Corpus Essonnien

Histoire et patrimoine du département de l'Essonne

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Saint-Pierre et Saint-Laurent du château de Montlhéry (3) (1604-1729)

Chronique du Vieux Marcoussy ————————————- _——————————-Juillet 2009

L'église Saint-Pierre sur une vue de Montlhéry du début XVIIIe siècle.

JP. Dagnot

C. Julien

Cette chronique est le troisième volet de l'histoire du prieuré Saint-Pierre et Saint-Laurent du château de Montlhéry. Lors de la première partie, nous avons pris connaissance de l'antiquité du prieuré bénédictin qui avait été placé sous l'obédience de l'ordre de Cluny.

La seconde paroisse de Montlhéry dépérit depuis plusieurs décennies, conséquence de la désertion du sommet de la montagne et des abords du château. Depuis la fin de la guerre de Cent ans, on comptait cinq feux en moyenne avec un seul marguillier qui ne peuvent assurer les réparations de l'église. D'autre part le patron, le prieur du couvent de Longpont est très avare pour maintenir le sanctuaire, se satisfaisant seulement de percevoir les revenus du temporel. En 1642, Messire Hector Leroux, prestre curé de l'église Saint-Pierre, avec l'aide du marguillier, avait tenté « de faire de fond en comble tous les gros murs d'une tour pour passer les cloches de ladite église… ». Vaine tentative….

Le droit de censive dans la ville de Montlhéry

Revenons encore une fois au mémoire du prévôt de Montlhéry qui donne un chapitre entier intitulé“ Des seigneurs prétendans droit de censive dans la ville de Montlhéry ”. Le premier seigneur reconnu dans la ville est le “prieur du Château”, sachant que « Quoyque tous les fiefs ci-dessus désignez estre dans l'enceinte de la ville de Montlhéry soient ainsy que dït est réunis au domaine de ce comté et que partant la seigneurie et censive des maisons et lieux estans dans l'enceinte de la ville en appartiennent au Roy seul comme comte de Montlhéry ou à ses engagistes ou apanagistes. Il y a pourtant divers seigneurs particuliers tant séculiers qu'ecclésiastiques lesquels prétendent mesmes percevoir le droit de censive sur plusieurs maisons, jardins et places de cette ville …. Et ce pour les maisons et lieux, les raisons qui seront ci après données ».

À Montlhéry, le prieur de Saint-Pierre du Chasteau a des droits dont la prétention est sur dix-sept tant maisons que cours et jardins. Toutes ces propriétés sont situées à l'intérieur de l'enceinte urbaine : • la première assise au carrefour Guillory, proche la rue des Juifs appartenant aux héritiers ou ayans cause d'Antoine Nolleau, • la seconde assise vis-à-vis la rue du presbytère dans la Grande ruë appartenant à Jean Susanne, • dix [maisons] assises dans la mesme Grande ruë en descendant à la porte de Paris, à la droite sçavoir la maison de deffunct Jean Bouthery, la grange de Denis Rousseau, maison de la veuve Jean Rousseau, maison de deffuncte Elizabeth Pigneron, veufve du sieur Philippe, maison de deffunct Jean Clozeau, maison de Pierre Polet et Estienne Rogier, les maisons aux hoirs Jean Poirier, maison de Jacques Rogier, maison de Julien Payen, • deux maisons dans la ruë des Juifs dont l'une aux hoirs (?) et l'autre la grange de Antoine Noleau, • trois dans la rue de la Borde autrement ditte la rue Pavée, sçavoir celle de deffunct Jean Chartier ou Abel Legendre moitié de celle de Jean Bourdon, celle d'Estienne Petit.

La suite du mémoire semble être une attaque contre le prieur de Saint-Pierre qui revendique ces censives, car nous somme à une époque où les officiers royaux sont de plus en plus exigeants quant aux prétentions seigneuriales au détriment du domaine royal « Pour la justification duquel droit de censive ce prieur ne rapporte aucun tiltre de concession et il se renferme dans la seule possession qu'il establit premièrement sur sept regrés non signez et en assez mauvais ordre en forme de papiers censiers, cueilloirs ou de recepte commençans en l'année 1392 et finissans en 1597, et en second lieu sur trois autres regrés en forme de terriers tous non clos, le premier non signé de l'année 1553, le second signé Porcher commis par justice faict en vertu de lettres du terrier du 17 febvrier 1569, et le troisième aussy non clos pareillement faict en vertu de semblables lettrers de terrier par le prieur qui estoit lors obtenues le 7 aoust 1624, au moyen de quoy le droit de censive sur les dix-sept maisons et lieux ont été déclarez luy appartenir par sentence contradictoire du prévost de Montlhéry contre les procureur du Roy et receveur de ce comté en datte du 19 mars 1667, et ce en conséquence de cette possession plus que centenaire du prieur sans aucune interruption ».

