Corpus Essonnien

Histoire et patrimoine du département de l'Essonne

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La vie de Jean de Montagu (2) ses proches parents

Chronique du Vieux Marcoussy ————————————- _————————-Septembre 2009

C. Julien

JP. Dagnot

Nous présentons le deuxième volet de la vie du prestigieux Jean de Montagu, seigneur de Marcoussis, qui fréquenta, à divers titres, les allées du pouvoir royal (1). Rappelons que la première partie avait précisé le titre de chevalerie du Grand maître Gérard II de Montagu (2), dont Simon de La Motte avait écrit « … maintenant que nous sommes parvenu au sujet de notre entreprise, de la noblesse duquel on a tant contesté en se laissant emporter aux apparences sans envisager ce qui en était de plus véritable sans vouloir même s'en informer superficiellement afin de se flatter sur je ne sais quelle formalité de peu de conséquence ».

Après avoir parlé des ancêtres du Grand maître, cette chronique concerne ses proches parents. Car on sait le rôle central de la famille dans le monde médiéval ; l'éducation donnée par ses oncles et les conseils de ses frères ont eut, incontestablement, une grande influence sur la carrière de Jean de Montagu.

L'oncle Jean

Revenons un instant sur nos pas, pour évoquer l'oncle Jean 1er de Montagu, qui eut une carrière aussi prestigieuse que son frère Gérard de Montagu. Nous avons appris qu'il était parlementaire et seigneur de Garigny-en-Brie. Simon de la Motte , qui copia littéralement ce qu'avait écrit Guillaume Pijart, en parle selon ces termes « Jean de Montagu qui ayant été honoré d'une charge de conseiller au Parlement le 17e août 1366, puis de celle de maître des requestres de sa majesté et enfin pourvu d'un office de président au mortier vacant par le décès de Messire Philippe de Paillart [Philibert, selon Pijart] duquel il prêta le serment le onze janvier de l'année 1387 , il l'exerça seulement pendant une année étant mort le 5 avril 1388 . Les messieurs de son auguste compagnie honorèrent ses obsèques de leur présence et le regrettèrent suivant ses mérites. ».

La seigneurie de Garigny-en-Brie avait été achetée par Jean 1er à messire Jean de Chamanville et Jeanne, sa femme, le 26 juin 1379 par devant Maîtres de Baignaux et de Monconseil, son confrère, notaires au Châtelet de Paris. Les trois fils, Pierre, Aleips ou Alexis et Nicolas de Montagu qui survécurent peu de temps après le décès de leur père. À ce sujet Simon de La Motte dit « et eurent pour héritiers Jean de Montagu et ses frères, cousins germains » ; ce qui est faux, puisque ladite seigneurie fut vendue, après 1392, par Isabelle de La Girarde , veuve de Jean à son neveu Gérard II de Montagu, alors évêque de Chartres. Cette terre passa ensuite dans les mains de Jean de Montagu, frère de ce dernier, qui en a gratifié depuis les Célestins de Marcoussis.

Concernant les lettres d'amortissement de la seigneurie de Garigny-en-Brie données en 1412, mentionnons l'aveu et dénombrement de « Isabelle La Girarde , dame de Garigny-en-Brie et de Ozouer en partie, veufve de Monseigneur Jean de Montagu, chevalier, jadis conseiller du Roy, nostre sire, et président en son parlement tant en son nom comme ayant la garde et administration de Pierre, Ailipe et Nicolas de Montagu, enfans dudit chevalier et de moy, confesse et advoue, etc. le 8 juillet 1392 ». Puis, l'auteur rapporte l'acte de foy et hommage rendu le 31 août 1399 à maître Gonthier Col, secrétaire du roi et seigneur d'Ozouer, pour 50 arpents de bois, « assis au lieu dit la Fontaine des trois Charmes ».

A propos de l'armorial de Jean 1er de Montagu, Simon de la Motte ajoute « … ses actes étaient comme celle de son père qui étaient changés aussi bien que son surnom parce que comme il est à présumer étant selon son origine prévenu des sujets de l'empereur qui tenait autrefois le royaume de Bourgogne, sa famille arborait l'aigle déployé au bec et déffence de sable en champs d'or à la bois de sable chargé de huit bezons d'argent. Il voulait témoigner qu'étant né français outre le surnom de Montagu qu'il s'attribuait qu'il veut dire ce me semble ferme et inévitable et devait lui et sa postérité sous ce titre être sincère suivant ce que la pureté de l'argent qu'il a pris pour son champ lui indiquait que les peines et ses veilles et ses soins, ses travaux avec ceux de ces descendans ou l'avait basté pour la gloire et l'honneur de la forme par le croix d'azur qu'il y aussi ? et faire et qu'ils devaient par ensemble y orienter leur triomphe » (3).

L'oncle Ferry

S'il est un homme qui joua un grand rôle dans la vie de Jean de Montagu, ce fut sans aucun doute son oncle maternel, Ferry Cassinel dont on trouve diverses variantes comme Ferric ou Féraud. Nous avons appris qu'il était le troisième fils de François Cassinel, sergent d'armes du roi Jean, et d'Alix Deschamps.

Il serait trop long de détailler la vie de Ferry Cassinel qui fut l'un des plus puissants prélats de son époque. Ce fut un clerc qui vécut dans l'entourage du roi Charles VI, tout d'abord comme notaire et secrétaire. Voici en quelques mots ce que dit Dom Marlot (4) : « Ferry, docteur en l'un et l'autre droict [romain et canon] et doué d'une rare éloquence, fut premièrement archidiacre du Vexin-le-François en l'église de Rouen, et secrétaire du roy, puis évesque de Lodève en l'archevesché de Narbonne, seigneur en partie de Galargues et de Montbus. Le roy Charles, connoissant ses mérites, le transféra en l'évesché d'Auxère, pour estre plus près de la cour et s'en servir en ses conseils. L'histoire marque que Ferry, fit une action de perpétuelle mémoire l'an 1383 : car comme un nommé Jean de Montelon enseignoit publiquement dans Paris que la Vierge avoit esté conceue en pèsché originel, il entreprit sa deffense avec tant de vigueur, qu'après avoir monstre par de fortes et convaincantes raisons la vérité de son immaculée conception, en présence de Sa Majesté, il fit en sorte qu'elle commandât aux adversaires de rétracter leur opinion, et que cette l'esté fût célébrée le mois suivant par toute la France , selon le désir de l'université » (5).

