Corpus Essonnien

Histoire et patrimoine du département de l'Essonne

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Bois-Courtin à Villejust (4) (1952-1972)

Chronique du Vieux Marcoussy –Marcoussis————— _—————————–___—– Mai 2009

Localisation de la pouponnière dans les communs actuels.

JP Dagnot

C. Julien

Cette chronique est la quatrième partie de l'histoire du Bois-Courtin à Villejust (Essonne, cant. Villebon-sur-Yvette). Nous avions laissé le Bois-Courtin quand l'Association Charitable d'Entr'aide Féminine dirigée par sœur Madeleine s'était installée dans la propriété mise à disposition par Armand Manuel de Ocampo. Dans un premier temps l'association, dont le but est de « soulager les détresses morales féminines », éprouve les tracas quotidiens de tous les Français après la Libération : rationnement , bons d'alimentation, bons d'essence, maigres indemnités journalières, etc. Pour palier les difficultés, en 1947, soeur Madeleine acquiert des outils agricoles et fait exploiter le terrain de la propriété par « un bon jardinier qui nous aide ».

Le centre d'accueil de Villejust

Dès juin 1952, la construction d'une pouponnière est envisagée dans l'enceinte de Bois-Courtin. Le rez-de-chaussée comporte le chauffage central, le réfectoire et une véranda devant ce dernier ; à l'étage une chambre pour la surveillante et deux pour les bébés avec une salle de bain. Ce bâtiment est situé à droite du château en entrant par l'avenue de tilleuls, dans les anciens communs en limite de propriété. [par la suite la salle de bains a été transformée par plusieurs WC pour adolescents et eau dans les chambres. Cette remarque confirme l'hypothèse de présence d'enfants plus âgés allant à l'école de Villejust que Monsieur et Madame Nacias ont vu].

Projet de pouponnière envisagée en 1952.

Un état nominatif des pensionnaires avec entrée sortie et nombre de journées est dressé le 30 juin 1952 : 377 journées représentant 4,2 lits. Une déclaration à la préfecture de police, publiée au Journal Officiel du 29 octobre mentionne « l'Association Charitable d'Entr'aide Féminine transfère son siège social, du 80 rue de Prony à Paris, à Bois-Courtin, Seine-et-Oise ».

Plusieurs échanges de courrier se font en 1953 : celui du 10 mars, entre fonctionnaires de Lyon et de Versailles, le premier a recueilli une fille de trois ans dont la mère vient d'être placée à Bois-Courtin; celui du 26 du même mois, entre fonctionnaires on apprend que la maison Marie-Jean-Joseph, reçoit « des femmes en danger moral prostituées ou libérées conditionnelles », dirigé par une religieuse assistée de quatre employées « actuellement ce centre accueille deux ou trois enfants en bas âge, ce nombre sera porté à dix dès que les travaux de la pouponnière seront terminés… »; celui du 30 mai est une autorisation de l'office français des changes donnant accord à l'Association Charitable d'Entraide Féminine, pour recevoir l'immeuble dit le château de Bois-Courtin appartenant à Monsieur de Ocampo, citoyen argentin.

Le courrier du 7 juin 1953 entre directeur de l'entr'aide sociale et celui de la santé de Seine-et-Oise; mentionne la demande d'autorisation de pouponnière pour « établissement recevant des enfants de 18 mois à 6 ans dont les mères sont en prison ». Des travaux simples de sécurité sont à prévoir ainsi que la présence d'une puéricultrice dès que l'effectif aura atteint une certaine importance. Suit un autre document sans date qui demande l'ouverture d'une maison destinée aux enfants nés en prison; l'âge de ces enfants s'étagerait de 18 mois à six ans; le local qui leur est destiné a reçu un avis favorable moyennant quelques petites modifications. « Actuellement nous avons trois enfants et bientôt cinq que nous avons installé dans trois grandes pièces de la maison principale. Je vous demande l'autorisation de les garder en attendant l'ouverture du pavillon qui leur est destiné et qui sera terminé au plus tard fin juillet ». Agrafé, un courrier de soeur Madeleine accompagne la demande d'ouverture datée du 2 juin 1953, avec une demande d'admission pour Yveline R. donnée par la maman actuellement à la Roquette.

