Corpus Essonnien

Histoire et patrimoine du département de l'Essonne

Outils pour utilisateurs

Outils du site


dagnot:chronique33.02

Page en chantier


L'église Sainte-Trinité de Montlhéry (5) (XVIIe-XVIIIe siècles)

Chronique du Vieux Marcoussy –Marcoussis————— _——————————_—– Avril 2009

Église sainte Trinité, cartes postales anciennes.

JP. Dagnot

C. Julien

Après avoir décrit l'organisation ecclésiastique de Montlhéry au Moyen Âge, la paroisse et la fabrique Sainte-Trinité au XVIe siècle, les confréries du XVIIe siècle, les travaux commencés en 1689, nous étions arrivés à l'écroulement presque total de l'église Sainte Trinité dans la soirée du 7 juillet 1689. Continuant notre narration cette cinquième chronique présente la reconstruction et la vie paroissiale au début du XVIIIe siècle.

Avant de continuer, cette histoire, nous apportons trois éléments qui concernent l'antiquité de l'église. Premièrement, une charte du XIIIe siècle, datée d'un 4 janvier dont nous ignorons exactement l'année, concerne la fondation d'un obit par maître Raymond de Figiac, sous-diacre de Notre-Dame de Paris « Ipso die, de domo Sancte Marie, obiit magister Reimundus de Figiaco, subdiaconus et concanonicus noster, cujus anniversarium in ecclesia nostra singulis annis fieri concessimus ». Le chanoine donne, à l'église cathédrale, une vigne qu'il possédait au Luisant de Montlhéry « Qui dedit nobis vineas suas quas habebat apud Montera Lethericum, in territorio quod vocatur Luisant ».

Plus, dans les comptes des funérailles de Charles VII, par messire Tanneguy du Chastel, vicomte de la Bellière, premier escuyer du Roy, nous trouvons les quittances « pour autres deniers à cause du service, aux curez d'Estrechy, des deux églises parrochiales de Chastre sous Montlhery, de l'eglise parrochiale de Montlhery, aux prieur de Saint Eloy, curez de Longjumeau, de Bourg la Reyne et l'Hospital Saint-Denis, pour semblable v escus dor vj livres xvij sols ».

Il convient de rappeler la fonction décanale assumée par Montlhéry à partir du XVIe siècle. Elle était due à la position politique de cette ville, siège de la châtellenie royale, et géographique, centre principal du Hurepoix. Le doyenné de Montlhéry regroupait près de 60 églises, 2 chapelles et 9 prieurés (1).

La reconstruction de l'église

L'écroulement du monument avait été constaté dès sept heures du matin par les autorités laïques et ecclésiastiques de Montlhéry. Rappelons que la prévôté était le maître d'œuvre de l'agrandissement de l'église Sainte-Trinité. Ce sont les travaux d'agrandissement qui sont la cause de l'écroulement du bâtiment. Il ne fait aucun doute qu'ils ont été mal conduits. Il est évident que le percement des murs de la nef a déstabilisé le bâtiment et le clocher, non déchargé de ses cloches, s'est écroulé entraînant une partie du bâtiment dont la nef et la toiture. Outre les négligences notoires une autre cause du sinistre peut-être le côté pervers de l'adjudication au rabais . À force de « tirer sur les prix », les entrepreneurs ne prennent plus les précautions d'usage pour raisons pécuniaires. On peut s'étonner également de la rapidité des travaux, en trois mois: faire des fondations, monter des piliers et un mur, déplacer l'appui d'une charpente, pratiquer des arcades sous le clocher, les maçons ont confondu “ vitesse et précipitation ” (2).

