Corpus Essonnien

Histoire et patrimoine du département de l'Essonne

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Le moulin de Grotteau (1) (de 991 à 1586) Extrait du plan d'intendance de Longpont-sous-Montlhéry (1787).

Février 2008

J.P. Dagnot

C. Julien

Chronique du vieux Marcoussy

De nombreux moulins travaillaient sur la rivière d'Orge, Urbia en latin (1). Cette chronique relate l'histoire d'un moulin disparu au XIXème siècle, celui de Grotteau à Longpont-sur-Orge (cant. Montlhéry, arr. Palaiseau, Essonne).

Grotteau était considéré comme l'un des plus importants “ moulin à bled ” de la région. Il était situé sur les bords de l'Orge en amont du prieuré, près de la route de Montlhéry à Saint-Michel-sur-Orge. Aussi, d'importants travaux hydrauliques avaient été nécessaires pour l'aménagement du moulin.

Il est désigné dans les titres du Moyen Âge sous le nom latin de Groetellum, puis plus tard en français, on le trouve nommé Grotel , et quelquefois Grostel . Les orthographes sont variées, on trouve encore Grouteau , Grosteau , Grosto (1669), Grotot (1679), Grousteau (1698), Grotau (1715), Groutaud (1814), en enfin Grotteau apparaît.

Le toponyme “ Grouteau ou Grotteau ” possède une origine celtique ou gauloise ( grauco, grava ) qui aurait donné en vieux français gros ou groue et en français moderne grève, gravelle, gravier . La terre de groue ou grouette , particulièrement appréciée en viticulture, est constituée par un mélange d'argile et de cailloux. À Longpont, le nom du chantier des Graviers procède de la même origine celtique.

Les anciens documents

Aucun document, à notre connaissance, ne mentionne la construction du moulin par les seigneurs de Montlhéry, mais il est certain que ce bien leur appartenait bien avant 1074. Toutefois des comptes terriers éclairent sur l'importance donnée à l'entretien des moulins. En 1287, on paie 4 livres 5 sols pour une meule, 43 sols pour du bourras destiné à faire des sacs, 18 sols pour les boisseaux neufs et pour les ferrer. À la même époque un maître-maçon reçoit 36 livres 10 sols par semestre pour réparer un moulin et un maître-charpentier gagne 2 sous par jour.

En fait c'est la charte de 991 qui nous renseigne sur l'antiquité du moulin. Pour récompenser son forestier Thibaut ler Filetoupe, Hugues Capet lui donna les fiefs et terres apud Monte Letherico avec toute la justice, métairie, domaine, terre, maison, bois, vignes, pressoirs, prés, pâture, chasse, rivière, pêche, moulins et autres dépendances avec les cens et redevances et fournitures. Toutefois, le seigneur de Montlhéry restait le feudataire de l'évêque de Paris à qui il devait payer comme vassal douze marcs d'argent le jour de son investiture.

Dès 1074, le moulin de Grotteau « molendinum Grootellum » entre dans le temporel du prieuré de Longpont par la donation de Guy de Montlhéry (charte IIL) constituant sa dot. « Moi, Guido de Monte Leherico, désireux de vouer mon corps et mon âme à la Bienheureuse Marie , mère de Dieu et à saint Pierre et bien entendu aux moines de ce lieu, prends la robe monastique, et en présence du prieur Stephano, je donne à Marie, mère de Dieu et à l'église de Longpont le moulin de Grouteau, qui était dans le fief que je possédais, et éternellement sans que quelqu'un parmi mes successeurs ne puisse troubler cette donation en revendiquant [le moulin] ultérieurement ». À l'époque où il prit l'habit de moine au couvent de Longpont, Grotteau devint donc la propriété entière de la seigneurie ecclésiastique, et en fut le moulin banal où les censitaires étaient tenus de moudre leurs grains.