Le 16 juillet 1953, une lettre concernant le centre d'accueil de Villejust semble indiquer que le centre est terminé fin juillet. Une réunion du conseil d'administration de l'association féminine se tient le 10 décembre suivant au siège 80 rue de Prosny à Paris. Deux jours plus tard un formulaire est demandé au maire de Villejust concernant Bois Courtin, le but « reclassement et relèvement de libérées de justice » est indiqué ainsi que la qualité du centre « œuvre privée catholique » où 14 pensionnaires peuvent résider avec un personnel de quatre personnes.

L'apport par Monsieur et Madame Ocampo

Un document important est établi le 23 janvier 1954 devant maître Gayot notaire à Versailles. Armand Manuel de Ocampo, agriculteur éleveur et Magdeleine Suzanne de Saint-Léger, demeurant ensemble à Buenos-Aires font apport à l'Association Charitable d'Entr'aide Féminine, devenue Association Charitable de Bois-Courtin, de divers biens composants le domaine de Villejust. Les apporteurs se réservent le droit de reprendre les immeubles au cas où l'association serait dissoute. Madame de Ocampo renonce à son droit d'hypothèque. Les biens sont estimés 3.000.000 de francs de l'époque.

Voici l'acte succinctement résumé: Antoine Robert de Naurois (gendre du couple Ocampo) , est mandaté par Armand Manuel de Ocampo, agriculteur éleveur, et Madeleine Suzanne de Saint-Léger, demeurant en Argentine, lequel apporte à l'Association Charitable d'Entraide Féminine actuellement à Villejust au Bois-Courtin , représenté par Gabriel Dupont, notaire à Palaiseau, président de l'association, la pleine propriété des immeubles ci-après désignés qui sont indispensables au fonctionnement de ladite association, au développement de son objet et au but poursuivi par elle : - une propriété bourgeoise sise à Villejust lieudit le Bois-Courtin, de forme irrégulière, contenant 5 hectares 83 ares 58 centiares, comprenant maison d'habitation, communs, jardin, parc, et deux allées d'accès. La maison comprenant au rez-de-chaussée, quatre pièces principales, une salle d'honneur, cuisine, office; escalier conduisant au premier, composé de huit pièces et d'une salle de bains; escalier conduisant aux combles composé de six pièces, cave, électricité, force, lumière, eau sous pression, chauffage central. Les communs comprenant habitation pour jardinier, remise, écurie, dépendances. Le tout cadastré B126 à B131. - avec 10 pièces de terres situées à Villejust aux lieux-dits les Beaux Regards B121 et B123 ; le Bois-Courtin B125, B130, B132 et B134 ; la Poupardière B249 ; le Bois Puley B195 ; à Villebon-sur-Yvette, lieu-dit les Joncs Marins E732-E738 et à Saulx-les-Chartreux, lieu-dit les Fonds de Verry, cadastré G78p, qui ont une contenance totale de 6 hectares 45 ares 41 centiares.

L'autorisation de l'Office des Changes avait été donnée à maître Paul Malan, avocat de Monsieur de Ocampo en date du 30 mai 1953. Nous ne reprendrons pas l'origine de la propriété sinon de dire que les immeubles appartenant à Monsieur de Ocampo provenaient de la vente Clovis reçue par Me Besnard, notaire à Palaiseau, en 1931 moyennant le prix principal de 400.000 francs (1).

Les annexes du document nous apprennent quelques informations sur la propriétaire américaine: Mr et Me Hall Clovis avaient été mariés le 23 septembre 1930 à la mairie de Chicago aux Etats-Unis, le notaire porte une mention peu courante « qu'il résulte un certificat de coutume concernant Mme Hall Clovis dressé par Me Greffin, avocat à la Cour Suprême de l'état de New-York » et que « d'après les lois des Etats-Unis d'Amérique et l'état d'Illinois, une citoyenne d'Amérique née aux Etats-Unis, mariée sans contrat dans l'état d'Illinois à un citoyen des Etats-Unis et ayant leur domicile marital dans ledit état, se trouve mise à un régime de séparation de biens qui lui permet vendre avec ou sans le consentement ou l'autorisation de son mari une partie ou la totalité de ses biens situés soit à l'étranger, sans avoir besoin d'aucune autorisation de justice, et sans être tenue à faire emploi régulier du prix qui peut lui être remis en espèces sans responsabilité, soit pour l'acquéreur, soit pour le notaire rédacteur de l'acte, c'est-à-dire que ladite épouse peut acquérir, posséder, jouir et vendre ou autrement disposer d'une partie ou de la totalité qu'il lui plaira, sous tous rapports aussi librement qu'une femme mariée et aussi librement que ledit mari aurait le droit de faire dans des circonstances similaires ».

