Corpus Essonnien

Histoire et patrimoine du département de l'Essonne

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   * 5e des [[:yerres#abbesses|45 abbesses d'Yerres]] (1226-1244).   * 5e des [[:yerres#abbesses|45 abbesses d'Yerres]] (1226-1244).
   * Autres graphies: en latin //Avelina//.   * Autres graphies: en latin //Avelina//.
-  * [[eustachie.dulers|Abbesse précédente]] — [[ermengart.dyerres|Abbesse suivante]].+  * [[eustache.dulers|Abbesse précédente]] — [[ermengart.dyerres|Abbesse suivante]].
  
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   * **Chapitre V. — Aveline (1226-1244)**   * **Chapitre V. — Aveline (1226-1244)**
-    * //La communauté est gouvernée par le chapitre. — Pierre de Nemours. — Les donateurs. — Noms de quelques religieuses du XIIIe siècle. — Les aumôniers ou chapelains. — Les seigneurs d’Yerres. — Mouvement religieux. — Yerres envoie une abbesse à Saint-Remi de Senlis. — Nombreux chevaliers bienfaiteurs du monastère. — Acquisitions. — Transactions. — Le chapelain Guillaume se fait Frère-Prêcheur.//+    * //Dix religieuses nommées Aveline. — L'abbaye à son apogée sous tous les rapports. — Périmètre de ses biens. — Les reliques. — L'humble abbesse. — Affaires diverses. — Guillaume d'Auvergne. — Les arbitres. — L'Official. — Les délégués du Pape. — Donation de livres. — Mort d' Aveline.//
  
-  * Pour porter la crosse tombée des mains de l’abbesse Ève, les religieuses firent choix d’une des plus anciennes moniales du cloîtreà qui les actes donnent fréquemment le nom de //Vénérable//. Elle s’appelait //Eustachie Dulers//, dit l’un des obituaires du couvent. Devant l’autorité de ce manuscritforce est de nous inclinerautrement nous l’eussions crue volontiers fille de Jean ou de Baudouin de Corbeilet mêmemalgré l’appellation si nette du nécrologeil nous reste certains doutes à ce sujet. Les actescependant assez nombreux, passés sous son gouvernement sont fort sobres de détails biographiques et restent tout à fait muets sur sa parenté. +  * Pour recueillir la succession d'Eustachie Dulers, les religieuses firent choix de l'une d'entre ellesappelée //Aveline//. À ce moment-là l'abbaye ne contenait pas moins de dix moniales portant ce nom; on y trouvait Aveline de CorbeilAveline de GarlandeAveline de Chevreuse, Aveline Briard et plusieurs autres. Toutefois il est probable, pour ne pas dire certain, que nous sommes en présence d'Aveline de Corbeil, fille de Jean de Corbeil et de Carcassonne. L'abbesse avait une sœur nommée Avelinecomme ellequi avait épousé, avant 1196, Guy III, seigneur de Chevreuse. Certains indices porteraient même à croire que notre abbesse était fille de ces derniers, et petite-fille de Jean de Corbeil. Les rédacteurs du nécrologevenus assez peu de temps après la mort de cette abbesse, ont fortement hésité sur son nomet leurs hésitations se sont traduites dans la rédaction de son obit; ils n'ont indiqué ni son âgeni les années de son gouvernement. Cependant une chose est certaine, c'est qu'elle fut élue par les suffrages de ses sœurs, sans la participation d'aucune personne étrangère; le règlement élaboré par Étienne de Senlis à l'origineétait complètement oublié: la nouvelle titulaire se contenta de demander à l'évêque de Paris de la bénir. |**55** 
-  * En montant au siège abbatialelle se trouvait à la tête d’une importante communautédont elle était l’âme assurément, mais qui en dehors d’elle avait déjà ses lois, ses usages, ses traditions, ses organes, en un mot tout son gouvernement. Tandis que les premières abbesses semblaient absorber la communauté tout entière, cest maintenant le chapitre qui a une tendance à tout absorber, en sorte que dans les actes, l’abbesse occupe toujours bien la première place, néanmoins |**45** on sent qu’elle est un peu reléguée au second plan. Désormais, c’est le chapitre qui reçoit, vend, achète, transige, en un mot représente les intérêts majeurs de l’association. +  * Au moment où Aveline prit la crossel'abbaye était à son apogée sous tous les rapports: le nombre de ses religieuses était toujours considérable; il dépassait encore le chiffre de 80fixé par les ordonnances du roi et du pape. On s'en plaindra bientôt de nouveau. Sa fortune était considérable; pas une paroisse dans les environs du monastère, où celui-ci n'eût des biens et des redevancesDe plus son action s'étendait dans un immense cercledont les rayons allaient toucher jusqu'à MelunPithiviers, Étampes et au-delà dans la plaine de Beaucepour passer ensuite par RambouilletMeulanConflans-Sainte-Honorine et revenir par VillepinteMitry, Lagny, Brie-Comte-Robert et Combs-la-VilleSur plus de cent cinquante fermes, granges, vignes, forêts, péages, ponts, moulins, clochers, situés dans cette grande circonférence, notre monastère prélevait des droits de toute nature, pour alimenter sa caisse et subvenir aux besoins de la communauté
-  * Ce fut lui notamment quiau mois de février 1211, sans même le concours de l’abbesseconclut un arrangement avec l’archidiacre Adam Maunouri, suzerain de Drancy, où nos religieuses possédaient une ferme importante et des biens considérablesL’archidiacredu consentement de sa mèrede son beau-père et de sa sœurnommée Eustachiecomme notre abbessefaisait don d’un septier de blé à prendre sur sa terre, et priait son évêque de sanctionner son bienfait de l’autorité épiscopalePierre de Nemours se prêta volontiers au désir de son archidiacre. Il favorisa même d’autres donations et scella grand nombre de contrats pour venir en aide à l’abbaye+  * Elle était belle et bien réglée cette communauté dont la vie offrait à tous un sujet d'édification. Le culte y était célébré avec pompe et magnificence; les fêtes religieuses fort nombreuses et les exercices du chœur très multipliés. Deux causes avaient surtout contribué à ce développement: les anniversaires des mortsdont la multiplicité allait bientôt amener des inconvénientset la dévotion des reliques((**Note d'Alliot.