Corpus Essonnien

Histoire et patrimoine du département de l'Essonne

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La seigneurie ecclésiastique de Linas

Chronique du Vieux Marcoussy –Marcoussis———— _———————————- Novembre 2008

C. Julien

JP. Dagnot

Cette chronique s'inscrit dans la série traitant des seigneurs de Linas (Essonne, cant . Montlhéry). Le troisième volet est la seigneurie ecclésiastique, celle possédée par le Chapitre de la Collégiale Saint-Merry que les vieux documents donnent parfois comme « Monsieur Saint-Merry de Linas » en personnifiant une communauté en un seigneur à part entière, ce qu'elle était en droit féodal (1).

Le doyenné rural

Au XIIe siècle, Linas était le siège d'un doyenné rural « decanatus de Linais » de l'archidiaconé de Josas, celui même qui, au XVe siècle, était devenu le doyenné de Montlhéry « decanatus de Monte Leherico ». On remarque ainsi qu'avant l'arrivée de Thibaut File-Etoupe à Montlhéry, l'organisation diocésaine considérait cette cité comme mineure comparée au bourg de Linas. Il semble donc, qu'une agglomération « Linayo » se soit formée dès l'époque gallo-romaine, au pied de la colline, du côté méridional (2).

Nous avons évoqué précédemment que des seigneurs laïcs possédaient la terre de Linas au temps des sires de Montlhéry, ce qui perdura jusqu'au XIIIe siècle (cf. “Les chevaliers de Linas”). Puis, l'étendue de la paroisse de Linas fut partagée par trois seigneuries : les deux seigneurs laïcs de La Roue et de Guillerville, et la seigneurie ecclésiastique de Saint-Merry, autrement dit le chapitre Saint-Merry de Linas . Ajoutons que les frères de l'Hôpital de Saint-Jean de Jérusalem, puis le commandeur du Déluge ont possédé des fiefs en commun avec le seigneur de la Roue.

En 1145, du temps du seigneur Hescelin de Linas, Guy était curé de l'église Saint-Vincent. « Guidone, presbitero de Linais ».

Dans le rôle des procurations du diocèse de Paris, en 1384, nous lisons « Capitulum sancti Mederici de Lynax X libr. X sol. ». Dans son Histoire du Diocèse, l'abbé Lebeuf précise « Ces chanoines sont seigneurs en partie de Linas, ils ont en face de leur église une maison seigneuriale où plusieurs d'entre eux demeurent ». Voilà l'objet de notre chronique, définir où, quand et comment la seigneurie ecclésiastique de Linas fut fondée et ce qu'elle comprenait.

La fondation du chapitre de Linas

Nous décrivons ici la fondation du chapitre Saint-Merry de façon succincte, sachant qu'une chronique spécifique traitera complètement la chose. Le chapitre de Linas « capitulum de Linais » est un collège de clercs appelés chanoines, attaché à une collégiale Saint-Merry. La charte de fondation oblige le chapitre à accomplir les fonctions liturgiques les plus solennelles dans son église. Le collège comprend un doyen, un chantre et des chanoines dont le nombre a varié dans le temps proportionnellement à celui des prébendes.

C'est Eudes de Sully, évêque de Paris, qui, en 1207, voulant donner plus d'extension au culte dans l'église Saint-Vincent de Linas, y institue des chanoines, qui pourront être reçus au nombre de 50, dans un délai de cinq ans « les premiers chanoines, c'est-à-dire ceux qui auront fondé leurs prébendes, ne seront pas astreints à la résidence, mais leurs successeurs y seront tenus, selon la règle de l'église Saint-Marcel de Paris ». Des revenus des prébendes, la moitié sera affectée à la fabrique et à l'entretien de l'église, le reste appartiendra aux chanoines prébendés. « les premiers chanoines, chacun une fois, pourront céder leur prébende à un clerc choisi par eux, mais leurs successeurs ne le pourront pas, et, si l'un d'eux démissionne ou meurt, sa prébende accroîtra la portion des autres chanoines, jusqu'à ce qu'ils soient réduits au nombre de treize ». La même année, l'acte de fondation fut ratifié par le doyen Hugues et le chapitre de Notre-Dame de Paris.