Ferry Cassinel est l'un des ecclésiastiques du chapitre Notre-Dame de Paris, qui, en 1370, était sous l'autorité du doyen Jacques Le Riche. De sa carrière ecclésiastique, nous retenons qu'il fut fait, le 8 août 1368, docteur en décrets (droit romain et droit canon), puis fut reçu docteur en théologie en 1372 et devint évêque de Lodève de 1374 à 1382. Le roi, le voulant près de lui, fut le promoteur de son transfert au siège épiscopal d'Auxerre en 1382 où son frère Bertrand était chantre de la cathédrale « Le roy Charles, connoissant ses mérites, le transféra en l'évesché d'Auxère, pour estre plus près de la cour et s'en servir en ses conseils ».

Il fut également seigneur laïc. Il avait reçut de son père les biens du Languedoc qui avait fait l'occasion d'un procès entre les deux cousins germains Albert et François Cassinel. Il fut co-seigneur et baron de Galargues par succession de son père, seigneur de Sourvilliers par achat à Péronelle de Laistre (6), seigneur de Marcoussis et la Ronce par échange avec le roi. Un acte du 26 mai 1377 nous apprend que Ferry reçut alors le titre de capitaine-général en Languedoc, et que ces fonctions lui valaient des appointements de deux livres en or par jour. Une autre charte du 12 septembre suivant, lui donne le titre de comte de Montbrun qui, depuis un temps immémorial, appartenait aux évêques de Lodève.

Ferry Cassinel portait pour armoiries « Vairé d'or et de gueules, à la cotice d'azur, posée en bande ». Certains auteurs qualifient Ferry Cassinel en tant que vidame de Laon, mais il s'agit d'une erreur, car le vidamé appartenait à son frère Guillaume du chef de sa femme qui le céda à Biette, leur sœur, mère de Jean de Montagu.

Dans sa célèbre chronique, le religieux de Saint-Denis nous dit comment il voyait les docteurs et les professeurs de l'université de Paris. Il y a des orateurs brillants « luculenter », dit-il, comme Jean Petit, il y a des orateurs brillantissimes dont Ferry Cassinel, Jean Courtecuisse et Jacques Legrand qui parle « luculentissime ». Il distingue une élite de professeurs et juge sans ambiguïté Ferry Cassinel comme étant exceptionnel et auquel sa sympathie est acquise, car le critère essentiel est l'éloquence « tulliana facundia », en ce temps où l'humanisme fait son entrée en France.

Suite à une trêve de trois ans conclue avec les Anglais, au début de l'année 1389, le roi se décida à se rendre à Avignon. Outre les indulgences, le pape accorda à Charles VI et aux princes la nomination à beaucoup de bénéfices dont celle de Ferry Cassinel à l'archevêché de Reims, devenu vacant par la mort de Richard Picque, en novembre 1389. Au cours du printemps 1390, le roi Charles VI avait entrepris une visite dans le Midi et y établit un conseil de gouvernement composé de trois commissaires réformateurs dont la mission était de rétablir l'ordre dans un pays épuisé par l'administration du duc de Berry. Ces hauts dignitaires étaient : Ferry Cassinel, archevêque de Reims, Pierre de Chevreuse et Jean d'Estouteville, tous deux chevaliers. Le 24 avril 1390, un règlement général pour l'administration de la ville de Toulouse est rendu par une assemblée de la Chambre des Comptes réunie à Nîmes. Ferry Cassinel mourut en cette ville le mort à Nîmes, le 26 mai 1390, « victime du poison ».

Nous arrivons à la seigneurie de Marcoussis lors de la confiscation des biens de Bernard de Montlhéry « jadis trésorier de nostre Dauphiné étoit redevable envers le roy ». Le roi entend être remboursé des deniers de sa cassette personnelle, celle du Dauphiné. Par un décret de 1386, le roi exerce la saisie féodale sur le chastel de Marcoussis et manoir de la Ronce « qui furent à Bernard de Montlehéry, trésorier du Dauphiné pour la somme de 6.010 francs ». La même année, il sera fait un « eschange perpétuel entre le Roy & Ferry Cassinel du chastel de Galargues pour le chastel et maison fort de Marcoussis et de la maison de la Ronce appartenant jadis à feu Bernard de Montlhéry. Les rentes de ces lieux seront prisées par bonnes gens et amis ». La suite de cette histoire fera l'objet d'une autre Chronique au sujet de la donation de Marcoussis et la Ronce par Ferry Cassinel à son neveu Jehan de Montagu.

L'oncle Guillaume

Le second frère de Biette Cassinel était Guillaume II Cassinel, seigneur de Romainville, de Pomponne et de Ver, qui épousa Isabeau de Châtillon, veuve de Mathieu de Roye. Cette dame était la fille de Gaucher de Châtillon, seigneur de Rosoy et de Clacy, vidame de Laon et de Marie de Coucy fille de Guillaume er d'Isabeau de Saint-Paul (7). Cette famille de Châtillon avait des origines picardes dont les aïeux étaient seigneurs de La Ferté en Ponthieu.