** — Voici la liste des reliques de l'abbaye aux environs de 1240: //De Innocentibus; — de sancto Firmino episcopo et martyre; — de sancto Adriano; — de sancto Leodegario; — de Lapide super quem oravit Dominus quando suscitavit Lazarum; — de sancto Theobaldo confessore et de cilicio ejusdem; — de quercu Mambræ ubi apparuit Dominus Abrahæ; — de Lapide Calvariæ in quo crux Domini fixa fuit; — de Pulvere lectuli beati Martini in quoquum ægrotareta Beata Maria matre Domini cum sanctis virginibus Agnete et Tecla visitatus et sanatus est; — de Petra super quam natus est Dominus ; — de Petra in qua sedit Dominus in monte Oliveti; — de Lapide in quo scripsit Dominus//Pater noster//; — de Camisia Beatæ Mariæ; — de sancto Petro Apostolo; — de Johanne Baptista; — de Capillis sancti Thomæ apostoli; — de Mensa ubi tres Magiadorato Dominorecubuerunt; — de sancto Jacobo apostolo; — de Ossibus sancti Barnabæ apostoli; — de sancto Andrea ; — Cornelio ; — Cypriano ; — et de aliis quadringentis ; — de Pulvere sanctorum DyonisiiRustici et Eleutherii; — de Casula et Dalmatica et de Baculo pastorali eorumdem; — Quatuor Dentes sancti Urrici cum maxilla; — Pectus sancti Thomæ Cantuariensis; — de Oleo sanctæ Katharinæ; — de Sepulcro sancti Lazari fratris Mariæ et Marthæ.//)). Des esprits forts ne manqueront pas de sourire au sujet |**56** de l'authenticité de quelques-unes des reliques vénérées à YerresLes incrédules auront tort; car les religieuses savaient quedans plusieurs cas, elles n'avaient qu'un symbole; mais ce symbolecomme les reliques véritablesétait l'objet d'une fête particulièreaccompagnée d'une instructionfaite par l'abbesse ou par l'un des chapelains; en sorte que ces moniales, dont les critiques modernes s'efforceront de railler l'ignorance et la crédulitéétaient fort instruites sur les choses religieusesseule science qui leur importât
-  * De ce nombre, sont la donation de quatre arpents de terre à Lieusaint, faite par Pierre Paner et Jeanson filssanctionnée par Payen, vicomte de Corbeil ((**Note d'Alliot** — Ce vicomté de Corbeil n'appartenait sans doute pas à l'ancienne maison et famille de Corbeil.)); — celle de Foulques Carrels et d'Aalie, son épouse, relative au péage de Broui, affirmée par Guillaume de La Ferté; — celle d'une vigne à Étiolles, donnée par Thibaut, fils de Fanie, et consentie par Gilon d'Étiolles; — celle de Renaud de Champsqui donna par testament tout son fief du Plessisainsi que les bois du même lieucet acte fut confirmé dans le palais même de l'évêque, par Agnès, veuve du donateur; — celle d'une dîmesise à Varennesdonnée à Agnès de Pontoise, religieuse de l'abbaye; — celle de Thierry, fils d'Hugues de Chantelouentré dans la cléricature, qui légua par moitié à l'abbaye et au curé d'Évry, la dîme des novales ((**Note d'Alliot** — //Novales//— Terres nouvellement défrichées et cultivées.)) sur les terres d'Éremburge et d'Adeline de Poligny, parentes du donateur et toutes deux moniales à Yerres. +  * Pieuses et dévotes, les sœurs d'Aveline avaient aussi une vie très austère et gardaient une observance régulière parfaite. Celle-ci cependant commençait à fléchir et l'austérité à s'adoucir un peuLes dernières donationsayant pour but la célébration des services anniversaires à l'abbayeportent presque toutes qu'un certain prélèvement sera faitsur les revenus léguésafin d'offrir aux religieuses un repas un peu plus somptueux après la fatigue de l'Office des mortsComme ces anniversaires se multiplièrent rapidementon eut bientôt de ces petites fêtes tous les jours; car les ressources de la communauté augmentant sans cesseles moniales elles-mêmes votèrent, sur leurs revenusde semblables prélèvementsmême pour les anniversaires de leurs abbesses, et de quelques-unes de leurs compagnes, qui en fondèrent égalementPuisce sont les amis plus zélés qu'intelligents du monastère, qui donnentdonnent et donnent encorepour améliorer la //pitance//c'est-à-dire la nourriture des religieusesSi légitimes que fussent à l'origine ces actes de bienfaisanceils amenèrent peu à peu le bien-être au cloître; et avec le bien-être et les repas somptueux, la violation du silence, le besoin des récréations prolongées et du repos, puis l'inobservation de la règleenfin tous les vices destructeurs de la vie religieuse se glissèrent par là dans le monastèrecomme les serpents à travers les lézardes des vieux murs
-  * Pierre de Nemours prêta encore son concours a un contrat important, par lequel Guérin d'Igny ((**Note d'Alliot** — //Igny//. — Cant. de Palaiseau, arr. de Versailles.))et sa femme Béatrice vendirent à l'abbayepour la somme énorme de 126 livres parisisla dîme de Trembleceau, en la paroisse d'Évry. Ce contrat |**46** avait une importance considérablecar il fut appuyé par deux chevaliers, Guillaume Chéronne d'Évry et Guy de Gercysanctionné par, Renaud et Pierre d'Egreneul, ainsi que par Jean et Guy de Garlande comme suzerains, en présence de l'Official de Paris. +  * Mais au début de l'abbatiat d'Avelineil n'en n'était pas encore ainsi. La nouvelle titulaire était d'une douceur angélique, et aussi d'une piété fortecapable de la préserver des dangers du relâchement. Vraie fille de Saint-Benoîtelle était d'une humilité remarquable, qui se traduisit pour la |**57** première foisdans les actes publics concernant l'administration de sa maison. //Avelinahumilis de Edera abbatissatotiusque ejusdem loci conventussalutem in vero Salvatori//; telle est la formule employée par l'abbesse; c'est la constatation authentique des vertus privées de la Supérieure, et en même temps de la part que les religieuses prennent à la gestion des affaires de la communauté ((**Note d'Alliot.** — L'acte qui nous donne cette formule est une lettre de l'abbesse elle-mêmecontresignée par Regnauddoyen de MelunC'est un bail à vie fait à Simonprêtrec'est-à-dire curé des PortesAveline lui loue les deux tiers des dîmes de sa paroisse, moyennant onze sols parisis de rente annuelleLe curé devra en outre payer les deux tiers de la cire nécessaire à l'église, les deux tiers du droit de synode, les deux tiers des cordes pour sonner les cloches, les deux tiers du vin destiné à laver l'autel le Jeudi-Saint, et les deux tiers du pain et du vin pour le repas offert, par l'abbaye, aux communiants de sa paroisse le jour de Pâques. Ce contrat fut fait au mois d'avril 1227; il était parfaitement connu des auteurs du //Gallia Christiania//, puisqu'il se trouve dans le cartulaire, et c'est une simple coquille d'imprimerie qui leur a fait dire 1237: par conséquentla découverte que prétend en avoir faite M. Mévil se borne à une simple rectification de date.))