Vers 1080, le chevalier Aymon, seigneur de Donjon prit les habits de moine et donna un fonds situé dans le hameau de Grouteau. « Aymon de Donjons, encore vivant, ce jour où il devint moine, donna à Dieu et à la bienheureuse Sainte Marie de Longpont, ce qu'il possédait au moulin nommé Grostello, et ce qu'il possédait dans le fief de la forêt de Siquiniacus, et un autre bien dans la paroisse de Nongemelli » (charte XLIX).

En 1098, la donation primitive fut reconduite par Milon 1er, fils aîné de Guy lors de son départ pour la Terre Sainte (charte VL). « À tous les chrétiens, nous voulons faire savoir que Milo de Monte Leherico quand il partit pour Jérusalem, donna à perpétuité aux moines de sainte Marie de Longpont le moulin de Grouteau, et le ban et tout ce qui appartient à ce moulin, recommandant [aux religieux] cette propriété ». En fait, la donation de Milon n'entamait pas le patrimoine seigneurial de Montlhéry puisque son père en avait fait don à la communauté des moines. C'est au plus une confirmation qui lui permet en cas de malheur de recommander son âme à Dieu.

Vers 1100, Gautier le meunier des moines est témoin, avec Hubert le cousin du prieur Henri, de la donation de la moitié des dîmes de Fontenelles faite par Radulf, fils de Galtier le voyer et frère de Letvise (charte CIV).

Un inventaire désigne ce domaine comme « le moulin, bâtiments et dépendances, terres, prés, isle et pâtures comptent pour 9 arpents 45 perches ». En 1232, une charte du Cartulaire mentionne « une commission du pape Alexandre à l'archevêque de Sens pour régler les relations entre les Religieux du Grand Couvent et ceux de Longpont sur les eaux détournées de leur ancien lit à cause du nouveau moulin ». Il s'agit du second moulin que viennent de construire les moines de Longpont, le moulin dit « de la Chaussée » (cf. Chronique).

En juillet 1250, Guillaume de Trappes, demeurant à Montlhéry, fit un legs à l'abbaye des Vaux-de-Cernay « sex arpenta vel circiter, sitam in ripparia de Ourge, inter molendinum de Basset et molendinum de Grootel , contiguam pratis militum de Sancto Michael » (charte DI). Il s'agit d'une prairie d'une contenance de 6 arpents sur les bords de l'Orge entre Basset et Grotteau dans la censive de Philippe de Linas (2).

Dans l'aveu et dénombrement fait à la Chambre des Comptes le 9 avril 1383, le prieuré Notre-Dame de Longpont, déclare : - chambre du prieur en la marese dudit lieu, l'église, les maisons, cour grange, jardin & vignes, le tout enclos de murs, - item prez & aulnoy tenant aux murs dudit jardin & d'autre à la rivière d'orge pour 18 arpents, - item deux moulins sur la rivière l'un appelé le moulin de chaussée, & l'autre le moulin de Grotiau valoient par anciennement seize muids de bled (3), - item 300 arpents de l'autre par de la rivière ou bois de Séquigny pour le chauffage du prieuré.

En 1463, acquisition par la fabrique de la paroisse N.-D. de Montlhéry de 9 arpents de pré en 3 pièces sises au terroir de Montlhéry ; 4 arpents au lieu-dit La Chartre, un arpent en la prairie de la rivière d'Orge entre la chaussée de Guiperreux et au-dessoubz de Sainct Michel et 3 arpents en la prairie du moulin de Grousteau.

