Corpus Essonnien

Histoire et patrimoine du département de l'Essonne

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Guillemette Le Camus (...-1459)

Notule

  • Guillemette Le Camus, d'abord moniale de de l'abbaye de Chelles, fut nommée par l'évêque de Paris et devint la vingt-septième abbesse de Notre-Dame d'Yerres de 1450 à 1459.

Notice de l'abbé Alliot

  • Chapitre XIII. (…) — Guillemette Le Camus (1450-1459) — (…).
    • (…). — L'évêque de Paris nomme une abbesse pour porter la crosse à Yerres. — Reprise de la vie commune. — Dreux Budé seigneur d'Yerres. — Les curés de Lieusaint et de Brie. — Agnès la Clémence. — (…).
  • (…).
  • L'abbaye demeura vacante et comme abandonnée pendant six mois, après le décès d'Huguette de Chacy. Mais à la Toussaint de l'année 1450, Guillaume Chartier, évêque de Paris, tira de l'abbaye de Chelles une très ancienne religieuse, appelée par tous les chroniqueurs Guillemette le Camus, et la plaça à la tète de la maison d'Yerres 1). Le mémoire, si souvent cité, dit que Guillemette avait 80 ans lorsqu'elle prit la crosse. Ce n'est guère croyable, car l'abbatiat de cette nouvelle titulaire se prolongea durant près de 10 ans, et de plus cette abbesse fit preuve d'une activité peu compatible avec un âge aussi avancé. Contentons-nous d'observer que Guillemette était d'une maturité consommée, et par conséquent d'une prudence capable de faire contrepoids à l'activité fébrile de sa devancière.
  • À quelle famille appartenait l'élue de l'évêque de Paris? Il est difficile de le dire, car si les historiographes la nomment le Camus, avec l'intention évidente de la rattacher à la grande famille de ce nom, par contre tous les titres du monastère l'appellent invariablement la Camuse; et il est probable qu'elle dut son nom à son nez court, large et plat, bien plus qu'à la noblesse de son origine 2).
  • Quoi qu'il en soit, Guillemette n'arriva pas seule à l'abbaye; avec elle entrèrent sous le cloître deux autres religieuses. L'une appelée Ysabeau de Brindesalle et l'autre Lucienne de Voullac. Elles amenèrent aussi un chapelain pour dire la messe dans la chapelle, et dès lors le monastère reprit une apparence de vie de communauté. |148
  • Guillemette et ses compagnes venaient de rentrer à Yerres, lorsqu'un évènement, d'une certaine conséquence, pour leur maison, s'accomplit dans la paroisse. Par contrat du 2 mars 1452, Louis de Châtillon, fils de Jacques, vendit, pour 800 écus d'or, la terre et seigneurie d'Yerres à Dreux Budé, trésorier et garde des Chartes du roi de France.
  • Les Budé étaient probablement originaires du Hurepoix; ils exerçaient des charges à la cour dès le temps de Charles V. Au mois de septembre 1399, Charles VI, pendant un séjour à l'abbaye de Maubuisson près Pontoise, avait donné des Lettres d'anoblissement à deux frères: Guillaume et Jean Budé. Le premier était officier de bouche de la maison du roi, et le second notaire et secrétaire du prince. Selon toute vraisemblance, Dreux Budé était le fils aîné ou peut-être le petit-fils de Jean. Ses fonctions l'avaient mis à même de connaître la situation précaire et difficile des communautés religieuses; aussi le voit-on acheter, à vil prix, les biens des moniales obérées, et passer des contrats louches, notamment avec les Cisterciennes de l'abbaye de la Joie-Villiers, vers 1440, pour des terres situées dans les paroisses de Vert-le-Grand et de Leudeville. Dès qu'il est entré en jouissance de la seigneurie d'Yerres, Dreux Budé se met en rapport avec l'abbesse Guillemette; et celle-ci, par contrat du 27 avril 1454, lui loue, par bail emphytéotique de 99 ans, le moulin de Mazières, l'ancien prieuré de Saint-Nicolas, des prés, des buissons qui avoisinent l'abbaye, et font pour ainsi dire partie de l'enclos, où les bâtiments claustraux sont assis. De ce bail malencontreux sortira un siècle tout entier de procès, et des soucis continuels pour les abbesses jusqu'au milieu du XVIe siècle.
  • L'activité débordante d'Huguette de Chacy avait créé quelques ressources matérielles au couvent, et bien qu'on se plaigne toujours amèrement de la disette, de la pénurie et de l'extrême pauvreté, on vit néanmoins, et qui plus est, on poursuit avec ardeur les revendications entreprises précédemment.