-  * Malgré les preuves réitérées de bienveillance données par Pierre de Nemours, on est en droit de se demander s'il conserva jusqu'à la fin son affection au couvent d'Yerres, car, dans le partage de ses biens et de ses ornements, fait en 1218, avant son départ pour la croisadeoù il mourut devant Damiette, il laisse un souvenir à presque tous les monastères du diocèse de Paristandis qu'il ne nomme pas même les Bénédictines d'Yerres+  * Comme sous les abbatiats précédents, elles furent nombreuses et compliquées les affaires concernant l'administration du couvent. Les donations gratuites y occupent toujours une large place. Gilbertvicomte de Corbeil, assisté de son frère Ansel et de sa femme, nommée Amable, donne par testament à l'abbaye tout ce qu'il possédait à //Silviniacum//?  Il loue en même temps une libéralité faite aux religieuses par Simon Strabonhabitant de Corbeil— Jean d'AubervilliersJulienne, son épouse, Henri, son frère ((**Note d'Alliot.** — Cette famille d'Aubervilliers descendaitselon toute vraisemblance, de Hugues le Louppremier du nom.)), et Drouin de Briearrondirent le domaine déjà considérable du monastère au nord de Parisen lui léguant vingt arpents de bois dans la forêt de Bondy— Puis ce sont les donations de rentes en naturequi pourvoient à la nourriture des religieuses. — Évrard de Chevryson fils Milon, déjà chevalier comme son père, sont des amis dévoués de la maisonils lui donnent un muid de bléà prendre tous les anssur la dîme de Brie. — Le moulin d'Athis fournira également un muid de blédonné par Philippe de Monsqui favorise encore la donation d'un arpent de vignefaite par Thomas de Vignoles, dont il est le |**58** suzerain. — Jean de Thiais et sa femme Aveline offrent tout ce qu'ils possèdent à Villeneuve ((**Note d'Alliot.** — //Villeneuve-Saint-Georges//. — Cant. de Boissy-Saint-Léger, arr. de Corbeil (S.-et-O.).)). Ce contrat nomme un certain Robert d'Yerrestombé dans le dénuement et la pauvreté. — Une autre Villeneuve, située dans la paroisse d'Angerville-la-Gaste, devra fournir à nos religieuses un muid de bléservi par le prieur de Notre-Dame-du-Préprès Étampes. — Noble dame Ermengarde Borée donne aussi un muid de blé à prendre chaque année sur le moulin de Vaux, ce qui est ratifié par Simon de Vaux. — Philippe de Brunoy et sa femme Élisabeth offrent 12 deniers de cens annuel, au mois de mai 1234. — Mais c'est toujours la famille le Loup qui tient la tête dans la liste des bienfaiteurs de la maison. En 1227Hugues le Loup, chevalier et seigneur de Villepintepasse un titre nouvel de 60 sols de rente, légués jadis à l'abbaye en pure aumône par Eustachie de Villepinte. — En 1233Adeline ou Adelvie de Villepinte donne aux moniales deux muids de blé et 40 sols à prendre sur son domaine. Ses deux fils, Hugues et Guy le Loup, s'associent à la libéralité de leur mère, et leur sœur Aveline entre comme novice au monastère, où elle perpétuerasous tous les rapports, les grandes traditions de vertus et de bienfaisance de sa famille
-  * Dans les premières années de l'abbatiat d'Eustachie, le monastère reçut de Roger la Pie, sept livres de rente à prendre chaque année sur le port de Conflans ((**Note d'Alliot** — //Conflans-Sainte-Honorine//. — Cant. de Poissy, arr. de Versailles.)); et cette libéralité nous met au courant des modifications apportées par le temps au prieuré de Saint-Nicolas. L'œuvre de Guillaume d'Étampes n'avait pas subsisté plus de 70 ans, sans subir un changement notableOn se souvient que le prieuré se composait de religieux prêtres pour le service de la chapelle, et de frères, pour l'administration du temporel de la communauté. Avant 1210, il n'y avait plus de prêtres faisant partie de l'association; seuls des frères laïques, mais portant l'habit bénédictincontinuaient l'œuvre des premiers moines, et l'un d'euxfrère Huguesremplit pendant plus de 30 ans, les fonctions de procureur de l'abbaye, avec zèle et autoritéDès lors néanmoins, les religieuses et les frères formaient deux associations bien distinctesayant des intérêts différents et parfois contradictoires. L'abbesse avait toujoursil