Le vidamé de Laon était entré dans la famille de Châtillon du chef de la mère de Gaucher, Marie de Clacy, épouse de Hugues de Châtillon et fille unique de Baudoin II du nom, vidame de Laon vivant en 1327. Avant d'entrer dans la famille Cassinel, le vidamé de Laon avait été dévolu par succession au fils aîné Gaucher de Châtillon qui le transmis à sa fille aînée Marie de Chatillon. Cette demoiselle avait épousé le 6 mai 1364 Jean de Craon, seigneur de Dommart, frère de Pierre de Craon, celui même qui tenta d'assassiner Olivier de Clisson, connétable de France. Selon le père Duchesne, le vidamé n'entra pas dans la succession des époux Châtillon-Craon car, il aurait été confisqué par le roi Charles VI pour en investir leur beau-frère Guillaume Cassinel, second époux d'Isabeau de Châtillon. La raison était que Jean de Craon avait « suivi le parti des Anglois ».

Cette version ne s'accorde pas avec celle des lettres de la chambre des comptes de Paris, communiquées à M. Mesnage par M. d'Herouval (Histoire de Sablé, liv. X. p.269) qui concernerait une vente du vidamé de Laon, faite par Jean de Craon le 6 mai 1389, pour 9.000 livres tournois à Ferry Cassinel, évêque d'Auxerre. C'est ainsi que plus tard, en qualité d'héritier de son frère Ferry, Guillaume échangea le vidamé contre la seigneurie de Ver qui lui fut cédée par Jean de Montagu, son neveu. Dans un traité de famille réglant la succession de l'archevêque de Reims, Guillaume, son frère Bertrand, ses fils Guillaume et Raoul, déclarèrent, en 1393, qu'une rente de 200 livres à prendre sur le territoire de Nîmes, appartenait à Jean de Montagu, leur neveu et cousin.

Guillaume fut impliqué dans de nombreuses affaires judiciaires de son propre chef ou de celles de son frère Ferry : - dans un procès contre Isabeau de Soisy, dame de Pomponne en 1363. - dans le contentieux suite au décès de sa pupille Marguerite Guy, morte fille en 1374, dont il se réclamait l'héritier universel. Marguerite, orpheline depuis 1366, était la petite-fille de Constance Cassinel et de Jean Guy et la fille de Robert Guy et d'Alix d'Auxy. Guillaume, réclamant, à ceux de la maison d'Auxy, la dot de la mère de sa parente, fut débouté par arrêt du 28 juillet 1403. - en novembre 1385, il mit une enchère de 1.500 livres sur la châtellenie de Saint-Omer, et le décret fut délivré contre le châtelain le 12 décembre. - dans le procès que l'avocat Etienne de Mailly intenta à l'évêque d'Auxerre pour l'avoir mis dans les prisons de l'évêché, en juin 1387, Guillaume fut « ajourné à comparoître personnellement, sur peine de 100 marcs d'argent » et fut finalement condamné par arrêt du parlement, le 28 janvier 1388, à une amende honteuse « sans chaperon et à genoux et à quatre mil livres ». - on le trouve appelant d'une sentence des requêtes du palais, en qualité d'exécuteur testamentaire de feu Adam Le Riche, conjointement avec Philippe Paris, clerc des comptes du roi, subrogé testamentaire.

Guillaume II Cassinel se qualifiait d'écuyer, sergent d'armes du roi Charles V. En 1371, il recevait 30 francs d'or pour ses gages de deux semaines, taxées par le roi à deux francs par jour. L'année suivante il recevait 10 sols parisis par jour pour sa solde de sergent. En septembre 1386, Guillaume servait, à Arras, sous le comte de Dammartin « en la chevauchée que le roi entendoit faire au païs d'Angleterre ». Il devint maître d'hôtel de la reine Isabeau de Bavière en 1389, suivant une ordonnance de Charles VI du 11 septembre de cette année.

L'oncle Guillaume avait fondé une chapelle dans l'église de Sainte-Catherine du Val-des-Ecoliers, il mourut le 27 avril 1413 et y fut inhumé.

La fratrie de Jean de Montagu

Différentes versions existent sur la descendance de Gérard de Montagu et Biette Cassinel. De ce couple sont nés trois garçons et trois filles. Simon de la Motte les nomment comme suit : - l'aînée, Jehanne, épousa le seigneur de Buconville-Châtillon « Qui comme il se voit au titre de notre église avait son écu pallé d'or et de gueulles de six pièces au chef d'or et sur le tout en face un lambet d'azur à trois pendants chargé chacun de deux bezans d'or » dit Simon de la Motte. Le roi Charles VI lui avait fait don de 2.000 francs pour aider au mariage de Johanna, la fille de son secrétaire ; deux quittances de Gérard de Montagu père, signées de sa main, constatent que les noces eurent lieu en 1391. - la seconde, Robine, s'allia le 22 décembre 1384 avec Guillaume de Chaumont, seigneur de Guitry au Vexin français, chambellan du roi qui porte « facelés en berne le tout d'argent et de gueulles de six pièces ». - la troisième « pour ne pas pouvoir découvrir de quelle maison sont les armes de Monsieur son mary qui sont d'or à la collier de gueulles de gauche à droite de sable chargé de trois molettes ou étoiles d'argent, l'alliance nous est inconnue » avoue Simon de la Motte. - l'aisné des fils a été Messire Jean de Montagu, Grand Maître de France, notre fondateur [du couvent des Célestins de Marcoussis] dit Pijart. - le second, aussi Monseigneur Jean de Montagu, filleul de son oncle paternel, de même nom [il s'agit de Jean Cassinel fut chevalier de l'Hôpital Saint-Jean de Jérusalem] fut évêque de Chartres et depuis, archevêque de Sens. Il est mort glorieusement selon le monde en la bataille funeste d'Azincourt le 25 octobre 1415. - le troisième, Monseigneur Gérard de Montagu, de même nom que Monsieur son père, il a été évêque de Poitiers et puis de Paris, après avoir servi le Roy en son Parlement en la cour des aides.

Le Père Anselme donne une variante en ce qui concerne les sœurs de Robine de Montagu. Ce généalogiste dit que l'aînée des filles fut Géraude de Montagu, morte sans enfants d'Hennequin Lescot en 1381 ; son père fut héritier d'elle. La sœur cadette se prénommerait Alix qui épousa le 24 juillet 1401, Jacques de Pavyot, échanson du roi, seigneur du Mesnil et de Boissi.