Un dernier paragraphe précise les droits des femmes américaines « Qu'il n'existe dans les états d'Illinois de contrat équivalent au régime dotal français qui interdise à la femme mariée de vendre ses biens personnels ou l'oblige à l'emploi du prix, qu'en un mot, la femme américaine ayant atteint l'âge de 21 ans et n'étant ni aliénée, ni autrement incapable et dont le domicile marital se trouve dans ledit état d'Illinois, peut toujours revendre sans autorisation de son mari, ni d'aucune autre personne et sans être tenue à l'emploi régulier et que les tiers qui traitent avec elle, n'ont aucunement à se préoccuper des clauses du régime sous lequel elle est mariée ».

À la fin de l'acte se trouve une clause de réserve « Monsieur de Naurois, ès-nom, déclare réserver expressément au profit des apporteurs ou de leurs ayant-droits, le droit de reprendre les immeubles par eux apportés à l'Association, pour le cas où ces immeubles existeraient encore dans le patrimoine de l'Association, lors de sa dissolution ou la valeur de leur apport au cas où les immeubles n'existeraient plus en nature, et ce, seulement après l'extinction de tout le passif ; étant entendu que la présente et pulation ne fera aucun obstacle à l'aliénation desdits immeubles au cours de l'existence de l'association, et qu'il ne doit pas par suite être considéré comme une interdiction d'aliéner ». Nous verrons par la suite que cette clause prendra son plein effet.

L'œuvre de sœur Madeleine

Deux courriers des 14 et 26 janvier 1954 adressés au directeur par le ministre portent toujours sur le même problème de l'état des frais de séjour du quatrième trimestre : 14 pensionnaires sur 17 sont d'anciennes détenues de droit commun appartenant à la catégorie « libérées conditionnelles » pour lesquelles le ministère de la justice verse 100 frs. Elles pourront être assimilées à des prostituées et aux femmes en danger moral !! Dans le courrier, il est fait mention que les ressources de l'association sont destinées en totalité à l'aménagement du pavillon d'enfants dont l'intérêt est incontestable.

Un état des dépenses de la maison dressé le 31 mars 1954, avec nom des pensionnaires « anciennes prostituées et personnes en danger moral » pour le premier trimestre, note 23 personnes pour 795 journées soit un remplissage moyen de 8,8 lits. Le 3 avril, le directeur de l'aide sociale écrit à sœur Madeleine « si des femmes abandonnent leur enfant il convient de me prévenir et non pas les tribunaux » (!!!)

Le 19 mai 1954, sœur Madeleine annonce au directeur que son centre d'accueil pour enfants fonctionnera dans un mois. Le docteur Julia sera chargé de la surveillance médicale et « prochainement je serai en mesure de vous fournir les titres de la responsable de ce petit centre ». Un procès-verbal de visite de la pouponnière est attaché à la précédente. Les travaux sont terminés, sept enfants de trois à quatre ans sont présents, l'effectif sera porté à dix. Au rez-de-chaussée, il y a un réfectoire et une salle de jeux, au premier, une chambre de cinq lits une autre de trois, salle d'eau, chambre de garde, seconde chambre de garde en fin de travaux. Une infirmerie est prévue. Le 14 juin 1954, soeur Madeleine demande l'agrément de la pouponnière.

Le 28 mai 1954, le ministère de la santé vu la loi de 1946 tendant à la fermeture des maisons de tolérances et au renforcement de la lutte contre le proxénétisme, alloue à la maison Marie-Joseph de Bois-Courtin 56.2065 frs pour le remboursement des frais de fonctionnement du centre de reclassement féminin au titre du premier trimestre. Le montant correspond à 795 journées soit une moyenne de 8,8 femmes présentes.