est vrai, la haute main sur la chapelle Saint-Nicolasrenfermée dans son enclosmais on sent qu'elle était parfois obligée de compter avec les hôtes de son prieuré. +  * Cependant l'abbesse n'eut pas qu'à recevoir des libéralités et des aumônes pour lesquelles on est toujours d'accord; elle connut les épines et les difficultés inhérentes au gouvernement d'un vaste domaine territorialAcquérir de nouveaux droits et de nouvelles propriétés était bien; mais il importait aussi de conserver avec soin les possessions anciennesOr, un certain nombre de titres commençaient à vieillir, et les changements apportés par un siècledans les choses humaines; sont nombreux. L'abbesse Aveline eut la premièrece semble, l'idée ou du moins la charge de faire passer des //titres nouvels//Elle en réclama surtout des descendants d'anciens bienfaiteurs. Hugues LoupIIIe du nomlui en fit quelques-unsElle en demanda également aux Briard, et Guy Briard, dès 1227, fit avec empressement droit à sa demande. |**59** 
-  * Cependantcomme il fallait des prêtres pour l'administration des sacrements et les soins spirituels du monastère, nos Bénédictines eurent dès lors des chapelainshôteseux aussi|**47** du prieuré, mais auquel ils n'étaient point attachés par des vœux, et par conséquent plus libres et plus indépendantsCes chapelains étaient au nombre de trois quand Eustachie prit la crosse; la donation de Roger la Pie porta leur nombre à quatre; et le donateur statua que ce quatrième prêtre dirait chaque jour la messe pour le repos de l'âme d'Adeline de Villepinte, sa femme, de l'abbesse Èvesa belle-sœur, et de lui-même, après son décès+  * Plus difficiles furent les reconnaissances d'autres droits modifiés par le temps. La première moitié du XIIIe siècle vit de nombreux défrichements dans le voisinage de Paris. Ces terresmises en valeurdurent payer certaines dîmes qu'on n'avait pu imposer à des terrains incultes. Ces dîmes furent appelées //Novales//; dénomination également appliquée aux nouvelles cultures. Aveline eut beaucoup de peine à percevoir ces nouveaux droits. Il fallut luttericiavec des chevalierssuzerains du territoire; làavec des fermiers avidesdésireux de jouir des avantages créés par leurs mains laborieusesqui refusaient le paiement des droits nouveaux; partout, avec les curés des paroisses, qui voulaient garder pour eux seuls les dîmes novales
-  * Autour du couvent, il s'opérait aussi des changements qui devaient avoir leur répercussion dans les annales du cloître. Lors de la fondation de l'abbaye, c'est-à-dire vers 1130la seigneurie d'Yerres était possédée par des chevaliers que nous avons rencontrés sous les noms de Guillaume, d'Hugues et de Thierry d'Yerres. Un peu plus tard, la famille du Donjon posséda le domaine seigneurial en partie et conjointement avec les représentants de l'ancienne famille. En 1203par suite d'une alliance avec les du DonjonJean de Courtenaysixième fils de Pierre de Courtenaydevint seigneur d'Yerres en partieet dès lors les représentants de cette branche de l'illustre maison de Courtenay se trouveront en rapports constants avec notre monastère, et joueront un certain rôle dans son histoire ((**Note d'Alliot** — Jean de Courtenay, dont il est ici question, était fils de Pierre de Francefils de Louis le Gros et d'Adélaïde de Savoie. Il devint seigneur de Courtenay par suite de son mariage avec Elizabethdame de Courtenay— Jean, leur sixième fils, devint, par sa femme, seigneur d'Yerres en partie, l'autre partie appartenant à Beaudoin du Donjon, son cousin. —— Armes des Courtenay: //d'or à 3 tourteaux de gueules posés 2 et 1//. — Yerres: //armes de Courtenaybrisées d'un lambel de 5 pendans de sable//.)). +  * Au milieu de ces embarras, l'abbaye trouva un puissant protecteur et un habile conseiller en la personne de Guillaume d'Auvergne, évêque de ParisCe prélatmonté au trône épiscopal en 1228, reprit en faveur d'Aveline et de ses fillesles grandes traditions de ses illustres prédécesseurs, Étienne de Senlis et Maurice de Sully. En maintes circonstancesil prêta son concours à l'abbessepour l'aider à sortir de ses difficultés. 