Robine de Montagu

Guillaume Pijart est beaucoup plus précis sur la généalogie de la famille de Montagu, alias Le Gros , en donnant les descendants de Robine, dame de Chaumont-en-Vexin du chef de son mari. Robine de Montagu, sœur de Jean épousa, en 1384, Guillaume V de Chaumont, seigneur de Quitry et de Chaumont-en-Vexin, en partie, chambellan du roy Charles VI, duquel elle eut Guillaume, Louis, Jean, Charles, Jehanne, Jacqueline, Isabeau et Marguerite, dont on possède quelques détails biographiques : • Jehanne, la fille aînée, épousa Baudrin de la Heuze , chambellan du duc de Berry. • Marguerite fut mariée à Louis, seigneur de Sainte-Mesme, chambellan du roi. • Guillaume VI de Chaumont, chevalier, seigneur de Quitry et Boissy, fut chambellan des roys Charles VI et VII ; à peine majeur, reçut la charge de son père à la mort de celui-ci en 1402. Il fut récompensé en 1418 du comté de Chaumont pour les services qu'il avoit rendu à la couronne des guerres contre les Anglais, laquelle comté ses ancêtres avoient autrefois tenus. Puis en 1424, il fut général réformateur des Eaux et Forêts. Il épousa en 1408, Jeanne de Millo, fille de Dreux de Millo, seigneur de de Rigny-le-Ferron , de laquelle il eut Antoine, Jean, Jeanne. Antoine de Chaumont épousa Jeanne Martel, fille du Buriau Martel et de Jeanne de Jouy, lequel Buriau Martel étoit fils aisné de Guillaume Martel seigneur de Barqueville, dont Julian, Guillaume et Catherine. L'auteur du cartulaire de l'abbaye de Saint-Martin de Pontoise continue cette lignée par : « messire Julian de Chaumont, qui espousa dame Heleine du Fay, et de luy est isseu Guillaume de Chaumont qui espousa dame Adrienne de l'Isle ; duquel mariage est issu Anthoiue de Chaumont qui espousa Jehanne d'Assy, duquel mariage est issu L'Inthimé, sieur de Guitry, nommé Jehan de Chaumont ».

• Louis fut trésorier de l'église de Saint-Martin de Tours, la plus haute dignité de cette abbaye. Il vivait encore en 1416 et donna à Antoine, son neveu, tous les héritages qui lui étaient advenus par le décès de ses père et mère et de Jacqueline, sa sœur.

• Jean, valet du roi en 1404.

• Jacqueline de Chaumont avait épousé Messire Jacques de Bouconvilliers, chambellan du roy.

• Isabeau de Chaumont épousa en 1414 Jacques d'Auxy, chevalier, fils de David, sieur d'Auxy et de Marguerite de la Trimouille.

Le contrat de mariage de Guillaume de Chaumont, dit Lyon ou Lionet, sire de Forest, chevalier et Robine de Montagu fut passé par devant deux notaires du Châtelet de Paris le 22 décembre 1384. Richard de Chaumont, père de Guillaume, transportait à son fils, toutes les terres, seigneuries, justices, fiefs, arrière-fiefs, cens et rentes lui appartenant à Guitry, Forest, Rocquencourt, Boissy-le-Bois, Chaumont, Bazincourt et autres lieux, à charge de 300 livres de pension viagère. De leur côté, les parents de Robinette, maître Gérard et damoiselle Biette sa femme, lui constituent une dot de 1000 livres d'or. Robine fut plus tard attachée à la maison d'Isabeau de Bavière ; le 15 juillet 1397, son mari donnait quittance au receveur général des aides pour la guerre, d'un acompte de 100 livres sur 500 revenant à la dame de Guitry « pour sa part de mil livres d'or que le Roy avoit données à la dite dame et à la dame de Gamaches, en considération des services qu'elles avoient fait et faisoient chaque jour à la Reine ». Un crédit pour gratification aux dames d'honneur imputé au budget de la défense nationale, c'est un virement quelque peu audacieux !!

Écu de la famille Chaumont-Montagu.

Dans son testament du 10 mars 1402, Guillaume « ordonne sa sépulture à Boissy-le-Bois auprès de monsieur son père et de madame sa mère ; il lègue diverses sommes à ladite église et à celle de Guitry où il avoit été baptisé, et à Jehan d'Avernes son valet ; il veut que ses robes de tous les jours soient données pour Dieu, où il plaira à sa femme ; il lègue à Jehannine de Chaumont 100 livres tournois pour la marier ; à Perrinet de Chaumont son harnois à armer tout entier avec son meilleur cheval ». Il désigne pour exécuteurs testamentaires “ ses bons et loyaux amis ” : l'évêque de Chartres, Jehan de Montaigu son beau-frère, Jehan de Montaigu, vidame du Laonnais et maître d'hôtel du roi, Guillaume Cassinel, oncle de Robinette, chambellan de Charles VI, noble homme Gérard de Montaigu, archevêque de Sens, conseiller du roi, messire Adam de Gaillonnel, chevalier, Sauvage des Boves, et « sa bonne amie et compaigne ». Robine de Montaigu fit abandon à son fils aîné de tous ses droits, sauf cent livres de rente viagère sur la terre de Boissy-le-Bois, et l'usufruit du domaine de Boisgarnier acquis pendant son mariage. Les deux prélats s'obligèrent en quatre mille écus d'or à bailler en garde à sire Jehan Chanteprime, conseiller d'Etat, pour être employés en acquisitions d'héritages. Ils s'engagèrent à obtenir les désistements des frères et sœurs mineurs de Guillaume, ainsi que des deux filles aînées. Les archives du chapitre de Sens renferment deux autographes de« Guillaume de Chaumont, chevalier, chambellan, sieur de Quitry », datés de 1411 et 1412 ; le premier est une quittance donnée, comme procureur de son oncle l'archevêque Jehan de Montaigu, de 15 livres tournois et d'un cheval de même prix « pour l'utilité de monsieur mon oncle ». Peut être s'agit-il du destrier qui porta l'archevêque à la journée d'Azincourt, où il périt le 25 octobre 1415. En 1413, Robert la Heuse , dit Baudran, fut élu prévôt de Paris en la place de Pierre des Essarts. « Il avoit de la naissance, du service et une telle réputation de probité, que le duc de Bourgogne ne s'y opposa pas, quoique la Heuse eût épousé une petite-fille de Montaigu ». Il s'agissait de Jeanne de Chaumont, fille aînée de Guillaume II, seigneur de Quitry, et de Robine de Montaigu.