La famille Nyon-Poirier à Grotteau

C'est la famille de meuniers que nous avons déjà présentée (cf. Chronique du moulin de la Chaussée). C'est en 1477 que le grand-père Nyon apparaît à Longpont. Véritable chef d'entreprise, relativement aisé puisqu'il afferme les deux moulins du prieuré. “ Frère Guillaume de Condat, prieur de Longpont pour le bien et le proffit & utilité dudit prieuré auroit baillé & délaissé à Jehan Nyon, musnier & Jehanne sa femme demeurant au moulin de Grosteau, c'est à savoir : - icelluy moulin de Grousteau situé sur la rivière d'Orge avec deux arpens de terre & avec grange tenant au chemin dudit moulin à Montlhéry et aboutissant au devant d'icelluy moulin, - & pareillement un lieu & moulin à bled aussi situé sur la rivière d'Orge prèz et au dessus de la chaussée dudit Longpont avec une pièce tant de pré que aulnoy tenant d'une part à ladite chaussée et aboutissant sur icelle rivière, un jardin contenant ung arpen ou environ joigant et au dessous dudit moulin de la chaussée et tenant …. les profits esmoluments par ledit Nyon & sa femme durant sa vie et des enffant nez & à naitre et des enffans de leur enffans moyennant la quantité de quatre muys de grain mousture, … et à la charge de faire édifier par iceulx maison de deux ou trois fermes audit moulin de la chaussée”.

Interdiction audit Nyon de bailler transporter & délaisser lesdits moulins à quelque personne que ce soit sans l'accord du prieur dudit Longpont, ce dernier restant propriétaire des deux moulins.

Le 27 juillet1485, vente faite à Jean Nyon l'aisné, musnier demeurant au moulin de Groteau par Pierre Cordeau sergent à cheval demeurant à Montlhéry, d'une pièce de terre contenant un arpent assis prez et au dessus dudit moulin de Grouteau qui appartenoit audit vendeur de son propre, tenant d'une part au vieil chemin, d'autre part au Prieur de Longpont, d'un bout par haut au sieur Prieur d'autre bout par bas à la rivière d'Orge, mouvant dudit Prieur de Longpont au cens et charges que ce peut devoir. Ladite vente faite moyennant le prix et somme de 56 sols parisis.

Le meunier de Grotteau était devenu un notable à Longpont, homme de confiance des moines du prieuré. Il avait marié sa fille Estienne avec Jehan Poirier dont la famille tenait le moulin d'Aulnay en amont sur l'Orge. Le couple eut de nombreux enfants dont on connaît la fille Claude et les deux garçons Guillaume l'aîné et Guillaume le jeune.

Après le décès de son beau-père (vers 1510), on trouve alors Jehan Poirier, maître meunier à Grotteau passant de nombreux actes notariés.

• 1521. - Acte fait par Geoffroy Le Maistre et Michel Burgevin commis sous Estienne Marcouville, tabellion-juré comparus personnellement Jean Poirier marchand musnier demeurant au moulin de Basset paroisse de Longpont, lequel de sa bonne volonté reconnu et confesse avoir vendu, céddé, quitté, transporté et prouvés garantir de tous empeschements quelconques à Guillaume Chaulme aussi marchand demeurant à St-Michel-sur-Orge d'un arpent de terre assis au terroir de Longpont près le moulin de Grouteau tenant d'une part à Jean Cordeau, boucher , d'autre aux hoirs ou aiyans cause Jean Nyon, d'un bout à Thierry Massy à cause de sa femme et d'autre à la rivière d'Orge, tel qu'il est déclaré es lettres anciennes de Monseigneur de Longpont en la censive du Seigneur de Longpont et chargé vers luy de tels cens charges et droits seigneuriaux qu'il peut devoir franc et acquitté de tous arrérages jusqu'à ce jour et vendu la somme de seize livres huit sols tournois que, pour ledit vendeur a confessé avoir donné ..en témoin de ce nous avonbs scellé ces présentes du scel de la prévosté ce fut fait en présence de Pierre Peuvrier, Jean Froissant et autres, l'an mil cinq cent et vingt et un au mois de février huitième jour. Signé de Marcouville, avec paraphe.