-  * Enfinl'abbaye n'était pas étrangère au grand mouvement religieux du XIIIe siècleLe célèbre décret du concile de Latran, tenu en 1215, ordonnait à chaque fidèle d'accomplir le devoir pascal dans sa paroisse. Il eut un grand retentissement dans la chrétienté tout entièreet partout on fit des efforts pour favoriser son exécutionPour leur part, nos religieuses en encouragèrent l'application dans toutes les paroisses soumises à leur abbaye. Elles donnèrent quatre septiers de blé à l'église paroissiale d'Yerres, pour faire des petits pains et de la soupe à distribuer le Jeudi-Saint, après l'office. |**48** Même distribution faite aux paschalisants d'Évry, le jour de Pâques, et à ceux de Lieusaint le mercredi suivantCette aumône se nommait //la Done//; elle était l'occasion d'une véritable fête paroissialeque l'abbesse elle-même ou la prieure allait presque toujours présider. +  * Au mois d'août 1228, Guillaume nomma trois chanoines de Paris pour conclure un arbitrage entre Aveline et le curé de Drancy. Dans cette paroisse, l'abbaye possédait l'un de ses plus anciens domaines. Il s'étendait jusqu'à la forêt de Groslayqui fut défrichée dans ce temps-là. Le curénommé Nicolas, prétendait avoir la dîme des novales que l'abbesse lui contestaitIl produisit au débat un titrepassé près de quarante ans auparavantentre le couvent et l'un de ses prédécesseursnommé Raoul, ce qui fit condamner les religieuses à lui payer chaque année un muid de blé sur leur dîme. D'ailleursles arbitres réduisirent considérablement les prétentions du curéet leur sentence mit pour un temps fin à la dispute qui devait pourtant renaître. — Même difficulté entre Guillaume, curé de Brunoy, et l'abbaye, touchant la dîme de certaine maison sise à la limite de la paroisse, et donnéeau dire de l'abbesse, à son monastère par Philippe de BrunoyPierre de Bourgeschanoine de Paris, vient à Yerresconvoque les parties dans |**60** l'église abbatiale, et là, invoquant le bien de la paix plutôt que le droitappuyé sur la volonté formelle de l'évêque de Paris, il adjuge un tiers de la dîme contestée à l'abbesse présente, un tiers au curé de Brunoy, l'autre tiers demeurant en litige entre le prieur de Marolles et le susdit curéCet arbitrage fut prononcé le jeudi avant le dimanche //Lætare//au mois de mars 1233. — En 1236il en fallut un également, pour régler un désaccord, né aux portes mêmes de l'abbayeentre le monastère et Guérincuré de la paroisse d'Yerres. Il s'agissait de la dîme des novales et de celle d'une maison récemment construite par Jean d'Yerres. L'abbé d'Yvernaux et Thomascuré de Chevreusefurent désignés comme arbitres. Ils accordèrent un demi-muid de blé au curé, à prendre chaque année, dans la ferme des religieusesle jour Saint-Martinils dirent doucement à l'abbesse qu'elle était un peu trop exigeantemais la maintinrent néanmoins dans tous ses droits et privilèges sur la cureLe curé de Chevreuse mourut sur ces entrefaites, mais Guillaume d'Auvergne promulgua la sentence arbitrale au mois d'août 1237— Le même prélat imposa de son chef et sans l'intermédiaire d'arbitresau mois d'avril 1241un autre arrangement entre Aveline et Pierrecuré d'Évry. Celui-cicomme tous ses confrères de l'époque, voulait percevoir pour lui seul la dîme des novales et certains autres droitsL'évêque lui accorda la petite dîme de sa paroisseperçue autrefois par le couvent, mais il donna les novales au monastère; qui reçut en outre, au mois d'août de la même année, tous les biens que Jeubertprédécesseur de Pierre à la cure d'Évry, possédait à Gercy
-  * Les décisions du concile de Latran eurent également pour résultat de développer parmi nos Bénédictines le culte du Saint-Sacrement, et c'est à partir de cette époque que la divine Eucharistie fut conservée d'une manière permanente dans l'église abbatialeservant de nouvel aliment à la piété de nos moniales+  * Ce n'était pas seulement auprès des prêtres de paroisse, placés directement dans sa sphère d'actionque Guillaume d'Auvergne exerçait son influencepour augmenter la prospérité du couvent, il agissait aussi près des laïques ses diocésains. Sous son contrôle bienveillantune pieuse femme, dame Éremburge du Chêne, donna en partie et vendit en partie une rente de 30 sols parisisassise à Brevannes ((**Note d'Alliot.** — //Limeil-Brévannes//. — Cant. de Boissy-Saint-Léger arr. de Corbeil (S.-et-O.).)). Les |**61** quatre enfants d'Éremburgeses trois fils et sa fille souscrivirent à ce bizarre contratque ratifia également Héron d'Étiollesau mois de juin 1228Quelques années plus tardau mois de mai 1234un certain Adam du Bois, sa femme Héloïse et ses filssignèrent un arrangement absolument semblable pour un cinquième de la dîme de Chevryc'est-à-dire qu'ils en donnèrent une partie et vendirent l'autre. Il est probable que ces contrats avaient pour but de déguiser, à une législation déjà tracassièresoit une libéralitésoit une vente pure et simple. 
-  * Durant l'abbatiat d'Eustachieles religieuses de Saint-Remi de Senlis eurent recours à l'abbaye d'Yerres pour lui fournir une abbesse. N'ayant pu s'accorder pour élire l'une d'entre elles, elles demandèrent, par l'entremise de Garin leur évêqueà Eustachie de leur envoyer une supérieureLa maison d'Yerres s'empressa d'accéder au désir exprimé par les sœurs de Saint-Remi; mais nous n'avons pu apprendre le nom de cette Titulairequi emmena avec elle deux ou trois monialespour l'accompagner dans son nouveau cloître ((**Note d'Alliot** — Cet évènement fut invoqué plus tard pour autoriser les injustes prétentions de l'abbaye d'Yerres sur Saint-Rémi; car Eustachie et sa communauté choisirent elles-mêmes la religieuse qu'elles jugèrent idoine à porter la crosse; tandis que. d'après le règlementSaint-Rémi devait élire une religieuse. Il est vrai qu'en pratique cela devenait difficilepuisque les sœurs de Saint-Rémi ne connaissaient aucune des moniales d'Yerresil fallait bien que le choix fut dévolu à quelqu'un.))+  * Jeanseigneur d'Yerres ((**Note d'Alliot.** — Il s'agit ici, évidemment, de Jean de Courtenay, le premier de cette famille qui ait possédé la seigneurie d'Yerres, et de Clémence, qui lui apporta la moitié de ce beau domaine.)), et Clémencesa femme, reconnaissent devant le prélat, que l'abbaye a droit au quart des moutures sur le moulin du Pont, situé entre le couvent et le village d'Yerres. Toutefois le blé du châtelain ne sera soumis à aucune retenue; il gardera en outre les droits de justice et de pêche ((**Note d'Alliot.** — M. Mévil dit tout le contraire.)) ainsi que le choix du meunier; celui-ci pourtant devra rendre hommage aux religieuses. — Le même jourJean et Clémence sanctionnèrent encore le prélèvement de 25 sols de rentedonnés à l'abbayepar Hugues de Limeilsur une maison de Brunoy et occupée par Avelineveuve de Jean l'Apostole. Les frères et les fils du donateur souscrivent à cette libéralité