Les difficultés à l'église Saint-Pierre au XVIIe siècle

Une sentence de Christophe Bagereau, prévôt de Montlhéry, datée de 1604, porte réformation des lettres d'acquisition d'une terre à Montlhéry, chantier des Graviers, par le sieur Hémon, dans lesquelles il a été déclaré que la terre est tenue en censive du prieur de Montlhéry, au lieu du chapitre de la collégiale Saint-Merry de Linas.

Une plainte des paroissiens de l'église Saint-Pierre du Chasteau est déposée au début de l'année 1606 devant le prévôt de Montlhéry. Dans les attendus, nous trouvons « qu'au prieuré de ladite église, le service divin ordonne et accoutume un …. que cette dernière est en grande ruyne et désolation; la couverture … naguère tombée et le reste du comble d'icelle prest à tomber. Il requiert luy estre permy de faire saisir le revenu du temporel dudit prieuré et y establir commissaire et assignation estre bailler à Pierre Bordeaulx, fermier dudit revenu pour représenter son bail et affermer ce qu'il doibt à cause de ladite ferme et aussy pour faire apparoir de ses acquits et respondre aux fins et conclusions que ledit substitut entend contre luy… de faire dire et chanter les messes qu'il est tenu de faire par son bail… ». Un document de sentence de saisie des revenus est obtenu par les habitants avec obligations de réparations par le fermier.

La semaine suivante, à la suite un extrait des registres du greffe de la prévosté, sur la requeste de Messire Estienne Rozé, chanoine de l'église Saint-Benoist pour l'église Saint-Pierre du chasteau, allencontre de Messire Anthoine Lanoullier, substitut, commis par la cour du Parlement pour raison des desmolitions faictes en ladite église, ledit Rozé prieur serait responsable de la ruyne…. Un procès est engagé. Le demandeur veut faire saisir le revenu du prieuré. Les habitants déclarent que le prieur n'a employé ung seul liard en réparations…

Apparemment cinq ans après le problème n'est pas résolu, Jacques de Devilliers, curé de l'église Saint-Pierre du chasteau de Montlhéry, est convaincu de l'état désastreux de son église « lequel porte plainte en justice contre le prieur de ladite église pour faire attacher les vitres aux fenestres et croisées, faire la couverture, … ne pouvant tenir allumés les cierges sur l'autel ».

Plusieurs années passent, et en 1633, fut présent François Champfrain, masson demeurant à Montlhéry, lequel s'est volontairement obligé par ces présentes envers Michel Petit, marguillier de l'église Saint-Pierre du chasteau dudit Montlhéry, de faire et parfaire bien et duement, les ouvrages de massonnerie en ladite église dont la teneur ensuit à savoir l'ancoingnure et la pointe au dessus du pignon de ladite église derrière l'autel…. Les travaux se montent à la somme de 23 livres.

Le prieuré de Saint-Pierre possédait une censive sur le chantier du Fossé Punais à Montlhéry. Deux reconnaissances sont passées le 28 juillet 1635. La première par Jean Maufet, maréchal demeurant à Longjumeau pour cinq quartes de terre « en la vallée de Longpont, chantier dit Fossé Punais » sur le chemin des Processions et contiguës à la parcelle des hoirs Gilles de Beaumont. La seconde par Andrée Delamarche, veuve Michel Hargenvillier, pour cinq quartes de terre tenant à la terre précédente. Ces deux déclarations furent utilisées lors du procès pour usurpation d'héritages faite par le seigneur de Villebouzin sur le prieuré Saint-Pierre de Montlhéry.

Les censives du prieuré Saint-Pierre et Saint-Laurent de Montlhéry au Mesnil-Longpont.