Le mémoire des paiements des travaux du 29 avril 1690 mentionne à cette date, que 1.800 livres ont été accordées au sieur Monbregnaud, maçon, pour les ouvrages extraordinaires de l'église jusqu'au mois de mars dernier, qu'il a recommencé à travailler du prix pour deux arcades des pignons du clocher et un premier payement de 189 livres . Puis, d'autres quittances de ce même entrepreneur de maçonnerie sont honorées : ce sont celles du 7 mai 1690, et ensuite sept quittances d'un montant total de 1.368 livres, nous sommes au 28 septembre 1690. Le solde des travaux est payé le 8 octobre de la même année par une somme de 282 livres. Ainsi, le clocher et les arcades sont réparés.

Le marché de charpenterie est passé le 26 avril 1691 par Georges Benoist, maistre charpentier demeurant à Linois, « lequel promet confesse faire marché avec Maistre Jean-Baptiste Bodin, sieur d'Esperrières, conseiller et procureur du roy au siège royal de Montlhéry, y demeurant et acceptant de faire et parfaire les ouvrages de charpenteryes nécessaires pour les cloches de l'église dudit Montlhéry, faire quatre lucarnes par le bas et quatre ouvertures par le hault fasson d'oeil de boeuf avec une pomme au dessus de la charpente de deux pieds de diamètre, le tout ainsi qu'il est marqué au plan annexé à la minute. Ledit Benoist devra fournir tout le bois nécessaire auxdits ouvrages, faire et parfaire dans le jour de la Saint Jean prochain, subjet à visitation; plus estre par ledit Benoist la sintre qui est de présentement à la voute du clocher y monter sur icelle deux cloches; s'oblige ledit Benoist de faire les sintrées qui conviendra pour les voultes du coeur de la dite église, à faire le plancher de lattes du costé de l'hôtel Dieu, refaire le lambri de ladite église ainsy qu'il estoit obligé par le premier marché, poser les gouttières qu'il convient de mettre sur la dite église entre la nef et le clocher et la croix audessus de la charpente du clocher. Ce marché est fait moyennant la somme de cinq cents livres, cent présentement comptant et le reste à mesure que ses bezognes advanceront » (3).

Pour en finir avec la reconstruction de l'église de Montlhéry, nous citerons un passage d'un procès du XVIIIe siècle qui précise les moyens pécuniaires qui ont été utilisés.

La vie paroissiale à la fin du XVIIe siècle

Une sentence fut rendue par l'official de Paris le 22 février 1691, « par laquelle les marguilliers ont le droit de choisir les chantres de temps immémorial et que le curé n'a rien à dire ». Le 2 janvier 1692, les marguilliers déposent un acte sous signatures privées du procureur et des habitants pour la nomination de deux chantres à l'église Sainte-Trinité. Le même jour, ils expliquent que les chantres nommés par le curé de Montlhéry sont la risée de tout le peuple par ce qu'ils ne savent pas chanter. N'est-ce pas troublant ?

Un acte passé en 1694 concerne « l' attribution du droit de chapelle Saint-Nicolas moyennant cent livres au profit de maître Jean Fontaine, procureur du Roy au Châtelet de Paris, tant pour luy, sa femme et famille, leurs hoirs ou ayant cause que leurs successeurs en la propriété de la maison et lieux scise à Montlhéry près la porte deffendant à Linas, appartenant audit sieur Fontaine… ». Il s'agit bien de la maison située sur la Grande-rue, attenant à la porte Baudry. Voici comment commence cette convention. « À la réquisition de Jean Leroy, notaire royal à Montlhéry, marguillier en charge de l'église Saincte Trinité de Montlhéry, sont comparus par devant le nottaire royal soubsigné Clotaire Rogier, maître appotiquaire aussy marguillier, Jean Quatrehomme, Claude Huiart et Jacques Suzanne tailleur d'habits demeurant audit Montlhéry, tous marguilliers et habitants de la paroisse dudit Montlhéry représentant une partie des paroissiens assemblés au son de la cloche en la manière accoustumée au devant de la principalle porte et entrée d'icelle église, sortie de la messe paroissialle ledit jour chantée et célébrée en ladite église… auxquels a esté par le dit Leroy communiqué l'exploit de soumission qu'ils ont fait faire avec requête à Monsiuer Louis Chanceau, prestre, curé de ladite église Saincte Trinité à comparoir en personne pour être présents à la commission qu'ils entendent faire du consentement desdits habitants et à Messire Jean-Baptiste Bodin, sieur Desperrières, conseiller du roy, maire perpétuel et procureur de sa Majesté audit Montlhéry, du droit de chapelle et d'autel Saint-Nicolas adossée au quatrième pilier, du costé droit en entrant dans la la nef de la dite église… ». Trois publications de cette concession avaient été faites par Jacques Jollivet, bedeau « par trois dimanches consécutifs ont esté par luy faite, lesdits jours de festes à l'issue des messes et des vespres… ».