-  * Yerresd'ailleurspouvait sans inconvénientfournir des sujets aux maisons de son ordre, car les moniales affluaient toujours dans ses mursMalgré les prescriptions de Philippe-Augusteon avait continué à donner le voile à de jeunes recruesbien avant que le nombre des religieuses fut ramené à 80et cela avec l'autorisation de Pierre de Nemoursce rigoureux observateur de toutes les lois. +  * Quand l'évêque n'agissait pas en personne, il était suppléé par un clerc de sa chancellerie, l'//Official//, personnage remplissant des fonctions juridiques, et dont l'importance grandit considérablement au début du XIIIe siècle. Il remplaça souvent le prélat. Ce fut lui quiau mois d'avril 1235notifia la donation assez importante, faite à l'abbaye, par Jean de VillepetiteCelui-ci léguait, en pure aumône, 45 sols parisis de rente, à prendre sur des biens nouvellement acquis de Pierre le Lico et de sa femme Aveline. — Dans le même temps, Odon Briard reconnaît devant l'official, que feu Gilbert de Villecresnes a donné en aumône des masures, dont les religieuses peuvent jouir sans opposition du suzerain— En 1237Herbert de Brie |**62** lègue à l'abbaye sous le sceau de l'officialitéquatre arpents de terre à Hercesplacés sous la suzeraineté de Guillaumedamoiseau de Combs-la-Ville. C'est l'origine de la ferme de Hercesqui, agrandie successivement par des dons et des acquisitionsdevint l'un des plus beaux biens du monastère
-  * Dès 1213Agnès de Garlande, femme d'Aubert d'Andreselavait amené au couvent sa fille Eustachieou nous la retrouverons plus tard. Pour dotelle lui donna 60 sols parisis de rente à prendre sur son domaine de Combs-la-Ville; et en |**49** 1223 ses deux fils, Jean et Aubert d'Andresel ((**Note d'Alliot** — //Andresel//. — Cant. de Mormant, arr. de Melun (S.-et-M.).)), et son neveu Anseau de Garlande confirmèrent cette libéralité. — Le même Anseau approuva également l'abandon de douze arpents de terre à Attillyfait par Adeline de Seureà l'occasion de la prise de voile de sa fille. — Pierre Bore consacre aussi à Dieu sa fille Aveline, et à cette occasion il donne à l'abbaye un muid de blé à prendre chaque année sur le moulin de Vaux, ce qui est approuvé par Simon et Henri de Vaux, les deux seigneurs suzerains du moulin. — Les trois sœurs de l'évêque d'Orléans, Agathe, Agnès et Alix de Jouy entrent toutes trois à l'abbaye et reçoivent de leur pèreGuy de Jouy, 60 sols de rente, à prendre à Monthaudier, à condition qu'une partie de cette rente reviendra à la famille après le décès de la dernière des trois sœurs. — Bouchard du Coudraypour favoriser l'entrée de sa sœur en religion, donne à l'abbaye la grande et la petite dîme du Coudray, et par le même acte se porte pleine pour une redevance due par Yves d'Yvry. Ce dernier acte fut passé au monastère, en présence de Barthélemyévêque de Paris (1223-1227), et de plusieurs officiers de la maison épiscopale, dont Bouchard lui-même faisait partie+  * L'intervention pacifique de l'évêque de Paris ou de son official ne suffisait pas toujours àh régler les difficultés de jour en jour plusnombreuses créées à l'abbaye; il fallutà maintes reprisesrecourir à la justice du roiEn 1233, deux baillis royaux, Nicolas de Hautvilliers et Galeran de Crosnes durent intervenir pour régler le différendsurvenu entre l'abbesse Aveline et les quatre frères: Guy, Milon, Giles et Robert de Linasau sujet de 20 sols de rente, que ces chevaliers refusaient de payer aux moniales. Un accord fut conclu, et douze ans plus tard, en 1245, Guy de Linas étant mort, son fils Philippe reconnut qu'il devaitpour sa part, 10 sols de rente à l'abbaye. — Pour régler un certain nombre de ces difficultés et afin d'éviter des déplacements trop fréquents, l'abbesse n'intervenait pas toujours elle-même, elle se faisait remplacer par un procureur, comme il arriva en 1240, lors d'un grand procès au sujet de la ferme de Brie-Comte-Robert. Dans ce procèsla communauté se trouva forcée de plaider contre les curés et le seigneur de Briele monastère de Saint-Victor de Pariset le prieur de Marolles. Pour ces litigesun frère convers de Saint-Nicolas était presque toujours chargé de représenter les intérêts de l'abbaye. Une fois cependant, nous voyons ces fonctions remplies par un certain Garnier, dit le diacre, lequel ne vivait pas dans les murs du monastère
-  * Ce n'était pas seulement par des apports dotaux que le monastère voyait sa fortune s'accroître chaque jour en rentes et en terres. Sans cesse des bienfaiteurs anciens et nouveaux s'intéressaient à sa prospérité et réclamaient ses prières. +  * Comme la maison d'Yerres avait été placée sous la protection  du Pape, à plusieurs reprises, des délégués de l'autorité pontificale intervinrent dans la direction de ses intérêts temporels. Par deux fois, durant l'abbatiat d'Aveline, cette intervention se manifestaD'abord, afin de faire cesser la querelle entre l'abbesse et Hugues de Puiseletpauvre écuyer, auquel il semblait dur de payer à Yerres les redevances prélevées sur une grande partie de son domaine, principalement sur des vignes, plantées quarante ans auparavant, |**63** et jusque sur son propre jardin— En second lieucontre Guérin de Bouclainval, pour le forcer à payer 30 sols de rente à l'abbayeà cause de certaines terres sises à Saint-Prixdans le diocèse de Chartres. Depuis lors on ne vit plus l'autorité papale, appelée au secours de l'abbaye, dans le domaine des choses temporelles. 