À cette époque, le recensement permet de faire un état des présents au Bois-Courtin. Du côté personnel, vivent la soeur Madeleine, directrice de la maison Jean-Joseph, sa mère Germaine Dol âgée de 84 ans, quatre dominicaines et trois laïques fémininines cuisinière, jardinière et domestique. Côté pensionnaires, 9 femmes âgées de 22 à 60 ans, 7 enfants entre 2 et 4 ans.

Un courrier de sœur Madeleine est adressé au directeur de la santé le 17 février 1955 : « la maison Marie-Jean-Joseph est une réalisation de l'Association Charitable d'Entr'aide Féminine », avec le budget 1954 en annexe. Pour faire connaître la maison, les visites des principales prisons d'Haguenau, Doullens, La Roquette , Fresnes, Corbeil et de Versailles, sont faites en relation avec les assistantes sociales et d'autres oeuvres similaires. « La réadaptation se fait par la vie en commun en atmosphère familiale dans un climat de confiance et de compréhension, par des habitudes régulières de travail et par un enseignement professionnel (ménager, sténo-dactylo) proportionné à leur capacité, nous les relançons mieux armées dans la vie où nous les suivons ensuite par nos lettres, visite et invitation à nous revoir ».

Le 10 mars 1955 est une belle journée pour sœur Madeleine : la maison Marie-Jean-Joseph est autorisée à recevoir dans son établissement dix enfants de 18 mois à deux ans. Un envoi de pièces pour l'agrément est fait par sœur Madeleine le 23 mars. Le 9 avril, le directeur de la santé demande au préfet la confirmation des agréments en rappelant le but de l'établissement. Un avis favorable pour Bois-Courtin arrive le 9 mai.

Photo montrant les enfants et une puéricultrice (3)

L'action du préfet de Seine-et-Oise

Le préfet de Seine-et-Oise écrit au maire de Villejust le 10 juin suivant : « le centre de Bois-Courtin est agréé pour recevoir les femmes libérées de justice et les anciennes prostituées par application de la loi des 11 avril 1946 sur la prostitution, elle fonctionne depuis cette époque. Un nouvel agrément doit être donné et je demande votre avis sur l'opportunité de confirmer cet agrément ». Par retour de courrier, le 25 juin, le maire de Villejust répond au préfet sur l'avis sur l'opportunité de la maison d'accueil, le maire n'y voit pas d'objection mais émet des réserves « sur l'application à la commune d'une majoration de dépenses des nouvelles lois d'assistance payé par nous pour des femmes venant de la France entière ». Qu'importe le soulagement de la détresse humaine, on en revient à des histoires sordides d'intérêts pécuniaires !!!

Le 10 septembre 1956, le préfet fait un rappel au maire de Villejust : - Que le décret pour l'hébergement type Bois-Courtin a été confirmé dans son agrément le 11 juillet 1955 ; - Que les admissions prononcées par la directrice devront l'être par vos soins ; - Que faute de quoi les frais ne seront pas réglés !! - Prenez contact avec la directrice du foyer pour régler les modalités !!!

Le 30 août 1956, la direction de l'aide sociale envoie un questionnaire à sœur Marie : le prix de journée est fixé à 730 frs ; 43 femmes ont été hébergées en 1955, avec 3.079 journées ; 10 enfants et 3.276 journées. L'agrément définitif de l'établissement est daté du 11 juillet 1955. Une carte-courrier jointe au dossier mentionne le numéro de téléphone, le “6 à Villejust” remplacé par le “928 16 66”, adressé au directeur de l'aide sociale lui signalant que seules les femmes bénéficient du prix de journée, « nos enfants étant pris en charge provisoirement par l'assistance publique, et rétribuées au titre de nourrices ».

Dans une enquête du service de contrôle d'aide sociale de Seine-et-Oise en date du 9 janvier 1957, nous relevons que l'établissement comprend deux parties bien distinctes, « d'une part une pouponnière pour les jeunes enfants nés en prison et d'autre part un centre d'hébergement pour les mères à leur sortie de peine. Ce séjour leur permet de retrouver un travail normal. Les enfants sont souriants et se plaisent, ils sont bien nourris ». La description des menus de la maison, du 1er août 1958, montre qu'ils sont simples mais roboratifs.