Ce droit de chapelle était ainsi attaché à la propriété d'une maison. Nous avons déjà vu cette coutume lors de l'étude de l'église Saint-Fiacre de La Ville-du-Bois quand le sieur Claude Erard possédait deux maisons dont un droit de chapelle était attaché à chacune d'elles. À Montlhéry, la convention de 1694 précise que le bénéficiaire pourra « faire poser banc et pupitre pour y entendre la messe » alors que les marguilliers promettent et s'obligent « de faire oster incessamment la chaire présentement adossée audit autel Saint Nicolas et la faire placer devant un autre pilier de la nef ». Une autre clause oblige les marguilliers qui « promettent qu'à l'advenir il ne sera adossé aucun banc ny chaire à la ditte chapelle qui puisse empescher et voir le prestre céllébrer au maistre autel dudit chœur… ». Outre la somme de 100 livres revenant à la fabrique, le sieur Fontaine « s'oblige, bailler, à payer à l'acquis du droit d'amortissement du à sa Majesté ».

Fin 1694, Claude Genty, maistre masson couvreur, s'est obligé à entretenir le carreau de ladite église ainsi que les crespis et enduits des murs d'icelle, entretenir la gouttière en cul de lampe et celle qui est entre le clocher et la nef de manière que les eaux pluvialles ne puissent rien gaster ny endommager les plafonds et murs, sera tenu de fournir le plastre, cloud, lattes, tuille, carreau, chaux sable et autres choses nécessaires, limité à 50 carreaux, ce marché fait moyennant 20 livres , sera tenu de recarreler les fosses des inhumations aux frais de ceux qui utilisent les dites fosses.

Depuis le rattachement du territoire de Montlhéry à la paroisse Sainte-Trinité, la convention de 1622 avait donné un dédommagement au curé de Longpont. Le 21 janvier 1696, un arrest du Grand Conseil par défaut est obtenu par dom Amand Valeilhe, curé de Saint-Barthélemy de Longpont, demandeur, « contre les marguilliers de l'oeuvre et fabrique de Sainte-Trinité de Montlhéry, qui ordonne que les parties plaideront au Grand Conseil au sujet d'une rente de 60 livres due par ladite fabrique au sieur curé ». La sentence par défaut de la prévôté de Montlhéry, obtenue, le 31 octobre 1696, par dom Amand Valeilhes, curé de Saint-Barthélemy de Longpont, demandeur, contre Claude Hugard et Jean Durand, marchands demeurant audit lieu et marguilliers de l'œuvre et fabrique de la Très Sainte-Trinité de Montlhéry qui les condamne à continuer de payer audit curé la rente de 60 livres qu'ils lui doivent et 300 livres d'arrérages échus et d'en passer titre nouvel.

Un acte est passé en 1698 par des habitants au sujet des chantres et que Vathou, prestre, remplit la place pour porter la chape à chanter au choeur mieux que le tailleur d'habits !!

