une sera dédiée à la Vierge et l'autre à Saint-Louis, lesquelles seront en face et placées vis à vis desdits bas costés afin que le public y puisse voir le prestre; et au devant de ces dites chapelles, il y sera fait une ballustrade à hauteur d'appuy servans pour les communions. Construction desdits ouvrages : sera abbatu l'ancien mur qui est à droit en entrant estant pendant et corrompu. Et ensuite sera fait la fondation d'un mur qui sera l'alignement de celui de la nef, laquelle fondation sera fouillée jusques sur bon fond et maçonné avec bon moillon dur du pays et de mortier chaux et sable de trois pieds d'épaisseur et au dessus de ladite fondation qui sera le rez de chaussée de ladite nef. Il y sera fait trois pieds droits et deux dosserets servans à porter quatre arcades qui seront de pareille hauteur que celles qui sont vis-à-vis construits avec pierres de tailles dure d'Arcueil, jusqu'aux impostes et le ceintre au dessus de pierre de lambourdes. Observant que les écoinssons entre lesdites arcades jusqu'à hauteur de l'entablement, seront maçonnez avec moilon de pierres dures et de mortier à chaux et sables ; crespis et enduire des dostez observant que les trois pieds droits qui seront issolez et auront chacun d'eux pieds et demy de parpin sur trois pieds et demy de face, et chacun dosserais sortiront de deux pieds d'après le nud des murs anciens, le tout fait en bonne liaison.

Plan de l'église de Montlhéry vers 1650 avant l'effondrement suite aux travaux d'agrandissement de juillet 1689.

Et comme la charpente du comble de ladite nef ne portera plus sur le mur ancien qui sera abbatu, elle sera retaillée pour la remettre, sur le mur qui sera au-dessus desdites arcades, le tout afin de rendre la nef d'un droit alignement, et pour ce remanier et reposer toute la couverture de tuille. Plus sera fait la maçonnerie du mur dudit bas costé à droite qui commancera depuis la face du devant de ladite église et qui viendra joindre par derrière la Maître Autel. Le bout du mur de l'autre bas-costé à gauche comme il se voit marqué sur le plan. Lequel mur sera aussy fondé sur bon et vif fond, sa fondation sera de trois pieds d'espoisseur maçonné avec moilon dudit pays et de mortier de chaux et sable, et le dessus depuis le rez-de-chaussée, en haut sera de deux pieds et demy d'espoisseur, et observant des encoignieures et pilliers boutans qui seront faits de la pierre meilleure du pays, avec les ouvertures de croisées, comme elles sont dans l'autre face à l'opposées. Lequel mur sera crespy et enduy avec mortier de chaux et sable par le dehors, et avec plâtre par le dedans. Sa construction sera aussy faite de moilon dur du pays maçonné avec pareil mortier comme il est dit, et ledit mur eslevé de pareilles hauteurs comme celuy de l'autre bas-costé. - Plus sera fait la maçonnerie de l'ouverture de trois arcades, sçavoir deux dans le mur à droite à costé du chœur, et l'autre dans le mur à gauche du costé du Maître Autel à la place où estoit l'autel du Rosaire. Les deux premiers serviront pour voir dans le chœur et l'autre pour la communication des processions. Auxquelles ouvertures d'arcades, il y sera fait les pieds droits et ceintres de pierres de taille vis-à-vis les aussi. - Plus sera fait un aire dans ledit nouveau bas-costé et dans sa continuation au derrière du Maître Autel pour recevoir la quarreau de terre cuite qui sera mis dans toute son étenduë et à niveau de celuy de ladite église. - Plus sera fait la charpente du comble en manière d'appenty tout au pourtour dudit bas-costé. Lequel sera garny de maistresses fermes, pannes, tirans, plateformes et des chevrons espassez de quatre à la latte de la longueur nécessaire et de quatre pouces de gros et les grosseurs des autres bois selon l'art de charpenterie. - Plus sera fait la couverture de tuille sur toute l'estenduë du comble dudit appenty laquelle tuille sera bien cuite et assise sur un lavis de lattes de cœur bois de chesne, faire les rillées et égouts à point au pied de l'appenty pour rejetter les eaux au dehors.

La passation du marché pour les ouvrages et travaux à faire à l'église est faite le 22 mars 1689. Les adjudicataires sont Jean de Monbregnaud, tailleur de pierre et masson demeurant en la ville de Chastres, Lyennard Dumas, aussi masson en plastre de la mesme ville et Georges Benoist, maitre charpentier demeurant à Linois, « lesquels ont volontairement reconnu et confessé avoir entrepris et entreprendre et promettent et s'obligent, solidaires l'un pour l'autre,… envers Messire Jean-Baptiste Bodin Desperrières,conseiller du Roy son procureur et juge royal de Montlhéry, tous les ouvrages pour la construction d'une aisle pour accrocher l'église dudit Montlhéry, suivant l'instruction de sa Majesté… ». L'adjudication au rabais pour tous les ouvrages de construction est faite « à la réserve toutefois des crespys et enduits, ouvrages de menuiserie, serrurerie et fournitures de fer, lambris et vitrages, comme aussy des bois aulx cul de lampe, comme aussy les bois viels pilliers et la grande porte d'entrée dicelle église ». Ce marché fait moyennant la somme de cinq mille quatre cents livres… Suivent les conditions d'exécution et de paiement. Le sieur Dumas a déclaré « ne sçavoir ny écrire ny signer ».