Les réparations de l'église Saint-Pierre

De nouvelles réparations du prieuré sont décidées en 1640, quand vénérable et discrète personne Messire Estienne Pize, conseiller aulmosnier du roy, cy devant prieur du prieuré Saint-Laurent, estant de présent en cette ville de Montlhéry et André Champagne, masson couvreur demeurant à Montlhéry, ont fait accord, c'est à savoir que « ledit Champagne promet d'édifier en l'église Saint-Pierre, à la nef Saint-Laurent un pignon de fond en comble de trois piedz d'espaisseur et faire ledit pignon à la première ferme du comble de la nef Saint-Laurent avec un pillier du costé de la Motte et …semblable à ceux de présent en l'encoignure du portant de ladite nef; de perser dans ledit pignon le portail… dans le milieu dudit pignon au-dessus du portail un rond de trois pieds d'ouverture…..d'ouvrir et descendre toute la tuille du comble de la nef, …remonter recouvrir la nef….de fournir ledit Champagne la chaulx, le sable, et le plastre qui conviendra ». Il est aussi convenu que ledit Champagne, pour édifier le pignon, prendra les pierres qui sont tombées de l'ancien pignon de la nef Saint-Laurent aussy desmolir la goutte…jusqu'au pillier du niveau de la première ferme. Le tout moyennant la somme de quatre cents livres pour eddifier ledit pignon. Était présent et témoin de ce marché Hector Le Roux prestre de ladite église Saint Laurent.

De la même manière, ledit Estienne Pize, fait « les marchez conventions » avec Pasquet Peuvrier, charpentier de Montlhéry, de desmonter toute la charpente du comble de la nef du prieuré Saint-Laurent, icelle charpente retailler la remonter sur lesdits combles des bastimens, trouver pour les bois rompus d'autres provenant de la desmolition de la première, desmonter iceluy Peuvrier la poultre qui est au dessus de l'aultre chapelle Saint-Laurent…moyennant la somme de six vingts livres.

Enfin, André Champagne fait un marché avec François Janot, masson Limosin de Saint-Germain-lès-Chastres à savoir : « ce dernier s'oblige de bastir et construire tout de neuf, un pignon au devant de l'église de Saint-Pierre du chasteau de Montlhéry avec un pillier de retour semblable à celuy qui est à présent devant et contre la porte de ladite église de l'épaisseur et largeur qu'est le reste du pignon abbatu et desmoly qui est à présent au devant d'icelle église lequel reste de pignon, il sera tenu …(?) de desmolir entièrement du mieux qui luy sera possible mesme le portail qui est encore présent audit pignon desmoly et le plastrer dans le pignon comme faire de neuf. Lequel pignon sera entièrement basti de chaux et sable avec ledit pillier cy dessus mentionné, avec ledit portail bien placé et posé et appliqué. Pourquoy ledit Janot sera tenu de fournir chaux et sable avec sa peine aussi ledit Janot de faire une ouverture de trois pieds de diamètre au dessus dudit portail et prendra ledit Janot la pierre sur le lieu Saint-Pierre en oultre ledit Janot de crespir lesdits bastimens des deux costés…. ». Ce marché et convention est passé moyennant à raison de quatre livres dix sols pour chacune thoise le dit Champagne a promis de bailler et payer soit cinquante livres lorsque le pignon sera eslevé et le surplus lorsque ladite besoigne aura esté parachevée….

Le marché est d'importance, on déshabille Saint-Laurent pour remonter Saint-Pierre. Les travaux se montent à 570 livres, somme énorme en regard du nombre de paroissiens.

Deux ans sont passés et les travaux ne sont pas terminés. François Junot, masson du pays de Poitou, depuis à Saint-Germain-lès-Chastres, recognoit et promet à Messire Hector Leroux, prestre curé de l'église Saint-Pierre et au marguillier, de faire de fond en comble tous les gros murs d'une tour pour passer les cloches de ladite église, au bout de ladite église, du costé dudit Montlhéry, de dix pieds de long sur neuf pieds de large dans l'œuvre et lesdits murs de deux pieds huit pouces d'épaisseur par le bas revenant à deux pieds par le hault, plus les pilliers de grais… de ladite tour de trois pieds en quarré et de fournir par ledit Janot la chaux et sable qui conviendra pour faire les gros murs, vuider les immondices, et de prendre la pierre qui conviendra sur le lieu, ce marché et convention fait moyennant six livres par thoise, ledit Janot s'engage à finir ledit ouvrage le lendemain des festes de Pasques.