-  * Dès le temps de l'abbesse Clémence, Thierry de Bouville avait donné au monastère des droits et des cens sur huit ou dix terresEn 1213l'un de ses descendantsThomas de Bouville et Ifémieson épouse, donnent aux moniales, avec l'approbation d'Hugues de Bouville et de Guillaume le Grifonsleurs suzerainstout ce qui leur restait de l'ancienne dîme de Bouville— Milon de Lieusaint, accorde trois arpents de terre à Savigny. — En 1219, Amicie de Breteuil, veuve de Baudouin du Donjon, dame d'Yerresfait don de la moitié du moulin de Pontdont la bizarre propriété totale appartenait à quatre ou cinq particuliers— Adam du Bois et sa femme Héloïse donnent en pure aumône 90 livres de rente à Chevry. |**50** L'abbaye reçoit également, en pure et perpétuelle aumône17 sols 3 deniers de cens à Corbeillégués par Ferry de Gazeranallié à la famille de Corbeilc'est pourquoi Pierre du Donjon et Meunier de Gazeran contresignent cet acte. — La comtesse de Crosne donne un muid de bléà prendre chaque annéesur le moulin de Crosne, acte approuvé par Milon de Cussyson suzerain+  * Le gouvernement d'Aveline se poursuivit et se termina au milieu d'une prospérité croissanteEn 1241l'abbesse, toujours appuyée de l'autorité épiscopale, écrivit une lettre pour maintenir les droits de sa maison, sur des biens à Gercy, qu'un basochien, Pierre de Gercy et sa femme Édeline, aidés de Gilbert, curé du Lys, s'efforçaient de soustraire aux charges contractées envers l'abbaye. — L'année suivante elle recueillit la riche offrandefaite à son monastère, par le damoiseau Philippe de Noyen en Gâtinais, qui donna 100 sols parisis, à prendre chaque année, sur le moulin de Noyen (//de Noemio//). Ce legs était fait en faveur de sa sœur Élisabeth, religieuse du cloître, et il devait être réduit à 40 sols après le décès de la moniale, morte d'ailleurs peu de temps après son frèreJean de Noyen, fils de Philippe, fit réduire cette rente à 30 sols en 1271; mais par contre, il se montra encore plus libéral que son père, car il donna aux religieuses 10 livres pour leur nourriture, 20 livres pour leur église et 20 livres pour les besoins du couvent
-  * Beaucoup d'autres donations ou confirmations de biens viennent encore consolider la fortune du couvent— En 1225, Aveline de Corbeilépouse en premières noces de Guy III de Chevreuse, et en secondes de Pierre de Richebourgconfirme à l'abbaye les 40 sols de rente, à prendre sur la prévôté de Chevreusedonnés jadis à l'abbaye en faveur d'Agnès de Chevreusesa fille, l'une des anciennes moniales du cloîtreMilonHervé, Adeline et Cécile de Chevreusefrères et sœurs de la religieusesouscrivent à cet acte; et il est remarquable que leur mèremalgré son second mariagey prend encore le nom de dame de Chevreuse. — C'était l'époque des nouvelles libéralités de la famille de Corbeil. Renaud du Donjonappuyé par ses frères Baudouin et Renardpar sa belle-sœur Agnès, par ses cousins Pierre et Jean de Corbeil, fonde l'anniversaire de son père et de sa mèrePour celail donne 20 sols de rente à Saintrytrois muids de vintrois setiers d'huile et trois setiers de froment; une partie de ces redevances devra être employée à donner un repas un peu plus copieux à la communauté après la messe des trépasséset l'autre partie paiera le luminaire de l'église— Hugues le LoupIIe du nomfonde lui aussi un anniversaire pour le repos de l'âme de Jeannesa seconde femme, dont le récent décès lui laisse au cœur une émotion si poignantequ'elle se ressent encore après sept siècles, à la simple lecture de sa lettre. Il donne pour cela 60 sols de rente, à prendre à Saint-Gratien et à Saint-Denys. +  * Les annales d'Yerres nous montrent encore Aveline recevant de Simoncuré des Portes, des volumes intitulés //Bibliothèque des Pères//; et d'un chevalier nommé Guy, un //Graduel//— Elle vendit en 1243, au chapitre de Meung-sur-Loire, une maison qu'elle possédait dans le cloître même des chanoines; — loua au chapelain de Pommeraie les dîmes du lieu, ce qui lui valut l'honneur de recevoir une lettre d'Amaury de Monfort. — Enfinau mois de mai 1244, elle obtint de Mathilde, veuve de Ferry de Cramoyelle, la reconnaissance de la dette souscrite par son mariUn certain //Jean de Sarriis//, sans doute fils de Mathildepromit de tenir cet engagement. 
-  * Une partie de cette somme paiera le luminaire pour le service; une autre partiele repas de la communauté, la //pitance des moniales////pitancia monialium//enfin, on donnera sur le tout, 10 sols, sa vie durant, à l'une des moniales du cloîtreappelée Marie, sa cousine. +  * C'est le dernier acte connu de l'administration d'Aveline, qui porta la crosse pendant 18 ans, et mourut au mois d'octobre |**64** 1244et non pas 1248, comme le disent les Bénédictins copiés par Mévil. Les religieuses l'ensevelirent dans le chœur de leur église; et selon la coutume, dès lors établie, votèrent 40 sols parisis, pour chanter chaque année son anniversaire. Pendant son abbatiat, elle dût faire au cloître d'importants travaux de consolidation, rendus nécessaires par les remaniements incessants qu'on faisait subir à l'édifice monacal.