  • Guillaume le Roy, curé de Lieusaint, est le grand adversaire des moniales. Il veut bon gré malgré les empêcher de prélever quoi que ce soit dans sa paroisse, où elles sont |149 grandes propriétaires. Pour atteindre ce but, il combattra 20 ans, fera faire enquêtes et contre-enquêtes, dans lesquelles on verra jusqu'à trente témoins, et finalement il sera condamné. Il a de parfaits imitateurs dans ses voisins, les deux curés de Brie-Comte-Robert, messires Jean Charron et Arnoul du Bac; ou plutôt ces deux personnages ne sont rien, ils ont loué leurs bénéfices à deux autres prêtres, Jean ltau et Jean Lefèvre, tous deux fermiers besogneux des cures qu'ils administrent; c'est pourquoi ils veulent garder toutes les dîmes de la paroisse. Mais une sentence prononcée le 29 août 1453, par Pierre de Buz, au nom du duc d'Orléans, comte de Brie, dont il est le prévôt, contraint les quatre prêtres à faire droit à Guillemette la Camuse.
  • Des difficultés analogues avaient lieu pour les dîmes de Puiselet, de Tremblay, de Villepinte et d'ailleurs. Il arrive cependant que l'abbesse trouve çà et là des situations moins épineuses. Elle peut louer sans opposition, les dîmes d'Évry, en 1454. A l'aide de son procureur, Henri Brochet, elle passe différents contrats plus ou moins heureux.
  • L'un de ceux-ci lui fut amèrement reproché. On le lui arracha, il est vrai, tout à fait à la fin de sa vie, et peut-être n'en était-elle guère responsable. Un certain Denis Robichon et Jeanne sa femme, venus de Blandy, louaient le 8 janvier 1459, par bail emphytéotique, tout ce que l'abbaye possédait à Moisenay, “terres, prez, bois, vignes, saussaies, cens, rentes, dîmes et tous autres droits”, pour la modique somme de 32 sols de rente annuelle. Ce contrat fut passé à Melun, par devant Pierre Gringault, notaire, et sanctionné par Jean Bras-de-Fer, prévôt de l'endroit, ainsi que par Pierre Pichon, prêtre, curé de Saint-Aspais, doyen de Melun et garde du scel de la prévôté.
  • Trente ans plus tard, quand on attaqua, avec raison croyons-nous, ce contrat, la veuve Robichon et ses deux fils, Denis et Jean, devenus riches, disaient bien, pour leur défense, que la ferme “était en si triste état de désolation et de ruine, par la fortune des guerres, qu'il leur avait fallu suer sang et eau, et dépenser des sommes considérables pour la remettre en état, et changer un désert en belles terres labourables”. |150 Était-il juste de les en dépouiller, alors que par leur travail et leur labeur, tout était en plein rapport? Ces raisons ne firent pas impression sur les magistrats, et le contrat fut cassé.
  • Au milieu des péripéties de son gouvernement, Guillemette était parvenue à remonter peu à peu sa communauté. Plusieurs jeunes filles étaient entrées à l'abbaye en même temps, et maintenant le monastère ressemblait déjà à un couvent. L'une d'elles fut élevée à la dignité de prieure; elle se nommait Agnès la Clémence, à cause de sa douceur sans doute, et son action bienfaisante se fit sentir à Yerres, pendant plus de dix ans. Un religieux Augustin servait d'aumônier ou de chapelain à cette petite communauté, qui réjouit par sa présence les derniers jours de l'abbesse Guillemette. Celle-ci, accablée par les ans, portait toujours le nom d'abbesse, mais n'en exerçait plus les fonctions. Dans un des nombreux incidents du procès Guillaume le Roy, le 28 février 1459, nous trouvons la maison d'Yerres représentée à Brie-Comte-Robert, par la prieure Agnès 3), sans qu'il soit question de l'abbesse. Guillemette vivait encore cependant, car elle ne s'éteignit que le 15 avril de la même année, après avoir porté la crosse plus de neuf ans.
  • (…).

Documents

Sources

Bibliographie

Notes

1)
Note d'Alliot. — Le nom de Guillemette le Camus ne se trouve pas dans la liste des abbesses sorties de la célèbre abbaye de Chelles; mais cette omission ne tire pas à conséquence, car M. l'abbé Torchet, curé de Chelles et historien de l'abbave, n'a pas dressé la liste complète de toutes les abbesses prises dans cette maison.
2)
Note d'Alliot. — On sait d'ailleurs que les Le Camus ne remontent qu'au XVIe siècle.
3)
Note d'Alliot. — Les noms de quelques-uns des témoins de cette instance sont à retenir. Ce furent: messire Guillaume Franc, curé de Cossigny; — fr. Philippe Vignon, prêtre religieux de Notre-Dame d'Yvernel; — noble homme Jehan de Lignères, dit Bernart, avocat; — Guillaume de Villeneuve; — Guillaume Lefèvre; — Guillaume Eugarrant; — Jehan Bourlot; — Raoulin de Beaufort; — Perrot de Lieusaint; — Jehan Guillart; — Symon Poule; — Marc des Allez et plusieurs autres, presque tous laboureurs.
guillemette.lecamus.txt · Dernière modification: 2022/07/24 12:19 de bg