De ce qui vient d'être dit, nous apprenons donc plusieurs leçons : • avant la mise en place du Chapitre, l'église de Linas avait la dédicace de Saint-Vincent , patron des vignerons, • les chanoines qui sont envoyés par l'évêque de Paris venaient donc du chapitre cathédral qui était seul habilité à fonder des filiales, • la règle de l'église Saint-Marcel de Paris était évoquée (3). Cela voudrait dire que les chanoines sont ceux de cette collégiale, qui au début du XIIIe siècle se trouvaient en errance par suite de la suppression d'une partie de leurs revenus. Les turbulents chanoines de Saint-Marcel semblent avoir été ainsi « mis au pas » par Eudes de Sully. • le projet initial de créer 50 chanoines à Linas ne fut jamais réalisé, par suite semble-t-il des revenus médiocres du Chapitre.

En 1291, le Chapitre est composé du doyen élu par le collège, un chantre, huit chanoines, quatre prêtres, deux diacres, sept sous-diacres. Chaque année, quatre vicaires étaient nommés pour aider au service de jour et de nuit, rétribués sur le fonds de l'église. Le curé avait la charge des droits synodaux, droit de gîte et autres droits épiscopaux accoutumés. Deux chapelains avaient été institués pour assister le curé à cause des heures canoniales et de la grand'messe.

L'abbé Lebeuf émet l'existence d'une « petite abbaye [qui] étoit un ancien bien attaché à l'Eglise de Saint-Pierre et Saint-Merry de Paris ». Cet aspect n'est pas évoqué dans la charte de l'évêque Eudes, ni même l'existence de « Saint Etienne de Linas ». Par contre, plusieurs chartes du prieuré de Longpont citent « Sancti Mederici de Linais ». Vers 1100, Guy de Linas donna, aux moines de Longpont, le quart de la dîme de bois situé à Saint Merry de Linas. En 1152, le diplôme du pape Eugène III confirme les biens de Longpont à Linas, les moines ayant le quart de la dîme de Saint-Merry « quartam partem decime Sancti Mederici ». Une dizaine d'années plus tard, un certain Froger de Saint-Merry « Frogerius de Sancto Mederico » est témoin du legs d'une hostise par le chevalier Pierre de Linas. Ces actes prouvent bien l'existence de Saint-Merry de Linas avant la charte de 1207.

Lebeuf cite encore: « L'église de Linas se recommande par ses proportions et par quelques beaux détails d'architecture, date du milieu du XIIIe siècle. La sacristie, surmontée d'une petite salle capitulaire qui pouvait servir de trésor et de chartrier, appartient à cette époque ».

La seigneurie ecclésiastique de Linas

Contrairement à ce qui s'est passé ailleurs et notamment au prieuré de Longpont, la seigneurie ecclésiastique de Linas ne s'est pas constituée autour de donations pieuses mais principalement par des achats. Seules les prébendes avaient été données par le pouvoir épiscopal. D'où vient cette différence? Il est difficile de le dire. Toutefois, nous savons qu'au XIIIe siècle les libéralités s'étaient tournées vers les ordres mendiants, mais aussi les deniers étaient dirigés vers l'organisation des pèlerinages et des croisades. Le temps des grandes créations de monastères était révolu.

En 1208, Hécelin, seigneur de Linas, autorise Messire Bernier, clerc de Louis, fils du roi de France, de tenir une chambre et partie de maison « pertnentis ad cameram ad opus ecclesie Beati Vincencii de Linais », qu'il avait achetées de Raoul Cudoe, et ce, avec le consentement d'Aales, femme dudit seigneur. Les lettres datées de 1215 produites par Gui de Linas, chevalier, de Mathilde, sa femme, de Milon et de Marie, sa femme, de Robert et de Gilon, frères du susdit Guy, taxent la taille de Linas sur les hostises à 30 livres par an, et celle de Saint-Merry à 12 livres (4). Ces tailles ne pourront être augmentées, et les hostises seront exemptes de corvées et de bans. Cet acte est fait avec l'approbation de Guy, chevalier, et d'Aales, beau-père et mère dudit Guy, et de Philippe, son fils. Les plèges sont Hervé, châtelain de Gallardon, Ferri, seigneur de Palaiseau, Pierre de Buci et Henri de Vallibus, chevaliers.