Le même jour, Hector Leroux, prestre curé et les marguilliers font avec Jacques Martin, charpentier demeurant à Saint-Germain-lès-Chastres, une convention « ledit Martin s'oblige à monter quatre poultres dans les murs, à faire un clocher dans l'église Saint-Pierre sur icelle … monter les trois cloches qui sont dans ladite église et rendre icelles sonnantes comme aussi de faire deux huuis de bois pour mettre à deux d'icelles cloches au lieu de celles qui y sont, comme pareillement dresser et monter tout le bois qui conviendra pour faire la couverture, ce marché et convention ainsy fait moyennant le prix somme de trente six livres ».

Le mois suivant, Janot et les marguilliers font le thoisé et … Mais c'est une grande dépense que la fabrique ne peut supporter « attendu le peu de revenus », ledit Janot promet de continuer les murs et pilliers d'icelle tour jusqu'à huit pouces au dessus de l'entablement du pignon de la nef du prieuré… le tout moyennant la somme de trois cents six livres.

Le revenu temporel du prieuré au XVIIe siècle

Nous avons vu à plusieurs reprises que seul le curé de l'église Saint-Pierre était résidant à Montlhéry, alors que le prieur de Saint-Laurent n'en perçoit que les revenus. En septembre 1630, Messire Estienne Rose, prestre chanoine de Saint-Benoist de Paris, est prieur du chasteau de Montlhéry. Les revenus seigneuriaux, dîmes et censives, sont affermés le plus souvent à un marchand ou bourgeois de Montlhéry.

Un bail est passé en 1635. Fut présent, Louis Bourdon, marchand, fermier et admodiateur du revenu temporel du prieuré Saint-Pierre du chasteau de Montlhéry, lequel baille à titre de loyer et prix d'argent pour quatre ans à Jean Cordeau, tonnelier de Linois, tout et chacun, les droits de dixmes de fillasse et la moitié des dixmes des cochons de lait et le droit de plassage qui se perçoit le onzième jour de marché qui se fait audit Montlhéry, qui ont accoustumé desja perçuz par les précédents fermiers dudit prieuré Saint-Pierre. Ce bail et prizé aisy faictz moiennant le prix et somme de huit livres tournois…

Les dîmes de La Ville-du-Bois sont affermées en septembre 1651 par honorable homme, Gilles Héaut, marchand, recepveur et admodiateur des revenus du temporel du prieuré Saint-Pierre du chasteau de Montlhéry, à René Chartier, vigneron de La Ville-du-Bois « lequel Héaut confesse avoir baillé à titre de loyer jusqu'à six ans, audit Chartier, les dixmes dudit prieuré sur le territoire du Plessis-Saint-Père et du Petit Rouillon, ledit preneur disant bien congnoistre. Ce bail faict moyennant soixante sols tournois ». Deux ans plus tard, le bail des dixmes dépendant du prieuré Saint-Pierre du chasteau de Montlhéry sur le territoire du Plessis-Saint-Père et Petit Rouillon est passé au profit de François Goix, marchand demeurant à La Ville-du-Bois.

En 1669, un autre marchand demeurant à Linois, Germain Heruet, fermier du prieuré Saint-Pierre du chasteau de Montlhéry, baille à tiltre de loyer et prix d'argent pour l'année présente seulement le droit de dîmage de bled, orge, avoine, vesse et poix, sur les terres dépendantes dudit prieuré, à Pierre Closeau, vigneron de Guyperreux, moyennant 75 livres.

En 1688, Germaine Lubin, bourgeoise de Paris, y demeurant, paroisse Saint-Benoît, laquelle ayant charge et pouvoir et fondée de procuration de Messire Michel Moynet, prieur du prieuré Saint-Laurent de Montlhéry (1), baille le revenu du temporel dudit prieuré, reconnaît avoir baillé à Michel Leroy, marchand demeurant à Marcoussis, toutes les dixmes, tant en bled, en filasse, agneaux et autres quy appartiennent audit prieur sans aucune réserves, sur le territoire de Montlhéry depuis le champtier du Haut-Chaperon, …., moyennant la somme de 60 livres.

Un mémoire datant de 1664 fait l'état des rentes qui sont à Monsieur le prieur Saint-Pierre de Montlhéry « lesquelles ont été vues par Pierre Fontaine et Gilles Hebner, conseiller du prieur pour Ambroise Munier, prieur… ».