• 1523. – Vente faite par Guillaume Nyon, marchand musnier demeurant au moulin de Basset à Albert Nutet, boucher demeurant à Montlhéry d'une pièce de terre contenant un arpent assis au moulin de Grouteau en la censive de Longpont à la charge de payer une mine de bled de rente envers les hoirs feu Yves Cordeau chacun an, jour que deüe est, rachetable selon le contenu des lettres en faisans mention. Cette présente vendition faiste moiennans la somme de 10 livres tournois que pource lesdits vendeurs ont confessés avoir reçu dudit acheteur. Ce fut fait et passé en présence de Jean Poirier dit Daulnay et Jean Cordeau, témoins. Signé de Marcouville, avec paraphe.

• 1525.– Vente à la censive de Longpont d'un arpent de terre au-dessus du moulin de Grousteau au proffit de Jean Lehoux (4).

• 1526. - Bail à ferme passé par Dom Jean Desnoyers, procureur du couvent de Longpont à Jean Poirier, marchand demeurant au moulin de Groutteau de 2 arpents 3 quartiers de pré. Bail pour trois ans moyennant 60 sols par an (Petit Couvent).

• 1527.– Contrat de vente entre Jean Farrilly, praticien demeurant à Montlhéry et Jean Lehoux marchand demeurant à Montlhéry d'un arpent de terre au terroir de Grouteau moyennant 14 livres tournois chargé de cens envers la seigneurie de Longpont.

• 1529. – Vente faite par Mathurine Peuvrier femme séparée de Guillaume Moireau demeurant au Mesnil paroisse de Longpont à Jean Lehoux marchand demeurant à Montlhéry d'un arpent et une quarte de terre en deux pièces assise près et au-dessus du moulin de Grouteau en la censive du seigneur prieur de Longpont. Signé Arnault, notaire.

• 1531. – Echange passé entre Pierre Peuvrier laboureur demeurant à Guyperreux et Jean Lehoux marchand demeurant à Montlhéry par lequel ledit Peuvrier cède à ce dernier neuf quartes de terre ou environ faisant partie de 2 arpents ou environ assis au dessus du moulin de Grouteau au chantier dit des Buissons en la censive du sieur prieur de Longpont et en contre échange ledit Lehoux cède audit Peuvrier un quartier et demi tant de terre que sautevye ( ?) assis au-dessus de la vigne dudit Peuvrier fait sans soulte ni retour.

Le 14 septembre 1537, un bail à ferme est passé par Guillaume Raguyer, prieur commendataire du prieuré N.-D. de Longpont à Jean Poirier, dit Daulnoy, meunier demeurant au moulin de Grotteau de trois quartiers de pré « moyennant quatre livres par an, ledit bail pour quatre ans au profit du Petit Couvent ». Son frère Guillaume est alors meunier au moulin de Basset. Le 17 juin 1539, un bail à ferme est passé à Guillaume Poyrier le jeune, meunier au moulin de la Chaussée de Longpont par Dom Christophe Cointet, sous-prieur de Longpont d'un quartier de pré pour six ans, moyennant 20 sols par an (4). En 1558, le meunier Gilles Paugevert loue « deux arpents de vigne au chantier des Thuyeaux moyennant 12 sols parisis et 32 sols tournois de rente, sujets à dîme et pressoir au profit du prieuré ».

Le contentieux du XVIe siècle

Au milieu du XVIe siècle, les frères Poirier tenaient toujours les moulins du prieuré de Longpont. Alors qu'il était très endetté Guillaume l'aîné décéda ; le frère cadet fit valoir ses droits sur le moulin de Grotteau puisqu'il considérait que le bail emphytéotique le lui permettait et qu'il possédait des parts de son héritage sur le moulin.