Le consentement donné en 1221 par Guillaume, évêque de Paris, permet la cession faite par le curé et l'église de Saint-Michel à l'église de Linas, de 8 deniers de cens à percevoir sur une maison proche l'église de ce lieu. L'année suivante, dans sa notification, Guillaume, évêque de Paris, constate que Guy de Alto Villari, chevalier, s'était porté sur l'église de Linas à des voies de fait, brisant les maisons de deux prêtres et enlevant leurs biens, avait donné pour la réparation de cette injure 20 sols de rente à ladite église, avec le consentement de son fils Philippe.

En janvier 1225, Barthélemy, évêque de Paris, notifie la vente faite à l'église de Linas par Jean de Mégaudon, chevalier, d'un cens qu'il percevait sur des biens proche l'église, avec le consentement d'Eustachie, sa femme, de Pierre Cortons, son frère, de Thierry de Milly, écuyer, premier seigneur, et de Messire Payen, châtelain de Saint-Yon, deuxième seigneur. Plèges : « Jodoinus de Alneto », chevalier, et ledit Pierre Cortons. En mars 1231 ou 1232, Jean Mécart, chanoine de Linas, cède à Simon, curé de Châtres et chanoine, ses droits sur une maison dans le cloître près de celle du chantre.

Par sa décision de mars 1234, le chapitre de Saint-Vincent de Linas « ecclesie Beati Vincencii de Linais » accorde à Philippe de La Tour , « de Turre », chanoine, 6 sols parisis à prendre après sa mort sur la maison proche l'église construite pour le Chapitre « quod ipse habeat post decessum suum sex solidos perisiensium annui redditus supra domum suam quam fundavit juxta ecclesiam ad opus capellanie sue in recompensacione sumptuum dicte domus quam domum edificavit voluntarie », somme qui sera affectée à son anniversaire.

En 1237, l'accord de Guillaume, évêque de Paris, porte qu'Aubert « de Nangevilla », chevalier et Aveline, sa femme, ont cédé au Chapitre toute justice et tous droits sur la maison que Renaud de Chevreuse, chanoine de Linas, avait donnée pour augmenter, après sa mort, la prébende de Guy de Chevreuse, également chanoine. L'année suivante, l'archidiacre de Paris, constate que Guy de Linas, chevalier, s'étant engagé par serment à assigner 20 sols de rente à l'église de Linas, ce qu'il avait fait, Philippe, son fils, et Petronille, sa femme, ont donné leur assentiment.

En novembre 1241, Geoffroy de La Roue, écuyer, et damoiselle Agnès sa femme, reconnaissent avoir vendu une vigne dans la censive de leur neveu Barthélemy, écuyer, chargé d'un cens de deux deniers parisis, la vente moyennant 18 livres « Gaufredus de Rota, armiger et donnecella Agnes ei uxor recognovirunt de vendidisse et apernentum pro decem et octo libras in censua Bartholemei armiger nepos ad duos denarios parisis censuales » (charte CXLII).

En juin 1254, le Chapitre reçoit un arpent de vigne situé dans la seigneurie Saint-Merry, chargé de 12 deniers parisis de cens au profit de la léproserie de Linas « unam arpenta in villam feodo Mederico et leprocham de Linais, vinee ad duodecim denarios parisis censuales ». Cette vigne avait été contestée par le prieur de Longpont (charte CXLIV). En novembre de la même année, dame Mathilde de La Roue approuve le legs d'un demi-muid de blé à prendre sur le moulin de la Roue « domicella Matildio de Rota voluit et concellit de demidio modio bladi apud molidino de Rota … » (charte CXLIII).

Plus tard, vers 1264, Philippe, prieur de Saint-Pierre de Montlhéry, amortit, en faveur du Chapitre de Linas, une pièce de vigne située entre la ville de Saint-Merry et la léproserie de Linas, et tenue en censive dudit prieuré. Puis, en 1274, un accord est passé par-devant l'official de Paris entre Jean d'Étiolles, « de Atiolis », chanoine de Linas, et le Chapitre, au sujet de la perception de diverses amendes. L'année suivante, un échange aux termes duquel « Haymon », prieur, et le couvent de Notre-Dame de Longpont, cèdent au chapitre de Linas ce qu'ils percevaient à Saint-Merry, et reçoivent en contre-échange différents biens du Chapitre situés vers Brétigny, appelés la « Cultura » et la terre de « Beletein », ainsi que des terres près de Longpont.