Après la résignation du dernier titulaire du prieuré Saint-Laurent de Montlhéry, ordre de Saint-Benoist, Claude Legrand, prestre chantre chanoine en l'église collégiale de Linois y demeurant, se rend à Montlhéry en exécution de lettre de provision venant de la cour de Rome « nous nous sommes transporté en l'église dudit prieuré de Montlhéry trouvée orné de son autel couvert de nappes avec figures représentant l'un le crucifix, l'autre Saint-Laurent et le troisième Saint-Pierre », et a mis en possession réelle Michel Moynet dudit prieuré le 25 janvier 1688.

Le 11 août 1696, le sieur Bodin Despérières fait une acquisition d'un clos par devant Leroy, notaire royal « Michel Moynet prieur du prieuré Saint-Pierre et Saint-Laurent du château de Montlhéry, demeurant à Paris rue Gallande, paroisse Saint-Estienne-du-Mont, lequel pour augmenter le revenu temporel du prieuré, baille à titre de rente non rachetable perpétuelle, à Jean-Baptiste Bodin, sieur Despérières, maire perpétuel de la ville de Montlhéry, juge de police audit lieu… ».

Les deux cantons dîmiers du prieuré Saint-Pierre et Saint-Laurent du château à Montlhéry.

Au cours du XVIIe siècle, il y eut de nombreux procès où le prieur de Saint-Pierre de Montlhéry fut engagé pour la conservation du droit de dîmes tant vis-à-vis de particuliers que des seigneurs voisins. Un conflit pris naissance entre le prieur et les chanoines de Linas à propos de la dîme de grains sur les terres situées entre « le moullin de Biron et celluy de l'estang tout le long de la rivière » alors que les chanoines prétendent en posséder 7 à 8 arpents de « ladite pièce du costé dudit moullin de l'estang ». De son côté, le prieur exhibe un terrier de 1627 où le notaire précise les « dixmes d'agnaeaux, cochons et oysons sur les teroirs de Montlhéry, Linois, Saint-Merry, Longpont et ses appartenances , les dixmes de grains avecq les menues dixmes de chanvre et lin ».

Le canton dîmier s'étend « depuis la Borde de Montlhéry jusqu'au Pressoir le Roy et dudit Pressoir jusqu'à la Croix de Bizon et de ladite croix jusqu'à la rivière dudit Bizon et de la dite rivière jusques au moullin de l'estang et du chemin qui tend dudit moullin au chasteau avecq toutes les terres de dessous ledit chasteau ».

La dîme de charnage et les bouchers de Montlhéry

Le prieur de Saint-Pierre et Saint-Laurent du château possédait le droit de dîme de charnage, c'est-à-dire toutes les dîmes sur les troupeaux d'ovins et notamment sur les agneaux que les bouchers de Montlhéry élevaient dans la plaine de Longpont et sur les prairies de l'Orge fameuses pour produire une viande de qualité. La perception de cette dîme a été l'objet de controverse de tout temps entre le prieur et les bouchers de Montlhéry (2).

Un accord est établi le 30 avril 1720 par acte notarié à l'étude d'Estienne Lhéritier, tabellion royal devant les témoins Jacques Philippe Lhéritier, huissier à cheval au Châtelet de Paris et de Jacques Pachonnet marchand à Montlhéry. Ce sont Simon Angot et Charles Bourgaux, marchands bouchers audit Montlhéry « lesquelles partyes ont dit que pour cesser le procès que ledit sieur prieur étoit prêt de faire auxdits Bourgaux et Angot au sujet de la dixme des toisons et agneaux des troupeaux de moutons et brebis qui se prend sur le territoire de Montlhéry comme prétendant ledit sieur prieur luy appartenir… ». Le traité prévoir qu'il sera payer « le vendredy Saint de chaque année, la dixme à raison de 2 sols par bestiau à layne » et le prieur renonce aux créances du passé.

En présence de deux témoins, maître Jean Mathurin Lemareschal, commis commissaire de police en la prévôté et Pierre Jean Baptiste Cornillier, praticien demeurant à Montlhéry, le bail de « droit de dîme du troupeau de bestes à laine » est passé le 6 avril 1723 par Michel Moinet, « clerc tonsuré de Paris, maître ès arts, licencié ès lois, prieur commendataire du prieuré Saint-Pierre et Saint-Laurent » au profit de Pierre Goix, marchand boucher demeurant à Linois, « moyennant la somme de 3 livres chacun an le jour du vendredy Saint de chacune année échéera audit jour prochain et ainsy continuer d'année en année ». Il est aussi dit que ledit Goix pourra continuer « à exercer son métier de boucher dans ledit lieu de Montlhéry » (3). Un bail identique est passé le 10 juin 1723 aux frères Simon et Jean Angot, marchands bouchers à Montlhéry et Louis Gallin, boucher à Linas.