Les travaux ont commencé le lendemain de la signature du marché. Un mémoire des payements faits à Monbregnaud, masson, depuis le 1er mai au 29 novembre laisse apparaître un “trou” en juillet !! Le total doit correspondre vu les sommes au marché du mois de mars. Un autre mémoire du charpentier Benoist résume ses ouvrages du premier may au sept novembre. Un “trou” également en juin et juillet. Un autre du plastrier couvreur Dumas du premier may au sept novembre, rien en juin et juillet. Que s'est-il passé ? Nous allons le savoir bientôt.

Nous avons retrouvé le journal des payements aux entrepreneurs intitulé « Estat des payemens faits pour les ouvrages de l'église de Montlhéry aux personnes cy après nomméés suivant leurs quittances retirées par Monsieur le procureur du Roy »: • premièrement a esté payé par ledit sieur Desperrières à Jean de Monbregnaud, la somme de 400 lt acompte sur les ouvrages faits par son marché suivant quittance passée par Le Roy le 1er may 1689, • plus a esté payé à George Benoist, charpentier, la somme de 300 lt, acompte sur ses ouvrages par luy faits suivant la quittance du 1er may 1689, • plus a esté payé à Léonard Dumas la somme de 200 lt, acompte suivant la quittance du 1er may 1689, • plus a esté payé à Thomas Legrain et autres 7 lt 4 sols pour voiture de pierres suivant la quittance du 1er may 1689, • plus a esté payé à Sébastien Verrier, voiturier, 4 lt pour voiture de pierres suivant la quittance du 8 may 1689, • plus a esté payé à Nicolas Clavet, manœuvrier, 4 lt pour voiture de pierres suivant la quittance du 8 may 1689, • plus a esté payé audit Verrier, pour voiture de pierres, 10 lt suivant la quittance du 15 may 1689, • plus a esté payé à Thomas Legrain et autres, voiturier, 14 lt 8 sols pour journées suivant la quittance du 15 may 1689, • plus a esté payé à Mathurain Leclive, 3 lt 8 suivant la quittance du 25 may 1689, • plus a esté payé à audit Monbregnaud…

et ainsi de suite. L'entrepreneur de maçonnerie a reçu la somme totale de 2.970 livres tournois dont les quittances sont les suivantes : 1 er may 1689 (400 lt), 29 may (640 lt), 5 juin (400 lt), 10 juillet (160 lt), 4 août (400 lt), 14 août (400 lt), 28 août (220 lt), 18 septembre (350 lt),

Le journal montre des versements réguliers. Ainsi au mois de mai 1689, ce sont plus de 907 livres qui sont versées dont les transports de pierre. Au mois de juin, nous avons 1.340 livres. C'est alors que les versements s'arrêtent le 10 juillet lors de l'effondrement du bâtiment. En juillet seulement 290 livres. Les travaux ont du reprendre de plus belle puisque les versements reprennent dès le 4 août avec 2.650 livres. Puis, le journal mentionne le paiement les fendeurs de grais au début septembre 1690 et du charpentier qui reçoit 1.400 livres. Enfin plusieurs petites sommes sont payées de fin septembre 1690 au 7 janvier 1691 pour un montant de 331 livres.

La catastrophe : l'écroulement de l'église

Il semble que les travaux d'agrandissement de l'église étaient bien avancés quand une catastrophe arriva dans la nuit du jeudi 7 juillet 1689. Par chance, il n'y eut aucune victime, puisque tard dans la soirée, nul ouvrier, nul paroissien n'était dans le bâtiment.