Un acte de 1275, nous apprend qu'une maison est située dans la censive du chantre de Linas. C'est le prévôt de Corbeil « Jehan Cocos, prévoust de Courbueil », qui notifie avec « Jehan Le Minagier, garde dou seel de la prévousté », la cession faite à Raoul de Vémars par Arnoul Le Tanneur et Marguerite, sa femme, d'une maison et jardin sis à Saint-Merry de Linas en la censive du chantre.

Avec les prérogatives seigneuriales, le Chapitre avait droit de censive, mais en tant qu'église les dîmes de la paroisse devaient lui revenir. Nous savons que celles-ci avaient été confisquées par les seigneurs laïcs (dîmes inféodées) qui, bien souvent à partir du XIe siècle les redonnaient à l'Église sous formes de libéralités pieuses pour le salut de leur âme « pro anime sue salute » (5). Il était interdit d'en faire commerce. Toutefois, des dérogations furent accordées « au coup par coup ». Le 18 juillet 1246, les lettres du pape Innocent IV permettent au Chapitre de racheter des mains des laïcs les dîmes dans les autres paroisses, avec l'assentiment des curés, « rectorum », et des diocésains, « dyocesanorum », à condition de les restituer à ceux-ci, s'ils les réclament. En 1254, les lettres de Renaud, évêque de Paris, ratifient le rachat des dîmes fait par le chapitre de Linas de dame « Alipdis » de Bordes, d'Adam, son gendre, et de Mathilde, femme de celui-ci. Encore une fois, en 1268, les lettres d'Étienne, évêque de Paris, autorisant le chapitre de Linas à racheter des laïcs les dîmes dans les autres paroisses conformément aux lettres du Saint-Siège et à fonder pendant un an de nouvelles prébendes destinées, après le décès de leurs titulaires ou de ceux qui auront été présentés par ceux-ci, à augmenter le revenu des quinze anciennes prébendes.

De tout ce qui vient d'être énoncé, il faut ajouter que la situation n'était pas « bijective » si l'on peut dire. En effet, le chapitre, en tant que tel, était seigneur en partie de Linas. C'est-à-dire la communauté des chanoines avec à leur tête le doyen. Mais, ce dernier avec le chantre de Saint-Merry possédaient des censives propres à leur prébende. Cet état juridique a été source de conflit, de procédures interminables, parfois assez violentes entre les parties qui défendaient leur pré carré bien que les décisions aient été prises lors des assemblées capitulaires.

Le règlement d'une chicane terminée en 1304 est donné par les lettres de l'official de Paris portant que Guillaume « de Novo Vico », chapelain perpétuel de Linas, déclare s'en remettre à l'arbitrage de frère Eudes, prieur de Saint-Martin des Champs, et de Messire Girard « de Collauduno », archidiacre de Paris, pour régler une contestation survenue entre lui et les doyens et chapitre de Linas, qui voulaient l'obliger à faire résidence, à trois fois par semaine pour les âmes des défunts, etc., en disant que feu Mathieu, son prédécesseur, s'y était engagé par serment.

La vente seigneuriale de 1284

Une copie collationné du 20 décembre 1782, des folios 29 et 30 d'un cartulaire de Linas rédigée « par Maître Argenvillier, tabellion à Mont-Lhéry suivant le jugement donné à cette fin par Mr le prévôt dudit lieu le mardy 10 septembre 1602 » concerne « l'acquisition de la seigneurie de Linois par Messieurs du Chapitre dudit lieu passée par devant l'official de Paris en 1284 au mois de février ». Cette vente est la pièce maîtresse de la seigneurie et des possessions du Chapitre jusqu'à sa disparition en 1790.

Acte de vente de la seigneurie de Linas par Amaury de La Hunière et Marie, sa femme.