Le 14 février 1543, entre Guillaume Poirier le jeune musnier, demeurant au moulin de la chaussée de Longpont, demandeur en deux instances d'une part, et Pasquier Bourrelier demeurant au moulin de Grousteau deffendeur en deux instances, l'une & première d'icelle à ce que le moulin de Grousteau fût déclaré hypothécairement obligé envers ledit Poirier au paiement de la somme de neuf livres tournois due par Guillaume Poirier l'ainé son frère, pour ce que depuis ledit temps de ladite obligation, ledit Bourellier avoit acquis dudit Guillaume Poirier l'ainé ledit moulin & ses appartenances.

Le moulin de Grotteau d'après une gravure du musée d'Île-de-France (dessin de C. Julien)

L'autre instance à ce que certaines lettres royaux par ledit Poirier le jeune obtenues à l'encontre dudit Bourrelier en 1542 afin de casser et résoudre le contrat de vendition par luy fait audit Poirier l'ainé de parts qu'il avoit audit moulin, …., & au contraire ledit Bourrelier disoit que ledit Poirier n'avoit pû obligé ledit moulin pour ce quy n'avoit rien en la propriété qui appartenoit aux religieux prieur & couvent de Longpont, desquels il estoit tenu à rente viagère… C'est à savoir que pour assoupir et mettre au néant lesdits procès, Bourrelier promet de paier audit Poirier vingt escus d'or, moiennant laquelle somme ce dernier abandonne tous ses droits sur le moulin de Grousteau.

Ce même jour une transaction fut passée entre Guillaume Poirier le jeune et Pasquier Bourrelier « par laquelle ledit Poirier le jeune se désiste de toutes les prétentions sur ledit moulin de Grouteau moyennant 20 écus d'or sols ».

L'acte final établi par Fontaine, tabellion de Montlhéry précise « L'une et première dycelles ad ce que le moulin et apartenances de Grousteau fussent déclarés ypothéquairement obligés envers de ledit Poirier au paiement de la somme de neuf livres dix sols tournois quy le disoit luy être deue par Guillaume Poirier laissée son frère restauré de plusieurs sommes pour la rente et délivrance du droit part portiez quy le avoit audit moulin et apartenances pour ce que depuis le temps de ladite obligation ledit Bourrelier avoit acquis dudit Guillaume Poirier laigné le moulin et apartenances, et l'autre justanie adce que certaines lettres royaux par ledit Poirier le jeune obtenues alluiouvre dudit Bourrelier le 24 ème jour de novembre de l'an mil cinq cent quarante deux affin de casser et résoudre le contrat de la vendation par luy faiste audit Poirier laigné dudit droit part portion qu'il avait audit moulin…que ledit Poirier laigné nauvré pu obliger ledit moulin et apartenance pouvre quy l'aurait rien eu la propriété mais appartenait aux Religieux, Prieur et Couvent de Longpont, lesquels yl étoit tenu de rente viagère. Ledit Bourrelier a promis et promet par ces présentes paier audit Poirier le jeune la somme de vingt escus d'or sol valant quarante cinq sols tournois pièce, moienant laquelle somme ledit Poirier a remis, ceddé, quitté, transporté et du tout délaissé audit Bourrelier toutes les droits, parts et portion aluy apartenant audit moulin de Grousteau et apartenances … ledit Poirier a promis bailler audit Bourrelier terme de paier la somme de 20 escus d'or sol a sçavoir dix escus d'or sol dedans dimanche prochain venant et l'autre moitié dedans le jour de la St Gilles le tout prochainement venant. Les témoins Jean Nyon, procureur à Montlhéry, Jean Pinot demeurant à Guyperreux et Jean Fléau demeurant au moulin de l'Etang ».

Les meuniers de Grotteau au XVIe siècle

1546. – Bail à rente passé par Jean Lefebvre, prieur à Longpont, à Pasquier Bourrelier, meunier demeurant au moulin de Grotteau de 12 deniers parisis de cens, 2 sols de rente.