Le frère archevêque

Jean de Montagu, troisième du nom suivit une carrière de clerc pour atteindre les plus hautes dignités de l'Église et de l'État, puisqu'il fut tour à tour évêque de Chartres pendant quinze ans, président des Comptes, chancelier de France et archevêque de Sens « archiepiscopum Senonesem de Monte Acuto ». Il fut d'abord trésorier de l'église de Beauvais, conseiller et clerc en Parlement en 1390. Il séjourna à Avignon comme camérier (8) du pape Clément VII, et « à son retour de la Cour apostolique, honnoré par le Roy de l'estat de conseiller en son conseil estoit le président en la Chambre des Comptes en 1398 » . Nommé au siège épiscopal de Chartres, il avait succédé en 1389 à Jean Lefebure et, après sa translation à l'archiépiscopat de Sens en 1406, eut pour successeur Martin Gouge.

Le 28 août 1393, Jean III de Montaigu, évêque de Chartres, fit estimer des objets légués par son prédécesseur, afin d'en bailler bonne et suffisante caution : l'estimation monta à 414 francs d'or. «Testamentum domini Johannis Fabri, quondam episcopi Carnotensis » (charte CCCXCV de N.-D. de Chartres). Outre les objets précieux relatés dans le testament de Jean Lefèvre, Jean de Montaigu, par un acte du 21 mai 1393, reconnut avoir reçu des exécuteurs testamentaires de son prédécesseur : - «Premièrement, en la chapelle de l'ostel de Paris, ung autel, prisé LX sols parisis - Item, à Chartres, en la chambre nommée le Trésor, une tunicle et ung domaticle de taffetas noir d'une part et d'autre part de taffetas vermeil, prisées XVI livres tournois. - Item, au pressoir de Chartres, une cheville de fer et une dolouere, prisées ensemble X sols tournois ; plus une grande cuve contenant VI muys ou environ ; plus ung pressoir et la couverture. - Item, en la sale de la Potence , ing grant banc à dossier et à marches de mi toises de long ; plus une table de ladicte longueur ; plus ung dressoir à estaiges. - Item, en la chambre du Trésorier , ung petit buffet et une petite fourme. - Item, en la chambre maistre Mahieu à Saint-Estienne, ung grant pontifical de grosse lettre, couvert de cuir blanc, commencent en la mie ligne après la rubrice Jacentem mundum.

Le roi décida, en 1392, de translater le corps de Saint-Louis de Paris dans la sépulture des rois à Saint-Denis ; « de translatione corporis sancti Ludovici » dit le religieux de Saint-Denis dans sa chronique (p. 34). On convoqua un grand nombre de prélat pour la translation des reliques, parmi lesquels on remarquait Jean III de Montagu, évêque de Chartres « dominus Johannes de Monte Acuto Carnotensis » (9). Dans cette chronique, l'auteur décrit une météorologie catastrophique « les plus grands fleuves de France, s'étant trouvés à sec, ne purent servir au transport des marchandises… On souffrait beaucoup de cette sècheresse, non-seulement il ne tomba point de pluie, mais la terre, desséchée jusque dans ses entrailles, fournit à peine l'au nécessaire aux sources. Dans certains lieux, cette disette d'eau [deffectus alibi aquarum] fit de grands ravages parmi les troupeaux, qui mouraient de soif sur le bord des fontaines et des ruisseaux, ou succombaient à des maladies contagieuses ».

En cette même année, Charles VI convoqua son ost pour aller punir le duc de Bretagne « il partit en grand attirail de guerre, mais attendant les ducs de Berry et de Bourgogne, il leur envoya des ordres tels, qu'il y avait crime de rébellion à ne pas les exécuter ». Il fut reçu à Chartres au palais épiscopal « avec les ducs de Bourbon et d'Orléans, par le frère du sire de Montaigu qui tenait le siège de l'évêché ». Le roi resta sept jours à Chartres, puis prit le chemin du Mans. Nous savons la suite malheureuse de cette équipée.

En 1395, en tant qu'évêque de Chartres, Jean III faisait copier un dictionnaire de théologie catholique, pour l'usage de son diocèse. Il devient premier président de la Cour des comptes, le 19 février 1398. Il reçut du roi, le même mois, une gratification de 2.000 livres pour ses bons services. Il en reçut une autre le 9 juin suivant pour acquérir une maison à Paris où il s'installa.

Créé chancelier de France en 1405 et archevêque de Sens en 1406. Selon Pijart il ne fit son entrée qu'en l'an 1414, « le jour de sainte Catherine accompagné de son frère Girard de Montagu, evesque de Paris, de Pierre d'Angers abbé de Saint Pierre le Vif, Guichard de Jerre abbé de Saint-Colombe, de Nicolas Braque, grand maistre d'hostel du Roy ». Le 1er août 1408, le clergé de France fut convoqué par le roi à Paris afin de pourvoir au gouvernement de l'Eglise de France. La séance d'ouverture, qui eut lieu que le 11 de ce mois dans la Sainte-Chapelle , fut présidée par l'archevêque de Sens, Jean III de Montagu. Jean fut destitué de sa charge de chancelier et rétabli dans celle de président de la Cour des comptes, le 10 novembre 1413.