Ainsi en ce mois de février 1284, devant le tabellion épiscopal, nous trouvons les vendeurs « noble homme Amaury de La Hunière, écuyer et damoiselle Marie, sa femme, domini de medietate, ut dicebant, ville et pertinenciarum de Linais subtus Montemlethericum », et les clercs Lucas des Vaux et Pierre Garin « Luca de Vallibus et Petro Garini, clericis nostris ». La vente concerne une partie du village de Linas avec les cens, droitures et autres droits seigneuriaux, dont la justice du lieu. « … constituti Domini pro mediate ut dicebunt villae et pertnentiarum de Linais subtus Montem Lhericum », et de préciser que le bien vient de l'héritage de ladite demoiselle « quod ipsi ex heriditate dictae Domicella, habebant, tenebant et possidebant in dicta villa… ». Ainsi, la seigneurie laïque de Linas, qui avait été possédé depuis longtemps par la famille des Hescelin (cf. “Les chevaliers de Linas”) était tombée dans les mains de Marie, héritière de Linas.

Les biens venant du propre de Damoiselle Marie sont ainsi énumérés : - en la ville et terroir de Linas, une auberge sur la rue de Montlhéry « herbergamentum sive manerium, situm in via Montisletherici », - 25 arpents environ de bois au lieudit « La Châteigneraie », - 3 arpents et demi de vignes environ ; un pré, - en divers lieux, les forages et menues coutumes, et, en d'autres lieux, la moitié, - la moitié d'un four et des fournages, - la moitié du moulin de l'Etang « molendini de Stagno » et du moulin Cholet « molendini de Cholet » qui proviennent de l'héritage de feu Guillaume de La Roue, avec la moitié de la mouture provenant du même héritage « salva portione heredibus antedictia » - 21 livres environ de cens et de tailles, - deux droitures, - la moitié du pressoir et du pressurage, - la moitié des foires au jour de la Saint-Merry, - quatre fiefs tenus desdits seigneurs, le premier par le fils de Monseigneur « Jehan de Ulmoi », le deuxième par messire Jean Lebrun, chevalier, le troisième par Messire Philippe des Bordes, « de Bordis », le quatrième par Jean Brocard « Johannes Brocardi ».

Les biens susdits étaient grevés de redevances tant en argent qu'en nature, au profit de plusieurs seigneurs et monastères qui possédaient de fiefs ou censives à Linas : - les chanoines de la Chapelle Royale de Paris « capellae Regalis Parisiensis », 3 muids et demi de froment, - le seigneur du Coudray, « de Codreyo », 37 sous et demi parisis, un demi-muid de seigle, un demi-muid d'avoine et sept « coteretis » de vin du pressoir, - le curé de Saint-Merry, un muid de vin « uno modio vini de pressoragio debito presbitero Sancti Mederici ejusdem loci », - des religieuses de l'abbaye de Gif, un demi-muid de seigle par an et trois gâteaux « tribus gastellis » par semaine, - les religieuses de Saint-Antoine de Paris, 4 livres, - les religieuses de l'abbaye d'Yères, 10 sous, - le chapitre de Saint-Merry, 20 sous, - le prieur de Saint-Pierre de Montlhéry, 2 sous et demi. Tout ce qui vient d'être décrit est placé dans la mouvance du Roi « omnia et singula supradicta tenebant jufeodo ab illustri Regi Francie ». La vente est consentie au profit des doyen chapitre et église « ab eisdem decano et capitulo et ecclesie » moyennant « le prix et somme de 710 livres parisis ». L'amortissement de cette vente fut donné par le roi Philippe III le Hardi, en tant que seigneur éminent de la châtellenie de Montlhéry.

Acquisitions postérieures à 1284

En 1284, le chapitre de Linas avait acquis une maison sise à Saint-Merry vendue par Robert dit Mignart et Guillaume Bérenger, bourgeois de Châtres, en tant qu'exécuteurs testamentaires de feu Eudes de Saint-Merry. C'était la demeure du défunt. L'année suivante, la donation par Nicolas dit Cochet et « Auburgis dicta La Cochète », sa femme, après le décès du survivant, concerne un demi-arpent de vigne, acquis de Jean de Chèvremont, au curé de Linas, de l'autre moitié dudit arpent au Chapitre, pour l'anniversaire des donateurs, d'un demi-arpent de vigne à Chèvremont à la léproserie de Linas, et d'un demi-arpent de terre, au lieudit « Chanqueille », aux enfants de feu Jean Couturier de Fontaine de Brétigny « de fonte de Bretigniaco ». La même année, la notification par Guillaume « Tibout », prévôt de Montlhéry, est relative à la vente faite à Philippe Pâté, chanoine de Linas, par Jean de Brétigny, bourgeois de Montlhéry, et Marie, sa deuxième femme, de la rente qu'ils percevaient sur le cens de feu Philippe de Linas.