Les comptes de 1959 sont dressés le 10 juin 1960 : 3.250 journées prévues, 3.279 réalisées, soit une occupation de 8,8 lits pour un taux de 75%. « La fréquentation de ce centre réservé aux jeunes mères sortant de prison se maintient. Notons le dévouement réel des organisatrices avec des résultats bien souvent décevants. Le centre est bien tenu, la salle à manger vaste et accueillante, les chambres des pensionnaires agréables. Les enfants sont logés dans les communs aménagés, les petits lits sont coquets, et l'ensemble très propre. Les enfants y sont manifestement heureux et détendus, leur sourire confiant le prouve. C'est dans ce domaine que l'on peut espérer le plus de résultats, car pour les mères, les tentations de leur ancien milieu les font souvent tomber dans l'ornière ».

Dans ce rapport, nous retrouvons toute la générosité de sœur Madeleine qui poursuit son œuvre bien que celle-ci ne soit pas toujours bien comprise de l'entourage.

Le 20 juillet 1961, la direction de l'aide sociale adresse un courrier au préfet de Seine-et-Oise : « le centre reçoit de jeunes prisonnières à leur libération et cherche à les reclasser. On ne connaît pas leurs antécédents et donc il est impossible de récupérer la moindre participation ». Pour les occuper pendant leur séjour, les pensionnaires font des chaussures de toile. La vente de ces dernières vient en diminution du prix de journée, procurant pour 1960 la somme de 9.074 frs. Relevons que les dons atteignent 11.469 frs (2).

Lors de la réunion du conseil d'administration de l'association le 7 octobre 1961 à Bois-Courtin, les présents : Maître Dupont président, Melle Dol, vice-présidente soeur Madeleine, Melle Boivin secrétaire adjointe religieuse, Melle Paumard, trésorière, religieuse, délibèrent pour approbation des comptes. Relevons les postes des recettes : - 8.500 frs, venant de la vente des espadrilles, - 15.000 frs, montant des pensions des enfants, - 27.000 frs, prix des journées adultes, - 18.000 frs, montant des dons.

Le 2 novembre 1961, le prix de journée prévisionnel pour 1962 est établi : prévues 3.320, réalisées 3.005 soit une moyenne de 8,23 et une occupation de 68%. « Le personnel est congréganiste hormis le jardinier ». Le budget définitif de 1961 est fait le 18 mai 1962 : réalisé 3.218 soit 8,8 pensionnaires pour une occupation de 73%.

L'examen des comptes de 1963 donne : 4.000 journées prévues, réalisées 3.169 d'où une occupation de 72%, et déjà « une baisse sensible de fréquentation qui continue cette année ». Nous sommes fin 1964. Notons qu'un ménage laïc, logé à l'extérieur fait partie du personnel et que Mme Andrieux fait le catéchisme pour les enfants de Villejust.

Les contrôles de la DASS

Dans un rapport de la DASS du 15 juillet 1966, nous relevons pour calcul du prix de journée : - 3.100 journées prévues, - 12 lits femmes, 12 lits enfants, - en activité annexe: il s'agit d'un centre de placement nourricier concernant des enfants placés par l'aide sociale à l'enfance de Seine-et-Oise . - la maison est occupée aux trois quarts par les femmes; - 4.100 rations pour les enfants soit 13 enfants. - les sœurs reçoivent une “ indemnité de vestiaire ”, - l'effectif est de quatre religieuses, trois laïcs, deux employées “toute main” pour les enfants et un jardinier s'occupant du potager, logé et nourri partiellement.

Le budget primitif 1968, établi le 16 novembre 1967, donne une aide sociale de 43.500 frs et une aide à l'enfance de 42.000 frs avec un personnel composé de sœur Madeleine directrice, trois religieuses, un jardinier (logé gratuitement) et trois “toute main”. Il y a 12 lits pour adultes. Le nombre de journées pour cette catégorie est rappelé pour les années 1964-67.