Une reconnaissance de créance est faite en 1704 par Pierre Lucas, marchand de Montlhéry et Barbe Leroyer, à cause d'elle fille de François Leroyer et Elizabeth Leroyer, « lesquels sont débiteurs envers l'église paroissiale de la Sainte-Trinité, de 99 livres de rente constituée par le testament de Jean Bourdon, le 8 janvier 1664, portant fondation de 72 messes ». L'acte fait en 1669 par Barbe Bourdon, fille dudit Jean précisait que la rente était assise sur une maison rue du Soulier Judas composé de deux corps de logis…. La famille Bourdon était très aisée et cette dame Barbe Bourdon, veuve Gérard Blavet, avait fondé une rente de 200 livres, somme considérable en 1671 lorsque l'on sait qu'un ouvrier maçon gagnait 9 sols par jour.

Signatures au bas du marché de construction. On remarque la belle signature de Jehan de Monbregnaud, entrepreneur de maçonnerie.

C'est à la fin du XVIIe siècle et au début du suivant que le nommé Bodin sieur Desperrières officier royal de la châtellenie de Montlhéry, que nous avons rencontré à plusieurs reprises dans cette narration, entreprend de fonder une chapelle dans la ville basse proche de la porte de Paris. L'archidiacre de Josas, messire d'Orsanne, venu pour consacrer le nouvel autel, visite l'église Sainte-Trinité.

Les travaux au début du XVIIIe siècle

De nouveaux travaux sont faits en l'an 1701. Le 6 septembre, Estienne Chapé, maître charpentier, demeurant à Linois, passe un marché « lequel a entrepris de faire et fournir les ouvrages de charpenterye, scavoir le befroid pour porter les quatre cloches au clocher de ladite église, fournir tout le bois de chesne neuf, ledit marché moyennant 800 livres le preneur pourra récupérer le viel bois ». Ce document nous apprend ainsi que le nouveau clocher est terminé fin 1701 avec les cloches mises en place.

Plan des travaux de réfection du parvis de l'église de Montlhéry. On peut voir le calcul minutieux de l'entrepreneur pour établir son devis.

Un marché d'entretien de l'horloge est passé en 1707 par maître Claude Lorise maître horloger à Paris demeurant paroisse Saint-Germain « lequel a promet, promet et s'oblige à faire et exécuter pendant l'espace de six années consécutives, l'orloge de ladite église, allante et sonnante sans aucune interruption et sans aucun denoyement.. ». La convention est passée avec Jacques Suzanne, maître tailleur d'habits et maître Auguste Decourchant, greffier en la prévôté royale de Montlhéry, demeurant audit lieu « au nom et comme marguilliers de l'église et fabrique Sainte-Trinité de Montlhéry, à ce présent et acceptant en la présence de Messire Jean-Baptiste Bodin sieur Desperrières, conseiller du roy et son lieutenant de police en la ville et châtellenie de Montlhéry ». Le marché de l'entretien de l'horloge est accepté moyennant la somme 10 livres payable chaque année. On voit ici l'importance accordée à l'horloge de l'église considérée, au XVIIe siècle, comme un service indispensable aux habitants, car seul le clocher, par les sonneries, donnait l'heure à tous.

Les travaux d'amélioration et d'embellissement de l'église Sainte-Trinité continuent en ce début de XVIIIe siècle. Un “ marché devis d'ouvrages de maçonnerie et quittance des ouvriers pour l'église de Montlhéry ”. Il s'agit de « construire un perron ou rampe coupée devant les portes de l'église… desmolir tout le parvis ou perron, poser au lieu dudit parvis une rampe coupée conforme au plan composé de quatre marches de bon grès, treize pouces de pas et six pouces de haut, devant les marches huit bornes ». Il convient de remarquer qu'après ces travaux faits début XVIIIe siècle, le parvis est resté inchangé puisque l'état de cette époque correspond au parvis actuel.