En 1292, un bail emphytéotique est fait au Chapitre par Grégoire, premier chapelain, « magister capellanus », et les autres chapelains de la Chapelle Royale de Paris de ce qu'il percevait à Linas. En 1298, la notification par Michiel des Essarz, prévôt de Montlhéry, entérine la donation faite au Chapitre pour la fondation d'un anniversaire par Pierre dit Lemaire, de Saint-Merry, et Edeline, sa femme, d'un demi-arpent de terre « assis à Saint-Merri ès closiaus ».

Une reconnaissance est faite en 1308 par-devant le prévôt de Montlhéry, Fourques de Samoury, par Guyot Aumont, de Linas, clerc, qui déclare avoir pris à cens « une place du jardin de la meson » que ledit Chapitre avait à Linas.

En mai 1490, une transaction est passée entre Jeanne, abbesse, et le couvent de Saint-Antoine des Champs, d'une part, et le chapitre de Linas, d'autre part, au sujet d'une rente que Philippe de Linas, chevalier, leur avait donnée en décembre 1201 et dont le Chapitre prétendait ne devoir que la moitié, alléguant en outre que le revenu des cens « n'estoit souffisant à paier les charges à quoy ils estoient et sont chargés envers aucuns autres seigneurs, et estoient de très peu de valeur au moien des guerres et divisions qui par cy-devant ont eu cours en ce royaume eu lieu de Montlehéry où iceulx de Saint-Merry et cens sont situez et assis ».

Lettre d'amortissement du roi Philippe III le Hardi (1284).

Les autres acquisitions sur le territoire de Linas

Depuis la fondation de 1207, de nombreux biens sont entrés dans le temporel du chapitre saint-Merry. Outre le patrimoine décrit ci-dessus, la seigneurie posséda d'autres terres dans les censives des seigneurs voisins. Nous décrivons celles situées à Buison (le long de la Sallemouille), à Chèvremont, et aux Rochers. Les droits acquis sur les moulins sont également mentionnés.

Les vente et donation faites en 1213 à l'église de Saint-Vincent de Linas par Guillaume de La Norville, chevalier, concernent tout ce qu'il avait en cens, dîmes et possessions diverses « apud Chèvremont usque ad nemus », avec l'approbation de Guy, son frère, chevalier, premier seigneur, et de Jean de Brétigny, chevalier deuxième seigneur. La même année, Aales, femme du susdit Guillaume, donne son consentement à la vente en spécifiant que les biens dont il s'agit s'étendent « usque ad nemus de Buisum ».

En 1217, l'évêque de Paris notifie l'amortissement par Milon de Chevreuse et « Rehemburgis », sa femme, de deux arpents de vigne « apud Beusum », ayant appartenu à la prébende de feu Guillaume « de Bussiaco », et que l'église de Saint-Vincent de Linas attribue à Vincent, fils dudit Milon, tant qu'il restera clerc, à condition que la vigne fasse retour à l'église après son décès.

En 1222, Guillaume, évêque de Paris, notifie la vente faite au chapitre de Linas par Gautier des Granges, « de Granchiis », écuyer, du cens qu'il percevait et de dîmes qu'il possédait à Chèvremont avec le consentement d'Aalit, sa femme, de Guillaume de Forges, chevalier, seigneur censier, et de Guy de La Norville , premier seigneur.

En 1230, Philippe de La Tour , chanoine de Saint-Vincent de Linas, vend à Robert, chapelain de ladite église, pour sa chapellenie, une vigne « apud Busun », en la censive de la Léproserie. Quatre plus tard, Guillaume, Jean et Pierre de Guillerville, chevaliers, frères, amortissent les vignes sises « apud prata de Buison », ayant appartenu à feu Hugues « de Boissiaco ».