Le 11 mars 1969, la DASS de l'Essonne effectue un contrôle sur place et note « un centre d'hébergement pour mères en liberté conditionnelle avec une capacité de 12 femmes et 12 enfants ». Une occupation de 3.093 journées représentant la moyenne des trois dernières années, avec une prévision de 1.600 journées compte tenu de l'occupation de 1968 (1.671 journées). Notons une aide à l'enfance de 51.450 frs, pension versée pour les nouveaux nés. Un personnel composé d'une mère supérieure de trois autres religieuses, trois laïques: une employée s'occupant des enfants, une employée s'occupant de la cuisine et un jardinier.

Quinze jours plus tard, la DASS calcule la situation définitive de l'exercice 1969 : 2.517 journées soit 7 lits moyens. Un second document mentionne: « les placements à Villejust de femmes venant d'accoucher dans les prisons de Fresnes, Rennes ou autres, mises en liberté conditionnelle est difficilement prévisible ».

Un contrôle prix de journée de la DASS, du 10 février 1970, donne : - capacité de 12 femmes occupée à 35% (relevons la descente de fréquentation annuelle, 3.518, 2.517, 1.608 journées), - 47.500 frs alloués pour les enfants, - 16.000 frs provenant de dons Les pensionnaires sont placées dans l'établissement par l'administration pénitentiaire de Fresnes et y demeurant en moyenne 10 à 20 jours. La gestion des religieuses est exceptionnellement économique et bien inférieur à celui accordé par des vieillards valides !!!

Un nouveau contrôle de la DASS de l'Essonne est effectué à Bois-Courtin le 19 mai 1971. Le procès verbal précise : - établissement capacité de 12 femmes et en annexe 12 enfants, - prévision d'occupation 36%, Activité très faible compensée par la présence d'enfants pris en charge par le service départemental d'aide sociale . En 1970, on compte 1.527 journées pour les mères. La recette de 56.000 frs provient de l'aide sociale à l'enfance correspondant à 13 frs par enfant par jour (celui des femmes en comparaison est de 24 frs). Le personnel est détaillé dans ce rapport : - administratif : la supérieure directrice et la sous-directrice et comptable sont toutes religieuses, - généraux : une religieuse est en cuisine et une autre religieuse travaille comme gardienne d'enfants, - divers : une femme au pair et une femme “toute main”. Notons qu'il n'y a plus de jardinier « il est parti en retraite » et que le jardin potager est abandonné .

Sur papier à en-tête “ Maison Marie Jean-Joseph” à Bois-Courtin, le 13 novembre 1971, est un extrait d'une assemblée examinant un compte-rendu financier annuel et une prévision pour l'année suivante. L'état du personnel mentionne une supérieure directrice, trois religieuses auxiliaires, une religieuse au pair sans salaire et une employée “toute main” pour 690 frs.

Le calcul prix de journée des établissements privés prévus pour douze femmes est donné le 16 novembre 1971. le rappel des journées constatées en 1968, 1969 et 1970 fait état de chiffres qui varient entre 1.527 et 1.608 ; il est prévu 1.560 pour 1972 avec mention d'une activité annexe de 12 enfants « le centre d'hébergement pour jeunes femmes libérées de justice et les enfants dont les mères sont pensionnaires ou détenues ». La modicité du prix de journée s'explique par la gestion économique des religieuses et les allocations d'aide sociales à l'enfance. « L'activité est en baisse continuelle à cause des séjours plus courts ; les femmes restent un mois seulement au lieu de deux ou trois précédemment, désirant se réinsérer le plus rapidement possible. Par ailleurs la justice use de plus en plus de la liberté provisoire; c'est ainsi qu'on arrive à un taux d'occupation extrêmement bas qui laisse entrevoir une cessation prochaine d'activité ou une reconversion ». La moyenne d'occupation est de 4,26 lits. Dans le chapitre des dépenses prévisionnelles, nous retrouvons quatre femmes en moyenne, quatre religieuses, et dix enfants. On note qu'il y a deux laïques : une femme au pair et une femme de service mais plus de jardinier.