Le 18 octobre 1399, Jean III de Montaigu recevait la concession d'une maison et dépendances, située à Goui de la part de Jean III de Poissy et sa femme Elisabeth de Trie. « A tous ceulz qui ces lettres verront ou orront, Jehan de Poissy, chevalier, seigneur de Gouy, salut. Savoir fais à tous que j'ay baillié et donné à tousjours més …. à Jehan de Monteingny le jeune, demourant à présent avec moy, pour les bons et agréables services qu'il m'a fais ou temps passé et que je ay espérance qu'il me face pour le temps [avenir], ce qui sensuit : c'est assavoir, une masure avec les gardins et terrez appartenais à icelle, laquelle masure, gardins et terre j'avoye nagaires eue par eschange de Martin Coten et de sa femme, à cause d'elle, fille de feu Guillebert le Piquart, laquelle masure est tenant d'un côté aux hoirs Regnont-Alles, et d'autre costé la voie qui maine de la rue de Gouy à l'église, d'un bout au chimetière de la dite église, et d'autre bout à la dite rue ; le dit gardin d'un costé Richard Roussel et d'autre costé les dis hoirs, et d'un bout au chimetière de la dite église. La première pièce de terre jouxte moy d'un costé ut d'autre aux hoirs Vatier-Regnont, et d'un bout au chemin ; l'autre pièce, au camp Guérault d'un costé et d'un bout à moy ; la tierce, d'un costé aux religieux de Saint- Ouen et d'un bout à moy et d'autre bout à la voie qui vient du bost de ….à la rue aux Dames, pour le pris et somme de vint soulz tournoiz de rente à paier à deux termes en l'an, c'est assavoir Pasques et Saint-Michel. Premier terme de paier à Nouel prouchain venant et auxi par en paiant deux chappons chacun an au terme de Nouel, ce est pour toute rente. Item ay baillé au dit Jehan une pièce de terre contenant vint acre, la quelle fu Guillaume des Haiez d'un costé, Jacques Regnont, Guiffroy le Vaillant d'un bout, et d'autre bout à moy, pour le pris et somme de six soulz de rente rendus chacun an au terme Saint-Michel. Lez quelles choses dessusditez je lui promet garantir et délivrer envers tous et contre toux se mestier est, par en paiant lez dites rentes aux termes dessus dis. En tesmoin de ce j'ay scellé ceste lettre de mon propre seel, faitte le XVIIIe jour d'octobre l'an mil CCCIIII XX dix-neuf ».

Il est difficile de préciser toutes les ambassades et missions qui ont été dirigées par Jean III de Montagu. Ce prélat est « si plein de bienveillance et d'affabilité » nous dit le moine Michel Pintoin. Bien souvent, il était accompagné par le secrétaire du roi, Gontier Col, les frères Pierre et Louis Blanchet, Jean de Sains ou Jean Hue. Ces ambassades sont envoyées à Boulogne et à Leulinghen pour négocier avec les Anglais ou à Avignon résoudre le schisme avec le pape. L'évêque de Chartres s'est trouvé également accompagné par de grands seigneurs comme le sire de Tancarville, le vicomte de Melun et le Grand maître d'Hôtel, son frère.

Pijart décrit dans mes moindres détails les aventures de l'archevêque de Sens à l'époque de l'arrestation de son frère « … cependant qu'on faisoit le procès à Messire Jean de Montagu, l'archevesque deschu son frère estoit à Amiens où il attendoit en vain depuis long temps les Ambassadeurs d'Angleterre pour la prolongation de la trêve entre les deux couronnes ». On avait envoyé un huissier arrêter le prélat, mais « ayant eu des gardes, il s'échappa adroitement de leurs mains sur le bord de la rivière d'Oyse » et le religieux de Saint-Denis de préciser « emprès la praerie de Saint-Leu de Sérens, auquel fleuve il déceut ledit huissiier très subtilement, car quant il fut yssu de la nef avec aucuns de ses gens, il monta sur le plus léger cheval qu'il eust, et s'en fuy ». Il se retira dans l'armée du duc d'Orléans « où il parut en équipage de capitaine… ». Et de conclure qu'à partir de ce jour, il fut condamné en perpétuel exil (10). À Sens sa maison et ses meubles furent donnés à la faveur du duc, « à un seigneur de son party ; mais devant quoy ont dit transporté, certain inconnu y mit le feu, qui brusla » nous dit Pijart, et l'usurpateur « en fut bien mari ».

La guerre civile reprend, en 1411, quand le duc d'Orléans assemble son armée composée de ses gens d'armes et des troupes des Armagnacs. Il avait avec lui, outre ses vassaux, toute une noblesse et des chevaliers au nombre de six mille dont l'archevêque de Sens, Jean III de Montagu auquel les Bourguignons avaient saisi les domaines, comme ceux de son frère l'évêque de Paris. « On n'avait pourtant d'autre crime à leur imputer que d'avoir pleuré leur frère le grand-maître d'hôtel ».

Le 13 novembre 1411, l'archevêque de Sens est nommé avec « tous les grans signeurs de la maldicte bande des Arminaz » sur le parvis de Notre-Dame ( Journal d'un bourgeois de Paris , p. 16). En présence du duc de Bourgogne et au milieu d'une affluence considérable de peuple, un frère mineur déclara excommuniés le duc d'Orléans et ses complices « et là, devant tout le peuple, fut maudicte et excommuniée toute le compaignie des Arminaz, et tous leurs aidans [amis] et confortans… Ils furent excommuniez de la bouche du Sainct Père, tellement qu'ilz ne povoient estre absoulz par prestre nul, ne prelat, que du Sainct Père et en article de mort… ».

Jean III de Montagu avait changé la mitre contre le casque , et la crosse d'évêque pour la hache de l'homme d'armes. Il fut tué lors de la bataille d'Azincourt en 1415 et « fut plaint pour ce que ce n'estoit pas son office ». Pijart écrivit « On dit qu'il fut le seul des ecclésiastiques qui ne craignit point qu'on luy reprochast d'avoir trempé son bras dans le sang des ennemis, qu'il y fit tout le devoir d'un grand courage, et que s'estant porté dans tous les dangers, il paya de sa vie l'estime qu'il s'estoit acquise, comme fit pareillement le vidame de Laonnois, son neveu ». On l'enterra dans son église cathédrale de Sens.