Dix ans plus tard, les lettres de Raymond, archidiacre de Paris, faisaient connaître que Jean, dit « Bouet de Couterbof », écuyer, et « Alipdis », sa femme, ayant acquis pendant leur mariage le cens et la dîme de blé et du vin « in territorio de Capremonte », et ledit Jean ayant constitué ses exécuteurs testamentaires Guillaume de Leuville, « de Lunvilla » et André de Chouanville, « de Chevanvilla », chevaliers, ces derniers vendent au Chapitre lesdits biens du défunt pour la prébende de Jean « de Salicibus ». Fidéjusseurs : Guillaume de Leuville, André de Chouanville, Pierre de Guillerville, chevaliers et Barthélemy de La Roue , « de Rota », écuyer.

En 1253, Philippe de Brétigny, clerc, amortit au profit de Jean de Salicibus, chanoine, pour sa prébende, de tout ce que ce dernier tenait de lui en censive de Chèvremont, avec l'approbation de Guillaume de Leuville, chevalier, arrière-seigneur. Puis, l'approbation est donnée par Pierre de Linaisi, écuyer, seigneur direct. L'année suivante, les lettres de l'official de Paris font connaître que Jean « de Salicibus », chanoine, a reconnu devoir à l'église de Linas 30 livres parisis pour la prébende par lui fondée, et donne à celui qui obtiendra se prébende une vigne qu'il tient en mainmorte au terroir de Chèvremont.

Un accord est passé en 1273 entre Messire Guérin, abbé des Vaux de Cernay, et le chapitre de Linas, aux termes duquel il est convenu que les chanoines pourront acheter et tenir en mainmorte jusqu'à deux arpents de pré ou 2 sols de cens en la censive de l'abbaye qui, moyennant ce, tiendra de son côté en mainmorte deux arpents de pré « subtus villam que dicitur Buison ».

En 1275, Simon de Leuville s'engage à ne réclamera aucun droit sur ce que Philippe de Brétigny perçoit au terroir de Brétigny dans son fief ainsi qu'à Leuville. Vers 1283, un bail à cens, est passé devant le prévôt de Montlhéry, par Guillaume Tibout, au profit de « Hue Sentart » de Saint-Merry, « Sedile », sa femme, et autres, d'une vigne au chantier de Chèvremont.

En 1281, le prieur et le couvent de Notre-Dame de Longpont permettent au chapitre de Linas de posséder un arpent de pré devant le moulin de l'Etang, « ante molendino de Stagno », en la censive du prieuré. On voit bien ici la complexité de la juridiction féodale par le chevauchement et le morcellement des censives.

Les lettres de Jehan de Brétigni et Jehan Blondel, « prévouz de Montlehéri » de 1287 font connaître que Marie, veuve de Robert Mignart, bourgeois de Montlhéry, et Robert son fils aîné, accordent en quantité de premiers seigneurs au chapitre de Linas, l'amortissement d'un cens qu'avait tenu d'eux Philippe de Brétigny, en son vivant chanoine de Paris. Le consentement à l'acte précédent est donné par Robert, dit Mignardi, clerc, de Montlhéry.

En 1288, Guillaume de Guillerville, écuyer, vend au profit du Chapitre, deux deniers de cens dus par ledit Chapitre pour les écluses « dou molin de Cholet » sur la partie cédée par Amaury de La Hunière. L'amortissement de la vente est accordé par Pierre Despinci, écuyer, premier seigneur. La même année, un engagement est pris devant les prévôts de Montlhéry par Esmauri de La Huinière , écuyer, d'amortir envers tous seigneurs le fief de Jean Brocart, mouvant de la seigneurie de Linas, ainsi que deux deniers de cens dus à Guillaume de Guillerville pour les écluses du moulin de Cholet. Les plèges sont Jean de Villepereur et Guiart du Codrey, écuyers.

La transaction de 1291 est passée entre Jeanne, abbesse, et l'abbaye de Gif, d'une part, le chapitre de Linas, d'autre, au sujet d'un demi-muid de seigle par an et de trois gâteaux par semaine dus à l'abbaye à cause du four et des moulins de Linas. Simon, évêque de Paris, approuve cet acte.