Le 29 juin 1972, la DASS à Évry , service des établissements calcule le prix de journée prévisionnel de 1972 pour Bois-Courtin « Ce centre d'hébergement pour femmes libérées de justice reçoit également, mais en activité annexe des enfants dont les mères sont pensionnaires ou détenues » . Nous assistons aux mêmes conclusions sur les difficultés de la maison « La modicité du prix de journée s'explique non seulement par la gestion très économique des religieuses mais aussi par la prise en compte des allocations d'aide sociale à l'enfance… L'activité est en baisse continuelle à cause des séjours plus courts. Les femmes restent un mois seulement au lieu de deux ou trois précédemment, désirant se réinsérer plus rapidement. Par ailleurs la justice use de plus en plus de la liberté provisoire. C'est ainsi qu'on arrive à un taux d'occupation extrêmement bas qui laisse entrevoir une cessation prochaine d'activité ou une reconversion ». Ces paroles sont difficiles à entendre pour les sœurs qui ont consacré leur énergie à cette entreprise. La moyenne d'occupation est d'environ 4,2 lits. L'effectif de six agents reste inchangé. Les religieuses sont au régime de la sécurité sociale, elles reçoivent une indemnité de vestiaire.

Recueil de conversations

Ici nous apportons des propos oraux qui font appel à la mémoire des intervenants et dans certains cas colportés donc à considérer comme tels.

Un lecteur me dit qu'en 2003 on lui a rapporté que vers la fin de l'activité de soeur Madeleine, le but de l'association avait élargi le champ des personnes accueillies et que l'on recevait: - des filles mères, françaises ou étrangères qui accouchaient sous X, - des femmes françaises et étrangères cachant leur grossesse, - des femmes de tout horizon ayant subies des violences morales ou physiques.

Ces faits ne sont pas apparus lors de l'analyse des documents de la préfecture ou de la DASS.

Selon Monsieur Buret, Armand de Ocampo aurait cédé Bois-Courtin à des religieuses s'occupant de filles mères. D'après des habitants voisins de la maison du curé, les soeurs entre 1960 et 1970 étaient présentes et s'occupaient de femmes en fin de peine, logeant dans les communs. Madame Holdener confirme que les sœurs élevaient les enfants des femmes prisonnières à la petite Roquette. Selon frère Michel Dumont en retraite en Bretagne, les sœurs s'occupaient de femmes célibataires avec enfant.

En 2006, une prise de contact avec soeur Marie de la Croix du couvent de St Sulpice de Favières qui fait partie de la Congrégation des Dominicaines de Béthanie d'où venait soeur Madeleine. Ma demande concerne l'établissement de Villejust. Il en résulte après renseignement que seule soeur Marie de Jésus a oeuvré pour la maison Marie Jean-Joseph dont la dénomination vient du prénom du dominicain fondateur de la communauté des dominicaines de Béthanie en 1860. Soeur Madeleine de Jésus reprit les idées du fondateur qui avait “prêché une retraite aux détenues de la prison de Caillac et ses effets merveilleux” et les reprit en accueillant des détenues en fin de peine.

La même année une conversation avec le couple Alexandre Thurot (né en 1920), ancien carrier, se souvient qu'entre 1947 & 1951, les pensionnaires se rendaient à la carrière pour voir les célibataires !!!.

Le maire, quant à lui, a fait son catéchisme chez les soeurs, soit vers 1955.

À suivre …

Notes

(1) La propriétaire avait été Mme Eléonor Herudon-Steele, divorcée en premières noces de Mr le comte Alexandre Marie Jean Eude Basèle de la Greze, en secondes noces de Mr Louis Marie Charles Debonnesset, et épouse en troisièmes noces de Mr Hall Clovis, propriétaire avec lequel elle demeurait à Villejust au château de Bois-Courtin.

(2) N'oublions pas que nous comptons avec les nouveaux francs (NFrs). C'est l' ordonnance du 27 décembre 1958, qui avait décidé que “à compter d'une date qui sera fixée par décret, et au plus tard le 1 er janvier 1960 il sera créé une nouvelle unité monétaire française dont la valeur sera égale à cent francs” .

(3) provenance “Regards en arrière”

dagnot/chronique28.06.txt · Dernière modification: 2020/11/12 03:17 de bg