Un devis pour maçonnerie, charpente couverture est établi à la même époque; il s'agit de la sacristie. Les entrepreneurs comparaissent devant le notaire royal de Montlhéry pour signer le marché, « à sçavoir Georges Benoist, charpentier demeurant à Linois, Claude Genty, maître maçon en plastre, et François Jerosme, maître maçon en terre demeurant en cette ville, pour faire les dits ouvrages audit marché au rabais ». Le marché est donné par Auguste Decourchant, marguillier qui « promet de payer la somme de 350 livres pour tous les ouvrages par eux faits avec un acompte de 92 livres 10 sols ».

La vie paroissiale au XVIIIe siècle

Une concession de banc est accordée le 14 avril 1715 « en la nef de l'église sous la première arcade à droit du chœur ». Comme toujours, il s'agit d'un acte notarié sur un “ petit papier à 10 deniers le feuillet ” timbré de la Généralité de Paris. Voici le début de cet acte « Furent présents Jacques Blin demeurant de présent en la paroisse des Marcoussis et Simon Angon, marchand boucher demeurant en cette ville de Montlhéry, lesquels aux noms et comme marguilliers en charge de l'église paroissiale de cette ville, en la présence de vénérable discrette personne Messire Louis Chanceau, prestre bachelier en droit canon et curé de ladite église paroissiale Sainte Trinité, ont par ces présentes pour le bien et avantage de la dite église concédé , accordé et permettent au sieur Louis Charles Mury, bourgeois de Paris, y demeurant Montagne Sainte-Geneviève, paroisse Saint-Estienne du Mont, estant de présent en cette ville et acceptant tant pour luy, son épouse et leurs enfants pendant leur vie à tous, tout le terrain qu'il y a entre les deux pilliers dont l'un est à costé de la place dudit sieur curé et celuy d'au-dessus pour y poser un banc de la mesme manière et uniforme à ceux quy sont au dessus du second pillier du costé droit du chœur de la dite église, qui compose la première arcade à droit du chœur et le tout sur l'alignement des autres bancs des sieurs Sigonneau et Tologe… ». Cette convention est d'une précision extraordinaire, il suffit d'entrer de nouveau dans l'église pour trouver cette place. Et enfin, il faut bien parler des “avantages de la fabrique” « Cette concession et permission faite et accordée moyennent la somme de 40 livres que ledit Mury baille, paye.. ».

À la même époque, les fonts baptismaux sont placés dans une chapelle particulière dans le bas-côté gauche. Il s'agit d'une vasque de belle pierre de marbre sculptée portant la mention « L'an 1716 étant curé depuis 28 ans, maître Louis Chanceau, natif d'Orléans, ces fonts ont esté faits par les soins de maître Claude Gentil, marguillier en charge et Charlemagne Badin, natif de cette ville en a esté sculpteur ». La chapelle des fonts avait été construite en 1708 par ordre du sieur Lecourchant, marguillier en charge.

En 1722, nous trouvons un réquisitoire de Messire Estienne Lhéritier, notaire royal, procureur audit Montlhéry, et agissant comme marguillier de ladite église, pour parvenir au marché qu'il convient de faire pour le rétablissement des cloches et de la charpente qui les porte, de ladite église, « dont deux ont été démontées depuis huit jours pour éviter le péril évident dont on étoit menacé par la chute desdites cloches…. ». Une assemblée est convoquée où le marguillier sollicite l'autorisation des paroissiens pour effectuer les réparations. Les évènements intervenus trente ans auparavant ont porté leurs fruits!

Le 14 octobre 1726, un titre nouvel de ladite rente du 21 janvier 1696 est passé par Guillaume Cancel; bourrelier, et Hugues Lefèvre, tourneur en bois, marguilliers en charge de l'œuvre et fabrique de l'église Sainte-Trinité de Montlhéry au profit de la cure de Longpont.