Le frère évêque

Gérard (ou Girard) de Montagu le jeune fut clerc et l'un des hauts dignitaires de l'Eglise au début du XVe siècle. Comme nous l'avons vu précédemment, il suivit les traces de son père en commençant sa carrière à la Chambre des Comptes à partir de 1384. En 1391, il devint garde des Chartes et des archives royales et conserva ces deux offices jusqu'en 1403 lorsqu'il fut pourvu au siège épiscopal de Poitiers « domni Gerardus de Monte Acuto, Pictavorum epicopi ». Vers la même époque, Girard de Montagu, évêque de Poitiers , cède à son frère Jean, la seigneurie de Garigny et dépendances qu'il avait achetée de madame Isabelle de la Girarde , veuve de Jean 1er de Montagu, son oncle, mort le 5 avril 1388. En l'an 1395, il fut pourvu du bénéfice d'archidiacre de Cambrai par le pape Benoît XIII pour remplacer Pierre d'Ailly (11).

En 1404, il devient chancelier du duc Jean de Berry, puis succédant à Pierre II d'Orgemont, il occupa le siège épiscopal de Paris depuis le 25 juillet 1409 . Le 7 octobre avait été jour de grande messe dans la capitale : messire Gérard de Montagu faisait son entrée, selon toutes règles et coutumes. Cette époque est celle de la construction du monastère des Célestins à Marcoussis. Le couvent étant parfait et achevé en 1408, l 'église fut consacrée et dédiée sous l'invocation de la très Sainte-Trinité, le 17 avril « qui étoit le mardi d'après la feste de Pasques » dit Simon de la Motte ; la dédicace faite par Jean de Montagu, alors évêque de Chartres, en présence du fondateur et madame sa femme, du prieur Étienne de Comblans, du prince Jean de France duc de Berry, oncle du roi, d'une multitude de seigneurs et « des vénérables chantre et doyen de Linois et de messieurs les curés des environs ». Le lendemain, les bâtiments conventuels furent bénis par Gérard de Montagu, évêque de Poitiers.

Vitrail qui existait dans l'église du couvent des Célestins de Marcoussis (XVe s.).

En 1411, Gérard de Montagu, évêque de Paris en compagnie du chancelier Henri de Marle, du prévôt Tannegui du Châtel, d'Etienne de Mauregard et de Philippe de Corbie étaient les seuls conseillers du dauphin Louis, instrument dans les mains des membres du parti Armagnac. Âgé de 14 ans, le prince était faible et l'avait laissé choir dans la débauche et la luxure (12). On l'avait accoutumé à croire qu'il suffisait pour être vertueux de « se montrer bon armagnac », et l'on excitait son irritabilité. Les deux camps s'invectivaient copieusement « tant au temporel qu'au spirituel » nous dit le moine de Saint-Denis.

Après l'arrestation et la décapitation du Grand maître, la situation devint très difficile pour l'évêque de Paris et ses partisans. Il s'enfuit un moment avec sa belle-sœur, dame Jacqueline de La Grange se refugier chez la parente de celle-ci en Savoie « et aucuns de ses enfans, car le duc de Berry avoit jà pourveu d'un autre chevalier en l'office de sa chancelerie. Et ala en la terre de sa belle fille, assise en savoie. Laquelle estoit fille de sire Estienne de La Granche , jadis président en parlement, et frère au cardinal d'Amiens ».

Bouillant partisan armagnac, Gérard de Montagu n'eut de cesse de venger la mort de son frère et celle du duc d'Orléans. En 1414, il prit une grande part à défendre la mémoire de ce dernier contre le cordelier Jean Petit (cf. la chronique “ Le Grand maître et le frère Cordelier ”). En 1416, il excommunia le duc de Bourgogne « ducem Burgundie ». Voici se qu'en dit le religieux de Saint-Denis : Comme le glaive temporel de la royauté était impuissant à réprimer les maux déplorables causés au royaume de France par le duc de Bourgogne et par ses gens de guerre, il fut décidé, d'après l'avis d'une assemblée composée de personnages pris parmi les trois ordres des citoyens de Paris, que le vénérable évêque de Paris, Girard de Montaigu, « Parisiensis venerabilis antistes, dominus Girardus de Monteacuto nominatus » tirerait contre eux le glaive spirituel, comme juge ordinaire et exécuteur des bulles perpétuelles données par monseigneur le pape Urbain V de sainte mémoire. Une procession générale fut ordonnée le jour de la saint Clément.

Le dictionnaire encyclopédique de Lebas désigne les frères Jean III de Montagu et Girard II de Montagu comme premiers présidents clercs de la Chambre des comptes de Paris pour les années respectives 1406 et 1413 (13). Dans la chronique de La Pucelle , l'auteur rapporte en l'an 1413 : « Le joedi desrain jour d'aost ensuivant, les adversaires Bourgongne, c'est assavoir les enfanz d'Orléans, etc., entrèrent à Paris à grant joye que leur adversaire n'y estoit pas, et trouvèrent le roy, la royne, l'archevesque de Sens [ Jean III de Montagu ], l'evesque de Paris [ Gérard II de Montagu ] et le duc de Bretaigne et firent tenir au roy lit de justice, mardi 5 e de septembre ensuivant et pristrent tel apointement comme il voulent. Et Bernard d'Armygac entra à Paris le jour de la Sainct-Michel ensuivant ». La riposte ne se fit pas attendre : l'évêque de Paris, homme simple et paisible « utique simplice viro et quieto », privé par ordre du roi et comme proscrit, de toute communication avec les fidèles du diocèse, n'avait d'autre tort que de déplorer et de blâmer comme une injustice la condamnation de son frère.