Dans un procès-verbal dressé le 14 octobre 1723, Messire Richard Laurent, prêtre curé de l'église Saint-Pierre du Château demeurant audit Montlhéry, aurait déclaré que « Maître Jacques Goulard, prêtre archidiacre de Josas, l'auroit fait avertir de sa visitte le 13 du présent mois, il l'a attendu huit heures, ce dernier seroit arrivé aux flambeaux accompagné d'une multitude d'habitans de l'un et l'autre sexe de la paroisse Sainte-Trinité attirez par la curiosité et l'heure indue et avec un si grand bruit d'indécence et de scandale qu'il estoit impossible d'entendre ce qui se disoit, qu'alors il s'éleva plusieurs bruits de malintentionnez qui disoient qu'eû égard au grand âge dudit sieur curé, il estoit hors d'état de faire les fonctions curialles, …, que le sieur archidiacre auroit rebuté et vilipendé le sieur Laurent… ». Nous pouvons imaginer la scène de la populace s'en prenant à un vieux curé ; tous étant terrorisés par la venue du représentant de l'archevêque de Paris et reportant leur terreur sur ce pauvre curé « le sieur curé étourdy, affaibli, vu son grand âge avoit signé un procès-verbal fait par le secrétaire de l'archidiacre ». La mascarade commencée aux flambeaux se terminait par la condamnation d'un membre du bas-clergé sans défense devant l'autorité du vicaire épiscopal.

Un bail à cens, surcens et rente foncière et seigneuriale est passé le 13 juillet 1723 par Messire Michel Moinet, prieur commendataire de Saint-Pierre et Saint-Laurent au profit du sieur François Gaudeau et Barbe Simonneau, sa femme, demeurant à Montlhéry, d'un demi arpent de terre au chantier des Larris tenant au grand chemin royal et sur le chemin de Montlhéry à Nozay, moyennant deux boisseaux et demi de seigle de surcens et rente foncière annuelle, perpétuelle et non rachetable et huit deniers de cens portant lods et ventes. Cette même terre avait fait l'objet d'un titre nouvel par Jean Peuvrier, vigneron à Longpont le 19 mars 1590.

Le 29 juillet 1729, Jean Saugé, curé de l'église Saint-Pierre, disait que n'ayant point de cimetière pour enterrer ses paroissiens est obligé de les inhumer dans ladite église « qui est très petite et pleine de cadavres, ne peut plus en accepter d'autres sans mettre les corps les uns sur les autres…. » et d'ajouter qu'il y a de mauvaises odeurs et demande au prévôt que le cimetière hors la ville réservé à l'église de la Sainte-Trinité soit commun aussi pour Saint-Pierre.

À suivre…

Notes

(1) Le révérend père Michel Moynet, maître ès arts, licencié ès lois, prieur commendataire de Saint-Pierre et Saint-Laurent du château, était archidiacre en l'église cathédrale de Tarbes. Baillant à ferme les revenus du temporel tant du prieuré de Montlhéry que de l'archidiaconé de Tarbes, ce prélat résidait le plus souvent à Paris.

(2) De tout temps, les bouchers ont été des commerçants influents. Les bouchers de Montlhéry élevaient leurs bestiaux dans les prairies nourricières de l'Orge. Au Moyen Âge, la corporation des bouchers à Paris est très riche et puissante et les heurts existaient au sein de la profession parfois avec les consommateurs, souvent avec les seigneurs. Au XVIIIe siècle, le prévôt de Montlhéry avait publié une ordonnance de police pour règlementer l'abattage des animaux et la vente de la viande. Le commerce du bétail est soumis aux mêmes « règles générales qui dominent le commerce des grains ».

(3) Un arrêt du Grand Conseil avait été obtenu le 6 décembre 1731 par les religieux de Longpont contre Pierre Goix et les autres bouchers de Montlhéry et Linois « lequel ordonne que le troupeau dudit Goix trouvé passant sur les terres de Longpont sera vendu au prochain marché, si mieux n'aime, ledit Goix, etc… Signification est donnée le 10 décembre suivant par lesdits religieux de Longpont audit Pierre Goix aux fins de se conformer audit arrest… ».

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