Laissons le prévôt de Montlhéry décrire ce qui est arrivé et ce qu'il a constaté le vendredi matin « l'an mil six cens quatre-vingt neuf, le huitième jour de juillet, , sept heures du matin, nous François Dedinan, conseiller du roy, président prévost soulz bailly, lieutenant criminel de robbe courte de la ville, compté, prévosté et chatellenie roialle de Montlhéry sur ce que nous aurions appris par la voye publique, que l'église de cette paroisse et clocher d'icelle, estoient tombez entre onze heures et minuit » . L'officier royal s'est transporté dans l'église assité de Messire Louis Chanceau, prestre bachellier en théologie et curé de cette paroisse, Messieurs Charles Gauvin, vicaire, François Quatrehomme, Jean Breton, marguilliers, Pierre Joubert procureur sindicq d'icelle paroisse et estant entrez en icelle. Et le prévôt continue « Nous avons vu que toute l'aire de la neffe et partie du coeur d'icelle estoient entièrement couverts et remplis de bois pierres provenant des descombes causés par la chutte du clocher et de la plus grande partie de ladite église ny restant plus que la place en laquelle est le tabernacle quy soit en son entière et la chapelle du rozaire quy est à costé du maistre hostel que le clocher et tour d'iceluy et orloge sons entièrement tombez de fond en comble, et lesdites cloches et orloges ensevellyes dans les descombremens de la vue, lesquelles nous avons vu une grande quantité de bois marrin rompuez et brisez, que dans la neffe, il ne reste qu'une partie du mur nouvellement construit pour faire la nouvelle “elle' que l'on batissoit et quant à celuy de l'antienne elle est demeuré en son entier et qu'à l'égard des arcades et pilliers tant antien que nouvellement construits sons tous tombez de fond en comble avecq ce quy restoit depuis ledit costre? du coeur et ladite chapelle du Rozaire jusques au bout et entrée de ladite église à la seule exception de deux pilliers de ladite antienne elle et environ deux espasses de couverture d'icelle prosche la porte par laquelle on entre dans laditte antienne elle, déclarant les sus nommés qu'ils ne scavent à quoy attribuer la chutte de ladite église et clocher dont ce de tout que dessus nous avons dressé nostre présent procès verbal pour servir et valloir ce que de raison ».

Les travaux d'agrandissement ont sans aucun doute été mal conduits. Il est évident que le percement des murs de la nef a déstabilisé le bâtiment et le clocher s'est écroulé entraînant une partie du bâtiment dont la nef, la toiture. Seule une partie du chœur et la chapelle du rosaire restent debout. Le poids du clocher avec ses cinq cloches non déposées avec un changement d'appui du comble de la nef est sans aucun doute la raison du sinistre. De plus pour le côté droit incriminé, faire en trois mois des fondations, monter des piliers et un mur, déplacer l'appui d'une charpente, Dieu a beau être conciliant…

Quelques jours plus tard, le 26 juillet, le prévôt se rend une nouvelle fois sur les lieux à neuf heures du matin, car il faut reconstruire au plus vite « nous François de Dinan, conseiller du roy, président presvost, juge ordinaire de la ville presvoté royal de Montlhéry, lieutenant civil et criminelle de robbe courte audit lieu, sur l'advis à nous donné, par un procès-verbal de l'official de Paris donné hier, … de travailler aux couvertures du cul de lampe nouvellement construits … au lieu où estoit le petit cimetière de ce lieu, jusqu'à ce que l'on est l'approbation de Monseigneur l'archevesque de Paris et un adveu des habitans pour la continuation desdits ouvrages il y avoit des environs de ladite église plusieurs ouvriers tant maçon que charpentiers qui travailloient actuellement à la continuation desdits ouvrages, nous nous sommes transportez, derrière ladite église ».

Ainsi les autorités religieuses de la curie épiscopale ont donné leurs instructions pour la reconstruction. Le prévôt rencontre les entrepreneurs et semble-t-il surveille les travaux « Nous avons trouvé Georges Benoist charpentier, lequel nous avoit dit estre celuy quy a entrepris les charpentes nécessaires pour lesquels ouvrages et lequel avecq six compagnons de son métier faisoient porter des bois au dedans du cul de lampe , ledit Benoist continue son marché en deffense de l'official de Paris continuation de la nouvelle aile ».

La tâche est délicate, il faut déblayer et reconstruire en tenant compte des fautes commises. Toutefois, l'écroulement sera l'occasion de construire une tour clocher en dehors du bâtiment, celui que nous voyons tous les jours, sur la façade occidentale du sanctuaire.

À suivre ….

Notes (1) Abbé Jean Lebeuf, Histoire du diocèse de Paris , tome IV de l'édition de 1883 (Libr. De Féchoz et Letouzey, rue des Saints-Pères à Paris), p. 111.

(2) A. Duchalais écrivit sa notice sur l'archéologie de la Tour de Montlhéry vers 1840. Il avait eu connaissance de l'ouvrage de Dulaure dont une édition corrigée par l'avocat Belin fut publiée en 1833.

(3) En 1660, Paul Legendre venait d'acquérir le domaine de Lormois de messire Nicolas Arnoult et dame Geneviève Saulger sa femme. Paul Legendre (1619-1710), demeurant rue du Lyon à Paris, est conseiller du Roy en ses conseils, maistre des requestes, procureur général de sa Majesté en son Parlement de Metz. Il est marié à Françoise de Chaulnes. En avril 1665, le nouveau seigneur de Lormoy fait l'aveu d'inféodation auprès du seigneur de Villebouzin.

dagnot/chronique28.03.txt · Dernière modification: 2020/11/12 03:12 de bg