Les lettres datées de 1292 de Jean Blondel, prévôt de Montlhéry, portent donation au Chapitre par Guillaume Tibout et « Eimanjart », sa femme, après le décès du survivant et pour fonder leur anniversaire, de 3 quartiers de vigne aux Rochers « assis ou Rochei delez la forest », en la censive des seigneurs de Linas. Une donation, faite la même année, par devant le prévôt de Montlhéry, par Jeanne, veuve de Robert Le Quorant, au chapitre de Linas ; pour fondation d'anniversaires, de terres sises à Chèvremont en censive commune dudit Chapitre et de Philippe Pâté.

Un consentement est donné en 1296 par Jean de Barzaico, prieur de Saint-Pierre de Montlhéry, à ce que le chapitre de Linas tienne de lui à cens et en mainmorte un arpent de pré situé devant le moulin de l'Etang.

La notification de 1299 par l'official de Girard, archidiacre de Paris, approuve la donation d'une vigne à Chèvremont, ayant appartenu à Nicolas de Villebon, chanoine de Linas, faite par Guillaume Guederon, curé de Noisy-le-Grand, chapelain dudit archidiacre, pour l'anniversaire de ses parents Pierre Guederon et Théophanie, femme de celui-ci, « ila quod in missa dicti anniversarii fiet collecta de karitate pro dicta Theophania quamdiu vixerit ».

En 1300, une vente est faite au Chapitre, pour subvenir à la chapellenie de Amaury de Lagny, « de Latiniaco », de 7 quartiers de vigne « in territorio de Bissone », tenant en partie « cruci de Bissone et vie per quam itur de Bissone apud Longum Pontem », en la censive de la léproserie de Linas, et ayant été légués par Pierre « de Bisson », en son vivant chanoine de Saint-Merry et curé de Saint-Michel près Longpont. Quelque temps après, frère Pierre de Vorgiis, « magister et provisor domus leprosarie de Linais » ammortit la vente précédente. Puis, Simon, évêque de Paris approuve ledit amortissement.

Le bail emphytéotique fait en 1306 au chapitre de Linas par le trésorier et les chapelains de la Chapelle Royale de Paris, porte sur 3 muids et demi de blé à percevoir à Linas sur la portion de terres, four et moulin précédemment acquise.

à suivre …

Notes

(1) Revenons un court instant aux définitions classiques. Une collégiale est une église qui a été confiée à un chapitre collégial, c'est-à-dire une réunion de chanoines, dont le nombre est variable selon les lieux, qui se tient ailleurs qu'au siège épiscopal. En fonction de la richesse du donateur et du nombre envisagé de chanoines, le fondateur dote le chapitre canonial de ressources suffisantes, biens fonciers qui sont répartis sous forme de bénéfices ecclésiastiques ou prébendes entre les chanoines nommés par le fondateur. Une prébende est un revenu strictement attaché à un canonicat et constituée par toute sorte de droits féodaux, mais le plus souvent des rentes.

(2) Selon l'abbé Lebeuf « étant certain que Linais étoit un lieu habité avant qu'on trouve aucune mention de Montlhéry dans les titres, …, [ville] sur la montagne au bas de laquelle Linais est bâti du côté du midi, il seroit injuste de dire que Linas doit son origine à Montlhéry ».

3) Saint-Marcel est le neuvième évêque de Paris, mort en 436. Il avait lui-même choisi, pour lieu de sépulture, un emplacement situé à l'angle sud que forment aujourd'hui le boulevard Saint-Marcel et l'avenue des Gobelins, en bordure de l'ancienne voie romaine.

(4) La création d'hostises apparaît après le Xe siècle avec le développement des seigneuries ecclésiastiques. Une hostise est une exploitation agricole, dépendante le plus souvent de l'église, concédée à un paysans libre et tenancier ( hôte ) à charge de défrichement moyennant un cens et des services allégés. Souvenons-nous que la rue de Paris à Longpont, s'appelait autrefois la rue des Hôtes .

(5) F. de Boutaric, Traité des Droits Seigneuriaux et des Matières Féodales (chez Henault, Paris, 1751). L'opinion la plus commune, touchant l'origine des dîmes inféodées, est celle qui la rapporte au temps de Charles Martel en 730. Ce prince dépouilla toutes les Eglises pour enrichir de leurs dépouilles ceux qui le servaient à la guerre « jus Sacratum Decimarum militaribus viris attribuit ».

dagnot/chronique21.02.txt · Dernière modification: 2020/11/12 00:59 de bg