1558. - Bail à cens et rente passé par Messire Louis Dannet prieur de Longpont tant en son nom qu'en celuy de la communauté des Religieux de Longpont à Gilles Paugevert demeurant au moulin de Grouteau, paroisse de Longpont, de un demi-arpent de terre à faire vigne assis audit terroir chantier des Thuyeaux, moyennant 12 deniers parisis de cens et 32 sols de rente payable le jour St martin dhyver, sujet à pressoir et dixmes.

1559.– Vente faite par Jean Ragon, laboureur demeurant à Leuville et Jeanne Cordeau sa femme à Marie Cordeau couturière demeurant à Longpont de la moitié d'une espace de maison, cour, jardin et cave sis à Longpont sur le rüe qui tend à Grouteau et une quarte de vigne assis derrière ledit lieu en la censive du prieuré de Longpont chargé envers lui de 2 deniers parisis de cens. Signé Roupeau, commissaire par autorité de justice.

Plan du moulin de Grotteau à Longpont. Le règlement imposait de mentionner la moiêle du repère pour régler la vanne de décharge.

1568. - Louis Dannet, prieur commandataire du prieuré de Longpont, seigneur temporel dudit lieu, et honneste personne maistre Joseph Poynet, procureur du roy, et Loys de la Rue, marchant demeurant à Longpont, pour eulx leurs enffans selon que cy après déclaré , d'autrepart disant lesdites partyes due l'an 1477 voir à cette date, … néanmoins les enffans auroient transféré les moulins à d'autres personnes dérogeant ainsi au bail emphithéotique, le prieur restant seigneur & propriétaire des moulins; cette prétendue cession et aliènation hypothécant les deux moulins de plusieurs debtes et rentes sur le moulin de la chaussée et ses dépendances et à la suite desquelles debtes et rentes ledit moulin a été saisi, à quoi le prieur s'est opposé afin de distraire le moulin à son proffit. De ce fait ledit Nyon, enffans et cessionnaire auroient délaissé iceulx lieulx en ruyne & désolation, même le moulin de la chaussée avec ses appartenances tellement que n'étoit en état pour mouldre ni habitable, estoit inutile et de nul proffit et par conséquent lesdits quatre muys de grain ne pourroit estre pris. Le prieur avec une ordonnance du prévost de Montlhéry a fait visité icelluy moulin par massons & charpentiers et trouvé utile de faire pour le rétablissement d'icelluy moulin jusqu'à la somme de 600 livres, faire aussi curer la rivière, tant au dessus qu'au dessous sur une lieu, pour plus de 800 livres, la rivière estoit comblée assablée et n'avoit son cours et vidange faisant un moyen (?) en grand abandon et la roue n'a pas de vannes et vannage dudit moulin inondées engorgées et empeschant icelluy de mouldre,….. donc de ce fait rebailler au proffit du seigneur. Depuis ont esté édifier plusieurs moulins à mouldre de bled et environs d'iceux…

La même année, un rapport de Jehan Pelouart masson en plastre et Adrian Thibaut charpentier de la grande cognée de la visitation qui estoient faite dudit moulin de la Chaussée du 17 mars 1568….Maistre Loys Dannet prieur & seigneur dudit Longpont pour la nécessité et le proffit du prieuré, ses revenus & esmoluments, après avoir traité avec les religieux, ensemble, et recongnoissent & confessent avoir baillé & délaissé à titre emphitéotique & viager à commencer de la st Jehan Baptiste prochain, .. vie et de leurs enffans nez & à nestre en loyal mariage et 99 ans après le trépas & décès du dernier mourant, promet au sieur Joseph Poynet procureur du roy à Montlhéry et Loys de la Rue marchand demeirant audit Longpont, pour eulx leurs enffans héritiers le temps & viager les deux moulins de la chaussée et grousteau, les deux arpents de pré … eddifier en iceulx … soulloient estre en terre labourable détail sur les terres, jardins, … ce présent bail faict moyennant pareille quantité de quatre muys de grain verte mousture et oultre quatre septiers supplémentaires … en la maison du prieuré, sera tenu de mouldre en ces moulins le grain qui leur sera baillé pour la fourniture de la maison dudit prieuré sans prendre aulcun proffit, et pareillement tenus de faire restablir réparer et mestre en estat lesdits moulins & maison ensemble ladite rivière icelle faire curer & nettoyer et mettre le tout en bon et suffisant estat , autant requis que nécessaire, dedans deux ans, et pourront lesdits preneurs durant le temps du viager pescher à poissons seulement aux vannages desdits moulins et pareillement faire bastir eddifier selon leur semble en rel endroit des deux moulins qu'ils adviserait et en chacun d'iceux moulins ung vollet à pigeons lesquels deux vollets à la fin dudit temps appartiendront & demeureront au sieur prieur & religieux de Longpont, à la charge de six pigeons par chacun vollet au jour de la fête notre dame en septembre, ne pourront transporter leur droit du présent bail ny portion d'icelluy.