Une des principales préoccupations des officiers et administrateurs de la fabrique est l'entretien du clocher, des cloches pour la sonnerie bien évidemment, mais aussi de l'horloge. Au XVIIIe siècle, les horloges particulières étaient rares et c'est l'horloge paroissiale qui rythme la vie des habitants. Chaque sonnerie, comme l'angélus par exemple, permet de connaître l'heure. En 1727, un nouveau marché est passé pour la réparation de l'horloge. Comme de coutume, une assemblée est convoquée « en la manière accoustumée, issue de la grande messe ditte chantée et célébrée en l'église Sainte Trinité ». Sur la réquisition du sieur Jean Carré, marguillier comptable, le sieur Pierre Bedée, notaire royal « s'est transporté au banc de l'œuvre où étoient Messires Louis Chanceau, prestre bachelier en droit canon et curé de cette église, Messire Pierre Cornillier, conseiller du Roy, son procureur audit Montlhéry, Jean Carré, marguillier comptable, et Hugues Lefebvre aussi marguillier en charge, tous assemblés aux fins du mauvais état de l'orloge de ladite paroisse ». Jean Carré présente le sieur Blin, maître horloger à Paris demeurant rue du Cœur-Volant, paroisse Saint-Sulpice, « lequel après avoir vu et examiné la dite horloge, avoit offert de la remettre en tel état qu'elle puisse régulièrement sonner l'heure ainsy qu'il convient … Plus faire une manivelle neufve avec des fuseaux dans la lanterne de remontoir et faire les engrenages des dittes roues de remontoir, plus mettre des fuseaux dans la lanterne de mouvement et mettre des boettes de cuivre dans les pivots de l'arbre du mouvement et de sonnerie, avec un timbre dans l'église pour sonner l'avant heure et sonnerie dans l'église ». Le tout pour le prix et somme de 50 livres une fois payée et de continuer l'entretien à raison de 10 livres par an pour le temps de neuf années à compter d'aujourd'hui. « sur quoy après avoir délibéré, les propositions et offres dudit sieur Blin avoient été acceptées et en conséquence ledit sieur Carré luy a présentement paié les dittes 50 livres en louis d'argent et autre monoïe ».

Un mémoire d'entrepreneurs datant de 1735 stipule qu'il convient de faire des réparations à la maison des prestres de la communauté de Montlhéry située derrière l'église de la très Sainte Trinité dudit lieu : remanier le corps de logis, l'appenty attenant et l'ancienne école, en sorte que le tout soit bien à l'abry des eaux pluviales. Comme de coutume, l'adjudication est faite au rabais.

Selon l'abbé Lebeuf, la réunion de la paroisse Saint-Pierre du Château à la Sainte-Trinité “ sanctæ Trinitatis Beate Mariæ ” aurait eu lieu avant 1740 car, il écrit « On voit par cette dernière inscription que c'est depuis plusieurs siècles que ce collatéral de l'Eglise servoit à faire l'Office de la Paroisse de Saint-Pierre ; mais comme elle n'étoit composée que de douze feux ou environ, à l'occasion de la mort de l'Un des Curés, ce peu d'habitans a été réuni en 1738 ou 1739 à la Paroisse de la Trinité bâtie dans la Ville et ils ont commencé à y prendre le pain béni le Dimanche 23 Août 1739, demandant seulement d'être inhumés dans leur ancienne Paroisse du Château ».

Une déclaration des biens du temporel de la fabrique est faite le 23 février 1742 « à cause de la réunion de Saint-Pierre du chasteau. Il est fait mention que « la sacristie est sur le point de tomber et que les réparations à refaire s'élèvent 3.000 livres ».

Plan géométrique et élévation de la nouvelle sacristie construite en 1745.