-  * Toutes ces largesses apportaient de l'aisance au monastère et |**51** lui permettaient d'acquérir à son tourAussi le voyons-nous acheter, en 1219, d'importants revenus à Chaintreauqu'il paye 38 livres parisis. Cette acquisition fut faite sur Henri de Moissy et sa femmeapprouvée par Henri et Jeanneleur fils et leur filleet contresignée par Godefroy de Livry et Ferry Briard. +
-  * Toutefois, il ne suffisait pas d'avoir de grands biens, il fallait savoir les conserver et les administreret au XIIIe siècle comme de nos jours, c'était chose difficile. En ces temps de législation mal assisede droits de propriété bizarres et compliqués, de contrats anciens et de donations souvent mal définies, un grand propriétaire terrien — et tous les couvents étaient dans ce cas-là— ne pouvait éviter les difficultés et les nombreuses contestations. Heureusement on avait plus souvent recours aux transactions par arbitrage qu'aux procès+
-  * L'abbesse Eustachie en fit d'assez nombreuseset leur trace se retrouve dans les actes de son temps. La première en date est de 1213. Elle est conclue par Jeanabbé de Saint-Germain-des-Prés, en faveur de Roger de Villeneuve-Saint-Georges et de Jean Pontonoirses vassaux ; elle a trait au port de Villeneuve, et elle sanctionne pour les religieuses le libre droit de passage dans la Seine. +
-  Puis viennent les nombreuses difficultés avec les curés relativement aux dîmes des paroisses. — Au XIIIe siècle comme aujourd'hui, Puiselet-le-Maraismême augmenté de Bois-Herpin, était un modeste bénéfice; mais Tyon, le curé du lieu, avait l'âme combative et faisait une guerre persévérante à l'abbesseIl avait porté sa cause jusque devant le Souverain Pontife, qui n'entendit jamais tant parler de cette obscure paroisse de la Beauce. Par deux foisInnocent III nomma des arbitres, pris les uns à Meaux et les autres à Chartres, pour dirimer ce grand débat. Les religieuses furent maintenues dans la possession de la grande dîmeet le bouillant curécondamné à garder le silence— Plus conciliants étaient Huguescuré de Gazeran, et Girbertcuré de Rambouillet, qui voulurent bien reconnaître, devant l'official de Sens, qu'ils n'avaient aucun droit sur la dîme de Pommeraie-en-Yveline. Il est vrai que pour les encourager à bien faireAmaury de Montfortoccupé au siège de Toulouse//in obsidione// |**52** //Tolose//avait trouvé le temps d'écrire à ses baillis de Montfort et d'Épernonpour leur recommander les intérêts des moniales d'Yerres, et faire savoir ses désirs aux deux curés— Le curé de Servy (//Serviaco//?concluait aussi un arrangement touchant le dîmage du vin de sa paroisse. — Celui de Chermontun autre pour les dîmes de JodainvilleHermainvilleetc. — Et enfin celui de Chevannesun également pour la dîme de quelques arpents de terreassis au lieu dit la Croix; dans sa paroisse+
-  * Un dernier arrangement fut faiten avril 1225entre l'abbaye et une famille de chevaliers croisésCristat de Chevry et sa femme Aalès réclamaient un petit taillis nommé le //Bois-Girard//, que les moniales prétendaient leur appartenirGrâce à une haute interventionles Chevry firent aumône de leurs droits à l'abbaye, et leurs deux filsGilotet Gilbertsouscrivirent à cet acte qu'on promit de faire ratifier à deux autres filsRegnaud et Guarinpartis pour Jérusalem où ils faisaient campagne+
-  * Dans plusieurs de ces accords, l'abbesse intervint en personne, mais dans quelques-uns elle agit par l'entremise de frère Hugues, son dévoué procureur, moine laïque de Saint-Nicolas. Pour les conclure on eut parfois recours à des arbitreschoisis et désignés par une intervention étrangère à l'abbaye; le plus souventcependantce furent les protecteurs-nés du monastère qui les firent accepter après les avoir discutésPierre de Corbeilarchevêque de SensGuillaume de Seignelayqui ne fit que passer sur le siège de Paris, et l'évêque Barthélémy, son successeurremplirent tour à tour ce rôle bienfaisant. +
-  * Durant l'abbatiat d'Eustachiesaint Dominique vint à Paris établir l'ordre célèbre qui porte son nom. Certaines circonstances encore mal éclairées ((**Note d'Alliot** — Un membre de la famille Briard avait donné des biens à saint Dominique dans les environs de La Ferté-Alaispour y fonder un couvent de son ordre. Peu de temps aprèsles Dominicains ayant renoncé à toutes les possessions terrestres, ces biens furent rendus au donateurqui les consacra à l'érection d'un monastère de femmes de l'ordre de Citeaux; ce fut l'abbaye de Villiers-aux-Nonnains.)) l'amenèrent dans le voisinage de notre monastèreet il est fort probable qu'il le |**53** visitaDans tous les cas, l'un des chapelains d'Yerresnommé Guillaume, quitta le prieuré de Saint-Nicolaspour se donner au nouvel ordre des Frères-PrêcheursTels sont les premiers rapports entre la maison d'Yerres et les fils de saint DominiqueCeux-cien prenant une de leurs premières recrues dans les murs de l'abbaye, étaient engagés d'honneur à lui donner des compensationsLa suite de notre récit nous les montrera acquittant largement leur dette+
-  * Après avoir gouverné l'abbaye environ dix-sept ansEustachie Dulers mourut le 28 février 1226. Elle brilla à l'aurore de ce magnifique XIIIe sièclesi fécond en œuvres religieuseset elle fut digne de son tempsSon abbatiat doit être rangé au nombre des plus brillants de tous ceux que vit passer le monastère. Elle travailla avec zèle à la formation monastique de ses fillesveilla avec soin à l'observation du bon ordre et de la régularité dans le cloître et développa la pompe du culte, par l'établissement de nouveaux offices en l'honneur du Saint-Sacrement. Ses filles décidèrent qu'on célébrerait chaque année son anniversaire dans le cloître, et votèrent 40 sols pour augmenter la //pitance// ce jour-là+
  
  
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