11 septembre 1574, trois maçons de Montlhéry reconnaissent avoir reçu du seigneur de Montlhéry, 100 livres pour refaire les sept arches de la chaussée de Guyperreux proche le moulin de Grousteau.

23 juillet 1577, mention de Jehan Michel musnier du moulin de Basset et Estienne Puand musnier du moulin de Grousteau.

5 janvier 1580, devant Symon Davoust, notaire à Montlhéry, honneste homme Pasquier Lebourellier greffier pour le roy nostre sire des eaux et forêts de la chastellenie de Montlhéry, gruerie de Séquigny, demeurant à Longpont, lequel confesse avoir baillé à titre de ferme et moisson pour six ans à Marin Musnier laboureur de St-Michel lun lieu & moullin appelé le moulin de Grousteau, granche, estable, cour, jardin ; le moullin est tournant, travaillant gany de ses ustancilles.

27 janvier 1580, Marin Musnier, musnier demeurant au moullin de Grousteau confesse avoir reçu de Symon Musnier son frère, tailleur d'habits demeurant au Perray, les droits de bail à ferme & moison de grain fait par Pasque Lebourellier greffier des eaux et forest de la chatellenie de Montlhéry, et gruerie de Séquigny d'ung moullin à eau appelé le moullin de Grousteu appartenances & dépendances et d'ung demy arpent de vignes size derière la granche dudit moullin… bail précédent passé devant Symon Davoust le 5 janvier 1580, ledit Symon Musnier respondant principal, cette renonciation faite pour le temps qui reste à écouler dudit bail, Marin a reçu de Symon dix escus d'or pour deulx juments l'une poil bayard l'autre poil rouge…

En 1580, en compaignie de Symon Davoust notaire, François Laigle marchant charpentier de la grande coignée demeurant à Chastres, Jehan Laisné musnier demeurant au moulin du Pré [Carouge] se sont transportés au moulin de Grousteau pour la prisée des meulles ustancilles tournans, demandé par Mr Pasquier Lebourrelier greffier pour le roy des eaux & forests de la prévosté et chatellenie de Montlhéry et Estienne Prudhomme musnier naguère locataire dudit moulin et Marin Musnier aussy musnier à présent locataire d'icelluy: - arbre avec roue quinze escus … - pas de dimensions intérêt la liste des constituants.

Rappelons qu'à chaque renouvellement de bail, il y avait une “ prisée ”, une visite par des experts qui notifiaient à travaux à entreprendre pour remettre le moulin dans l'état initial. En cas de différence, le meunier sortant était tenu de payer l'écart entre la prisée à l'entrée et celle à la sortie.

Le droit de chasse à La Ville-du-Bois

La chasse consistait à aller quérir chez les particuliers les grains pour les moudre dans un moulin autre que celui permis par le ban. Le meunier devait ramener la farine bien moulue. Le meunier prélève une quotité de farine pour rétribuer son travail qui devait être fait sous 48 heures. Le droit de chasse était donc accordé par le meunier de la seigneurie qui possédait la banalité. Le village de La Ville-du-Bois était mouvant de Marcoussis, mais trop éloigné du moulin à vent de Fretay, le meunier préférait bailler le droit de chasse à ses voisins de Longpont.