En 1745, nous trouvons un acte d'assemblée sur le réquisitoire de Jacques Thiboust, prestre curé de la paroisse de la Sainte-Trinité, fait en conséquence de l'annonce faite au prosne de la messe, d'où une assemblée avec les marguilliers en charge de cette église. « Ledit curé a représenté que la sacristie de l'église tombe en ruine, qu'il y pleut de tous côtés que la charpente en est presque pourrie, les plafonds près à tomber, la couverture en mauvais état, que les ecclésiastiques ont été obligé de l'abandonner de peur d'être écrasé sous les ruines; que l'humidité qui règne dans la sacristie pourrit les ornements et linges, qu'il est nécessaire d'eddifier à neuf une autre sacristie en un lieu plus commode, soit dans le petit cimetière derrière le cul de lampe et chapelle de la sainte Vierge ». Le curé précise qu'une somme de 346 livres 9 sols a été dépensée pour les réparations précédentes. « Que pour aider à ladite construction qu'il y a mesme de l'argenterie de la paroisse Saint-Pierre qui a été réunie à celle de la Sainte-Trinité qui consiste en une croix, un soleil, un calice, deux burettes, un petit ciboire, deux autres burettes qu'il estime être inutiles en ladite église… ». Ces ornements peuvent être vendus et le prix qui en proviendra pourra être employé à la construction de la nouvelle sacristie. Une autorisation de vente de l'argenterie par adjudication est demandée pour payer les réparations envisagées.

Décrivons un instant les tenants et aboutissants et les décisions de cette assemblée où sont présents : Messire Pierre Bedée, substitut de monseigneur le procureur général du roy en cette ville et prévosté, le sieur Claudes Esnard, marchand, Jacques Angot, marchand boucher, marguilliers de présent en charge de la dite église, Raymond Huierd marchand, Jacques Huard maître serrurier, maître Jacques Philippe Lhuillier huissier à cheval au Châtelet de Paris, anciens marguilliers de ladite église, Louis Robillard, Barthélemy Goix, Charles Cherneau, vigneron, tous demeurant audit Montlhéry, auxquels le sieur curé a représenté que la sacristie tombe en ruine… Après délibération, il est décidé « de vendre l'argenterie sus-détaillée à Paris en l'hostel des monnoyes ou à un orfèvre à Paris suivant qu'il sera plus avantageux ». L'acte d'assemblée est également signé par le bedeau Pierre René Monnet.

Puis, l'adjudication au rabais doit avoir lieu suivant les clauses contenues dans le « Devis des ouvrages et fournitures qu'il convient faire pour la construction à neuf d'une nouvelle sacristie dans le petit cimetière de la ville de Montlhéry tenant par dehors à la chapelle de la sainte Vierge de l'église Sainte Trinité dudit Montlhéry dont l'adjudication doit estre faite au rabais au moins offrant ».

Voici un extrait du cahier des ouvrages et des charges : • premièrement l'adjudicataire au rabais sera tenu et obligé de faire fouiller les terres du petit cimetière jusqu'au niveau des terres de la chapelle de la sainte Vierge et de faire transporter ces terres au grand cimetière (4), • sur le niveau sera fouillé quatre pieds de profondeur pour les fondations conformément au plan géométrique qui sera amené, • la construction de grands murs entre les vitraux de la chapelle tomberont perpendiculairement entre iceux, • les portes ou entrées cintrées (GG) seront de graiseries tailléez et piquez, • les grands murs de touttes parts de la ditte sacristie seront de hauteur du rez-de-chaussée trois pieds d'épaisseur, • les murs KS en figure à droite et à gauche seront de la hauteur de six pieds et demy du rez-de-chaussée de la chapelle, et de la même épaisseur que dessus garny chacun trois barres de fer, • les cintres et voûtes, BG et KK, seront construits en pierre de meulière… leur naissance de la ditte élévation de six pieds et demy et termineront au bas des vitraux HH de la chapelle… • aux lettres BB à droite et à gauche, il sera fait deux portes… • les grands murs faisant le tour de la ditte sacristie suivant ledit plan géométrique auront douze pieds de hauteur du rez-de-chaussée, quatre pieds de fondation dans laquelle lesdits murs auront trois pieds d'épaisseur réduit à trente pouces, lesquels seront bâtis à chaux et sable ainsy que les voûtes, le mortier sera composé d'un tiers de bonne chaux et les deux autres de sable…. • les voûtes seront construites de la meilleure pierre de meulière des environs de Montlhéry, néant moins, lesdits murs de toutes parts seront bâtis de graisserie… • au milieu de ladite sacristie, dans le fond ayant une vüe sur le carrefour sera fait une fenestre de dix pieds de hauteur sur quatre pieds de large de vitrage du même goust que celle de la chapelle… Les clauses du cahier des charges continuent avec la charpente et la couverture mentionnant la nature et le nombre de chevrons, lattes, poutres, tuiles ; la menuiserie et les « portes avec les gonds et pentures et bonne serrure ».