Gérard de Montagu était un des membres les plus importants du parti des Armagnacs « le plus fors en loy d'Armagnagnerie ». Mais à partir de cette époque le privilège ecclésiastique (l'Eglise pouvait abriter un meurtrier sans que celui-ci soit inquiété) commença à faiblir, et les troubles qui survinrent contribuèrent surtout à sa ruine. En 1416, Girard de Montagu, évêque de Paris, voulut protéger diverses personnes que les Armagnacs firent saisir dans l'église des Quinze-Vingt. Le service fut interrompu et les offices cessèrent. Mais, l'évêque n'obtint pas le même succès que son prédécesseur, les Armagnacs ayant eux-mêmes aposté des prêtres pour rouvrir l'église et officier malgré l'évêque.

Il s'était enfui de Paris, en octobre 1418, pour se réfugier au château de Malesherbes en Orléanais, puis auprès de sa nièce, la comtesse de la Marche , à Valère en Touraine et y meurt le 25 septembre 1420. « Il fait son testament fort avantageux pour nostre maison, constituant Jeanne de Montagu, sa niepce seule exécutrice, mais ses intentions à celle de sa dite niepce eurent peu de leur effet » dit Pijart. « Son corps fut apporté avec celuy de ladite Jeanne sa nièce, dans l'église des Célestins à Marcoussis et inhumé avec celuy de Jean de Montagu, grand maistre dhostel du Roy, son frère, devant le maistre autel sous un tombeau de pierre et non de marbre comme escrivit Desnochard », ajoute-il.

Parmi ceux qui n'acceptèrent pas la solution anglaise du traité de Troyes, une voix s'est élevée avec clarté, celle de l'évêque de Paris lui-même, Gérard de Montagu. Sa dépouille fut transférée au couvent des Célestins de Marcoussis, où une pierre était chargée d'une épitaphe « par laquelle on apprend que c'est la sépulture de Gérard de Montaigu, évêque de Paris, qui mourut neuf ans après son frère » a écrit Pijart.

À suivre …

Notes

(1) Le lecteur pourra consulter la longue et belle histoire du règne de Charles VI « Chronicon Karoli Sexti » écrite en latin par Michel Pintoin, dit « le Religieux de Saint-Denys », qui fut éditée et traduite par L. Bellaguet, en six volumes parus de 1839 à 1852.

(2) Pijart donne les armoiries de Jean 1er de Montagu identique à son père Robert « de plus timbré sur le casque d'un mortis » et La Girarde « d'azur à la bande d'argent et en bordure d'or chargé de neuf tourtiaux d'azur ».

(3) Le Grand maître de France était appelé autrefois « souverain maistre d'hostel du Roy », tel par Pijart. Il avait le commandement et la surintendance sur les officiers de la bouche et maison du roi. Il recevait le serment de fidélité de ces derniers et disposait de leurs charges.

(4) Dom Guillaume Marlot , Histoire de la ville de Reims , vol. 4, ch. XXIX (chez Jacquet, Reims, 1846) p.122.

(5) Ferry Cassinel força Guillaume de Vallan, évêque d'Évreux, partisan de cette doctrine, de rétracter le 17 février 1389, en présence du roi, ses erreurs à ce sujet, et il engagea le roi à ordonner que l'on célébrât dans le royaume la fête de la Conception , et que l'on fit publiquement rétracter les partisans de Monteson.

(6) Il en fit présent à Marie Cassinel, sa nièce, lors de ses noces avec Gaucher de Châtillon, seigneur de Troissy et de Marigny.

(7) Les vidames de la maison de Châtillon portaient pour brisure « une aiglette de sable à dextre sur le chef ».

(8) ) Le chambrier ou camérier « cubiculari » désignait ce qui appelle un camerlingue, responsable de la chambre à coucher du pape. Par conséquent, cet officier était un familier du Saint-Père.

(9) Le moine mentionne que ce fut l'occasion d'une grande distribution de reliques. « On donna une cote à maître Pierre d'Ailly pour le pape Clément, deux autres aux ducs de Berri et de Bourgogne, et un os aux prélats qui étaient présents, pour qu'ils le partagent entre eux ». On chanta « le répons Quum esset rex in accubita » ; puis une procession solennelle eut lieu avec les Vénérables Religieux.

(10) Doit-on faire croire à un historien moderne qui dit « les deux prélats, frères du Grand maître devaient encourir aussi la vengeance du duc de Bourgogne. L'archevêque de Sens, menacé d'être arrêté, put se réfugier à Blois auprès du duc d'Orléans ; mais l'évêque de Chartres n'obtint sa liberté qu'au prix d'une rançon exorbitante » ? [c'est une erreur de discernement que de prendre l'évêque de Chartres pour l'évêque de Paris].

(11) L'archidiacre était primitivement le chef des Diacres, mais depuis longtemps ce titre était conféré à un prêtre qui visitait les églises de son district, surveillait l'emploi de leur revenu, faisait rendre les comptes aux marguilliers, connaissait des matières provisionnelles, et qui devait se juger sur-le-champ, mais pour la plupart de peu d'importance.

(12) Louis, duc de Guienne, né en 1397, est le second dauphin depuis la mort de Charles, son frère aîné (1392-1398). Ce dernier meurt à Paris le 18 décembre 1415 à l'âge de dix-huit ans. Il est resté dans les mémoires comme un prince épris de paix « ce fut grant dommage pour le royaume ; car il avoit grant désir de tenir son peuple en pais ». Son frère Jean, duc de Touraine, devenu le troisième dauphin meurt le 5 avril 1417, laissant la place à son cadet, Charles qui deviendra le roi Charles VII à la mort de son père le 21 octobre 1422.

(13) Depuis l'ordonnance de Philippe le Long donnée au Vivier en 1319, la Chambre des comptes avait, dans l'origine, deux présidents, l'un clerc, qui était archevêque ou évêque, l'autre laïque, qui était chevalier ou baron.

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