En 1580, Nicolas Hanyard musnier demeurant au moullin à vent de Marcoussis, lequel confesse avoir consenty & accordé le droit de chasse à Jean Marin musnier demeurant au moullin de Grousteau et acceptant chasser les bleds & moudre dans le village de la Ville-du-Boys & qu'il prenne les bleds des personnes qui les voudront bailler, les moudre en son moullin de Grousteau sera chargé de ramener la faryne du bled… mousture d'iceulx bleds moyennant la quantité de troys septiers de bled mestail sans orge… (5).

L'année suivante, ledit Nicollas [Hanyard] confesse avoir baillé à titre de moison, d'aujourdhuy jusqu'à ung an, à Symon Musnier demeurant au moullin de Grousteau, c'est à savoir le droit de chasser et prendre bled et moudre au lieu & village de la Ville-du-Bois des personnes qui leurs voudront bailler bled moyennant la quantité de trois septiers bled mestail….sans empêcher Hanyard de faire la mesme chose, ledit Hanyard ne pourra bailler semblable.

Ces baux se renouvellent toujours avec Nicolas Hanyard, musnier du moullin à vent de Marcoussis, qui confesse avoir accordé à Michel musnier du moulin de Grousteau aller chasser bled et convertir en farine dans son moulin, dans le village de la Ville-du-Boys et Grand Rouillon, prendre à iceux et ramener à iceux moyennant onze septiers de bled mestail..

En 1586, Gilles Musnier demeurant à Saint-Michel-sur-Orge, est en procès avec le meusnier du moulin Basset. Il s'agirait des barrages faits sur la rivière.

En 1587, Benjamain Glignet « musnier du moullin de Grousteau » est cité dans un acte ne concernant pas le moulin.

Fin de la première partie. À suivre …

Notes

(1) Urbia est bien l'Orge, quoique son nom, au moyen âge, soit plutôt Orgia , Ordea et Ourge Orbia (VI e s.) vient du mot celtique “ orbios ”, “ orbos ” qui signifie « héritage, héritier ». On a aussi Orbicus qui est devenu la rivière Orb dans l'Hérault. Orobia possède la même étymologie celte. Grégoire de Tours parle d'une charte de l'an 670 dans laquelle on lit “ ad Urbiam fluviolum in pago Stampensi ”.

(2) Guillaume de Trappes désigné comme bourgeois de Montlhéry était un juriste puisqu'en mars 1239, il servit d'arbitre entre le seigneur de Molignon et l'abbaye des Vaux de Cernay (charte CCCXCII).

(3) Nous retrouvons bien les deux moulins qui allaient faire la fortune puis la ruine de la famille Nyon-Poirier (cf. Chronique du moulin de la Chaussée à Longpont). Le moulin de la Chaussée (au Bas-de-Longpont) était situé sur une dérivation de l'Orge en aval du moulin de Grotteau. En effet, aux XVIIe -XVIIIe siècle la Chaussée de Longpont est la route qui menait au Perray et qui aurait donné son nom au village “ longus pons ”.

(4) C'est le même Jehan Lehoux, bourgeois de Montlhéry qui rassemble les terres autour de la ferme de Lormoy (cf. Chronique des Seigneurs de Lormoy).

(5) Nicolas Hanyard, meunier du moulin à vent de Marcoussis, accorde également “le droit d'aller chasser les blés et moudre dans le village de la ville du bois”, au meunier de Villebouzin (cf. Chronique de moulin à vent de Longpont) . Benjamin Glynet devra payer pour ce droit de chasse « trois septiers de blé métail sans orge ni avoine » .

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