Le plan et la description correspondent à un ouvrage qui va faire pâlir l'église existante… Le grand jour de l'adjudication au rabais arrive. La mise à prix faite par le marguillier Pierre Enard se monte à 2.500 livres et l'enchère fut portée plusieurs fois devant la porte de l'église par Pierre Monnet, bedeau, sans que personne ne se soit présenté « pour mettre au rabais les ouvrages de construction ». L'adjudication est remise à huitaine et le procès-verbal est signé en présence de Denis Bataille, arpenteur royal et Louis Lefebvre, maître perruquier, témoins demeurant à Montlhéry.

La même procédure se répète les dimanches suivants. Aucun adjudicataire ne se présente sur le parvis. L'avant dernier dimanche du mois, est comparu Nicolas Boutigny, maçon demeurant à Linas lequel a prit au rabais pour la somme de 2.450 livres ; puis un maçon de Corbeil, nommé André Martin Dufour offre 2.400 livres. Ne se trouvant plus autre personne, l'adjudication est remise à huitaine. Enfin, le 29 août, l'adjudication est relancée : Léonard Connille du Plessis-Sebeville offre 2.350 lt, François Laudron le jeune, maçon à Linas pour 2.300 lt, Nicolas Boutigny offre 2.250 lt, Pierre Fayet, maçon demeurant à Linas offre 2.200 lt, Robert Benoist, charpentier à Linas pour 2.175 lt, le sieur Dufour 2.100 lt. D'autres adjudicataires interviennent : Antoine Fédon, maçon à Longpont ; Julien Desvignes, fontainier au château de Lormois, paroisse de Longpont ; Pierre Caillier, maçon à Montlhéry.

Finalement, André Martin Dufour l'emporte à la hauteur de 1.860 livres, soit un rabais de plus d'un quart du prix annoncé. Ne serait-il pas la source d'un ouvrage défectueux ?

À suivre…

Notes

(1) En 1205, le pouillé du diocèse de Paris mentionnait le doyenné de Linais (Linas), puis Essonne était apparu comme siège du doyenné rural, en 1260, le siège se situe à Nongemelli (Longjumeau). Selon Joinville, l'évêque parisien Guillaume d'Auvergne regardait Montlhéry comme « situé au fin cœur du Royaume ». Enfin, le transfert du doyenné à Montlhéry paraît définitif vers 1380.

(2) Il est surprenant que les maîtres maçons aient oublié les éléments d'architecture et la résistance des matériaux. Les anciens connaissaient bien les limites des arcades romanes qui ont toujours nécessité d'importants contreforts. Le poids du clocher de Montlhéry ne pouvaient pas être supporté par quatre piliers simples sans un appareillage plus sophistiqué. De plus, on remarquera sur les dessins présentés dans les Chroniques du Vieux Marcoussy que le clocher du XIIIe siècle était beaucoup haut que celui du XVIIIe siècle, donc de masse plus importante.

(3) Jean-Baptiste Bodin, sieur Desperrières (ou Bodin des Perriers pour l'abbé Lebeuf) était officier royal, substitut du procureur général à Montlhéry, lieutenant de police et subdélégué de la Généralité de Paris sous la responsabilité de l'intendant Phélypeaux.

(4) Cette clause veut sans doute préserver le caractère sacré du surplus de la terre du petit cimetière.

dagnot/chronique33.02.txt · Dernière modification: 2020/11/12 04:03 de bg